Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association " Bien Vivre à Achery ", la SCI Imdes et vingt-et-un particuliers requérants ont demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 27 avril 2017 par lequel, au nom de l'Etat, le maire d'Achery a délivré à la SCI La Pelle à Four un permis de construire pour la réalisation de l'extension d'une unité de compostage d'effluents d'élevage, sur un terrain cadastré section ZH n° 30, situé route d'Achery à Anguilcourt (D 643) à Achery, ainsi que la décision du 3 juillet 2017 par laquelle le maire d'Achery a explicitement rejeté le recours gracieux formé contre cet arrêté.
Par un jugement n°1702482 du 1er octobre 2019, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et quatre mémoires, enregistrés le 9 décembre 2019, le 14 janvier, le 23 mars, le 21 avril et le 10 mai 2021, l'association " Bien Vivre à Achery ", M. O... G..., Mme AJ... I..., M. AC... J..., M. C... T..., M. Q... W..., M. U... L..., M. V... AF..., Mme AB... D..., M. AI... X..., M. B... N..., M. Z... Y..., Mme H... AH..., Mme P... R..., Mme AE... R..., M. C... E..., Mme K... AA..., et Monsieur AC... AG..., représentés par Me AK... F..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 27 avril 2017 et le rejet du recours gracieux formé contre cet arrêté ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;
- l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme M... S...,
- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public,
- et les observations de Me AD... A..., représentant l'association " Bien vivre à Achery " et autres.
Considérant ce qui suit :
1. Sur le territoire de la commune d'Achery, la société PCVF exploite depuis 2014, sous le régime de la déclaration, une installation de compostage d'effluents d'élevage, dont les bâtiments sont la propriété de la société La Pelle à Four, qui comprend les mêmes associés que la société PCVF. Cette dernière voulant multiplier par huit le tonnage annuel de matières premières à composter, en passant de 10 000 à 80 300 tonnes, la société La Pelle à Four a déposé le 3 août 2016 une demande de permis de construire pour l'extension de l'installation, consistant, d'une part, en la réalisation d'un bâtiment de stockage de matières premières, de deux bâtiments pour maturation, d'un hangar de stockage et de bureaux, et d'autre part en l'extension des bâtiments dits " bunkers " et d'un hangar de stockage de produits finis. Par un arrêté du 27 avril 2017, le maire d'Achery a accordé, au nom de l'Etat, le permis de construire sollicité. L'association " Bien vivre à Achery " et de nombreux autres requérants ont demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler cet arrêté. Cette association, M. G..., Mme I..., M. J..., M. T..., M. W..., M. L..., M. AF..., Mme D..., M. X..., M. N..., M. Y..., Mme AH..., Mme R..., Mme R..., M. E..., Mme AA... et M. AG... relèvent appel du jugement rendu le 1er octobre 2019 par lequel le tribunal a rejeté leur demande.
Sur la régularité du jugement :
2. Il résulte de la simple lecture du paragraphe 9 du jugement attaqué que, contrairement à ce que soutiennent les appelants, les premiers juges, qui ont relevé notamment les avantages et inconvénients du projet tels que les avait exposés le commissaire enquêteur, n'ont pas omis de statuer sur le moyen tiré de ce que l'avis du commissaire enquêteur n'aurait été ni motivé ni personnel. Il en va de même de la lecture des points 11 et 12 du jugement par lesquels les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments, ont écarté les moyens tirés de l'insuffisance de l'étude d'impact et de la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
3. Par ailleurs, il résulte des pièces du dossier de première instance que, par ordonnance du 26 octobre 2018 prise en application de l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative, le président de la quatrième chambre du tribunal a décidé que la production de moyens nouveaux devrait intervenir avant le 28 novembre 2018 à midi. Le moyen tiré du caractère incomplet du dossier soumis à l'enquête publique, qui a été soulevé dans un mémoire récapitulatif enregistré le 2 septembre 2019, était, par suite, irrecevable. Dès lors, c'est sans entacher le jugement attaqué d'une omission à statuer que les premiers juges n'ont pas répondu à ce moyen.
4. Il résulte de ce qui précède que les appelants ne sont pas fondés à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier en raison des omissions à statuer sus-évoquées.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne les moyens de légalité externe soulevés contre le permis de construire en litige :
S'agissant du moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact :
5. L'article R. 122-5 du code de l'environnement indique en premier lieu que le contenu de l'étude d'impact doit être proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, et fixe ensuite une liste des éléments qu'une telle étude doit comporter en fonction des caractéristiques spécifiques du projet et des types d'incidences sur l'environnement qu'il est susceptible de produire.
6. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.
7. Pour soutenir que l'étude d'impact aurait été insuffisante, les appelants font valoir, d'une part, qu'elle aurait passé sous silence la présence d'une école maternelle et primaire sur le territoire de la commune d'Achery, d'autre part que l'état initial des odeurs serait manifestement inexact, enfin que l'étude d'impact n'a pas pris en compte la rose des vents disponible la plus proche du site et que l'impact de l'installation en a été minimisé.
8. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que, dans son analyse de l'état initial de la zone, et notamment sa description du milieu socio-économique, l'étude d'impact n'a pas répertorié la présence d'une école maternelle et primaire sur le territoire de la commune d'Achery. Cependant, à supposer que les dispositions de l'article R. 122-5 sus-évoqué exigent cette précision, cette information, qui était nécessairement connue de la population de la commune d'implantation du projet, laquelle compte approximativement 600 habitants, a été donnée par le commissaire-enquêteur dans son rapport. Dès lors, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'omission entachant l'étude d'impact sur ce point aurait pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou aurait été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.
9. En second lieu, si, dans son chapitre consacré à l'état initial du site, l'étude d'impact ne mentionne l'existence d'aucune nuisance olfactive, un " état des lieux initial des odeurs " est évoqué dans le chapitre intitulé " analyse des effets directs et indirects temporaires et permanents de l'installation sur l'environnement mesures envisagées pour éviter, réduire ou compenser les effets sur l'environnement ". L'étude d'impact indique que cet état des lieux initial a été établi par un organisme appelé Odournet, faisant appel à un jury de nez, au terme d'une visite, effectuée le 5 avril 2016.
10. S'il ne pouvait à lui seul constituer un état initial suffisant relatif aux odeurs se dégageant de l'installation existante, dès lors que, notamment, les conditions météorologiques rencontrées le 5 avril 2016 ne pouvaient être regardées comme représentatives, sur ce seul jour, de celles prévalant sur le territoire concerné, l'organisme, auteur de ce premier rapport olfactif, en a réalisé un second, sur la base de visites effectuées les 23 et 24 novembre 2016, lequel modifie sensiblement, par rapport à la première visite, le tableau des odeurs perceptibles, en en accentuant nettement le caractère désagréable. Certes, ce deuxième rapport, daté du 17 janvier 2017, faisant notamment la comparaison des " événements olfactifs rencontrés " entre les deux visites et prenant en considération l'effet cumulé de l'installation avec les autres installations voisines, n'est pas évoqué dans l'étude d'impact. Cependant, ce rapport a été joint au dossier de l'enquête publique, comme il ressort du rapport du commissaire enquêteur. Dans ces conditions, le caractère incomplet de l'évaluation de l'état initial des odeurs dans l'étude d'impact n'a pu être de nature à nuire à l'information de la population ou à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.
11. En dernier lieu, la rose des vents produite par les appelants ne contredit pas celle mentionnée dans l'étude d'impact, et si les appelants soutiennent que des roses des vents établies en d'autres points seraient plus pertinentes, ils ne les produisent pas.
12. Il résulte de ce qui précède, et alors que la circonstance invoquée que les mesures de réduction envisagées dans l'étude d'impact ne permettraient pas de diminuer l'impact olfactif de l'installation n'est pas de nature à démontrer l'insuffisance alléguée de l'étude d'impact, le moyen tiré de l'insuffisance de cette étude doit être écarté.
S'agissant du moyen tiré du caractère incomplet du dossier d'enquête publique :
13. Aux termes du II de l'article L. 123-6 du code de l'environnement, qui s'appliquent aux projets faisant l'objet, comme en l'espèce, d'une enquête unique portant à la fois sur le permis de construire et sur l'autorisation d'exploitation : " II. - En cas de contestation d'une décision prise au terme d'une enquête publique organisée dans les conditions du présent article, la régularité du dossier est appréciée au regard des règles spécifiques applicables à la décision contestée. ".
14. Pour prétendre que cinq avis auraient, à tort, manqué au dossier d'enquête publique, les appelants n'étayent leurs allégations sur aucune référence textuelle précise et se bornent à faire référence aux dispositions du 4° de l'article R. 123-8 du code de l'environnement, selon lesquelles le dossier soumis à enquête publique comprend les avis émis sur le projet plan, ou programme lorsqu'ils sont rendus obligatoires par un texte législatif ou réglementaire préalablement à l'ouverture de l'enquête.
15. De plus, il ressort des pièces versées au dossier que quatre des avis en cause, respectivement émis le 3 février 2017 par la direction départementale des territoires, le 13 février 2017 par la direction départementale de la protection des populations, le 8 février 2017 par l'agence régionale de santé, et le 23 février 2017 par le département de l'Aisne, avaient pour destinataires les services concernés par l'éventuelle et future autorisation d'exploitation de l'installation, et non ceux concernés par la délivrance du permis de construire en litige. Par suite, la circonstance qu'ils n'auraient pas été joints au dossier d'enquête publique est sans incidence sur le caractère complet de ce dossier s'agissant du permis de construire.
16. Pour le cinquième avis invoqué, émis le 3 février 2017 par le syndicat des eaux d'Ile-de-France, outre la circonstance déjà relevée pour les autres avis qu'il est adressé à l'unité de gestion des installations classées, les appelants eux-mêmes relèvent qu'il " aurait en tout état de cause été inutile " qu'il soit joint au dossier d'enquête publique car portant " sur une unité de production d'eau située à 145 km du projet ". Et s'ils font valoir qu'un avis aurait dû être fourni concernant l'impact du projet sur les unités de production d'eau potable proches d'Achery, cette allégation ne s'appuie sur aucune référence textuelle qui concernerait la nécessité d'un tel avis pour le permis de construire en litige.
17. Dès lors, le moyen tiré du caractère incomplet du dossier d'enquête publique doit être écarté.
S'agissant du moyen relatif à l'avis du commissaire enquêteur tiré de la méconnaissance de l'article R. 123-19 du code de l'environnement :
18. Aux termes de l'article R. 12319 applicable du code de l'environnement, dans sa rédaction en vigueur à la date de la clôture de l'enquête publique : " Le commissaire enquêteur (...) établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies.// Le rapport comporte le rappel de l'objet du projet, plan ou programme, la liste de l'ensemble des pièces figurant dans le dossier d'enquête, une synthèse des observations du public, une analyse des propositions et contrepropositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, les observations du responsable du projet, plan ou programme en réponse aux observations du public. // Le commissaire enquêteur (...) consigne, dans un document séparé, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet.//(...) ". Si ces règles n'obligent pas le commissaire enquêteur à répondre à chacune des observations présentées lors de l'enquête publique, les conclusions qu'il émet à l'issue de cette enquête, pour être regardées comme motivées, lui imposent d'indiquer au moins sommairement, en donnant son avis personnel, les raisons qui déterminent le sens de son avis, même si ses réponses peuvent revêtir une forme synthétique.
19. En premier lieu, les appelants font valoir que le commissaire enquêteur se serait prononcé sur les nuisances olfactives et sur l'impact routier du projet sans disposer d'informations suffisantes fournies par la pétitionnaire dans le dossier d'enquête publique. S'agissant des nuisances olfactives, il ressort des pièces du dossier, notamment des conclusions du commissaire-enquêteur, que, pour estimer que la lutte contre les odeurs pourrait être efficace, il s'est fondé sur la mise en place à titre d'essai d'un canon neutralisateur d'odeurs par la société pétitionnaire vers la fin et après clôture de l'enquête publique qui s'est déroulée du 25 janvier au 24 février 2017. Comme il sera dit plus loin, ce point fait d'ailleurs l'objet d'une réserve claire du commissaire-enquêteur dans ses conclusions portant sur la nécessité de mesures immédiates en vue de la suppression des odeurs. Il en va de même pour les éléments relatifs au trafic routier qui n'ont pas empêché le commissaire enquêteur d'émettre une réserve tenant à la nécessité d'aménagements routiers, couplés avec un suivi rigoureux des vitesses autorisées. Par suite, à supposer opérant le moyen précité, il doit être écarté, dès lors que la circonstance que le commissaire-enquêteur a émis son avis au vu d'éléments qui ne figuraient pas dans le dossier d'enquête publique mais dont il a eu connaissance avant de rédiger son rapport et ses conclusions ne caractérise pas une insuffisance des éléments dont il disposait pour émettre son avis.
20. En second lieu, il ressort des pièces du dossier qu'à l'issue de l'enquête publique, le commissaire enquêteur a émis, au terme de ses conclusions motivées, un " avis favorable ", qu'il a précisé n'être assorti d'aucune réserve. Cependant, il résulte clairement de la lecture de l'ensemble des conclusions motivées que le commissaire enquêteur y a exprimé deux réserves, tenant, pour la première, à la nécessité de mesures efficaces pour supprimer les nuisances olfactives, et pour la seconde, à la nécessité de prévoir, en raison de la dangerosité potentielle du trafic routier engendré par le fonctionnement à venir de la plate-forme, des aménagements routiers associés à une limitation de la vitesse à surveiller rigoureusement. Dès lors, l'avis favorable sans réserves émis par le commissaireenquêteur sur le projet en litige ne peut être regardé, en raison de son incohérence avec une partie des motifs qui le précèdent, comme assorti des raisons qui le déterminent et est intervenu en méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 123-19 du code de l'environnement.
21. Toutefois, dès lors que les motifs de l'avis étaient très clairs sur l'existence de réserves émises par le commissaire enquêteur, si clairs d'ailleurs qu'il ressort des pièces du dossier que, dans le cadre de l'autorisation d'exploitation, le préfet de l'Aisne a requalifié l'avis émis d'avis favorable avec réserves, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'erreur commise par le commissaire enquêteur sur la qualification de son avis aurait été de nature à exercer, en l'espèce, une influence sur la décision de permis de construire en litige prise par le maire d'Achery au nom de l'Etat, ou aurait privé quiconque d'une garantie.
22. Par suite, le moyen tiré de ce que l'avis du commissaire enquêteur méconnaîtrait les dispositions de l'article R. 123-19 du code de l'environnement doit être écarté en tous ses développements.
En ce qui concerne les moyens de légalité interne soulevés contre le permis de construire en litige :
S'agissant des moyens tirés d'erreurs manifestes d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme :
23. L'article R. 111-2 du code de l'urbanisme dispose : " " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ". Pour l'application de ces dernières dispositions, il n'appartient pas à l'autorité administrative d'assortir le permis de construire délivré pour une installation classée de prescriptions relatives à son exploitation et aux nuisances qu'elle est susceptible d'occasionner. Il lui incombe, en revanche, le cas échéant, de tenir compte des prescriptions édictées au titre de la police des installations classées ou susceptibles de l'être.
24. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que, par arrêté délivré le 13 mars 2019, le préfet de l'Aisne a assorti l'autorisation d'exploitation de l'installation faisant l'objet du permis de construire en litige de nombreuses prescriptions relatives tant aux nuisances olfactives qu'à celles induites par le trafic routier qui sera généré par la plate-forme de compostage. Il est constant que les appelants n'ont pas contesté cet arrêté du 13 mars 2019 et, dans la présente instance ils n'établissent pas, ni même n'allèguent, le caractère insuffisant des prescriptions qu'il fixe dans les domaines des nuisances dues aux odeurs ou au trafic routier. Dès lors, les moyens tirés de ce que le permis de construire en litige serait entaché d'une première erreur manifeste d'appréciation au regard des exigences de sécurité publique liées au trafic routier, et d'une seconde erreur manifeste d'appréciation au regard des exigences de salubrité publique liées aux nuisances olfactives doivent être écartés.
S'agissant des moyens tirés de ce que le permis de construire en litige ne régulariserait pas les constructions non autorisées sur lesquelles il porte, de fraude et manoeuvres :
25. Aux termes de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme : " Par dérogation à l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative, et sans préjudice de l'application de l'article R. 613-1 du même code, lorsque la juridiction est saisie d'une requête relative à une décision d'occupation ou d'utilisation du sol régie par le présent code, ou d'une demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant une telle décision, les parties ne peuvent plus invoquer de moyens nouveaux passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense. Cette communication s'effectue dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article R. 611-3 du code de justice administrative. / Le président de la formation de jugement, ou le magistrat qu'il désigne à cet effet, peut, à tout moment, fixer une nouvelle date de cristallisation des moyens lorsque le jugement de l'affaire le justifie. / Le présent article n'est pas applicable aux décisions contestées par le pétitionnaire. ".
26. Il ressort des pièces du dossier, notamment des notifications de l'application Télérecours, que le premier mémoire en défense a été produit par la société pétitionnaire en appel le 3 mars 2020 et a été adressé au conseil des appelants le lendemain. En vertu des dispositions du I de l'article 15 de l'ordonnance n° 2020-305 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif, renvoyant à l'article 2 de l'ordonnance n° 2020-306 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période, le délai de deux mois prévu par les dispositions précitées de l'article R. 600-5 et donné aux appelants pour présenter des moyens nouveaux a commencé à courir le 24 juin 2020. En application de ces mêmes dispositions, lesquelles s'appliquent à la présente requête enregistrée au greffe de la cour le 9 décembre 2019, ce délai de deux mois était donc expiré quand les appelants ont soulevé, par mémoire enregistré le 23 mars 2021, le moyen nouveau tiré de ce que le permis de construire en litige ne régulariserait pas les constructions non autorisées sur lesquelles il portait, et par mémoire enregistré le 10 mai 2021, les moyens nouveaux tirés de fraude et de manoeuvres. Dans ces conditions, les appelants ne sont pas recevables à soulever ces moyens, qui doivent être écartés pour ce motif.
27. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées à la requête, que les appelants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande.
Sur les frais liés au litige :
28. D'une part, les dispositions de l'article L. 761 1 du code justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse aux appelants la somme que ceux-ci demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.
29. D'autre part, dans les circonstances de l'espèce et sur le fondement de ces mêmes dispositions, il y a lieu de mettre à la charge des appelants le versement à la société la Pelle à Four de la somme globale de 1 500 euros au titre de ces mêmes frais.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de l'association Bien Vivre à Achery et autres est rejetée.
Article 2 : L'association Bien Vivre à Achery, M. O... G..., Mme AJ... I..., M. AC... J..., M. C... T..., M. Q... W..., M. U... L..., M. V... AF..., Mme AB... D..., M. AI... X..., M. B... N..., M. Z... Y..., Mme H... AH..., Mme P... R..., Mme AE... R..., M. C... E..., Mme AA..., et M. AC... AG..., verseront à la société La Pelle à Four la somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Bien Vivre à Achery, M. O... G..., Mme AJ... I..., M. AC... J..., M. C... T..., M. Q... W..., M. U... L..., M. V... AF..., Mme AB... D..., M. AI... X..., M. B... N..., M. Z... Y..., Mme H... AH..., Mme P... R..., Mme AE... R..., M. C... E..., Mme K... AA..., et M. AC... AG..., à la société La Pelle à Four et à la ministre de la transition écologique.
Copie en sera adressée pour information à la commune d'Achery et au préfet de l'Aisne.
N°19DA02678 2