Vu, enregistrée le 10 mars 2010, la requête présentée pour Mme Zoubida B, M. Salim B, M. Azdine B, Mlle Nadja B, M. Abdelmalek B, Mlle Habida B et Mlle Amel B, domiciliés 941 rue Cancellieri à Sallanches (74700) ;
Ils demandent à la Cour :
1°) la réformation du jugement n° 0604722 du 30 décembre 2009 du Tribunal administratif de Grenoble qui a condamné le centre hospitalier intercommunal Hôpitaux du pays du Mont Blanc à leur verser respectivement les sommes de 4 837 euros, de 4 837 euros, de 4 837 euros, de 4 837 euros, de 3 120 euros, de 3 120 euros et de 3 120 euros ;
2°) de faire droit à leur demande en majorant ces sommes et en allouant au titre du préjudice économique, des indemnités de 12 697,39 euros à Mme Zoubida B, de 2 642,45 euros à M. Salim B, de 1 626,12 euros à M. Azdine B, de 1 321,22 euros à Mlle Nadja B , de 1 219,59 euros à M. Abdelmalek B, de 914,69 euros à Mlle Habida B et de 609,80 euros à Mlle Amel B et, au titre du préjudice moral, des indemnités de 200 000 euros à Mme Zoubida B et de 150 000 euros à chacun des autres requérants ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que :
- le jugement doit être confirmé s'agissant du principe même de responsabilité ;
- il doit être réformé en ce qui concerne le préjudice ;
- la perte de chance subie par M. B est totale et non pas de 3/4 seulement ;
- l'arrêt cardiaque dont il est décédé est en lien avec sa prise en charge déficiente et non avec son accident ou avec un état antérieur ;
- les requérants justifient de leur préjudice économique ;
- leur préjudice moral est également important, tous les enfants vivant au foyer familial et rien ne justifiant la distinction faite entre enfants mineurs et majeurs ;
- leur demande au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative aurait du être satisfaite alors que seuls deux d'entre eux bénéficiaient de l'aide juridictionnelle.
Vu le jugement attaqué ;
Vu, enregistré le 26 novembre 2010, le mémoire présenté pour le centre hospitalier intercommunal Hôpitaux du pays du Mont Blanc qui conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- M. B a exposé une perte de chance qui doit donner lieu à réparation d'une fraction du préjudice subi, justement évaluée aux trois quarts par le Tribunal ;
- il est décédé de lésions traumatiques graves qui l'avaient exposé à un risque vital sérieux ;
- la comparaison avec la situation de son ami est inopérante ;
- Mme B ne justifie pas d'éventuelles ressources propres, notamment perçues au titre de la législation sociale, mettant le juge dans l'impossibilité d'évaluer, le cas échéant son préjudice économique ;
- la perte de revenus subie a été entièrement réparée par les sommes allouées par le juge judiciaire ;
- les sommes allouées au titre du préjudice moral ne sont pas insuffisantes, la distinction faite entre enfants mineurs et majeurs n'étant pas injustifiée.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ;
Vu la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 mars 2011 :
- le rapport de M. Picard, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mme Marginean-Faure, rapporteur public ;
Considérant qu'à la suite d'une chute de 12 mètres dont il a été victime le 10 mars 1996 alors qu'il installait une parabole au quatrième étage d'un immeuble, M. Yazid B, âgé de 48 ans, a été admis au centre hospitalier de Sallanches, qui relève du centre hospitalier intercommunal des hôpitaux du pays du Mont-Blanc, où plusieurs traumatismes et fractures thoraciques ont été diagnostiqués ; que M. B, qui avait été transféré au centre hospitalier universitaire de Grenoble le 14 mars 1996, est décédé d'un arrêt cardiaque prolongé ; que par un jugement du Tribunal de grande instance de Bonneville en date du 17 mai 2001, confirmé par un arrêt de la Cour d'appel de Chambéry du 2 décembre 2003, l'épouse de M. B et ses six enfants ont obtenu la condamnation de la société HLM, propriétaire de l'immeuble, à les indemniser à hauteur des deux tiers de leurs préjudices économiques et moraux ; qu'ils ont également recherché la responsabilité du centre hospitalier intercommunal des hôpitaux du pays du Mont-Blanc devant le Tribunal administratif de Grenoble ; que le Tribunal a ordonné en référé une expertise dont le rapport a été déposé le 22 décembre 2006 et, par un jugement du 30 décembre 2009, a retenu la responsabilité pour faute du centre hospitalier à n'avoir pas transféré M. B en service de réanimation malgré l'aggravation de son état dès le 12 mars 1996 et a condamné ce dernier à réparer le préjudice moral subi par son épouse, Mme Zoubida B, et ses enfants, M. Salim B, M. Azdine B, Mlle Nadja B, M. Abdelmalek B, Mlle Habida B et Mlle Amel B, en leur versant respectivement les sommes de 4 837 euros, de 4 837 euros, de 4 837 euros, de 4 837 euros, de 3 120 euros, de 3 120 euros et de 3 120 euros ;
Sur le préjudice :
Considérant que si le principe même de la responsabilité du centre hospitalier n'est pas discuté, les consorts B soutiennent que la faute commise par cet établissement n'a pas seulement privé M. Yazid B d'une chance de survie dont le Tribunal a fixé l'ampleur aux trois quarts, mais a causé son décès; qu'il résulte toutefois de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert que, même si M. Yazid B avait fait l'objet d'une réanimation de bonne qualité, l'atteinte thoracique dont il souffrait l'exposait à un risque vital inhérent à son état; que ni le fait qu'il était en parfaite santé avant son accident ni le fait que la personne, tombée de l'immeuble en même temps que lui, a récupéré de sa chute ne permettent de regarder son décès comme ayant exclusivement pour origine la faute du centre hospitalier ; que, par suite, et contrairement à ce que soutiennent les requérants, en fixant aux trois quarts la fraction de perte de chance de survie de M. Yazid B, le Tribunal ne s'est pas livré à une appréciation inexacte des pièces du dossier ;
Sur l'indemnisation des consorts B :
En ce qui concerne les préjudices d'ordre économique :
Considérant que les requérants ne justifient pas de ce que les indemnités allouées par le juge judiciaire n'auraient pas entièrement réparé le préjudice économique qu'ils ont subi du fait du décès de M. B ;
En ce qui concerne les préjudices d'ordre moral :
Considérant que compte tenu de la fraction de perte de chance retenue et des sommes allouées à ce titre par le juge judiciaire, il ne résulte pas de l'instruction que le Tribunal, en fixant respectivement à 4 837 euros, à 4 837 euros, à 4 837 euros, à 4 837 euros, à 3 120 euros, à 3 120 euros et à 3 120 euros les préjudices d'ordre moral de Mme B, de M. Salim B, de M. Azdine B, de Mlle Nadja B, de M. Abdelmalek B, de Mlle Habida B et de Mlle Amel B, se serait livré à une appréciation insuffisante de ces chefs de préjudice ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les consorts B ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal a fait droit seulement partiellement à leur demande ;
Sur les frais irrépétibles :
Considérant que si les requérants avaient demandé au Tribunal, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le remboursement par l'établissement hospitalier des frais d'assistance exposés dans le cadre de la présente procédure, il n'y avait pas lieu, en l'espèce, de faire droit à ces conclusions; qu'ils ne sont donc pas fondés à demander la réformation du jugement attaqué sur ce point ;
Considérant que, compte tenu de ce qui précède, les conclusions qu'ils ont formées devant la Cour au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête des consorts B est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme KETFI veuve B Zoubida, à M. Salim B, à M. Azdine B, à M. Nadja B, à M. Abdelmalek B, à Mme Habiba B, à M. Amel B, au centre hospitalier intercommunal hôpitaux du pays du Mont-Blanc, à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Savoie.
Délibéré après l'audience du 31 mars 2011 à laquelle siégeaient :
M. Vivens, président de chambre,
Mme Steck-Andrez, président-assesseur,
M. Picard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 21 avril 2011.
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N° 10LY00551