LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
FD
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 21 novembre 2024
Cassation partielle
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 1083 F-B
Pourvoi n° A 22-16.763
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 21 NOVEMBRE 2024
1°/ La société Livemarket, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ M. [L] [H], domicilié [Adresse 2],
3°/ M. [K] [W], domicilié [Adresse 3],
ont formé le pourvoi n° A 22-16.763 contre l'arrêt rendu le 24 février 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 1, chambre 2), dans le litige les opposant à la société Saveats, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, trois moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Bohnert, conseiller référendaire, les observations de la SCP Melka-Prigent-Drusch, avocat de la société Livemarket, de M. [H] et de M. [W], de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de la société Saveats, et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 9 octobre 2024 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Bohnert, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 février 2022), invoquant des pratiques déloyales de la part de M. [H] et M. [W], deux de ses associés fondateurs, et de la société Livemarket qu'ils ont créée, la société Saveats a obtenu, sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, par ordonnance sur requête du président d'un tribunal de commerce du 19 octobre 2020, une mesure d'instruction dans les locaux de la société Livemarket et au domicile de M. [W].
2. M. [H], M. [W] et la société Livemarket ont été déboutés de leur demande en rétractation par ordonnance du 6 juillet 2021 et en ont relevé appel.
Examen des moyens
Sur les premier et deuxième moyens
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le troisième moyen
Enoncé du moyen
4. M. [H], M. [W] et la société Livemarket font grief à l'arrêt de confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle les avait condamnés solidairement aux dépens de première instance et à payer à la société Saveats la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et de les avoir condamnés in solidum aux dépens d'appel et à payer à la société Saveats la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure pour la procédure d'appel, alors « que le demandeur à la rétractation d'une ordonnance sur requête ayant prononcé des mesures d'instruction sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile ne peut être considéré comme la partie perdante sur laquelle pèse la charge des dépens ; qu'il ne peut en conséquence être condamné aux dépens et au paiement d'une indemnité au titre des frais irrépétibles que par décision motivée ; qu'en condamnant néanmoins la société Livemarket, M. [H] et M. [W] aux dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'au versement d'indemnités au titre des frais de procédure de première instance et d'appel, sans motiver sa décision sur ce point, cependant que ces derniers, demandeurs à la rétractation de l'ordonnance rendue 19 octobre 2020 à la requête de la société Saveats, ne pouvaient être considérés comme la partie perdante, la cour d'appel a violé les articles 696 et 700 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
5. La société Saveats conteste la recevabilité du moyen en ce qu'il porte sur la condamnation au titre des dépens et des frais irrépétibles exposés en première instance. Elle soutient que la demande est nouvelle et à ce titre irrecevable.
6. Cependant le moyen, qui ne se réfère à aucune considération de fait qui ne résulterait pas des énonciations de l'arrêt attaqué, est de pur droit.
7. Le moyen est, dès lors, recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu les articles 696 et 700 du code de procédure civile :
8. La partie défenderesse à une demande de mesure d'instruction, ordonnée sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, ou demanderesse à la rétractation d'une telle mesure, ne peut être considérée comme une partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, cette mesure d'instruction n'étant pas destinée à éclairer le juge d'ores et déjà saisi d'un litige mais n'étant ordonnée qu'au bénéfice de celui qui la sollicite en vue d'un éventuel futur procès au fond.
9. Pour condamner la société Livemarket, M. [H] et M. [W] aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'aux frais irrépétibles, l'arrêt, après avoir rejeté la demande en rétractation, retient que ces derniers succombent.
10. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il confirme l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a condamné solidairement la société Livemarket, M. [H] et M. [W] aux dépens de première instance et à payer à la société Saveats la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et en ce qu'il les condamne in solidum aux dépens d'appel et à payer à la société Saveats la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure pour la procédure d'appel, l'arrêt rendu le 24 février 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;
Condamne la société Saveats aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un novembre deux mille vingt-quatre.