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21/01/2025 | FRANCE | N°24NT00252

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 6ème chambre, 21 janvier 2025, 24NT00252


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 15 juin 2020 par laquelle le proviseur du lycée professionnel Ludovic-Ménard à C... a refusé de renouveler son contrat de travail à durée déterminée.



Par un jugement n° 2009625 du 29 décembre 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 31 janvie

r 2024, M. A..., représenté par Me Cao, demande à la cour :



1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de N...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 15 juin 2020 par laquelle le proviseur du lycée professionnel Ludovic-Ménard à C... a refusé de renouveler son contrat de travail à durée déterminée.

Par un jugement n° 2009625 du 29 décembre 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 31 janvier 2024, M. A..., représenté par Me Cao, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 29 décembre 2023 ;

2°) d'annuler la décision contestée ;

3°) de mettre à la charge du lycée professionnel Ludovic Ménard une somme de 3 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il n'a pas, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal pour écarter le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation, manqué à son obligation de neutralité ;

- le refus de renouveler son contrat est fondé sur un motif discriminatoire lié à son engagement syndical.

Le lycée professionnel Ludovic-Ménard a présenté un mémoire qui a été enregistré le 1er octobre 2024.

Par une lettre du 3 octobre 2024, la cour a invité le lycée professionnel Ludovic Ménard à régulariser son mémoire en le présentant par l'un des mandataires mentionnés à l'article R. 431-2 du code de justice administrative.

Par un mémoire, enregistré le 10 octobre 2024, le recteur de l'académie de Nantes a présenté des observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;

- le décret n° 2003-484 du 6 juin 2003 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bougrine,

- et les conclusions de Mme Bailleul, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un contrat de travail à durée déterminée, M. B... A... a été recruté par le lycée professionnel Ludovic-Ménard à C... (Maine-et-Loire) pour occuper un poste d'assistant d'éducation du 1er septembre 2019 au 31 août 2020. Le 15 juin 2020, le proviseur de cet établissement l'a informé de sa décision de ne pas renouveler son engagement, au-delà de son terme. M. A... relève appel du jugement du 29 décembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de non-renouvellement de son contrat de travail.

Sur la recevabilité du mémoire en défense présenté par le lycée professionnel Ludovic Ménard :

2. Aux termes de l'article R. 811-7 du code de justice administrative : " Sous réserve des dispositions de l'article L. 774-8, les appels ainsi que les mémoires déposés devant la cour administrative d'appel doivent être présentés, à peine d'irrecevabilité, par l'un des mandataires mentionnés à l'article R. 431-2 (...) ".

3. Le mémoire en défense du lycée professionnel Ludovic-Ménard n'a pas été produit par l'un des mandataires mentionnés à l'article R. 431-2 du code de justice administrative et n'a pas été régularisé, malgré l'invitation qui lui a été adressée et dont il a accusé réception le 3 octobre 2024. Ce mémoire doit, dès lors, être écarté des débats.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

4. Un agent public qui a été recruté par un contrat à durée déterminée ne bénéficie pas d'un droit au renouvellement de son contrat. Toutefois, l'administration ne peut légalement décider, au terme de son contrat, de ne pas le renouveler que pour un motif tiré de l'intérêt du service. Un tel motif s'apprécie au regard des besoins du service ou de considérations tenant à la personne de l'agent.

5. Il ressort des écritures de première instance du lycée professionnel Ludovic-Ménard que pour refuser de renouveler le contrat de M. A..., le proviseur de l'établissement s'est fondé sur les difficultés relationnelles que l'intéressé rencontrait avec ses supérieurs hiérarchiques, sur les manifestations de l'engagement syndical de l'intéressé dans le cadre du service ainsi que la détérioration du climat de travail en résultant et sur la nécessité d'assurer la continuité du fonctionnement du service.

6. Il ressort des pièces du dossier que, dans un courriel adressé le 27 avril 2020 aux trois conseillers principaux d'éducation et aux quatre autres assistants d'éducation de l'établissement, dans le cadre d'échanges relatifs aux modalités d'organisation du service en vue de la reprise des cours après la période de confinement dû à l'état d'urgence sanitaire, M. A... a fait état de sa " déception " quant à la manière dont sa hiérarchie avait assuré la " gestion humaine " des assistants d'éducation durant la période de confinement et a suggéré, de manière ironique, que la consultation des personnels quant aux modalités de réouverture du lycée était liée à un courrier, qu'il a joint à son message, adressé par des organisations syndicales au chef d'établissement. Il a également, dans ce même courriel, manifesté, de surcroît en des termes inappropriés, sa désapprobation de la politique gouvernementale. Toutefois, si l'un des trois conseillers principaux d'éducation de l'établissement décrit une " volonté de division ", un " manque de neutralité " et la mise en place, par M. A..., d'un " contre-pouvoir ", il n'est justifié, à l'exception du courriel du 27 avril 2020 évoqué ci-dessus, d'aucune illustration concrète d'un tel comportement ni de ses répercussions sur le fonctionnement du service. De même, un deuxième conseiller principal d'éducation indique " qu'il [lui] semble que l'attitude contestataire de M. A... a eu une influence sur le climat du service de la vie scolaire, et a perturbé quelque peu la sérénité de ce dernier ", sans fournir d'éléments circonstanciés. Dans ces conditions, et alors que plusieurs enseignants et assistants d'éducation ainsi que la troisième conseillère principale d'éducation de l'établissement témoignent des grandes qualités professionnelles de M. A... ainsi que de son fort investissement auprès des élèves et dans son travail, le courriel du 27 avril 2020, dont la diffusion a été restreinte à l'équipe de la vie scolaire, ne saurait à lui seul justifier le non renouvellement, dans l'intérêt du service, du contrat à durée déterminée de M. A.... Par ailleurs, le lycée professionnel invoque la désorganisation du service résultant des vingt-cinq journées au cours desquelles M. A... a été absent au cours de l'année 2019-2020. Toutefois, le motif de ces absences, dont il n'est ni établi ni même allégué qu'elles auraient été irrégulières, n'étant pas précisé, il n'est pas établi que M. A... n'aurait pas été en mesure d'assurer, durant l'année sur laquelle porte le refus de renouvellement, un service entier. Compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, en estimant que le comportement de M. A... et l'intérêt du service justifiaient la décision de ne pas renouveler le contrat à durée déterminée de l'intéressé, le proviseur du lycée professionnel Ludovic-Ménard a commis une erreur manifeste d'appréciation.

7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

8. Il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge du lycée professionnel Ludovic Ménard le versement à M. A... de la somme de 1 200 euros au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2009625 du 29 décembre 2023 du tribunal administratif de Nantes et la décision du proviseur du lycée professionnel Ludovic-Ménard du 15 juin 2020 sont annulés.

Article 2 : Le lycée professionnel Ludovic-Ménard versera à M. A... la somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au lycée professionnel D...et à la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Une copie en sera adressée au recteur de l'académie de Nantes.

Délibéré après l'audience du 13 décembre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Pons, premier conseiller,

- Mme Bougrine, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 janvier 2025.

La rapporteure,

K. BOUGRINELe président,

O. GASPON

La greffière,

I. PETTON

La République mande et ordonne à la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui la concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24NT00252


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NT00252
Date de la décision : 21/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: Mme Karima BOUGRINE
Rapporteur public ?: Mme BAILLEUL
Avocat(s) : SCP IN-LEXIS SAUMUR

Origine de la décision
Date de l'import : 23/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-21;24nt00252 ?
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