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13/07/2010 | FRANCE | N°09-15472

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 13 juillet 2010, 09-15472


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la société AIG Europe et à la société Chanel du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Mannheimer Versicherung Ag ;
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société AIG Europe et la société Chanel que sur le pourvoi incident éventuel relevé par la société Office de transports européens et de courtage ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Chanel a confié le déplacement de colis de produits cosmétiques, de Le Meux (Oise) à Ha

mbourg (Allemagne), à la société Office de transports européens et de courtage (la so...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la société AIG Europe et à la société Chanel du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Mannheimer Versicherung Ag ;
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société AIG Europe et la société Chanel que sur le pourvoi incident éventuel relevé par la société Office de transports européens et de courtage ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Chanel a confié le déplacement de colis de produits cosmétiques, de Le Meux (Oise) à Hambourg (Allemagne), à la société Office de transports européens et de courtage (la société OTEC), qui s'est substitué la société Otte Spedition Gmbh (la société Otte Spedition), dans les locaux de laquelle une partie de la marchandise a été volée ; que la société Chanel et son assureur, la société AIG Europe (la société AIG), ont assigné en indemnisation la société OTEC et la société Otte Spedition ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal :
Attendu que la société AIG et la société Chanel font grief à l'arrêt d'avoir limité à l'équivalent en euros au jour de l'arrêt de 12 455,18 DTS le montant en principal de la condamnation principale prononcée contre la société Otte Spedition à leur profit, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en écartant la faute lourde du transporteur, dès lors que ce dernier ne pouvait déduire de la seule identité de l'expéditeur, malgré sa célébrité, la nature et la valeur de la marchandise, sans rechercher, comme elle y était invitée, si non seulement la célébrité mais encore le caractère notoirement connu du type de marchandises vendues par la société Chanel, en l'occurrence des articles de luxe, n'impliquait pas la connaissance par le transporteur de la nature et de la valeur de la marchandise transportée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1150 du code civil, 23 et 29 de la convention de Genève du 19 mai 1956, dite CMR ;
2°/ qu'en laissant sans aucune réponse les conclusions d'appel de la société AIG et de la société Chanel qui soutenaient que les listes de colisage, versées au débat, qui mentionnaient précisément le contenu des marchandises avaient été remises au chauffeur de la société Otte spedition, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que les juges ne peuvent se prononcer par un motif hypothétique ; qu'en retenant qu' «apparemment», le vol a eu lieu dans le camion alors qu'il se trouvait en un lieu privé clos, muni de caméras de surveillance et, selon Otte et son assureur, dans lequel se trouvait un chien de garde et le gérant de la société Otte, et que ces lieux «auraient» fait l'objet de rondes de surveillance, la cour d'appel s'est prononcée par un motif hypothétique, et a violé l'article 455 du code civil ;
4°/ qu'en laissant sans aucune réponse les conclusions de la société AIG et de la société Chanel qui soutenaient que la société Otte spedition disposait d'un entrepôt fermé que mettait à sa disposition la société Georg Ottebetonwerk et qu'en ne recourant pas à cette option de sécurisation des marchandises, elle avait commis une faute lourde, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5°/ qu'en écartant la faute lourde, en admettant même que les précautions prises par la société Otte spedition aient été insuffisantes compte tenu des vols antérieurs, la cour d'appel a violé les articles 1150 du code civil, ensemble les articles 23 et 29 de la convention de Genève du 19 mai 1956 dite CMR ;
Mais attendu, en premier lieu, que si l'arrêt relève qu'apparemment le vol a eu lieu dans le camion alors qu'il se trouvait en un lieu privé clos, muni de caméras de surveillance et, selon la société Otte Spedition et son assureur, dans lequel se trouvait un chien de garde, le gérant de la société Otte Spedition habitant en outre sur les lieux, qui auraient fait l'objet de rondes de surveillance effectuées par une société Haring international, le caractère dubitatif de ces motifs est inopérant, l'incertitude factuelle qui en résulte laissant subsister à la charge des sociétés AIG et Chanel la preuve de l'existence d'une faute lourde du transporteur qu'elles invoquent au soutien de la demande d'indemnisation totale de leur préjudice ;
Attendu, en second lieu, que l'arrêt constate que la lettre de voiture ne stipule aucune précaution particulière à prendre de la part du transporteur, que les espaces «instructions de l'expéditeur» et «conventions particulières» dans lesquels il peut être indiqué que les marchandises sont dangereuses, fragiles ou précieuses et que des précautions spéciales doivent être prises sont restées vierges et, enfin, que la nature de la marchandise, des cosmétiques et parfums de luxe, n'est même pas indiquée ; que l'arrêt retient ensuite que le transporteur ne peut être obligé de déduire de la seule identité de l'expéditeur, quelque célèbre qu'il soit, la nature et la valeur de la marchandise, que le fait qu'étaient joints des «factures et bordereaux», dont le transporteur déclare qu'ils étaient sous enveloppe fermée, ne suffit pas à établir cette connaissance ; que l'arrêt relève encore que l'expéditeur désigné dans la lettre de voiture est la société OTEC, que la société Chanel n'y apparaît pas et que la société Otte Spedition n'a pas pris livraison dans les entrepôts Chanel ; que de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation et qui a répondu en les écartant aux conclusions prétendument délaissées, a pu déduire que les sociétés Chanel et AIG ne faisaient pas la preuve de la faute lourde de la société Otte Spedition ;
D'où il suit que le moyen, inopérant en sa troisième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu que la société OTEC fait grief à l'arrêt d'avoir dit qu'elle a concouru à la survenance du sinistre, de lui avoir en conséquence accordé garantie à l'encontre de la société Otte Spedition à concurrence de la moitié seulement et de l'avoir ainsi déboutée de sa demande de garantie intégrale, alors, selon le moyen :
1°/ que la cour d'appel a relevé que le prix du transport - 520 euros – correspondait à un transport ordinaire, sans précaution ou organisation particulière dont la société Chanel n'avait pas souhaité payer le cout ; qu'en considérant néanmoins, pour retenir une négligence de la société OTEC de nature à réduire son appel en garantie envers le transporteur Otte Spedition, que la société OTEC n'avait pas mentionné sur la lettre de voiture la nature et la valeur de la marchandise ni donné d'instruction quant à des précautions particulières, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants, et privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, ensemble l'article L. 132-6 du code de commerce ;
2°/ que la société OTEC faisait valoir devant la cour d'appel qu'elle avait transmis à la société Otte Spedition la documentation sur la marchandise qu'elle avait elle-même reçue, ainsi qu'en attestait la mention apposée à la rubrique n° 5 des lettres de voiture, de sorte que le transporteur substitué Otte Spedition avait été mis en possession de l'ensemble des éléments dont disposait OTEC, de sorte que cette dernière avait parfaitement exécuté sa mission en répercutant au transporteur toutes les consignes reçues afférentes à l'expédition ; qu'en reprochant à la société OTEC d'avoir commis une négligence en ne mentionnant pas sur la lettre de voiture la nature de la marchandise ni leur valeur, sans prendre en considération, ainsi qu'elle y était invitée, la transmission par la société OTEC au transporteur Otte Spedition de tous les documents et instructions reçus de l'expéditeur, attestée par les mentions des lettres de voiture, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, ensemble l'article L. 132-6 du code de commerce ;
3°/ que le commissionnaire de transport est celui qui s'engage en cette qualité à accomplir, pour le compte de son commettant, les actes juridiques nécessaires au déplacement d'une marchandise, et qui, en cette qualité, reçoit toute latitude pour organiser librement le transport par les voies et les moyens de son choix ; qu'en se fondant, pour qualifier la société OTEC de commissionnaire et donc apprécier au regard des obligations du commissionnaire de transport l'existence d'une négligence imputable à la société OTEC, sur la circonstance inopérante que la société OTEC avait pris en charge l'organisation du transport de la marchandise depuis son point de départ jusqu'à sa destination finale, sans rechercher la qualité que les parties avaient eu la volonté de conférer à la société OTEC au moment de la conclusion du contrat et notamment si la société Chanel avait chargé la société OTEC de conclure des actes juridiques pour l'organisation de ce transport ou lui avait confié une simple prestation matérielle, les juges d'appel ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 132-1 du code de commerce, ensemble l'article L. 132-6 du même code et l'article 1147 du code civil ;
4°/ que le commissionnaire de transport est celui qui s'engage en cette qualité à accomplir, pour le compte de son commettant, les actes juridiques nécessaires au déplacement d'une marchandise, et qui, en cette qualité, reçoit toute latitude pour organiser librement le transport par les voies et les moyens de son choix ; que la qualité de commissionnaire de transport ne résulte pas, pour celui qui a été chargé de l'acheminement d'une marchandise de bout en bout, du seul fait qu'il s'est substitué un tiers dans l'exécution de l'expédition s'il ne justifie pas du consentement de son donneur d'ordre à l'existence de cette substitution ; qu'en qualifiant la société OTEC de commissionnaire et donc apprécier au regard des obligations du commissionnaire de transport l'existence d'une négligence imputable à la société OTEC, sans rechercher quelle avait été l'intention des parties au moment de la conclusion du contrat, et en se fondant sur le motif inopérant que la condition tenant à l'accord du donneur d'ordre est sans aucune pertinence, quand, en l'absence d'un tel accord à la substitution de transporteur, la qualité initialement convenue entre les parties ne peut avoir été modifiée et reste donc acquise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 132-1 du code de commerce, ensemble l'article L. 132-6 du même code et l'article 1147 du code civil ;
Attendu, en premier lieu, que la cour d'appel n'a pas déduit la qualité de commissionnaire de transport de la société OTEC de la seule substitution d'un transporteur sans accord de son donneur d'ordre, mais, recherchant la volonté des parties, a retenu que le transport avait été organisé entièrement jusqu'à Hambourg via Thiais et Neuilly-sur-Seine par la société OTEC, que la lettre de voiture pour le transport de Neuilly à Hambourg mentionnait expressément «OTEC International» comme expéditeur et que la société OTEC avait donc agi et notamment conclu le contrat avec la société Otte Spedition en son propre nom et pour le compte d'un commettant ;
Mais attendu, en second lieu, que le commissionnaire de transport qui sait, ou ne peut raisonnablement ignorer, que les marchandises qui lui sont confiées comportent un risque particulier de vol a l'obligation d'en informer le voiturier de telle sorte que puissent être prises les mesures nécessaires à leur sécurité ; qu'ayant retenu que la société OTEC n'avait mentionné sur la lettre de voiture ni la nature de la marchandise qu'elle connaissait nécessairement ni leur valeur et n'avait donné aucune instruction quant à des précautions particulières à prendre, réticence que ne justifiait pas le prix réduit du transport et que ne palliait pas la transmission des documents faite au transporteur, la cour d'appel a pu en déduire une faute à la charge de la société OTEC ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Mais sur le second moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 132-5 du code de commerce, ensemble l'article1er de la Convention de Genève du 19 mai 1956, relative au contrat de transport international de marchandises par route, dite CMR ;
Attendu que pour limiter à l'équivalent en euros au jour de l'arrêt de 12 455,18 DTS le montant en principal de la condamnation principale prononcée contre la société OTEC au profit de la société AIG Europe et de la société Chanel, l'arrêt retient que les sociétés OTEC et Otte Spedition doivent indemniser la société Chanel et son assureur, la société AIG, mais seulement à hauteur de la limitation prévue par l'article 23 de la convention CMR et que le calcul aboutissant à 12 455,18 DTS n'est pas contesté ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'en raison de la faute personnelle qu'elle avait commise en sa qualité de commissionnaire de transport, la société OTEC ne bénéficiait pas de la limitation d'indemnisation instituée par la Convention de Genève du 19 mai 1956, dite CMR, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné solidairement la société Office de transports européens et de courtage et la société Otte Spedition Gmbh à payer l'équivalent en euros au jour de l'arrêt de 12 455, 18 DTS à la société AIG Europe et à la société Chanel, l'arrêt rendu le 3 décembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Office de transports européens et de courtage aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize juillet deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils pour les sociétés Aig Europe et Chanel
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR a limité à l'équivalent en euros au jour de l'arrêt de 12.455,18 DTS le montant en principal de la condamnation principale prononcée contre la société Otte Spedition au profit de la société AIG Europe et de la société Chanel ;
AUX MOTIFS QU'on ne saurait étendre la notion de faute lourde équivalente au dol au point que toute victime d'un vol soit considérée comme fautive ni qu'une négligence simple soit considérée comme équivalente à un dol ; qu'en l'espèce, la lettre de voiture ne stipule aucune précaution particulière à prendre de la part du transporteur ; que les espaces « instructions de l'expéditeur » et « conventions particulières » dans lesquels il peut être indiqué que les marchandises sont dangereuses, fragiles ou précieuses, et que des précautions spéciales doivent être prises sont restées vierges ; que la nature de la marchandise, des cosmétiques et parfums de luxe, n'est même pas indiquée ; que le transporteur ne peut être obligé de déduire de la seule identité de l'expéditeur, quelque célèbre qu'il soit, la nature et la valeur de la marchandise ; que le fait qu'étaient jointes des « factures et bordereaux » dont Otte déclare qu'ils étaient sous enveloppe fermée, ne suffit pas à établir cette connaissance ; qu'au demeurant, l'expéditeur désigné dans la lettre de voiture est OTEC ; que Chanel n'y apparaît pas ; qu'Otte a pris livraison à Thiais ou Neuilly sur Seine et non dans les entrepôts Chanel ; qu'apparemment le vol a eu lieu dans le camion alors qu'il se trouvait en un lieu privé clos, muni de caméras de surveillance et, selon Otte et son assureur, dans lequel se trouvait un chien de garde, le gérant de Otte habitant en outre sur les lieux, qui auraient fait l'objet de rondes de surveillance effectuées par une société Haring International ; qu'à supposer que, compte tenu des vols antérieurs, ces précautions aient été insuffisantes et que cette insuffisance ait constitué une négligence, elle n'a aucunement le caractère d'une extrême gravité, confinant au dol et dénotant l'inaptitude du transporteur à l'accomplissement de la mission ; que sur l'indemnisation, il résulte de ce qui précède que OTEC et Otte doivent indemniser CHANEL et son assureur mais seulement à hauteur de la limitation prévue par l'article 23 de la convention CMR ; que le calcul aboutissant à 12.455,18 DTS n'est pas contesté ;
1°) ALORS QU' en écartant la faute lourde du transporteur, dès lors que ce dernier ne pouvait déduire de la seule identité de l'expéditeur, malgré sa célébrité, la nature et la valeur de la marchandise, sans rechercher, comme elle y était invitée, si non seulement la célébrité mais encore le caractère notoirement connu du type de marchandises vendues par la société Chanel, en l'occurrence des articles de luxe, n'impliquait pas la connaissance par le transporteur de la nature et de la valeur de la marchandise transportée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1150 du code civil, 23 et 29 de la convention de Genève du 19 mai 1956 dite CMR ;
2°) ALORS QU' en laissant sans aucune réponse les conclusions d'appel de la société AIG Europe et de la société Chanel (pp.17-18) qui soutenaient que les listes de colisage, versées au débat, qui mentionnaient précisément le contenu des marchandises avaient été remises au chauffeur de la société Otte spedition, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE les juges ne peuvent se prononcer par un motif hypothétique ; qu'en retenant qu' « apparemment », le vol a eu lieu dans le camion alors qu'il se trouvait en un lieu privé clos, muni de caméras de surveillance et, selon Otte et son assureur, dans lequel se trouvait un chien de garde et le gérant de la société Otte, et que ces lieux « auraient » fait l'objet de rondes de surveillance, la cour d'appel s'est prononcée par un motif hypothétique, et a violé l'article 455 du code civil ;
4°) ALORS QU' en laissant sans aucune réponse les conclusions de la société AIG Europe et de la société Chanel (p.19, alinéas 7-10) qui soutenaient que la société Otte spedition disposait d'un entrepôt fermé que mettait à sa disposition la société Georg Ottebetonwerk et qu'en ne recourant pas à cette option de sécurisation des marchandises, elle avait commis une faute lourde, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5°) ALORS QU' en écartant la faute lourde, en admettant même que les précautions prises par la société Otte spedition aient été insuffisantes compte tenu des vols antérieurs, la cour d'appel a violé les articles 1150 du code civil, ensemble les articles 23 et 29 de la convention de Genève du 19 mai 1956 dite CMR.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR a limité à l'équivalent en euros au jour de l'arrêt de 12.455,18 DTS le montant en principal de la condamnation principale prononcée contre la société OTEC au profit de la société AIG Europe et de la société Chanel ;
AUX MOTIFS QU'on ne saurait étendre la notion de faute lourde équivalente au dol au point que toute victime d'un vol soit considérée comme fautive ni qu'une négligence simple soit considérée comme équivalente à un dol ; qu'en l'espèce, la lettre de voiture ne stipule aucune précaution particulière à prendre de la part du transporteur ; que les espaces « instructions de l'expéditeur » et « conventions particulières » dans lesquels il peut être indiqué que les marchandises sont dangereuses, fragiles ou précieuses, et que des précautions spéciales doivent être prises sont restées vierges ; que la nature de la marchandise, des cosmétiques et parfums de luxe, n'est même pas indiquée ; que le transporteur ne peut être obligé de déduire de la seule identité de l'expéditeur, quelque célèbre qu'il soit, la nature et la valeur de la marchandise ; que le fait qu'étaient jointes des « factures et bordereaux » dont Otte déclare qu'ils étaient sous enveloppe fermée, ne suffit pas à établir cette connaissance ; qu'au demeurant, l'expéditeur désigné dans la lettre de voiture est OTEC ; que Chanel n'y apparaît pas ; qu'Otte a pris livraison à Thiais ou Neuilly sur Seine et non dans les entrepôts Chanel ; qu'apparemment le vol a eu lieu dans le camion alors qu'il se trouvait en un lieu privé clos, muni de caméras de surveillance et, selon Otte et son assureur, dans lequel se trouvait un chien de garde, le gérant de Otte habitant en outre sur les lieux, qui auraient fait l'objet de rondes de surveillance effectuées par une société Haring International ; qu'à supposer que, compte tenu des vols antérieurs, ces précautions aient été insuffisantes et que cette insuffisance ait constitué une négligence, elle n'a aucunement le caractère d'une extrême gravité, confinant au dol et dénotant l'inaptitude du transporteur à l'accomplissement de la mission ; que Chanel et AIG ne font pas la preuve qui leur incombe de la faute lourde de Otte GmBH ; qu'il en est de même en ce qui concerne OTEC ; que le fait de ne pas avoir mentionné sur la lettre de voiture la nature de la marchandise qu'elle connaissait nécessairement ni leur valeur et de n'avoir donné aucune instruction quant à des précautions particulières à prendre constitue de la part d'OTEC une négligence ; mais qu'il n'est toutefois pas établi, compte tenu de l'ensemble des éléments du litige, et notamment des obligations d'AIG et Chanel quant à de précédents transports de marchandises Chanel, et surtout au fait que le prix du transport, 520 € correspondait à un transport ordinaire, sans précaution ou organisation particulière dont Chanel n'a apparemment pas souhaité payer le coût, que cette négligence ait le caractère d'une faute lourde ; que le cumul de deux négligences simples par deux personnes différentes ne leur donne pas le caractère de faute lourde ; que c'est encore à juste titre qu'AIG et Chanel font valoir que le transport a été organisé entièrement jusqu'à Hambourg via Thiais et Neuilly sur Seine par OTEC ; que si l'identité du transporteur jusqu'à Neuilly est inconnue, la lettre de voiture précitée pour le transport pour Otte de Neuilly sur Seine à Hambourg mentionne expressément « OTEC International » comme expéditeur ; qu'OTEC a donc agi et notamment conclu le contrat avec Otte en son propre nom et pour le compte d'un commettant ; qu'elle avait le choix de modalités de transport notamment du transporteur ; que l'intervention d'OTEC correspond à la définition légale de la commission de transport ; qu'il n'y a pas lieu d'y ajouter des conditions, telles que l'accord du donneur d'ordre sur l'identité du transporteur, que la loi ne prévoit pas et qui n'ont aucune pertinence, le donneur d'ordre faisant au contraire confiance au commissionnaire pour le choix du transporteur ; qu'OTEC a en l'espèce agi en qualité de commissionnaire de transport ; qu'il a en outre, commis une faute personnelle, quoique non « lourde » comme dit ci-dessus ; que sur l'indemnisation, il résulte de ce qui précède que OTEC et Otte doivent indemniser CHANEL et son assureur mais seulement à hauteur de la limitation prévue par l'article 23 de la convention CMR ; que le calcul aboutissant à 12.455,18 DTS n'est pas contesté ;
1°) ALORS QUE le commissionnaire de transport répond de l'entier dommage lorsqu'il a commis une faute personnelle ; qu'en faisant supporter à l'expéditeur et à son assureur les limitations d'indemnisation prévues par la CMR, dans les rapports avec la société OTEC, tout en constatant que celle-ci, qu'elle qualifiait de commissionnaire de transport, avait commis une faute personnelle, la cour d'appel a violé l'article L. 132-5 du code de commerce ;
2°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QU' en écartant la faute lourde, après avoir pourtant constaté que le fait pour la société OTEC de ne pas avoir mentionné sur la lettre de voiture la nature de la marchandise ni leur valeur et de n'avoir donné aucune instruction quant à des précautions particulières à prendre constituait une négligence, au motif inopérant que le prix payé par la société Chanel correspondait à un transport ordinaire, sans précaution ou organisation particulière, la cour d'appel a violé les articles 1150 du code civil, ensemble les articles 23 et 29 de la convention de Genève du 19 mai 1956 dite CMR ;
3°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QU' en écartant la faute lourde du transporteur, qui était opposable au commissionnaire, dès lors que le premier ne pouvait déduire de la seule identité de l'expéditeur, malgré sa célébrité, la nature et la valeur de la marchandise, sans rechercher, comme elle y était invitée, si non seulement la célébrité mais encore le caractère notoirement connu du type de marchandises vendues par la société Chanel, en l'occurrence des articles de luxe, n'impliquait pas la connaissance par le transporteur de la nature et de la valeur de la marchandise transportée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1150 du code civil, 23 et 29 de la convention de Genève du 19 mai 1956 dite CMR ;
4°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QU' en laissant sans aucune réponse les conclusions d'appel de la société AIG Europe et de la société Chanel (pp.17-18) qui soutenaient que les bordereaux d'instruction versés aux débats comportaient en annexe les listes de colisage qui mentionnaient expressément le contenu des marchandises et que la liste de colisage avait été remise au chauffeur de la société Otte spedition, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QU' en laissant sans aucune réponse les conclusions de la société AIG Europe et de la société Chanel (p.19, alinéas 7-8) qui soutenaient que la société Otte spedition disposait d'un entrepôt fermé à clé que mettait à sa disposition la société Georg Ottebetonwerk et qu'en ne recourant pas à cette option de sécurisation des marchandises, elle avait commis une faute lourde, laquelle était opposable au commissionnaire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
6°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE les juges ne peuvent se prononcer par un motif hypothétique ; qu'en retenant qu' « apparemment », le vol a eu lieu dans le camion alors qu'il se trouvait en un lieu privé clos, muni de caméras de surveillance et, selon Otte et son assureur, dans lequel se trouvait un chien de garde et le gérant de la société Otte, et que ces lieux « auraient » fait l'objet de rondes de surveillance, la cour d'appel s'est prononcée par un motif hypothétique, et a violé l'article 455 du code civil ;
7°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QU' en écartant la faute lourde du transporteur, qui était opposable au commissionnaire, en admettant même que les précautions prises par la société Otte spedition eussent été insuffisantes, la cour d'appel a violé les articles 1150 du code civil, ensembles les articles 23 et 29 de la convention de Genève du 19 mai 1956 dite CMR.
Moyen produit au pourvoi incident éventuel par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils pour la société Office de transports européens et de Courtage (OTEC)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la société OTEC a concouru à la survenance du sinistre, d'AVOIR en conséquence accordé à la société OTEC garantie à l'encontre de la société OTTE DPEDITION GMBH à concurrence de la moitié seulement, et d'AVOIR ainsi débouté la société OTEC de sa demande de garantie intégrale ;
AUX MOTIFS QUE le fait de ne pas avoir mentionné sur la lettre de voiture la nature de la marchandise qu'elle connaissait nécessairement ni leur valeur et de n'avoir donné aucune instruction quant à des précautions particulières à prendre constitue de la part d'OTEC une négligence ; mais qu'il n'est toutefois pas établi, compte tenu de l'ensemble des éléments du litige, et notamment des obligations d'AIG et CHANEL quant à de précédents transports de marchandises CHANEL, et surtout du fait que le prix du transport - 520 euros - correspondait à un transport ordinaire, sans précaution ou organisation particulière dont CHANEL n'a apparemment pas souhaité payer le coût, que cette négligence ait le caractère d'une faute lourde ; … que c'est à juste titre qu'AIG et CHANEL dont valoir que le transport été organisé entièrement par OTEC ; que si l'identité du transporteur jusqu'à Neuilly est inconnue, la lettre de voiture précitée pour le transport par OTTE mentionne expressément OTEC International comme expéditeur ; qu'OTEC a donc agi et notamment conclu le contrat avec OTTE en son propre nom et pour le compte d'un commettant ; qu'elle avait le choix des modalités de transport notamment du transporteur ; que l'intervention d'OTEC correspond à la définition légale de la commission de transport ; qu'il n'y a pas lieu d'y ajouter des conditions, telles que l'accord du donneur d'ordre sur l'identité du transporteur, que la loi ne prévoit pas et qui n'ont aucune pertinence, le donneur d'ordre faisant au contraire confiance au commissionnaire pour le choix du transporteur ;
1°) ALORS QUE la cour d'appel a relevé que le prix du transport - 520 euros – correspondait à un transport ordinaire, sans précaution ou organisation particulière dont CHANEL n'avait pas souhaité payer le coût ; qu'en considérant néanmoins, pour retenir une négligence de la société OTEC de nature à réduire son appel en garantie envers le transporteur OTTE, que la société OTEC n'avait pas mentionné sur la lettre de voiture la nature et la valeur de la marchandise ni donné d'instruction quant à des précautions particulières, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants, et privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, ensemble l'article L. 132-6 du code de commerce ;
2°) ALORS QUE la société OTEC faisait valoir devant la cour d'appel qu'elle avait transmis à la société OTTE la documentation sur la marchandise qu'elle avait elle-même reçue, ainsi qu'en attestait la mention apposée à la rubrique n° 5 des lettres de voiture, de sorte que le transporteur substitué OTTE avait été mis en possession de l'ensemble des éléments dont disposait OTEC, de sorte que cette dernière avait parfaitement exécuté sa mission en répercutant au transporteur toutes les consignes reçues afférentes à l'expédition ; qu'en reprochant à la société OTEC d'avoir commis une négligence en ne mentionnant pas sur la lettre de voiture la nature de la marchandise ni leur valeur, sans prendre en considération, ainsi qu'elle y était invitée, la transmission par la société OTEC au transporteur OTTE de tous les documents et instructions reçus de l'expéditeur, attestée par les mentions des lettres de voiture, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, ensemble l'article L. 132-6 du code de commerce ;
3°) ALORS QU'en toute hypothèse, le commissionnaire de transport est celui qui s'engage en cette qualité à accomplir, pour le compte de son commettant, les actes juridiques nécessaires au déplacement d'une marchandise, et qui, en cette qualité, reçoit toute latitude pour organiser librement le transport par les voies et les moyens de son choix ; qu'en se fondant, pour qualifier la société OTEC de commissionnaire et donc apprécier au regard des obligations du commissionnaire de transport l'existence d'une négligence imputable à la société OTEC, sur la circonstance inopérante que la société OTEC avait pris en charge l'organisation du transport de la marchandise depuis son point de départ jusqu'à sa destination finale, sans rechercher la qualité que les parties avaient eu la volonté de conférer à la société OTEC au moment de la conclusion du contrat et notamment si la société CHANEL avait chargé la société OTEC de conclure des actes juridiques pour l'organisation de ce transport ou lui avait confié une simple prestation matérielle, les juges d'appel ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 132-1 du Code de commerce, ensemble l'article L. 132-6 du même code et l'article 1147 du code civil ;
4°) ALORS QUE le commissionnaire de transport est celui qui s'engage en cette qualité à accomplir, pour le compte de son commettant, les actes juridiques nécessaires au déplacement d'une marchandise, et qui, en cette qualité, reçoit toute latitude pour organiser librement le transport par les voies et les moyens de son choix ; que la qualité de commissionnaire de transport ne résulte pas, pour celui qui a été chargé de l'acheminement d'une marchandise de bout en bout, du seul fait qu'il s'est substitué un tiers dans l'exécution de l'expédition s'il ne justifie pas du consentement de son donneur d'ordre à l'existence de cette substitution ; qu'en qualifiant la société OTEC de commissionnaire et donc apprécier au regard des obligations du commissionnaire de transport l'existence d'une négligence imputable à la société OTEC, sans rechercher quelle avait été l'intention des parties au moment de la conclusion du contrat, et en se fondant sur le motif inopérant que la condition tenant à l'accord du donneur d'ordre est sans aucune pertinence, quand, en l'absence d'un tel accord à la substitution de transporteur, la qualité initialement convenue entre les parties ne peut avoir été modifiée et reste donc acquise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 132-1 du code de commerce, ensemble l'article L. 132-6 du même code et l'article 1147 du code civil.


Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

TRANSPORTS ROUTIERS - Marchandises - Commissionnaire de transport - Responsabilité - Responsabilité personnelle - Faute - Risque connu et particulier de vol - Omission d'en informer le voiturier

Le commissionnaire de transport, qui sait ou ne peut raisonnablement ignorer, que les marchandises qui lui sont confiées comportent un risque particulier de vol, a l'obligation d'en informer le voiturier de telle sorte que puissent être prises les mesures nécessaires à leur sécurité. Une cour d'appel qui retient que le commissionnaire de transport n'a mentionné sur la lettre de voiture ni la nature de la marchandise qu'il connaissait nécessairement ni leur valeur et n'a donné aucune instruction quant à des précautions particulières à prendre, réticence que ne justifiait pas le prix réduit du transport et que ne palliait pas la transmission des documents faite au transporteur, peut en déduire une faute à la charge du commissionnaire de transport


Références :

article 1147 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 03 décembre 2008


Publications
Proposition de citation: Cass. Com., 13 jui. 2010, pourvoi n°09-15472, Bull. civ. 2010, IV, n° 130
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, IV, n° 130
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Composition du Tribunal
Président : Mme Favre
Avocat général : M. Le Mesle (premier avocat général)
Rapporteur ?: M. Potocki
Avocat(s) : SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Didier et Pinet, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Formation : Chambre commerciale
Date de la décision : 13/07/2010
Date de l'import : 14/10/2011

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 09-15472
Numéro NOR : JURITEXT000022488594 ?
Numéro d'affaire : 09-15472
Numéro de décision : 41000828
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2010-07-13;09.15472 ?
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