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03/12/2008 | FRANCE | N°07-19997

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 03 décembre 2008, 07-19997


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 14 mai 2007), que la société See Siméoni (la société Siméoni) chargée par l'Etablissement public d'aménagement de Saint-Quentin-en-Yvelines (l'EPAD) agissant en qualité de maître d'ouvrage délégué par la commune de Magny-les-Hameaux, de la construction d'un "café culture" a sous-traité à la société Bluntzer les travaux du lot "menuiserie aluminium" ; que la société Siméoni ayant été placée en redressement judiciaire, la société Bluntzer, s

outenant qu'elle n'avait pas été intégralement payée au titre du paiement direct do...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 14 mai 2007), que la société See Siméoni (la société Siméoni) chargée par l'Etablissement public d'aménagement de Saint-Quentin-en-Yvelines (l'EPAD) agissant en qualité de maître d'ouvrage délégué par la commune de Magny-les-Hameaux, de la construction d'un "café culture" a sous-traité à la société Bluntzer les travaux du lot "menuiserie aluminium" ; que la société Siméoni ayant été placée en redressement judiciaire, la société Bluntzer, soutenant qu'elle n'avait pas été intégralement payée au titre du paiement direct dont elle bénéficiait, a sollicité la fixation, au passif de cette société, de sa créance relative à un solde sur la partie du marché principal sous-traitée et à des travaux supplémentaires ;

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1134 du code civil, ensemble les articles 1 et 6 de la loi 75-1334 du 31 décembre 1975 ;

Attendu que pour rejeter la demande en fixation de la créance de la société Bluntzer au titre d'un solde dû sur la partie du marché principal sous traitée, l'arrêt retient que la société Bluntzer indique ne pas avoir exercé d'action directe aux motifs que l'EPAD, maître d'ouvrage délégué est dissous, que son action à l'encontre du maître de l'ouvrage serait difficilement envisageable et que cette société n'a jamais saisi directement la commune, ni d'un refus non motivé opposé par l'entreprise générale à une demande en paiement ni d'une non transmission de demande en paiement ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'institution dans les marchés publics d'un paiement direct du sous-traitant par le maître de l'ouvrage ne fait pas disparaître le contrat de sous-traitance et laisse au sous-traitant la faculté d'agir en paiement contre l'entrepreneur principal ou de solliciter la fixation de sa créance, sans être contraint d'épuiser auparavant les voies de recours contre le maître de l'ouvrage, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de la société Bluntzer tendant à la fixation de sa créance au titre d'un solde dû sur la partie à elle sous-traitée du marché principal, l'arrêt rendu le 14 mai 2007 par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;

Condamne la société See Simeoni aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société See Simeoni à payer à la société Bluntzer la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de la société See Simeoni, de la SCP Laureau-Jeannerot, ès qualités et de Mme X..., ès qualités ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois décembre deux mille huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Boullez, avocat aux Conseils pour la société Bluntzer.

Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR fixé la créance de la société BLUNTZER au passif de la société SEE SIMEONI à la somme de 16 745 30 seulement, au titre des travaux supplémentaires ne relevant pas de la procédure de paiement direct, et D'AVOIR débouté la société BLUNTZER de sa demande tendant à ce que sa créance soit fixée au passif de la société SEE SIMEONI pour un montant de 65 981 83, soit le solde du prix des travaux qu'elle lui avait sous-traités, pour un montant total de 105 750 83, sous la garantie du paiement direct par le maître de l'ouvrage ;

AUX MOTIFS QU' «il résulte du dossier que par lettre du 15 juin 2001, la société SEE SIMEONI a invité le maître d'oeuvre à procéder à la réception des travaux, qu'en raison de l'importance des travaux de reprise des mal façons et des travaux non exécutés, le maître d'ouvrage a, par courrier du 28 novembre 2001, refusé de prononcer cette réception et mis en demeure la société SEE SIMEONI de terminer les travaux dans le délai d'un mois, avant de résilier le contrat par lettre du 16 janvier 2002, en raison de l'absence de reprise des malfaçons et du défaut de réalisation des travaux non exécutés ; que l'expert judiciaire Y... indique que lors des opérations préliminaires de réception, 380 réserves avaient été faites par le maître d'oeuvre ; qu'un projet de décompte final a été adressé le 1er octobre 2002 par la société SIMEONI à l'EPA de Saint Quentin en Yvelines, visant une somme cumulée due aux sous-traitants de 3.282.516,46 francs (et non euros) ; que le décompte général et définitif notifié à la société SIMEONI le 2 décembre 2004 par l'EPA de Saint Quentin en Yvelines, après résiliation du contrat, ne contient pas de détail des sommes dues aux sous-traitants et fait état d'un trop perçu par la société SIMEONI de 252.213,45 ; que par courrier du 5 janvier 2005, la société SIMEONI a contesté ce décompte ; qu'il n'est pas justifié que le compte entre la commune de Magny-les-Hameaux et la société SEE SIMEONI ait été définitivement arrêté ; que la société SEE SIMEONI produit une situation de travaux n°15 du 30 juin 2001, à destination de l'EPA de Saint Quentin en Yvelines, accompagné notamment d'une demande de paiement direct au profit de la société BLUNTZER pour une somme de 124.954,01 francs TTC ; qu'elle produit également un certificat de paiement de cette somme qu'elle a établi et comptabilisé le 30 juillet 2001 ; qu'il en est de même de situations de travaux antérieures du 30 septembre 2000 (n°9), du 31 octobre 2000 (n°10) et du 30 novembre 2000, accompagnés de demandes de paiement direct au profit de la société BLUNTZER à concurrence d'un montant cumulé de 348.000 francs hors taxes, pour lesquelles la société SEE SIMEONI produit les certificats de paiement correspondants, qu'elle a comptabilisés les 3 novembre 2000, 21 décembre 2000 et 26 mars 2001 ; que, par ailleurs, dans son rapport du 31 juillet 2003, M Y... a constaté que sur les 209 réserves imputées à ses sous-traitants par la société SIMEONI, 192 sont bien fondées, dont 34 portent sur des prestations de la société BLUNTZER, tenue d'une obligation de résultat à l'égard de l'entreprise principale ; qu'en tout état de cause, la société BLUNTZER, sous-traitant agréé, bénéficiant du paiement direct, bénéficie de l'action directe à l'encontre de la commune de Magny les Hameaux, maître d'ouvrage, qu'elle indique ne pas avoir exercé aux motifs que l'EPAD de Saint Quentin en Yvelines, maître d'ouvrage délégué, est dissout et que son action à l'encontre du maître d'ouvrage serait difficilement envisageable ; qu'elle n'a jamais saisi directement la commune de Magny les Hameaux, ni d'un refus non motivé opposé par l'entreprise générale à une demande de paiement, ni d'une non transmission de demande de paiement » ;

1. ALORS QUE l'institution, dans les marchés passés par l'Etat, les collectivités locales, les établissements et entreprises publics, d'un paiement direct du sous-traitant par le maître de l'ouvrage n'a pas pour effet de décharger l'entrepreneur principal de son obligation contractuelle au paiement des travaux réalisés ; qu'en énonçant que la société BLUNTZER n'avait pas saisi la commune de Magny les Hameaux, ni d'un refus non motivé opposé par l'entreprise générale à une demande en paiement, ni d'une non-transmission de demande en paiement, bien qu'elle ne soit pas tenue d'épuiser les voies de recours contre le maître de l'ouvrage, la Cour d'appel qui s'est abstenue de fixer le montant de sa créance au passif de la procédure collective ouverte à l'encontre de cette dernière, au titre des travaux des sous-traités, a violé l'article 1134 du Code civil, ainsi que les articles 1er et 6 de la loi du 31 décembre 1975 ;

2. ALORS QU'en présence d'un contrat d'entreprise, il appartient aux juges du fond de fixer la rémunération due à l'entrepreneur, compte tenu des éléments de la cause ; qu'en affirmant que le maître de l'ouvrage a refusé de recevoir les travaux (arrêt attaqué, p. 6, 2ème considérant), et qu'il avait émis plusieurs réserves dont certaines seraient imputables à la société BLUNTZER, d'après l'expert judiciaire, M. Y... (arrêt attaqué, p. 7, 1er alinéa), la Cour d'appel qui s'est abstenue d'évaluer le prix des travaux dont la société BLUNTZER poursuivait le paiement, après avoir recherché si ces réserves étaient fondées, de se prononcer sur leur imputabilité aux différents intervenants à l'acte de construire, et de chiffrer le coût des travaux nécessaires à leur mainlevée et de proposer un compte entre les parties, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil.

LE GREFFIER DE CHAMBRE


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 07-19997
Date de la décision : 03/12/2008
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

CONTRAT D'ENTREPRISE - Sous-traitant - Rapports avec l'entrepreneur principal - Coût des travaux - Paiement - Marchés publics - Paiement direct par le maître de l'ouvrage stipulé dans le contrat - Effet

MARCHE PUBLIC - Sous-traitant - Paiement direct par le maître de l'ouvrage - Action contre l'entrepreneur principal - Possibilité

L'institution dans les marchés publics d'un paiement direct du sous-traitant par le maître de l'ouvrage ne fait pas disparaître le contrat de sous-traitance et laisse au sous-traitant la faculté d'agir en paiement contre l'entrepreneur principal ou de solliciter la fixation de sa créance, sans être contraint d'épuiser auparavant les voies de recours contre le maître de l'ouvrage


Références :

article 1134 du code civil

articles 1 et 6 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 14 mai 2007

A rapprocher :3e Civ., 15 janvier 1992, pourvoi n° 90-11356, Bull. 1992, III, n° 131 (cassation)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 03 déc. 2008, pourvoi n°07-19997, Bull. civ. 2008, III, n° 193
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2008, III, n° 193

Composition du Tribunal
Président : M. Weber
Avocat général : M. Cuinat
Rapporteur ?: M. Mas
Avocat(s) : SCP Boullez, SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:07.19997
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