Vu la requête, enregistrée le 20 août 2008, présentée pour
Mme Sandrine A, demeurant ... par Me Meiffren, avocat ;
Mme A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0501411 en date du 5 juin 2008 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à l'indemniser des préjudices qui auraient résulté de sa vaccination obligatoire contre l'hépatite B ;
2°) de désigner un expert aux fins de chiffrer son entier préjudice corporel ;
3°) de condamner l'Etat au paiement d'une indemnité provisionnelle de 30 000 euros ;
4°) de condamner l'Etat à verser une somme de 70 000 euros à M. A au titre de son préjudice moral ;
5°) subsidiairement, au cas où la Cour refuserait l'expertise, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 633 310,95 euros en réparation de son préjudice corporel ;
6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;
Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat, en date du 27 janvier 2009, fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er février 2011 :
- le rapport de M. Fédou, rapporteur,
- les conclusions de Mme Fedi, rapporteur public,
- et les observations de Me Meiffren pour Mme A ;
Considérant qu'ont été administrées à Mme A les 25 octobre, 27 novembre et 30 décembre 1993, suivies d'un rappel le 14 décembre 1994, des injections de vaccin contre le virus de l'hépatite B ; qu'à la suite d'une consultation médicale en date du 16 mars 2000 a été diagnostiquée, après une biopsie musculaire du deltoïde gauche, une myofasciite à macrophages ; que Mme A interjette appel du jugement en date du 5 juin 2008 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande, fondée sur les dispositions de l'article L. 3111-9 du code de la santé publique, tendant à la condamnation de l'Etat à l'indemniser des préjudices qui auraient résulté de sa vaccination obligatoire contre le virus de l'hépatite B ; qu'elle sollicite à titre principal la désignation d'un nouvel expert pour chiffrer son entier préjudice corporel, à titre subsidiaire la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 633 310,95 euros en réparation de ses préjudices ;
Sur la responsabilité de l'Etat :
Considérant que si le deuxième expert désigné par le tribunal a conclu, dans son rapport rendu le 25 février 2008, que (...) le lien de causalité entre la myofasciite à macrophages observée chez Mme A et la vaccination subie (...) semble établi sans pouvoir toutefois le qualifier de certain, ces conclusions ne sont étayées par aucune étude scientifique validée et reconnue, établissant une relation de causalité directe et certaine entre l'entité histologique, désignée sous le nom de myofasciite à macrophages, dont il est admis qu'elle peut être causée par l'adjuvant aluminique entrant dans la composition des vaccins contre l'hépatite B, et une pathologie quelconque dont les symptômes pourraient correspondre aux doléances de Mme A ;
Considérant en effet que si, par un communiqué du 6 mars 2000, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé a admis que l'existence d'un risque faible d'atteintes démyélinisantes ou d'affections intra-immunes associées au vaccin contre l'hépatite B ne pouvait pas être exclue, notamment chez certaines personnes présentant des facteurs de sensibilité particuliers, cette circonstance ne suffit pas, à elle seule, à établir un lien de causalité direct et certain entre le vaccin administré contre le virus de l'hépatite B et les troubles notamment musculaires dont Mme A se plaint ;
Considérant en outre que si, par un avis du 5 mai 2004, le conseil scientifique de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé a estimé que l'état actuel des connaissances permet (...) de considérer que l'association entre l'entité histologique myofasciite à macrophages sur le site musculaire classiquement choisi pour la vaccination et l'administration de vaccins contenant un adjuvant aluminique est hautement probable, ledit conseil a conclu au terme de l'étude épidémiologique qu'il a diligentée que l'état actuel des connaissances ne permet pas (...) de considérer qu'il existe une association entre l'histologie myofasciite à macrophages et un syndrome clinique spécifique ; qu'il résulte de l'instruction que cet avis concorde avec celui du comité scientifique pour la sécurité des vaccins de l'Organisation Mondiale de la Santé rendu les 3 et 4 décembre 2003 ; que, contrairement à ce que soutient la requérante, la preuve du caractère partial de l'avis du 5 mai 2004 n'est pas apportée par le rapport de l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques du Sénat ; que si l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé a confirmé, par un compte rendu du 1er juillet 2005, la mise en évidence d'un lien de causalité entre l'administration d'aluminium vaccinal par injection intra-musculaire et la formation de la lésion myofasciite à macrophages, il confirme également l'absence de démonstration de lien de causalité entre la myofasciite à macrophages et la survenue du syndrome clinique ;
Considérant par ailleurs qu'aucune pièce du dossier, et notamment ni l'étude complémentaire effectuée par des chercheurs américains en juin 2005, ni une étude française présentée la même année orientée sur la composition du vaccin lui-même, ni l'article sur les troubles neuromusculaires rédigé en 2006, ni encore une décision rendue le 16 janvier 2006 par le tribunal du contentieux de l'incapacité de Haute-Normandie ne permettent d'établir l'existence d'un lien entre la myofasciite à macrophages et les troubles dont souffre Mme A ; qu'il est au demeurant constant, ainsi que cela résulte du premier rapport d'expertise rendu le 10 octobre 2006, qu'il n'existe pas de proximité temporelle entre la vaccination et les premiers symptômes de troubles ressentis par l'intéressée, dès lors que le dernier rappel de vaccination contre l'hépatite B a été effectué le 14 décembre 1994 et que Mme A n'a développé la pathologie en cause qu'au mois de janvier 2000 ; que, par suite, nonobstant la circonstance qu'elle ne présentait aucun antécédent médical et qu'aucun autre facteur ne permet de penser que la personne vaccinée était déjà atteinte lors des injections des troubles dont elle se plaint, le tribunal a, à bon droit, compte tenu de l'ensemble des éléments qui précèdent, jugé que l'existence d'un lien de causalité entre la vaccination subie par Mme A et les troubles dont elle souffre ne pouvait pas, en l'état actuel des connaissances scientifiques, être établi ;
Considérant qu'il résulte de tout qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande indemnitaire ; qu'il y a lieu en conséquence, sans qu'il soit besoin de recourir à la nouvelle expertise sollicitée en appel, de rejeter sa requête ;
Sur les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de Béziers :
Considérant que, dès lors que le présent arrêt rejette la demande de Mme A tendant à la condamnation de l'Etat à la réparation de ses préjudices, les conclusions de la caisse précitée tendant au remboursement des prestations servies à son assurée sociale et au paiement de l'indemnité forfaitaire instaurée par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ne peuvent également qu'être rejetées ;
Sur les conclusions des parties tendant à l'application des dispositions de
l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à Mme A et à la caisse primaire d'assurance maladie de Béziers la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête n° 08MA03914 de Mme A et les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de Béziers dans la même instance sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Sandrine A, à la caisse primaire d'assurance maladie de Béziers et au ministre du travail, de l'emploi et de la santé.
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N° 08MA039142