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04/10/2024 | FRANCE | N°23PA05119

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 4ème chambre, 04 octobre 2024, 23PA05119


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 5 janvier 2023 par lequel la préfète du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.



Par un jugement n° 2301272 du 9 novembre 2023, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par une requête et

des mémoires, enregistrés respectivement les 11 décembre 2023,

26 décembre 2023 et 16 janvier 2024, Mme C..., représentée p...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 5 janvier 2023 par lequel la préfète du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 2301272 du 9 novembre 2023, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés respectivement les 11 décembre 2023,

26 décembre 2023 et 16 janvier 2024, Mme C..., représentée par Me Sadfi, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Val-de-Marne de lui délivrer un certificat de résidence algérien ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 10 euros par jour de retard, et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pendant la durée du réexamen ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

- elle est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- elle méconnaît les dispositions du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense du 3 janvier 2024, la préfète du Val-de-Marne conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mantz,

- ainsi que les observations de Me Sadfi et de Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., née le 6 décembre 1990, entrée en France le 29 août 2017 sous couvert d'un visa de long séjour pour études, a bénéficié de titres de séjour en qualité d'étudiante puis d'un titre de séjour en qualité de commerçante, valable du 10 février 2021 au 9 février 2022. Ayant cessé cette dernière activité, elle a sollicité le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et a été placée sous récépissé de demande de carte de séjour, en dernier lieu jusqu'au 17 janvier 2023. Par un arrêté du 5 janvier 2023, la préfète du Val-de-Marne a rejeté sa demande d'admission au séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Mme C... relève appel du jugement du 9 novembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... est entrée en France en 2017 pour suivre des études. Elle a obtenu, au titre de l'année universitaire 2018-2019, un diplôme de Master " Sciences et techniques des activités physiques et sportives, mention Management du sport ", délivré par l'université de Bordeaux. A compter de sa dernière année d'études, elle a exercé en qualité d'assistante d'éducation, à mi-temps, d'abord dans un collège à Gentilly (Val-de-Marne), du 18 septembre 2018 au 31 août 2019, puis dans un collège à Montrouge (Hauts-de-Seine), du 1er septembre 2019 au 31 août 2021. Il ressort à cet égard d'une lettre du conseiller principal d'éducation de ce dernier collège, en date du 6 juillet 2021, que Mme C... s'est acquittée de sa mission de manière très satisfaisante. La requérante, qui possède un certificat de sauveteur secouriste du travail délivré le 17 juillet 2020 ainsi qu'un certificat d'agente privée de prévention et de sécurité délivré le 31 juillet 2020, a en outre développé, à compter du 14 janvier 2021, une activité professionnelle indépendante de commerce de programmes d'enseignements en langue étrangère, qu'elle a toutefois cessée à la date du 30 juin 2022. Elle a par ailleurs conclu, le 13 juillet 2021, un pacte civil de solidarité avec M. B... D..., de nationalité française, qui exerce en qualité d'assistant d'éducation depuis le 1er septembre 2020. Aux fins d'établir une communauté de vie avec M. D..., Mme C... produit la taxe d'habitation pour 2022 du logement du couple, au nom des deux conjoints pacsés, un avis d'imposition commun sur les revenus de 2021, différents bulletins de paie de M. D... de l'année 2022 établissant l'adresse commune du couple, un relevé d'identité bancaire d'un compte joint de la banque Boursorama, ainsi que des factures d'abonnement téléphoniques des deux conjoints pacsés, portant la même adresse. Dans les circonstances de l'espèce, compte tenu de ce que Mme C... est en situation régulière de manière ininterrompue sur le territoire français

depuis son entrée en France, au demeurant non exclusivement en qualité d'étudiante, soit depuis plus de cinq ans à la date de la décision attaquée, qu'elle a fait montre d'une volonté d'insertion significative et qu'elle établit résider avec M. D... depuis la conclusion de leur pacte civil de solidarité, soit depuis environ un an et demi à la date de la décision attaquée, et nonobstant le caractère relativement récent de cette union à la date de la décision attaquée, cette dernière a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et a ainsi méconnu les stipulations précitées du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien modifié. L'illégalité de la décision de refus de séjour entraîne, par voie de conséquence, celle de l'obligation de quitter le territoire français.

4. Il résulte de ce qui précède que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Eu égard au motif d'annulation retenu au point 3, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement la délivrance d'un certificat de résidence algérien d'un an portant la mention " vie privée et familiale " à Mme C.... Il y a lieu, en l'absence de changement de circonstances de droit ou de fait y faisant obstacle, d'enjoindre à la préfète du Val-de-Marne d'y procéder, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à Mme C..., en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2301272 du tribunal administratif de Melun du 9 novembre 2023 et l'arrêté de la préfète du Val-de-Marne du 5 janvier 2023 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint à la préfète du Val-de-Marne, sous réserve d'un changement de circonstances de droit ou de fait, de délivrer à Mme C... un certificat de résidence algérien d'un an portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme C... la somme de 1 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 20 septembre 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Bruston, présidente,

M. Mantz, premier conseiller,

Mme Saint-Macary, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 octobre 2024.

Le rapporteur,

P. MANTZ

La présidente,

S. BRUSTON

La greffière,

E. FERNANDO

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23PA05119 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA05119
Date de la décision : 04/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BRUSTON
Rapporteur ?: M. Pascal MANTZ
Rapporteur public ?: Mme LIPSOS
Avocat(s) : SADFI

Origine de la décision
Date de l'import : 13/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-04;23pa05119 ?
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