LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 833-1 ancien du code civil, ensemble l'article 883 ancien du même code ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que dans l'instance en partage de la communauté de M. X... et de Mme Y..., deux immeubles communs ont été adjugés en 1995 à M. X... à l'occasion d'une vente sur licitation dont le cahier des charges prévoyait que si l'adjudicataire était un des colicitants, celui-ci pourrait différer le règlement de la partie du prix devant revenir à l'autre colicitant jusqu'au règlement définitif de la liquidation de la communauté ; que Mme Y... a saisi le tribunal pour obtenir la revalorisation de la somme d'argent devant lui revenir ;
Attendu que, pour rejeter cette demande, l'arrêt retient qu'aucun acte de partage n'a été dressé, que la soulte qui sera due par M. X... dans le cadre du partage et suite à la licitation n'a pas été déterminée et que cette somme n'était pas exigible d'après le cahier des charges de la vente, que les immeubles sont devenus la propriété de M. X... et ont été remplacés dans l'actif communautaire par leur prix, que le fait qu'ils aient ou non augmenté de valeur pour plus d'un quart est sans incidence s'agissant des opérations de liquidation, les conditions d'application de l'article 833-1 du code civil n'étant pas remplies ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résulte du second des textes susvisés que la licitation à un indivisaire constitue un partage partiel revêtant un caractère définitif à l'égard du bien licité qui est sorti de l'indivision en contrepartie d'un prix, lequel, en vertu du premier, est assimilable à une soulte devant revenir divisément aux autres coïndivisaires, la cour d'appel a violé ces textes ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté Mme Y... de sa demande de revalorisation de la soulte, l'arrêt rendu le 10 septembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... et le condamne à payer à Mme Y... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mai deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Georges, avocat aux Conseils, pour Mme Y....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme Y... de sa demande de revalorisation de soulte,
AUX MOTIFS PROPRES QUE Mme Y... explique que, malgré le jugement rendu le 26 octobre 1993 et les deux jugements d'adjudication, la liquidation de la communauté n'a pas pu aboutir ; qu'elle invoque les dispositions de l'article 833-1 du code civil pour prétendre à une revalorisation de la soulte qui lui est due par M. X... ; qu'elle explique que deux immeubles dépendaient de la communauté et que M. X... s'est porté adjudicataire de ces biens pour 30.870,93 ¿ et 97.186,25 ¿ ; que, cependant, la valeur de ces immeubles a connu une forte augmentation depuis 1995 et qu'ils peuvent actuellement être évalués à 169.500 ¿ pour le chalet de Basse-sur-le-Rupt et à 370.000 ¿ pour la maison de Fouquereuil, ce qui correspond à des augmentations de 549 % et 400 % ; qu'elle constate que, suite à l'attribution à son ex-époux de ces deux immeubles, la soulte qui lui est due doit être revalorisée et ce d'autant que le prix des biens n'a pas été payé en 1995 ; qu'elle prétend qu'il y a déjà eu un partage partiel du fait de l'adjudication qui a été faite au profit de l'un des indivisaires ; que M. X... s'oppose à cette demande en affirmant que l'article 833-1 du code civil n'a pas vocation à s'appliquer puisqu'il n'est pas débiteur d'une soulte, aucune soulte n'étant encore exigible, cette somme ne pouvant être chiffrée puisque le partage n'a pas été réalisé, et puisque les biens communs ne lui ont pas été attribués et n'ont pas été mis dans son lot étant devenus sa propriété suite au jugement d'adjudication, et qu'ils ne sont pas à partager, seul leur prix de vente pouvant l'être ; que l'article 833-1 ancien du code civil dispose que lorsque le débiteur d'une soulte a obtenu des délais de paiement, et que, par suite des circonstances économiques, la valeur des biens mis dans son lot a augmenté ou diminué de plus du quart depuis le partage, les sommes restant dues augmentent ou diminuent dans la même proportion ; que cet article est applicable puisque l'article 47 de la loi du 23 juin 2006 précise que les dispositions de ses articles 2, 3, 4, 7 et 8 sont applicables dès son entrée en vigueur aux indivisions existantes et aux successions ouvertes non encore partagées, mais que les autres dispositions sont applicables aux successions ouvertes à compter de son entrée en vigueur ; qu'en l'occurrence, l'indivision post-communautaire existant entre les parties depuis 1987 et le partage définitif n'étant toujours pas intervenu, ce sont donc les dispositions anciennes du code civil qui demeurent applicables ; qu'il découle des dispositions de l'article 833-1 ancien du code civil que, si lors d'un partage, l'une des parties est débitrice d'une soulte et que des délais de paiement lui ont été accordés, le montant de cette soulte peut augmenter lorsque, par suite de circonstances économiques, la valeur des biens placés dans son lot a augmenté de plus du quart depuis le partage ; que, pour l'application de cet article, un partage doit avoir été effectué ; qu'en effet, pour qu'une soulte, somme destinée à compenser l'éventuel déséquilibre entre les lots devant être attribués à chaque indivisaire, soit fixée, qu'elle soit exigible et qu'un des co-indivisaires soit débiteur d'une telle somme, le partage doit avoir été réalisé ; que tel n'a pas été le cas en l'espèce ; qu'en effet, suite au jugement du 26 octobre 1993 et à la licitation des deux immeubles, éléments d'actif de la communauté, aucun acte de partage n'a été dressé ; que seul un projet a été établi, qui n'a pas recueilli l'accord des deux parties ; qu'il ne peut même pas être considéré qu'il y a eu partage partiel, seule la licitation de deux éléments d'actif étant intervenue ; que le prix de ces biens s'est substitué à ces immeubles, mais qu'il n'a pas été décidé de l'attribution des éléments d'actif de la communauté ni même du prix des immeubles ; que la soulte qui sera due par M. X... dans le cadre du partage et suite à la licitation n'a pas été déterminée et cette somme n'était pas exigible puisque, comme le rappelle Mme Y..., le cahier des charges annexé au jugement d'adjudication précise que « si l'adjudicataire est un des co-licitants, celui-ci pourra différer le règlement de la partie du prix devant revenir à l'autre co-licitant jusqu'au règlement définitif de la liquidation de la communauté » ; qu'en conséquence, il ne saurait être considéré que M. X... a obtenu des délais de paiement pour une soulte, dont le montant n'est actuellement pas déterminé et qui n'est donc pas exigible, faute de partage de la communauté ; qu'en outre, suite aux jugements d'adjudication, les immeubles sont devenus la propriété de M. X... et ont été remplacés dans l'actif communautaire par leur prix ; que ces biens ne font donc plus partie de l'actif de la communauté et ne seront pas attribués à l'un des époux par l'état liquidatif ; qu'en conséquence, le fait qu'ils aient ou non augmenté de valeur pour plus d'un quart et sans incidence s'agissant des opérations de liquidation, les conditions d'application de l'article 833-1 du code civil n'étant pas remplies ; que la demande de Mme Y... tendant à obtenir la revalorisation de la soulte en fonction de la valeur actuelle des immeubles considérés sera donc rejetée (arrêt attaqué, pp. 9 et 10) ;
ET AUX MOTIFS, REPUTES ADOPTES, DES PREMIERS JUGES QUE, par jugements du 23 février 1995, M. X... a été déclaré adjudicataire de l'immeuble de Basse-sur-le-Rupt pour un prix de 30.870,93 € et de l'immeuble de Fouquereuil pour un prix de 97.186,25 € ; que, si l'article 11 des conditions générales de vente stipule que l'adjudicataire est débiteur du prix à compter du jour de l'adjudication devenue définitive, le cahier des charges prévoit que si l'adjudicataire est un des colicitants, celui-ci pourra différer le règlement de la partie du prix devant revenir à l'autre colicitant jusqu'au règlement définitif de la liquidation de la communauté ; que Mme Y... ne produit la moindre pièce pour établir que la valeur des biens mis dans le lot de M. X... a augmenté de plus du quart ; que, par ailleurs, la soulte dont le débiteur est redevable n'est sujette à révision que si les biens mis dans son lot ont augmenté ou diminué de plus du quart entre le jour du partage et celui où la dette vient à échéance, et qu'en l'espèce, le partage n'a pas encore eu lieu et n'aura lieu qu'avec l'établissement définitif de l'acte de partage établi par le notaire ; que, par ailleurs, ce ne sont pas les immeubles en tant que tels qui figurent dans le lot de M. X... puisque ce dernier est adjudicataire de ces immeubles et en est devenu de ce fait propriétaire, mais le prix de cette adjudication (jugement entrepris, pp. 12 et 13) ;
ALORS QU'en vertu de l'article 883 du code civil, que l'article 1476 de ce même code rend applicable aux partages des communautés, notamment pour ce qui concerne la licitation des biens, chaque coïndivisaire est censé avoir succédé seul et immédiatement aux effets à lui échus sur licitation ; qu'il en résulte qu'en cas d'adjudication d'un bien indivis à un colicitant, la licitation vaut partage partiel ; qu'il ne peut être dérogé à ces règles que si les parties en sont convenues par l'insertion au cahier des charges de l'adjudication d'une clause dite d'attribution au profit d'un colicitant qui serait dernier enchérisseur, consistant en une promesse synallagmatique engageant le colicitant adjudicataire à prendre l'immeuble dans son lot et les autres colicitants à lui en faire l'attribution dans le partage définitif pour la somme déterminée par la dernière enchère ; qu'en l'espèce, pour débouter Mme Y... de sa demande revalorisation de soulte par application de l'ancien article 833-1 du code civil, la cour d'appel a retenu que le fait que M. X... ait été déclaré adjudicataire des deux immeubles licités ne permettait pas de considérer qu'il y avait eu partage partiel, et ce parce qu'il était indiqué au cahier des charges que si l'adjudicataire était l'un des colicitants, celui-ci pourrait différer jusqu'au règlement définitif de la liquidation de la communauté le règlement de la partie du prix devant revenir à l'autre colicitant ; qu'en statuant ainsi, sans relever l'existence d'une clause d'attribution par laquelle les parties seraient convenues, par une promesse synallagmatique, de l'engagement du colicitant adjudicataire de prendre les immeubles licités dans son lot et de l'engagement de l'autre colicitant de lui en faire l'attribution dans le partage définitif pour la valeur déterminée par la dernière enchère, la cour d'appel a violé les articles 883 et 1476 du code civil, ensemble l'ancien article 833-1 et l'article 1134 du même code.