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Sur le premier moyen :
Attendu, selon le jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Bobigny, 11 juillet 1988), que les salariés de la société L'Hirondelle bénéficiaient de divers avantages en vertu d'usages en vigueur dans l'entreprise ; qu'à la suite de difficultés économiques, la société a mis fin à ces usages en 1986 ;
Attendu qu'il est fait grief au jugement d'avoir ordonné l'inscription au passif de la liquidation judiciaire de la société diverses sommes réclamées par des salariés à titre de primes de treizième mois, de primes d'ancienneté et d'heures payées non travaillées, alors, selon le pourvoi, que, d'une part, la dénonciation par l'employeur, responsable de l'organisation, de la gestion et de la marche générale de l'entreprise, d'un usage ou d'un autre accord collectif ne répondant pas aux conditions de l'article L. 132-19 du Code du travail, est opposable à l'ensemble des salariés concernés, dès lors que cette décision a été précédée d'une information donnée aux intéressés et aux institutions représentatives du personnel ; qu'en l'espèce, le Groupement des Assedic de la région parisienne (GARP) et M. X..., ès qualités, avaient fait valoir, dans des conclusions demeurées sans réponse, que les salariés avaient été informés de la dénonciation de l'usage et des négociations engagées par le biais des délégués du personnel et des délégués syndicaux, par les compte rendus des réunions du comité d'entreprise et par le fait que la société L'Hirondelle est une société coopérative dont la plupart des salariés sont sociétaires et administrateurs ; que le conseil de prud'hommes, en estimant que les avantages acquis ne pouvaient être remis en cause, et en condamnant le GARP à en garantir le paiement, n'a pas suffisamment motivé sa décision, au regard de l'article L. 143-11-1 du Code du travail ; alors que, d'autre part, il appartient aux salariés de prendre acte de la rupture de leur contrat de travail en cas de modification unilatérale par l'employeur d'un usage, sans pouvoir exiger de celui-ci le maintien des conditions antérieures ; qu'en l'espèce, le conseil de prud'hommes, qui constate que les salariés n'avaient pas pris acte de la rupture de leur contrat de travail, à la suite des modifications des avantages résultant d'un usage, et qui impose le maintien de ces derniers, a violé les articles L. 135-5, L. 143-4 du Code du travail et 1134 du Code civil ;
Mais attendu que le conseil de prud'hommes a relevé que la direction de l'entreprise avait remis en cause les usages en vigueur dans l'entreprise par un courrier confidentiel destiné au seul secrétaire du comité d'entreprise, sans prévenir individuellement les salariés de la modification ainsi apportée à leurs conditions de rémunération ;
Qu'en l'état de ces constatations, les juges du fond, qui n'étaient pas tenus de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, ont pu décider que cette décision unilatérale de l'employeur, qui modifiait les droits attachés à l'exécution du contrat de travail, n'était pas opposable aux salariés ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 55 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Attendu que, selon ce texte, le jugement d'ouverture du redressement judiciaire arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels, ainsi que tous intérêts de retard et majorations ;
Qu'en décidant que les créances des salariés, antérieures au jugement d'ouverture du redressement judiciaire, porteraient intérêt au taux légal à compter de la date de réception de la convocation devant le bureau de jugement, le 27 avril 1988, date postérieure audit jugement, le conseil de prud'hommes a violé le texte susvisé ;
Et attendu que la cassation n'implique pas qu'il soit à nouveau statué au fond ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, en ce qu'il a décidé que les créances qu'il constate porteraient intérêt au taux légal à compter de la date de réception de la convocation devant le bureau de jugement, le jugement rendu le 11 juillet 1988 par le conseil de prud'hommes de Bobigny ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi