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27/06/2014 | FRANCE | N°12MA00986

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 27 juin 2014, 12MA00986


Vu 1°) la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 8 mars 2012, sous le numéro 12MA00986, présentée pour Mme B...A..., demeurant ..., par Me Laborde-Giraudo, avocat ;

Mme A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104186 du 10 février 2012 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 7 octobre 2011 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fix

le Maroc comme pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ...

Vu 1°) la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 8 mars 2012, sous le numéro 12MA00986, présentée pour Mme B...A..., demeurant ..., par Me Laborde-Giraudo, avocat ;

Mme A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104186 du 10 février 2012 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 7 octobre 2011 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le Maroc comme pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de procéder à un nouvel examen de sa demande, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu le jugement attaqué ;

Vu 2°) la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 14 mars 2012, sous le numéro 12MA01047, présentée pour Mme B...A..., demeurant..., par Me Ajil, avocat, qui s'est également constitué pour la requête n° 12MA00986 dont il s'approprie les termes ;

Mme A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104186 du 10 février 2012 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 7 octobre 2011 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le Maroc comme pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale ", " salarié " ou " étudiant " ou à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation et de lui délivrer dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Marseille en date du 10 mai 2012 admettant Mme A...à l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juin 2014 le rapport de Mme Pena, premier conseiller ;

1. Considérant que les requêtes susvisées n° 12MA00986 et n° 12MA01047, présentées pour MelleA..., sont dirigées contre le même jugement, présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant que Mme B...A..., de nationalité marocaine, relève appel du jugement en date du 10 février 2012 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté en date du 7 octobre 2011 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de renouveler son titre de séjour " en qualité de conjoint de français ", lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le Maroc comme pays de destination ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français " ; qu'aux termes de l'article L. 313-12 du même code : " ... Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé. Toutefois, lorsque la communauté de vie a été rompue en raison de violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger et peut en accorder le renouvellement... " ;

4. Considérant qu'après avoir épousé au Maroc un ressortissant français le 18 juin 2007, Mme A...est entrée en France le 26 octobre 2007 munie d'un visa D valable du 16 octobre 2007 au 14 janvier 2008 ; qu'en sa qualité de conjointe de français, elle s'est vue délivrer un premier titre de séjour valable du 5 décembre 2007 au 4 décembre 2008, régulièrement renouvelé depuis ; que par une main courante du 4 mai 2010, elle a déclaré que son époux avait changé les serrures de la porte de leur domicile, puis par une autre main courante datée du 8 juin 2010, elle a dénoncé les violences physiques et psychologiques commises sur elle par son époux depuis une année environ ; que l'appelante produit également un certificat médical du service des urgences du centre hospitalier de Sens daté du 21 avril 2010 faisant apparaître des douleurs au niveau des bras et un choc émotionnel ayant entraîné une interruption temporaire de travail de trois jours, un document médical daté du 23 avril 2010 attestant de douleurs au niveau des épaules, ainsi qu'un certificat du 15 juin 2010 attestant d'un hématome au mollet droit et au poignet gauche ; que Mme A...fournit également une attestation de suivi d'un responsable d'un centre médico-psychologique de Sens en date du 11 juin 2010 ainsi qu'une attestation de la directrice du centre d'information sur les droits des femmes et des familles C...du 3 novembre 2011 dont il résulte que l'intéressée est suivie depuis le mois de juin 2010 suite à des violences conjugales ; qu'il ressort également d'un courrier du parquet près le tribunal de grande instance de Sens qu'une enquête pour violences conjugales a été ouverte et que cette dernière se poursuit depuis le 20 janvier 2011 devant le parquet du tribunal de grande instance de Nice ; qu'un courrier du 14 juin 2010 de la coordinatrice et formatrice du Greta de Dijon confirme que l'intéressée a été contrainte d'interrompre sa formation en raison des violences conjugales subies et indique que les intervenants au sein de cette formation avaient pu déceler sa détresse psychologique durant la période de formation ; qu'enfin, il ressort des pièces du dossier que Mme A...a engagé une procédure de divorce le 17 février 2011 devant le tribunal de grande instance de Nice, alors qu'elle fait valoir, sans être contredite, ne pas avoir eu connaissance du jugement de divorce qui aurait été prononcé par le tribunal de première instance de Ouarzazate ; que l'ensemble de ces éléments suffit à établir la réalité des comportements allégués ; que, par suite, en refusant de renouveler à Mme A...le titre de séjour dont elle était jusqu'alors titulaire, le préfet des Alpes-Maritimes a méconnu les dispositions précitées de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lesquelles permettent le renouvellement de son titre de séjour au conjoint de français en cas de violences conjugales et en l'absence de menace pour l'ordre public ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement et les autres moyens de la requête, Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Considérant que le présent arrêt implique qu'il soit enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à Mme A...un titre de séjour " vie privée et familiale " dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens (....) " ; que l'article 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 dispose que : " (...) L'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner, dans les conditions prévues à l'article 75, la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à une somme au titre des frais que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Il peut, en cas de condamnation, renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et poursuivre le recouvrement à son profit de la somme allouée par le juge " ;

8. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle ne peut demander au juge de condamner à son profit la partie perdante qu'au paiement des seuls frais qu'il a personnellement exposés, à l'exclusion de la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle confiée à son avocat mais que l'avocat de ce bénéficiaire peut demander au juge de condamner la partie perdante à lui verser la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client, si ce dernier n'avait eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement à son profit de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

9. Considérant, d'une part, que Mme A...n'allègue pas avoir exposé des frais autres que ceux pris en charge par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale qui lui a été allouée par une décision du 10 mai 2012 ; que, d'autre part, son avocat n'a pas demandé la condamnation de l'Etat à lui verser la somme correspondant aux frais exposés qu'il aurait réclamée à sa cliente si cette dernière n'avait bénéficié d'une aide juridictionnelle totale ; que dans ces conditions, les conclusions sus mentionnées ne peuvent être accueillies ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice en date du 10 février 2012, ensemble la décision du préfet des Alpes-Maritimes en date du 7 octobre 2011, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " à Mme A...dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

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N°12MA00986,12MA010472


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA00986
Date de la décision : 27/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: Mme Eleonore PENA
Rapporteur public ?: Mme MARZOUG
Avocat(s) : LABORDE-GIRAUDO ; LABORDE-GIRAUDO ; AJIL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-06-27;12ma00986 ?
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