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10/07/2014 | FRANCE | N°14BX00439

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 10 juillet 2014, 14BX00439


Vu I°), sous le n° 14BX00439, la requête, enregistrée le 11 février 2014, présentée pour la commune de Kourou, représentée par son maire, par Me Mbilampindo, avocat ;

La commune de Kourou demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200389 du 19 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Cayenne a annulé le marché de collecte des déchets ménagers qu'elle avait conclu avec la société Sogema, et l'a condamnée à verser une indemnité de 71 147,80 euros à la société Guyane Collecte Collectivités (GCC), concurrente évincée, en réparation de

ses préjudices, ainsi que les intérêts légaux sur cette somme à compter du 5 mars 2012 ...

Vu I°), sous le n° 14BX00439, la requête, enregistrée le 11 février 2014, présentée pour la commune de Kourou, représentée par son maire, par Me Mbilampindo, avocat ;

La commune de Kourou demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200389 du 19 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Cayenne a annulé le marché de collecte des déchets ménagers qu'elle avait conclu avec la société Sogema, et l'a condamnée à verser une indemnité de 71 147,80 euros à la société Guyane Collecte Collectivités (GCC), concurrente évincée, en réparation de ses préjudices, ainsi que les intérêts légaux sur cette somme à compter du 5 mars 2012 ;

2°) de rejeter la demande de la société Guyane Collecte Collectivités ;

3°) de mettre à la charge de cette société une somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu II°), sous le n° 14BX00440, la requête, enregistrée le 11 février 2014, présentée pour la commune de Kourou, représentée par son maire, par Me Mbilampindo, avocat ;

La commune de Kourou demande à la cour :

1°) de prononcer le sursis à l'exécution du jugement n° 1200389 du 19 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Cayenne a annulé le marché de collecte des déchets ménagers qu'elle avait conclu avec la Sogema, et l'a condamnée à verser une indemnité de 71 147,80 euros à la société Guyane Collecte Collectivités (GCC), concurrente évincée, en réparation de ses préjudices, ainsi que les intérêts légaux sur cette somme à compter du 5 mars 2012 ;

2°) de rejeter la demande de la société Guyane Collecte Collectivités ;

3°) de mettre à la charge de cette société une somme de 4 000 euros à lui verser au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu III°), sous le n° 14BX00568, la requête, enregistrée le 20 février 2014, présentée pour la société Sogema, dont le siège est 391 Route Baduel à Cayenne (97300), par la société d'avocats Hdla ;

La société Sogema demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200389 du 19 décembre 2013 en tant que le tribunal administratif de Cayenne a prononcé l'annulation à effet différé du marché de collecte des déchets ménagers qu'elle a conclu avec la commune de Kourou ;

2°) de mettre à la charge de la société Guyane Collecte Collectivités une somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu IV°), sous le n° 14BX00751, la requête, enregistrée le 7 mars 2014, présentée pour la société Sogema, dont le siège est 391 Route Baduel à Cayenne (97300), par la société d'avocats Hdla ;

La société Sogema demande à la cour :

1°) de prononcer le sursis à l'exécution du jugement n° 1200389 du 19 décembre 2013 en tant que le tribunal administratif de Cayenne a annulé le marché de collecte des déchets ménagers qu'elle avait conclu avec la commune de Kourou ;

2°) de mettre à la charge de la société Guyane Collecte Collectivités une somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 juin 2014 :

- le rapport de Mme Sabrina Ladoire, conseiller ;

- les conclusions de Mme Christine Mège, rapporteur public ;

- et les observations de Me Coulaud, avocat de la société Sogema ;

Vu, enregistrée le 30 juin 2014, la note en délibéré présentée par Me A...pour la société Sogema ;

1. Considérant que la commune de Kourou a lancé, le 11 mai 2011, un appel d'offres ouvert pour l'attribution du marché de collecte des déchets ménagers et assimilés de la commune, d'une période de cinq ans, prolongeable par période annuelle dans la limite de deux années ; que la commission d'appel d'offres qui s'est réunie le 4 août 2011 a sollicité des précisions complémentaires sur la teneur des offres présentées et a fixé aux entreprises la date du 24 août 2011 pour apporter les précisions requises ; qu'au vu du rapport modificatif d'analyse des offres, la commission, réunie le 7 septembre 2011, a déclaré la procédure infructueuse au motif que les offres présentées étaient toutes inacceptables ou irrégulières ; que les candidats ont alors été informés de la mise en oeuvre d'une procédure négociée conformément à l'article 35 du code des marchés publics et de la nécessité de présenter leur offre avant le 28 septembre 2011 ; qu'après examen du rapport d'analyse des offres, la commission d'appel d'offres a, le 4 novembre 2011, retenu l'offre proposée par la société Sogema ; que par délibération du 27 décembre 2011, le conseil municipal a autorisé le maire à signer ce marché ; que la société Guyane Collecte Collectivités (GCC), informée du rejet de son offre le 3 janvier 2012, a présenté, le 2 mars 2012, une demande préalable d'indemnisation à la ville de Kourou et a parallèlement saisi le tribunal administratif de Cayenne en sollicitant l'annulation de ce marché et une indemnité de 71 147,80 euros en réparation des préjudices consécutifs à son éviction ; que le contrat en litige a en outre été transféré, le 1er janvier 2013, à la communauté de communes des Savanes, établissement public de coopération intercommunale dont la ville de Kourou est membre ; que par un jugement n° 1200389 du 19 décembre 2013, le tribunal administratif de Cayenne a annulé ce marché de collecte des déchets ménagers et a condamné la commune de Kourou à verser une indemnité de 71 147,80 euros à la société Guyane Collecte Collectivités, concurrente évincée, ainsi que les intérêts légaux sur cette somme à compter du 5 mars 2012 ; que la commune de Kourou et la société Sogema, par des requêtes enregistrées respectivement sous les n° 14BX00439 et 14BX00568, relèvent appel de ce jugement ; que par deux requêtes enregistrées sous les n° 14BX00440 et 14BX00751, la commune et la société attributaire du marché demandent également à la cour de surseoir à l'exécution du jugement ;

Sur la jonction :

2. Considérant que les requêtes n°s 14BX00439, 14BX00568, 14BX00440 et 14BX00751 présentent à juger des questions semblables et sont dirigées contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur la recevabilité des requêtes :

3. Considérant que le fait que la commune de Kourou n'ait pas, malgré une mise en demeure, produit de mémoire en défense en première instance et qu'elle ait donc été regardée, en application de l'article R.632-1 du code de justice administrative, comme ayant acquiescé aux faits, ne lui interdit pas de contester en appel la matérialité de ces faits, notamment en produisant de nouveaux documents à l'appui de ses allégations ; que par suite la société Guyane Collecte Collectivités n'est pas fondée à soutenir que l'appel de la commune serait irrecevable ; que si elle a également demandé de rejeter comme irrecevable l'appel de la société Sogema, elle ne développe aucun moyen à l'appui de ces conclusions ;

Sur la régularité du jugement :

4. Considérant que la société Sogema critique le tribunal pour avoir relevé que la déclaration d'infructuosité de l'appel d'offres n'est pas motivée et ne précise pas les éléments qui justifieraient le recours à une procédure négociée, sans indiquer sur quel fondement de telles exigences reposeraient ; que toutefois, la circonstance qu'aucun texte n'imposerait une telle motivation relève du bien-fondé du jugement et n'affecte pas la suffisance de sa motivation ;

Sur la recevabilité de la demande :

5. Considérant en premier lieu, que la commune de Kourou soutient que la signataire des mémoires présentés en première instance pour la société Guyane Collecte Collectivités n'était pas habilitée à représenter cette société en justice ; que toutefois, il ressort des pièces du dossier que Mme Maugée, présidente directrice générale de cette société par actions simplifiées, avait, par un pouvoir du 5 janvier 2012, habilité MmeB..., signataire des différents mémoires, à ester en justice au nom de cette société ; que, par suite, la fin de non recevoir invoquée doit être écartée ;

6. Considérant en deuxième lieu, que la commune de Kourou fait valoir que la société Guyane Collecte Collectivités a introduit tardivement sa demande en contestation de validité du contrat litigieux ;

7. Considérant que ce recours doit être exercé, y compris si le contrat contesté est relatif à des travaux publics, dans un délai de deux mois à compter de l'accomplissement des mesures de publicité appropriées, notamment au moyen d'un avis mentionnant à la fois la conclusion du contrat et les modalités de sa consultation dans le respect des secrets protégés par la loi ; que la commune ne produit aucun document de nature à établir qu'elle aurait procédé à la publication de l'avis d'attribution du marché ; que la seule publication versée au dossier a été réalisée en janvier 2013 et ne mentionne d'ailleurs que l'infructuosité de l'appel d'offres, et non l'attribution de ce marché à la société Sogema ; que, par suite, la société Guyane Collecte Collectivités, qui s'est vu notifier le rejet de son offre le 3 janvier 2012, n'était pas tardive à contester, par une demande enregistrée par le greffe du tribunal administratif de Cayenne le 2 mars 2012, le contrat attribuant le marché en litige à la société Sogema ;

Sur l'action en contestation de la validité du marché :

En ce qui concerne le moyen tiré de l'illégalité du recours à la procédure négociée :

8. Considérant que la société Sogema reproche aux premiers juges d'une part, de s'être fondés à tort sur les dispositions du I de l'article 35 du code des marchés publics alors que la procédure négociée aurait été conduite sur le fondement des dispositions du II de cet article et d'autre part, d'avoir estimé que le recours à la procédure négociée n'était pas fondé, faute pour la commune d'avoir justifié du caractère irrégulier ou inacceptable de l'ensemble des offres initiales ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article 35 du code des marchés publics applicable à la date de passation du marché : " Les pouvoirs adjudicateurs peuvent passer des marchés négociés dans les cas définis ci-dessous. I.- Peuvent être négociés après publicité préalable et mise en concurrence : 1° Les marchés et les accords-cadres pour lesquels, après appel d'offres ou dialogue compétitif, il n'a été proposé que des offres irrégulières ou inacceptables que le pouvoir adjudicateur est tenu de rejeter. Une offre irrégulière est une offre qui, tout en apportant une réponse au besoin du pouvoir adjudicateur, est incomplète ou ne respecte pas les exigences formulées dans l'avis d'appel public à la concurrence ou dans les documents de la consultation. Une offre est inacceptable si les conditions qui sont prévues pour son exécution méconnaissent la législation en vigueur, ou si les crédits budgétaires alloués au marché après évaluation du besoin à satisfaire ne permettent pas au pouvoir adjudicateur de la financer. / Les conditions initiales du marché ne doivent toutefois pas être substantiellement modifiées. /Le pouvoir adjudicateur est dispensé de procéder à une nouvelle mesure de publicité s'il ne fait participer à la négociation que le ou les candidats qui, lors de la procédure antérieure, ont soumis des offres respectant les exigences relatives aux délais et modalités formelles de présentation des offres ; / (...) ; II. -Peuvent être négociés sans publicité préalable et sans mise en concurrence : 1° Les marchés et les accords-cadres conclus pour faire face à une urgence impérieuse résultant de circonstances imprévisibles pour le pouvoir adjudicateur et n'étant pas de son fait, et dont les conditions de passation ne sont pas compatibles avec les délais exigés par les procédures d'appel d'offres ou de marchés négociés avec publicité et mise en concurrence préalable, et notamment les marchés conclus pour faire face à des situations d'urgence impérieuse liées à une catastrophe technologique ou naturelle. / (...) / Par dérogation aux dispositions du chapitre V du titre II de la première partie du présent code, lorsque l'urgence impérieuse est incompatible avec la préparation des documents constitutifs du marché, la passation du marché est confirmée par un échange de lettres ; / (...) / 3° Les marchés et les accords-cadres passés selon la procédure de l'appel d'offres, pour lesquels aucune candidature ou aucune offre n'a été déposée ou pour lesquels seules des offres inappropriées ont été déposées, pour autant que les conditions initiales du marché ne soient pas substantiellement modifiées et qu'un rapport soit communiqué, à sa demande, à la Commission européenne. Est inappropriée une offre qui apporte une réponse sans rapport avec le besoin du pouvoir adjudicateur et qui peut en conséquence être assimilée à une absence d'offre (...) " ;

10. Considérant en premier lieu, qu'il résulte de ces dispositions, premièrement, que la procédure d'appel d'offres et la procédure négociée sont deux procédures matériellement et juridiquement distinctes, la première trouvant son aboutissement dans la signature du marché ou dans une déclaration d'infructuosité, deuxièmement que la procédure négociée n'est justifiée que si la déclaration d'infructuosité est fondée et enfin, que la procédure négociée qui peut être mise en oeuvre, après publicité préalable et mise en concurrence ou sans publicité préalable et sans mise en concurrence, dépend étroitement des raisons pour lesquelles la procédure a été déclarée infructueuse ; que, compte tenu du lien ainsi établi entre la procédure d'appel d'offres infructueuse et la négociation ultérieure, et contrairement à ce qui est soutenu par la commune de Kourou, la société Guyane Collecte Collectivités était recevable à se prévaloir devant le juge du contrat des irrégularités affectant la procédure d'appel d'offres, y compris de celles affectant la déclaration de son infructuosité, à l'appui de son recours contre le contrat issu de la procédure négociée en résultant ;

11. Considérant en deuxième lieu, qu'il résulte du procès-verbal de la commission d'appel d'offres du 7 septembre 2011, que cette commission a déclaré la procédure infructueuse au motif que les offres présentées étaient inacceptables ou irrégulières ; qu'il ressort également des pièces du dossier que seuls les candidats ayant participé à l'appel d'offres initial ont été invités à participer aux négociations ; que dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que la commune avait entendu faire application des dispositions du I de l'article 35 du code des marchés publics permettant au pouvoir adjudicateur d'une part, de recourir à la procédure négociée lorsque les offres initiales sont inacceptables ou irrégulières et d'autre part, de ne pas soumettre cette procédure à publication lorsqu'elle admet seulement à la négociation les sociétés ayant soumis, lors de l'appel d'offres initial, des offres respectant les exigences relatives aux délais et modalités formelles de présentation des offres ; que si les procès verbaux de la commission d'appel d'offres, de même que la lettre du 14 septembre 2011 adressée à la société Guyane Collecte Collectivités, mentionnent que la procédure négociée ne serait pas soumise à une mise en concurrence, alors que cette lettre évoque pourtant une " nouvelle consultation ", cette formulation erronée ne permet toutefois pas, compte tenu des motifs précités du procès-verbal de la commission d'appel d'offres du 7 septembre 2011, de regarder la commune comme ayant souhaité mettre en oeuvre les dispositions du II de l'article 35 du code des marchés publics, qui ne sont applicables qu'en cas d'offres inappropriées ;

12. Considérant en troisième lieu, que les requérantes reprochent aux premiers juges d'avoir considéré que l'ensemble des offres ne pouvaient être qualifiées d'irrégulières ou d'inacceptables en relevant que l'offre de la société Guyane Collecte Collectivités était d'un coût moindre que celui de la société attributaire du marché ;

13. Considérant que la commune de Kourou indique que le rapport d'analyse des offres portant la mention " suite à négociations " ne porte pas sur les offres produites dans le cadre de la procédure initiale d'appel d'offres mais constitue une première analyse des offres présentées par les sociétés dans le cadre de la procédure négociée ; que la mention du mois d'octobre 2011 apposée au bas des pages de ce document et le rappel des faits qu'il comporte confirment cette information ; qu'ainsi, faute d'avoir produit le rapport d'analyse des offres remis dans le cadre de l'appel d'offres initial, la commune n'apporte aucun élément de nature à identifier les critiques formulées à l'encontre de l'offre de la société Guyane Collecte Collectivités et à établir, ainsi qu'elle le soutient, que l'ensemble des offres étaient effectivement irrégulières ou inacceptables ; que de même, si la société Sogema soutient que toutes les offres étaient incomplètes et donc irrégulières, elles ne produit cependant aucun document permettant de le démontrer ;

En ce qui concerne la demande de substitution de base légale :

14. Considérant que la société Sogema demande à la cour d'opérer une substitution de base légale de la décision de la ville de Kourou de recourir à une procédure négociée en soutenant qu'il existait, conformément à l'article 35-II 1° précité du code des marchés publics, une urgence impérieuse à attribuer un nouveau marché de collecte des déchets ménagers et assimilés eu égard aux exigences de continuité du service public et de la salubrité publique ; qu'elle fait valoir, à l'appui de cette demande, que la liquidation judiciaire de la société LPL Participation, précédent titulaire, et le caractère irrégulier de l'intégralité des offres remises dans le cadre de l'appel d'offres ont créé une circonstance extérieure, imprévisible et irrésistible pour la commune qui n'a pas les moyens techniques, matériels et humains, pour prendre en charge en régie directe la collecte des ordures ménagères ;

15. Considérant qu'il est constant que la ville de Kourou, pouvoir adjudicateur, n'a pas elle-même sollicité une telle substitution de base légale ; qu'au demeurant, et ainsi qu'il a été dit au point 13, il ne résulte pas de l'instruction que l'appel d'offres pouvait être regardé comme infructueux dès lors qu'il n'est pas établi que toutes les offres auraient été inacceptables ou irrégulières ; qu'en outre, suite à la liquidation judiciaire de la société LPL Participation, la commune a conclu un marché temporaire afin d'assurer la continuité du service public de collecte des déchets ménagers et donc la protection de la salubrité publique au sein de la commune ; que, dans ces conditions, le moyen ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté ;

En ce qui concerne les conséquences de l'illégalité du contrat :

16. Considérant en premier lieu, que le vice entachant le contrat résultant du caractère injustifié de la déclaration d'infructuosité a affecté gravement la régularité de la mise en concurrence et a été de nature à influer sur le choix du délégataire ; que cette irrégularité, qui n'est pas susceptible de régularisation, implique, par sa gravité, l'annulation du contrat ; que si la commune invoque un intérêt général tenant au maintien de l'exécution de ce contrat afin de permettre la continuité du service public d'enlèvement des ordures ménagères, il ne résulte pas de l'instruction, compte tenu notamment de ce que la commune ne produit aucun élément permettant d'établir que cette activité ne pourrait être poursuivie en régie ou dans le cadre d'un contrat temporaire comme celui qu'elle avait conclu suite à la liquidation judiciaire de la société LPL Participation, que les conséquences de cette annulation puissent constituer un tel motif d'intérêt général ; que de plus, et afin de prendre en considération l'intérêt général tenant à la continuité du service public, le tribunal a différé dans le temps les effets de l'annulation qu'il a prononcée ;

17. Considérant en second lieu, que la société Sogema fait grief au tribunal de n'avoir pas recherché si l'annulation de ce contrat ne portait pas une atteinte excessive à ses droits ; que s'il est vrai que les premiers juges ne se sont pas expressément prononcés sur ce point, entachant ainsi le jugement d'une erreur de droit, il appartient à la cour de procéder à cette recherche ; que toutefois, la seule circonstance que ce contrat ait été exécuté durant deux ans sur les cinq années prévues, n'est pas de nature à caractériser une atteinte excessive aux droits du titulaire, alors que cette société n'invoque aucune autre circonstance de nature à justifier une telle atteinte ;

18. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Kourou et la société Sogema ne sont pas fondées à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cayenne a annulé le marché qu'elles avaient conclu ;

En ce qui concerne la demande indemnitaire :

19. Considérant que faute d'avoir produit le rapport d'analyse des offres établi dans le cadre de la procédure d'appel d'offres initiale, la commune ne permet pas à la cour de vérifier que la société Guyane Collecte Collectivités n'aurait pas disposé, ainsi qu'elle le soutient, d'une chance sérieuse d'obtenir le marché, alors qu'elle a été classée 2ème dans le cadre de la procédure négociée, avec un prix sensiblement inférieur à l'offre finalement retenue ; que, dans ces conditions, c'est à juste titre que le tribunal a condamné la commune de Kourou à verser à la société Guyane Collecte Collectivités la somme non sérieusement contestée, au regard de la marge modérée qu'elle représente, de 71 147,80 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du 5 mars 2012, en réparation de son manque à gagner sur la durée de cinq ans du marché ;

Sur les conclusions aux fins de sursis à l'exécution du jugement :

20. Considérant que le présent arrêt statue au fond sur les conclusions d'appel de la commune de Kourou et de la société Sogema ; que dès lors, les conclusions de celles-ci tendant au prononcé du sursis à exécution du jugement du 19 décembre 2013 du tribunal administratif de Cayenne deviennent sans objet ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

21. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par la commune de Kourou et la société Sogema sur leur fondement ;

22. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Kourou une somme de 1 500 euros à verser à la société Guyane Collecte Collectivités au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes n° 14BX00439 et 14BX00568 présentées par la commune de Kourou et la société Sogema sont rejetées.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions des requêtes n° 14BX00440 et 14BX00751 présentées par la commune de Kourou et la société Sogema.

Article 3 : La commune de Kourou versera une somme de 1 500 euros à la société Guyane Collecte Collectivités en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

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Nos 14BX00439, 14BX00440, 14BX00568, 14BX00751


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14BX00439
Date de la décision : 10/07/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-02-02-05 Marchés et contrats administratifs. Formation des contrats et marchés. Mode de passation des contrats. Marché négocié.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Sabrina LADOIRE
Rapporteur public ?: Mme MEGE
Avocat(s) : HDLA - AVOCATS ; AZAN AVOCATS ASSOCIES ; HDLA - AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-07-10;14bx00439 ?
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