Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le syndicat des forestiers privés d'Alsace a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 22 juillet 2021 par laquelle le président de la fédération départementale des chasseurs du Haut-Rhin a fixé les plans de chasse individuels pour le département du Haut-Rhin ainsi que la décision née le 6 octobre 2021 du silence gardé sur son recours gracieux tendant à ce que les plans de chasse individuels soient complétés pour respecter les minima arrêtés par le préfet du Haut-Rhin.
Par un jugement n° 2107026 du 16 décembre 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a, d'une part, annulé la décision du président de la fédération départementale des chasseurs du Haut-Rhin attribuant les plans de chasse individuels pour les espèces cerfs élaphes, chamois et daims, révélée le 22 juillet 2021 en tant qu'elle attribue, sur la totalité des lots de chasse concernés, un nombre minimal de cerfs élaphes, de chamois et de daims à prélever inférieur au nombre minimal fixé par l'arrêté préfectoral du 14 avril 2021 et d'autre part enjoint au président de la fédération départementale des chasseurs du Haut-Rhin de répartir l'intégralité des minima de prélèvement de cerfs, chamois et daims fixés dans l'arrêté du 14 avril 2021 entre les plans de chasse individuels concernés, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 14 février 2022 et un mémoire complémentaire enregistré le 28 février 2024, la fédération départementale des chasseurs du Haut-Rhin, représentée par Me Muller-Kapp, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 16 décembre 2021 ;
2°) de rejeter la demande présentée par le syndicat des forestiers privés d'Alsace devant le tribunal administratif de Strasbourg ;
3°) de mettre à la charge du syndicat des forestiers privés d'Alsace une somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête en première instance est irrecevable car dirigée contre une décision matériellement inexistante ;
- elle ne s'est pas irrégulièrement affranchie des minima fixés à l'article 1er de l'arrêté du préfet du Haut-Rhin du 14 avril 2021 en n'attribuant pas 47 % des cerfs à tirer, 15 % des chamois et 24 % des daims, n'a pas mis en œuvre le plan de chasse décidé par le préfet dans toute son ampleur en méconnaissance du principe d'équilibre agro-sylvo-cynégétique inscrit à l'article L. 425-4 du code de l'environnement, des dispositions de l'article L. 425-8 relatives à la compétence du préfet pour fixer les minima et maxima de prélèvement et de celles de l'article R. 425-2 du code de l'environnement relatives à la force contraignante de cette décision.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 février 2024, le syndicat des forestiers privés d'Alsace, représenté par Me Lang, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la fédération départementale des chasseurs du Haut-Rhin sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par la fédération départementale des chasseurs du Haut-Rhin n'est fondé.
Les parties ont été informées, par un courrier du 28 février 2024, qu'une clôture d'instruction était susceptible d'intervenir à compter du 10 avril 2024, sur le fondement de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative.
La clôture d'instruction a été prononcée, avec effet immédiat, par ordonnance du 6 mai 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Sibileau, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique,
- et les observations de Me Muller-Kapp, pour la fédération départementale des chasseurs du Haut-Rhin.
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier que le syndicat des forestiers privés d'Alsace doit selon les premiers juges être vu comme demandant l'annulation de la décision du président de la fédération départementale des chasseurs du Haut-Rhin attribuant les plans de chasse individuels pour les espèces cerfs élaphes, chamois et daims, révélée le 22 juillet 2021 en tant qu'elle attribue, sur la totalité des lots de chasse concernés, un nombre minimal de cerfs élaphes, de chamois et de daims à prélever inférieur au nombre minimal fixé par l'arrêté préfectoral du 14 avril 2021. Par un jugement n° 2107026 du 16 décembre 2021 dont la fédération départementale des chasseurs du Haut-Rhin interjette appel, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé cette décision révélée et enjoint au président de la fédération départementale des chasseurs du Haut-Rhin de répartir l'intégralité des minima de prélèvement de cerfs, chamois et daims fixés dans l'arrêté du 14 avril 2021 entre les plans de chasse individuels concernés dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne le cadre juridique applicable :
2. Aux termes de l'article L. 425-6 code de l'environnement : " Le plan de chasse détermine le nombre minimum et maximum d'animaux à prélever sur les territoires de chasse. (...). / Pour le grand gibier, il est fixé après consultation des représentants des intérêts agricoles et forestiers pour une période qui peut être de trois ans et révisable annuellement ; il est fixé pour une année pour le petit gibier. / (...) ". Il ressort du premier alinéa de l'article L. 425-8 du code de l'environnement que " le plan de chasse, qui prend en compte les orientations du schéma départemental de gestion cynégétique, est mis en œuvre (...) par le président de la fédération départementale des chasseurs. (...) ". Le deuxième alinéa de cet article dispose que : " Pour chacune des espèces de grand gibier soumises à un plan de chasse, le représentant de l'Etat dans le département fixe, après avis de la commission départementale compétente en matière de chasse et de faune sauvage, le nombre minimal et le nombre maximal d'animaux à prélever annuellement dans l'ensemble du département, répartis par sous-ensembles territorialement cohérents pour la gestion de ces espèces, le cas échéant par sexe ou par catégorie d'âge. Pour déterminer le nombre minimal et le nombre maximal d'animaux à prélever, le représentant de l'Etat dans le département prend notamment en compte les dégâts causés par le gibier dans le département ". L'article R. 425-2 prévoit que " (...) / Le nombre minimal et le nombre maximal d'animaux fixés par cet arrêté s'imposent aux plans de chasse individuels ". Enfin, l'article R. 435-3 dispose : " Dans les départements ou parties de département où une espèce de gibier est soumise à un plan de chasse, la chasse de cette espèce ne peut être pratiquée que par les bénéficiaires de plans de chasse individuels attribués conformément aux dispositions des articles R. 425-4 à R. 425-17 ou leurs ayants droit. ".
En ce qui concerne le moyen tiré de l'irrecevabilité de la requête de première instance :
3. Tout d'abord, il ressort des pièces du dossier que par un arrêté du 14 avril 2021, le préfet du Haut-Rhin a fixé sur le fondement de l'article L. 425-8 du code de l'environnement, les nombres minimal et maximal d'animaux d'espèce de grand gibier à prélever pour la saison de chasse 2021-2022. Il a ainsi notamment fixé à 2 176 cerfs élaphes, à 415 daims et à 400 chamois le nombre minimal d'animaux à tirer pour ces espèces. Ensuite, il ressort également des pièces du dossier que le président de la fédération départementale des chasseurs du Haut-Rhin a rendu public sur le site internet de la fédération le 21 juillet 2021 le sens des 842 plans de chasse individuels devant assurer l'exécution du plan de chasse départemental. Contrairement à ce que soutient la fédération départementale des chasseurs du Haut-Rhin, cette dernière n'a pu légalement délivrer le 1er avril 2021 ces mêmes plans de chasse individuels dès lors que ce n'est que le 14 avril 2021, soit treize jours après, que le préfet du Haut-Rhin a fixé le plan de chasse départemental. Enfin, il est constant que l'addition des minima distribués par la fédération départementale des chasseurs du Haut-Rhin à l'occasion de la délivrance le 22 juillet 2021 des 842 plans de chasse individuels est inférieure, pour les espèces " cerfs ", " chamois " et " daim " aux minima prévus par l'arrêté du 14 avril 2021. Cette abstention révèle une décision non formalisée du président de la fédération départementale des chasseurs du Haut-Rhin d'autoriser un nombre minimal de prélèvement pour les espèces précitées inférieur aux seuils fixés par l'arrêté du 14 avril 2021. Par suite, la fédération départementale des chasseurs du Haut-Rhin n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le syndicat des forestiers privés d'Alsace avait formé des conclusions à fin d'annulation dirigés contre une décision matériellement existante.
En ce qui concerne le moyen retenu par les premiers juges :
4. Il ressort des pièces du dossier que par sa décision non formalisée du 22 juillet 2021, le président de la fédération départementale des chasseurs du Haut-Rhin a fixé un nombre minimal de prélèvement de cerfs élaphes, daims et chamois inférieur aux seuils prévus par l'arrêté du 14 avril 2021. Ce faisant, le président de la fédération départementale des chasseurs du Haut-Rhin qui ne saurait utilement se prévaloir ni de circonstances postérieures à sa décision ni d'une abstention antérieure du préfet du Haut-Rhin, a méconnu les dispositions du code de l'environnement citées au point 2 ci-dessus. Dès lors, la fédération départementale des chasseurs du Haut-Rhin n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg a annulé sa décision du 22 juillet 2021.
Sur les frais d'instance :
5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du syndicat des forestiers privés d'Alsace qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la fédération départementale des chasseurs du Haut-Rhin demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la fédération départementale des chasseurs du Haut-Rhin une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par le syndicat des forestiers privés d'Alsace et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la fédération départementale des chasseurs du Haut-Rhin est rejetée.
Article 2 : La fédération départementale des chasseurs du Haut-Rhin versera au syndicat des forestiers privés d'Alsace la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la fédération départementale des chasseurs du Haut-Rhin et au syndicat des forestiers privés d'Alsace.
Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.
Délibéré après l'audience du 27 juin 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Wallerich, président de chambre,
- Mme Guidi, présidente-assesseure,
- M. Sibileau, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 juillet 2024.
Le rapporteur,
Signé : J.-B. SibileauLe président,
Signé : M. Wallerich
La greffière,
Signé : S. Robinet
La République mande et ordonne au préfet du Haut-Rhin en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
S. Robinet
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N° 22NC00351