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15/12/2015 | FRANCE | N°15NT01176

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 15 décembre 2015, 15NT01176


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...E..., épouseB..., a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de la décision du 4 février 2013 par laquelle le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1304148 du 25 février 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 14 avril 2015 et le 12 octobre 2015, ainsi que des pièces complémentaires, enregistrées les 27

mai 2015, 27 juillet 2015 et 16 novembre 2015, MmeE..., épouseB..., représentée par Me Cosme, dema...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...E..., épouseB..., a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de la décision du 4 février 2013 par laquelle le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1304148 du 25 février 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 14 avril 2015 et le 12 octobre 2015, ainsi que des pièces complémentaires, enregistrées les 27 mai 2015, 27 juillet 2015 et 16 novembre 2015, MmeE..., épouseB..., représentée par Me Cosme, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 25 février 2015 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la décision du préfet de la Loire-Atlantique du 4 février 2013 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire Atlantique de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée.

Elle soutient que :

- la décision attaquée, qui porte atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale, est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droits d'asile ;

- elle méconnaît également les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 5 juin 2015 et 15 octobre 2015, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondé et s'en rapporte à ses écritures de première instance.

MmeE..., épouse B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 17 août 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Rimeu, premier conseiller,

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,

- et les observations de Me Cosme, avocat de MmeE....

1. Considérant que MmeE..., épouseB..., de nationalité turque, relève appel du jugement du 25 février 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de la Loire Atlantique du 4 février 2013 refusant de lui délivrer un titre de séjour ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'il appartient à l'autorité administrative qui envisage de refuser de régulariser la situation d'un ressortissant étranger en situation irrégulière et de procéder à son éloignement d'apprécier si, eu égard notamment à la durée et aux conditions de son séjour en France, ainsi qu'à la nature et à l'ancienneté de ses liens familiaux sur le territoire français, l'atteinte que cette mesure porterait à sa vie familiale serait disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision serait prise ; que la circonstance que l'étranger relèverait, à la date de cet examen, des catégories ouvrant droit au regroupement familial ne saurait, par elle-même, intervenir dans l'appréciation portée par l'administration sur la gravité de l'atteinte à la situation de l'intéressé ; que cette dernière peut en revanche tenir compte le cas échéant, au titre des buts poursuivis par sa décision, de ce que le ressortissant étranger en cause ne pouvait légalement entrer en France pour y séjourner qu'au seul bénéfice du regroupement familial et qu'il n'a pas respecté cette procédure ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme E...épouseB... est entrée en France en septembre 2010, pour rejoindre son époux, M. C...B..., également de nationalité turque, titulaire depuis 2009 d'une carte de séjour temporaire en qualité de salarié ; que le couple a eu deux enfants, nés en France les 15 décembre 2011 et 9 janvier 2013 ; que M. B...travaille comme maçon, sous couvert de contrats à durée déterminée régulièrement renouvelés ; que, sauf à contraindre M. B...à accompagner son épouse en Turquie, alors qu'il exerce une activité professionnelle en France et qu'il a par ailleurs toute sa famille proche en France, son père étant de nationalité française, l'unité de la cellule familiale risquait en conséquence du refus de séjour opposé d'être compromise pour une période relativement longue, privant ainsi deux jeunes enfants de la présence de l'un ou l'autre de leurs parents ; que, dans ces conditions, alors même que l'intéressée n'établit pas qu'elle n'aurait plus d'attaches familiales dans son pays d'origine, l'atteinte portée par la décision contestée à son droit au respect de sa vie privée et familiale doit être regardée comme disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, la décision du préfet de la Loire Atlantique du 4 février 2013 a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et doit pour ce motif être annulée ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que MmeE..., épouse B...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Considérant que le présent arrêt implique nécessairement que le préfet de la Loire Atlantique délivre à MmeE..., épouseB..., sous réserve de changement des circonstances de droit ou de fait, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ; qu'il y a lieu de lui enjoindre d'y procéder dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

6. Considérant que MmeE..., épouse B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Cosme renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de celui-ci le versement à Me Cosme de la somme de 1 500 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1304148 du 25 février 2015 du tribunal administratif de Nantes et la décision du préfet de la Loire Atlantique du 4 février 2013 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Loire Atlantique de délivrer à MmeE..., épouseB..., une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'État versera à Me Cosme la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Cosme renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...E..., épouseB..., et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise au préfet de la Loire Atlantique.

Délibéré après l'audience du 24 novembre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Loirat, président-assesseur,

- Mme Rimeu, premier conseiller.

Lu en audience publique le 15 décembre 2015.

Le rapporteur,

S. RIMEU Le président,

L. LAINÉ Le greffier,

M. D...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N°15NT011762


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT01176
Date de la décision : 15/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Sophie RIMEU
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : COSME MARIE

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-12-15;15nt01176 ?
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