Vu la requête, enregistrée le 12 septembre 2006, présentée pour Mme Jacqueline X, demeurant au ...), par Me Gas ;
Mme X demande à la Cour :
11 d'annuler l'article 4 du jugement n°0502308 en date du 18 juillet 2006 par lequel le Tribunal administratif de Marseille, après avoir, d'une part, condamné assistance publique des hôpitaux de Marseille à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation de ses préjudices et la somme de1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, d'autre part, mis à la charge de l'assistance publique à Marseille les frais d'expertise, a rejeté le surplus de sa demande tendant à la condamnation de cet établissement public à lui verser la somme de 145 000 euros ;
2° de condamner l'assistance publique des hôpitaux de Marseille à lui verser la somme de 145 000 euros ;
3° de mettre à la charge de l'assistance publique des hôpitaux de Marseille la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
.........................................................................................................
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 26 décembre 2006, présenté pour la mutualité sociale agricole du Var, qui informe la Cour qu'elle n'a aucune créance à présenter ;
Vu le mémoire, enregistré le 2 février 2007, présenté pour Mme X, tendant aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens et informant la cour qu'elle a dû subir le 7 décembre 2006 une nouvelle intervention pour retirer un fragment de la bandelette « TVT » ;
Vu le mémoire, enregistré le 6 décembre 2007, présenté pour l'assistance publique des hôpitaux de Marseille, par Me Le Prado ;
L'assistance publique des hôpitaux de Marseille demande à la Cour :
1° d'annuler les articles 1er, 2 et 3 du jugement n°0502308 en date du 18 juillet 2006 par lequel le Tribunal administratif de Marseille l'a, d'une part, condamnée à verser à Mme X la somme de 5 000 euros en réparation de ses préjudices et la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, d'autre part, mis à sa charge les frais d'expertise ;
2° de rejeter les demandes de Mme X ;
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Vu l'ordonnance en date du 20 novembre 2007 fixant la clôture d'instruction au 21 décembre 2007 à 16 heures, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;
Vu le mémoire, enregistré le 21 décembre 2007, présenté pour Mme X, aux fins de communication de pièces ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 février 2008 :
- le rapport de M. Bédier, président-assesseur ;
- les observations de Me Gas, pour Mme X et de Me Demailly, substituant Me Le Prado, pour l'assistance publique des hôpitaux de Marseille ;
- et les conclusions de M. Dubois, commissaire du gouvernement ;
Considérant que Mme X a été examinée le 3 avril 2000 dans les services du centre hospitalier Salvador à Marseille pour des incontinences urinaires d'effort survenant après miction, liées à deux opérations d'hystérectomie et de cystopexie réalisées en 1998 ; que le praticien qu'elle a rencontré lui a alors proposé la mise en place d'une bandelette sous-uréthrale de polypropylène de type « TVT » (Tension free Vaginal Tape) dans le but de remédier à l'incontinence dont elle était atteinte ; que l'intervention s'est déroulée le 9 mai 2000 ; qu'à la suite de cette intervention, la requérante a présenté des troubles mictionnels invalidants, des infections urinaires ainsi qu'une aggravation de l'incontinence ; qu'une nouvelle intervention réalisée le 11 juillet 2000 n'a pas apporté d'amélioration à l'état de santé de l'intéressée ; que Mme X, imputant les troubles persistants dont elle était victime aux soins reçus dans les services du centre hospitalier et estimant que la responsabilité de cet établissement était engagée à son égard, a saisi le Tribunal administratif de Marseille d'une demande de réparation de ses différents préjudices ; que, par l'article 4 d'un jugement en date du 18 juillet 2006, le tribunal, après avoir condamné l'assistance publique des hôpitaux de Marseille, gestionnaire du centre hospitalier Salvador, à verser à Mme X la somme de 5 000 euros en réparation de ses préjudices et mis à la charge du même établissement la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les frais d'expertise, a rejeté le surplus de la demande de la requérante tendant à la condamnation de l'établissement à lui verser la somme de 145 000 euros ; que Mme X demande à la cour d'annuler l'article 4 de ce jugement et de porter au montant de 145 000 euros, qu'elle demandait aux premiers juges, le montant de la condamnation prononcée à l'encontre de l'assistance publique de Marseille ; que, par la voie du recours incident, l'assistance publique des hôpitaux de Marseille demande à la Cour d'annuler toute condamnation prononcée à son encontre ;
Sur le principe de la responsabilité de l'assistance publique des hôpitaux de Marseille :
En ce qui concerne la perte par le centre hospitalier de certaines des pièces du dossier médical de la patiente :
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la perte par le centre hospitalier de certaines des pièces du dossier médical de la patiente telles que des radioscopies ou le compte rendu opératoire de l'intervention du 11 juillet 2000 s'expliquerait par la volonté des responsables de l'établissement de faire disparaître des documents de nature à révéler l'existence de fautes commises à l'égard de Mme X ; qu'il ne résulte pas davantage de l'instruction que la perte de ces documents aurait été de nature à priver les praticiens d'informations indispensables à la mise en oeuvre des soins qui ont été prodigués à la requérante alors que l'expert a pu retracer avec précision, trois années après les faits, au vu d'un dossier médical suffisamment exploitable même si certaines pièces en étaient absentes, la chronologie des examens et des interventions subis par la patiente ainsi que la nature des actes effectués par les praticiens du centre hospitalier ; qu'ainsi la faute dans l'organisation du service commise par le centre hospitalier en perdant certaines pièces du dossier médical de Mme X ne peut être regardée comme étant à l'origine d'un quelconque préjudice dont l'intéressée serait fondée à demander réparation ;
En ce qui concerne l'existence d'une erreur de diagnostic :
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des conclusions du rapport d'expertise, que les troubles dont s'est plainte Mme X trouvent leur origine dans des mictions intra-vaginales et que le diagnostic d'incontinence urinaire à l'effort a été à bon droit posé par les praticiens du centre hospitalier ; que, dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la pose d'une bandelette sous-uréthrale de polypropylène de type « TVT », qui était à l'époque la technique chirurgicale de référence dans le traitement d'incontinence urinaire à l'effort révèlerait de la part des praticiens du centre hospitalier une erreur de diagnostic ; qu'en outre, s'il est vrai qu'une fistule uréthro-vaginale a également été mise en évidence chez la patiente tardivement en mars 2003, il résulte des constatations de l'expert que la présence de cette fistule avait été évoquée par les praticiens du centre hospitalier dès juin 2000 mais n'avait pu être mise en évidence malgré des examens attentifs de leur part ; que, d'ailleurs, des explorations réalisées en octobre 2000 dans les services d'un établissement hospitalier d'une autre région ne permettaient toujours pas de mettre en évidence la présence d'une fistule ; que, dans ces conditions, aucune erreur de diagnostic ne peut non plus être reprochée aux médecins, qui n'ont pas omis de rechercher, par des méthodes appropriées, les origines possibles des troubles décrits par la patiente ;
En ce qui concerne l'existence de fautes médicales :
Considérant que, comme il vient d'être dit, la pose d'une bandelette « TVT » était la technique chirurgicale de référence dans le traitement d'incontinence urinaire à l'effort ; que le choix de ce traitement effectué par les praticiens du centre hospitalier ne révèle aucune faute médicale ; qu'il résulte également de l'instruction et notamment des constatations de l'expert qu'aucune faute ne peut être relevée ni au cours de l'intervention chirurgicale de pose de la bandelette « TVT », qui a été réalisée selon une technique conforme au mode opératoire et aux règles de l'art en la matière ni au cours de l'évaluation pré-opératoire ou des soins post-opératoires administrés à la patiente jusqu'à sa sortie du centre hospitalier ; qu'en outre, la complication qui est survenue sous la forme d'une extériorisation de la bandelette « TVT » ne peut être regardée comme constitutive d'une faute technique mais résulte d'un simple aléa thérapeutique ;
En ce qui concerne les manquements du centre hospitalier à son obligation d'information :
Considérant que, lorsque l'acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l'art, comporte des risques connus de décès ou d'invalidité, le patient doit en être informé dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement éclairé ; que, si cette information n'est pas requise en cas d'urgence, d'impossibilité ou de refus du patient d'être informé, la seule circonstance que les risques ne se réalisent qu'exceptionnellement ne dispense pas les médecins de leur obligation ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des constatations du rapport d'expertise, que l' assistance publique des hôpitaux de Marseille n'établit pas avoir informé Mme X des risques, réels, notamment au regard des troubles de la miction et des incontinences urinaires graves, que pouvait comporter l'intervention qui lui a été proposée avec pose d'une bandelette de type « TVT » ; que ce défaut d'information a constitué une faute susceptible d'engager la responsabilité de l'établissement public dès lors qu'aucune urgence n'empêchait qu'une telle information soit délivrée à la patiente ; que, toutefois, même si elle a subi des souffrances physiques importantes fixées par l'expert à 4 sur une échelle de 1 à 7, les troubles de la miction et les infections urinaires dont Mme X s'est plainte ne sont à l'origine pour elle d'aucune invalidité ; que, par suite, le risque de décès ou d'invalidité justifiant l'information de la patiente ne s'étant pas réalisé, la faute commise par le centre hospitalier en ne délivrant pas l'information à laquelle il était tenu n'est à l'origine pour Mme X d'aucun préjudice indemnisable ; qu'au surplus, la requérante ne soutient pas que, si elle avait été informée du risque de complications qu'elle courait du fait de l'intervention qui lui a été proposée, elle aurait renoncé à celle-ci ou opté pour un autre type de thérapie, à supposer qu'il en existât ; que, par suite, elle n'est pas davantage fondée à rechercher la responsabilité de l'assistance publique des hôpitaux de Marseille pour défaut d'information et de consentement éclairé ;
Considérant, par suite, que, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, aucun droit à réparation ne peut être reconnu à Mme X à raison des soins reçus au centre hospitalier Salvador à Marseille ; que les conclusions de la requérante tendant à la majoration de l'indemnisation qui lui a été accordée par les premiers juges doivent, dans ces conditions, être rejetées tandis qu'il y a lieu de faire droit aux conclusions incidentes par lesquelles l'assistance publique de Marseille demande à la Cour d'annuler les articles 1er et 2 du jugement du 18 juillet 2006 par lesquels le Tribunal administratif de Marseille l'a condamnée à verser à Mme X la somme de 5 000 euros en réparation de ses préjudices et la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de prononcer l'annulation de l'article 3 du même jugement par lequel le tribunal a mis à la charge de l'assistance publique de Marseille les frais d'expertise ;
Sur les conclusions de Mme X tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de cet article s'opposent à ce que soit mise à la charge de l'assistance publique de Marseille, qui n'est pas la partie perdante, la somme que Mme X demande en remboursement des frais qu'elle a exposés ;
DECIDE :
Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement en date du 18 juillet 2006 du Tribunal administratif de Marseille sont annulés.
Article 2 : La demande de Mme X présentée au Tribunal administratif de Marseille et ses conclusions d'appel sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Jacqueline X, à l' assistance publique des hôpitaux de Marseille, à la mutualité sociale agricole du Var et au ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.
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N° 06MA02741