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17/02/2015 | FRANCE | N°14VE03261

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 17 février 2015, 14VE03261


Vu la requête, enregistrée le 28 novembre 2014, présentée pour la société SYSTEMES MOTEURS SAS, dont le siège est au Parc Ariane IV, 7 avenue du 8 mai 1945, à Guyancourt (78280), par la Selarl Orion avocats et conseils ;

La société SYSTEMES MOTEURS SAS demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1404705 du 30 septembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a annulé, à la demande du syndicat CGT Mark IV automotive et autres, la décision en date du 22 avril 2014 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la cons

ommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Alsace a homologué son docu...

Vu la requête, enregistrée le 28 novembre 2014, présentée pour la société SYSTEMES MOTEURS SAS, dont le siège est au Parc Ariane IV, 7 avenue du 8 mai 1945, à Guyancourt (78280), par la Selarl Orion avocats et conseils ;

La société SYSTEMES MOTEURS SAS demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1404705 du 30 septembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a annulé, à la demande du syndicat CGT Mark IV automotive et autres, la décision en date du 22 avril 2014 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Alsace a homologué son document unilatéral ;

2° de rejeter la demande présentée par le syndicat CGT Mark IV automotive et autres devant le Tribunal administratif de Versailles ;

3° de mettre à la charge solidaire du syndicat CGT Mark IV automotive et des autres intimés la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le jugement du 30 septembre 2014 est irrégulier en tant qu'il est intervenu après l'expiration du délai de trois mois fixé à l'article L. 1235-7-1 du code du travail ;

- le jugement attaqué est par ailleurs mal fondé car il s'appuie sur une interprétation des dispositions de l'article L. 1233-5 du code du travail qui n'est plus applicable depuis l'intervention de la loi du 14 juin 2013 sur la sécurisation de l'emploi qui permet à l'employeur, même dans le cadre d'un document unilatéral, de fixer le niveau pertinent d'application des critères définissant l'ordre des licenciements dans un plan de sauvegarde de l'emploi ;

- la procédure d'homologation de son document unilatéral a été régulière ;

- la décision du 22 avril 2014 est suffisamment motivée ;

- le document unilatéral n'avait pas à être soumis pour avis au comité central d'entreprise ;

- si le calendrier de consultation des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail qui figure dans l'accord de méthode signé avec les organisations syndicales représentatives n'a pas été respecté, les comités d'établissement ont pu être éclairés par les avis des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et se sont par conséquent prononcés régulièrement ;

- aucune disposition n'imposait que les éléments de réponse transmis par elle en réponse aux observations de la DIRECCTE fussent portés à la connaissance des membres du comité d'entreprise avant la fin de la procédure d'information-consultation et en tout état de cause, ces éléments ont été portés à la connaissance des représentants du personnel à l'occasion des dernières réunions des comités d'entreprise et d'établissement ;

- les catégories professionnelles ont été définies régulièrement et il a été tenu compte des observations de la DIRECCTE sur ce point ;

- il n'y avait pas lieu de saisir la commission nationale paritaire instituée par la convention collective de la plasturgie ;

- le plan de sauvegarde de l'emploi est suffisant au regard des moyens du groupe ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 février 2015 :

- le rapport de M. Meyer, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Rollet-Perraud, rapporteur public,

- les observations de Me D...de la Selarl Orion avocats et conseils, pour la société SYSTEMES MOTEURS SAS,

- les observations de MeB..., substituant MeA..., pour le syndicat CGT Mark IV automotive et autres,

- et les observations de M.C..., représentant le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social ;

1. Considérant qu'à l'issue d'une négociation infructueuse tendant à la signature d'un accord collectif majoritaire relatif à un plan de sauvegarde de l'emploi destiné à sauvegarder sa compétitivité, la société SYSTEMES MOTEURS SAS a saisi le 11 avril 2014 la DIRECCTE d'Alsace d'une demande tendant à l'homologation d'un document unilatéral portant sur ce plan de sauvegarde de l'emploi ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que l'article L. 1235-7-1 du code du travail dispose que : " L'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1, le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi, les décisions prises par l'administration au titre de l'article L. 1233-57-5 et la régularité de la procédure de licenciement collectif ne peuvent faire l'objet d'un litige distinct de celui relatif à la décision de validation ou d'homologation mentionnée à l'article L. 1233-57-4. Ces litiges relèvent de la compétence, en premier ressort, du tribunal administratif, à l'exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux. Le recours est présenté dans un délai de deux mois par l'employeur à compter de la notification de la décision de validation ou d'homologation, et par les organisations syndicales et les salariés à compter de la date à laquelle cette décision a été portée à leur connaissance conformément à l'article L. 1233-57-4. Le tribunal administratif statue dans un délai de trois mois. Si, à l'issue de ce délai, il ne s'est pas prononcé ou en cas d'appel, le litige est porté devant la cour administrative d'appel, qui statue dans un délai de trois mois. Si, à l'issue de ce délai, elle ne s'est pas prononcée ou en cas de pourvoi en cassation, le litige est porté devant le Conseil d'Etat. Le livre V du code de justice administrative est applicable. " ; que la demande des intimés tendant à l'annulation de la décision du 22 avril 2014 par laquelle le DIRECCTE d'Alsace a homologué le document unilatéral de la société SYSTEMES MOTEURS SAS a été enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Strasbourg le 20 juin 2014 ; que ce dossier a été transmis au Tribunal administratif de Versailles en application d'une ordonnance prise le 23 juin 2014 par le président du Tribunal administratif de Strasbourg ; que le greffe du Tribunal administratif de Versailles a enregistré ce dossier le 1er juillet 2014 ; que les dispositions ci-dessus rappelées du code du travail imposent que la juridiction du premier degré saisie d'une demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle l'administration du travail a homologué un document unilatéral relatif à un plan de sauvegarde de l'emploi statue dans un délai fixe de trois mois qui ne peut connaître aucune prorogation et qui est prescrit à peine de dessaisissement au profit de la cour administrative d'appel territorialement compétente ; que, toutefois, ce délai ne commence à courir qu'à la date à laquelle la juridiction territorialement compétente a, elle-même, enregistré la demande contentieuse ; qu'ainsi, en statuant le 30 septembre 2014, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a respecté les dispositions de l'article L. 1235-7-1 du code du travail ;

Sur le fond et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1233-58 du code du travail : " I. En cas de redressement ou de liquidation judiciaire, l'employeur, l'administrateur ou le liquidateur, selon le cas, qui envisage des licenciements économiques, met en oeuvre un plan de licenciement dans les conditions prévues aux articles L. 1233-24-1 à L. 1233-24-4 (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-24-2 du même code : " L'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 porte sur le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63. Il peut également porter sur : 1° Les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise ; 2° La pondération et le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements mentionnés à l'article L. 1233-5 ; 3° Le calendrier des licenciements ; 4° Le nombre de suppressions d'emploi et les catégories professionnelles concernées ; 5° Les modalités de mise en oeuvre des mesures de formation, d'adaptation et de reclassement prévues aux articles L. 1233-4 et L. 1233-4-1. " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-24-4 du même code : " A défaut d'accord mentionné à l'article L. 1233-24-1, un document élaboré par l'employeur après la dernière réunion du comité d'entreprise fixe le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi et précise les éléments prévus aux 1°) à 5°) de l'article L. 1233-24-2, dans le cadre des dispositions légales et conventionnelles en vigueur " ; que l'article L. 1233-57-1 du code du travail prévoit que : " L'accord collectif majoritaire mentionné à l'article L. 1233-24-1 ou le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4 sont transmis à l'autorité administrative pour validation de l'accord ou homologation du document. " ; et qu'enfin l'article L. 1233-57-3 du même code dispose que : " En l'absence d'accord collectif ou en cas d'accord ne portant pas sur l'ensemble des points mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié la conformité de son contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles relatives aux éléments mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise et, le cas échéant, du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et de l'instance de coordination mentionnée à l'article L. 4616-1, le respect, le cas échéant, des obligations prévues aux articles L. 1233-57-9 à L. 1233-57-16, L. 1233-57-19 et L. 1233-57-20 et le respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 en fonction des critères suivants : 1° Les moyens dont disposent l'entreprise, l'unité économique et sociale et le groupe ; 2° Les mesures d'accompagnement prévues au regard de l'importance du projet de licenciement ; 3° Les efforts de formation et d'adaptation tels que mentionnés aux articles L. 1233-4 et L. 6321-1. (...) " ;

4. Considérant que le document unique, qui a été homologué par la décision du

22 avril 2014 de la DIRECCTE d'Alsace, prévoit à la page 20 de procéder, pour l'application des critères de définition de l'ordre des licenciements, au niveau de chaque établissement impacté par les suppressions d'emplois appartenant à la société SYSTEMES MOTEURS SAS sur le territoire national ; que toutefois la définition d'un tel périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements à un niveau inférieur à celui de l'entreprise n'est envisageable que dans le cadre d'un accord collectif, les dispositions précitées des articles L. 1233-24-2 et L. 1233-24-4 du code du travail dans leur rédaction issue de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi, éclairées par les travaux préparatoires, n'ayant pas entendu remettre en cause un tel principe ; que si le principe de l'application des critères d'ordre des licenciements a été accepté par les organisations syndicales dans le cadre de la négociation d'un accord collectif majoritaire, ces négociations ont finalement échoué ; que, par suite, à défaut d'un accord collectif signé, l'administration du travail, en homologuant ce document unilatéral, dont un des éléments, mentionné au 2° de l'article L. 1233-24-2 du code du travail, n'est pas conforme à une disposition législative, a méconnu les dispositions de l'article L. 1233-57-3 du même code ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société SYSTEMES MOTEURS SAS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a annulé la décision du 22 avril 2014 ;

Sur les conclusions présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge des intimés qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, le versement de la somme que demande la société SYSTEMES MOTEURS SAS au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la société SYSTEMES MOTEURS SAS une somme totale de 2 000 euros à verser aux intimés en application de ces dispositions ; qu'il n'y a pas lieu, en revanche, de mettre à ce titre une somme à la charge de l'Etat ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société SYSTEMES MOTEURS SAS est rejetée.

Article 2 : La société SYSTEMES MOTEURS SAS versera au syndicat CGT Mark IV automotive, à l'union départementale Force Ouvrière du Haut-Rhin, à Mme F... et à M. E... une somme totale de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 14VE03261


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE03261
Date de la décision : 17/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-03 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour motif économique.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: M. Emmanuel MEYER
Rapporteur public ?: Mme ROLLET-PERRAUD
Avocat(s) : BOURGUN et DORR

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2015-02-17;14ve03261 ?
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