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09/04/2019 | FRANCE | N°18LY01295

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 09 avril 2019, 18LY01295


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du préfet de la Loire du 11 mai 2017 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignant le pays de destination.

Par un jugement n° 1705234 du 6 mars 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 9 avril 2018, MmeB..., représentée par Me E..., dem

ande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 6 mars 2018 du tribunal administratif de Lyon ;

...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du préfet de la Loire du 11 mai 2017 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignant le pays de destination.

Par un jugement n° 1705234 du 6 mars 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 9 avril 2018, MmeB..., représentée par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 6 mars 2018 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler ces décisions du 11 mai 2017 du préfet de la Loire ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'au réexamen de sa demande, et ce, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son avocat d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée, notamment sur l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnait les dispositions de l'article L. 313-11, 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus d'admission au séjour ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 mars 2019, le préfet de la Loire conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens présentés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord du 9 octobre 1987 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Chevalier-Aubert, présidente-assesseure ;

Considérant ce qui suit :

1. MmeB..., ressortissante marocaine née le 26 novembre 1963, est entrée en France le 16 août 2010 et a bénéficié jusqu'au 29 mars 2016 de titres de séjour " vie privée et familiale " en raison de son état de santé. Par des décisions du 11 mai 2017, le préfet de la Loire lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays de destination. Mme B...relève appel du jugement du tribunal administratif de Lyon du 6 mars 2018 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions du 11 mai 2017.

Sur la légalité de la décision portant refus de séjour :

2. La décision en litige comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui la fondent notamment au regard de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

3. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. (...) ".

4. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant devant le tribunal des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

5. Il ressort des pièces du dossier que le médecin de l'agence régionale de santé, saisi sur la demande de titre de séjour de l'intéressée, a, dans son avis du 5 juillet 2016, estimé que l'état de santé de Mme B...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'un traitement approprié existe en tout état de cause dans le pays d'origine. Mme B...se bornait à produire en première instance des certificats médicaux des années 2010 et 2011. Aucun de ces certificats anciens ni les documents produits en appel qui ne portent que sur la disponibilité des soins ne remettent en cause l'avis du médecin sur la gravité de son état de santé à la date de la décision en litige. Par suite, le préfet de la Loire n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

7. Si Mme B...fait valoir qu'elle réside en France depuis le 16 août 2010 et que ses parents et ses frères et soeurs y résident également et lui apportent une aide elle ne justifie pas que son état de santé nécessiterait une assistance quotidienne ou régulière dont elle ne pourrait pas bénéficier dans son pays d'origine. Par ailleurs, Mme B...qui est célibataire et n'a pas d'enfant à sa charge, n'allègue pas avoir une insertion professionnelle particulière en France ni être dépourvue de toutes attaches personnelles et familiales au Maroc, pays dans lequel elle a vécu jusqu'à l'âge de 46 ans. Dans ces circonstances, eu égard notamment à la durée et aux conditions du séjour en France de la requérante à la date de ce refus, celui-ci ne peut être regardé comme portant à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts poursuivis ni comme méconnaissant l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ce refus ne saurait davantage être regardé comme procédant, s'agissant de ses conséquences sur la situation personnelle de la requérante, d'une erreur manifeste d'appréciation.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

8. Il résulte de l'examen de la légalité du refus d'admission au séjour que Mme B...n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de ce refus à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français.

Sur la décision désignant le pays de destination :

9. En premier lieu, il résulte de l'examen de la légalité de la décision obligation de quitter le territoire français que Mme B...n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision désignant le pays de renvoi.

10. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " et ce dernier texte énonce que " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ".

11. MmeB..., en se bornant à faire état " de sa situation d'extrême fragilité, de précarité manifeste " et de son isolement en cas de retour dans son pays d'origine, n'établit pas l'existence de risques personnels et actuels en cas de retour dans ce pays. Par suite la décision en litige ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation des décisions du 11 mai 2017 du préfet de la Loire.

13. Le présent arrêt n'appelant aucune mesure d'exécution, les conclusions de Mme B... à fin d'injonction doivent être rejetées.

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il en soit fait application à l'encontre de l'Etat, qui n'est pas partie perdante.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Loire.

Délibéré après l'audience du 19 mars 2019, à laquelle siégeaient :

M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,

Mme Virginie Chevalier-Aubert, présidente assesseure,

Mme D...C..., première conseillère.

Lu en audience publique le 9 avril 2019.

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N° 18LY01295


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY01295
Date de la décision : 09/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: Mme Virginie CHEVALIER-AUBERT
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : BENAICHATA DJAMILA

Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-04-09;18ly01295 ?
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