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11/06/2025 | FRANCE | N°52500637

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 juin 2025, 52500637


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


JL10






COUR DE CASSATION
______________________




Arrêt du 11 juin 2025








Cassation partielle




Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président






Arrêt n° 637 F-B


Pourvoi n° S 24-13.083


Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [D].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassationr> en date du 18 janvier 2024.




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOC...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

JL10

COUR DE CASSATION
______________________

Arrêt du 11 juin 2025

Cassation partielle

Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 637 F-B

Pourvoi n° S 24-13.083

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [D].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 18 janvier 2024.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 11 JUIN 2025

M. [Z] [D], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° S 24-13.083 contre l'arrêt rendu le 10 mai 2023 par la cour d'appel de Nîmes (chambre civile, 5e chambre sociale PH), dans le litige l'opposant à la société La Flèche, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Filliol, conseiller, les observations de la SAS Hannotin Avocats, avocat de M. [D], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société La Flèche, après débats en l'audience publique du 13 mai 2025 où étaient présents Mme Capitaine, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Filliol, conseiller rapporteur, Mme Lacquemant, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 10 mai 2023), M. [D] a été engagé en qualité de conducteur routier le 19 juillet 2011 par la société La Flèche.

2. Il a été victime d'un accident du travail le 14 décembre 2016.

3. Aux termes d'une attestation de suivi individuel de l'état de santé du 29 mai 2017, le médecin du travail a indiqué : « Peut reprendre son travail. Affectation sur un poste avec transpalettes électriques nécessaire le premier mois. A revoir avec le médecin en charge de l'entreprise dans un mois. »

4. Le 26 juin 2017, le médecin du travail a déclaré le salarié apte, en précisant « sans port de charge supérieure à 10kg, tirer ou pousser une charge pendant 5 mois, sauf à l'aide d'un chariot électrique ».

5. A la suite de cet avis, le salarié qui exerçait ses fonctions sur le site de [Localité 4] a été affecté sur le site de [Localité 3].

6. Le 7 novembre 2017, le médecin du travail a déclaré le salarié apte à son poste.

7. Placé en arrêt de travail à compter du 22 novembre 2017, le salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail.

8. A l'issue d'un examen médical de reprise, le médecin du travail a déclaré le 16 avril 2018 le salarié inapte à son poste, en précisant que tout maintien du salarié dans son emploi serait gravement préjudiciable à sa santé.

9. Le salarié a été licencié le 31 mai 2018 pour inaptitude.

Examen des moyens

Sur le second moyen

10. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

11. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes de résiliation du contrat de travail, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité de préavis et de dommages- intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité et pour exécution déloyale du contrat de travail, alors « que manque à son obligation de sécurité l'employeur qui ne justifie pas qu'il a mis en oeuvre les mesures prescrites par le médecin du travail ; qu'il appartient à l'employeur d'un salarié exerçant des fonctions de livreur de vérifier que les lieux qu'il prévoit pour sa "tournée" sont équipés du matériel préconisé par le médecin du travail ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé qu'il résultait des protocoles de sécurité de six des lieux de livraison attribués au salarié que ceux-ci n'étaient pas équipés d'un transpalette électrique, constatant expressément que cela ne correspondait pas aux préconisations du médecin du travail ; qu'en décidant néanmoins, bien qu'ayant ainsi constaté que l'employeur ne s'était pas assuré que les lieux de livraison imposés à son salarié étaient bien tous équipés du matériel préconisé par le médecin du travail, qu'il n'aurait pas commis de manquement contractuel dès lors qu'il s'agissait de sociétés tierces et qu'il appartenait au salarié d'alerter son employeur sur ce point, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 1222-1, L. 4121-1, L. 4121-2 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 4121-1, L. 4624-3 et L. 4624-6 du code du travail, le premier dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010, les suivants dans leur rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 :

12. Aux termes du deuxième de ces textes, le médecin du travail peut proposer, par écrit et après échange avec le salarié et l'employeur, des mesures individuelles d'aménagement, d'adaptation ou de transformation du poste de travail ou des mesures d'aménagement du temps de travail justifiées par des considérations relatives notamment à l'âge ou à l'état de santé physique et mental du travailleur.

13. Aux termes du troisième, l'employeur est tenu de prendre en considération l'avis et les indications ou les propositions émis par le médecin du travail en application des articles L. 4624-2 à L. 4624-4. En cas de refus, l'employeur fait connaître par écrit au travailleur et au médecin du travail les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné suite.

14. Il résulte de la combinaison de ces textes que l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité, doit en assurer l'effectivité en prenant en considération les propositions de mesures individuelles d'aménagement, d'adaptation ou de transformation du poste de travail justifiées par des considérations relatives notamment à l'âge ou à l'état de santé physique et mental du travailleur que le médecin du travail est habilité à faire en application de l'article L. 4624-3 du code du travail.

15. Pour dire que l'employeur n'avait pas manqué à son obligation de sécurité, l'arrêt retient que l'employeur justifie que le site de [Localité 3] est équipé de chariots transpalettes électriques mis à la disposition du salarié, que le salarié invoque sans le démontrer, l'absence de quais de déchargement dans de nombreux magasins Intermarché faisant partie de sa tournée, que le salarié produit un protocole de sécurité concernant sept magasins Intermarché qui précise qu'un transpalette manuel est mis à la disposition du conducteur à l'exception d'un magasin disposant d'un transpalette électrique, ce qui ne correspond pas aux préconisations du médecin du travail, mais que s'agissant de sociétés tierces, clientes de l'employeur, ce dernier ne peut avoir connaissance de l'absence de transpalette électrique, si le chauffeur intervenant chez le client ne l'alerte pas sur ce point.

16. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que le médecin du travail avait préconisé l'aide d'un chariot électrique et que l'employeur, informé de cette préconisation, n'avait pas vérifié que les lieux dans lesquels le salarié effectuait sa tournée étaient équipés de ce matériel, ce dont il résultait que l'employeur avait manqué à son obligation de sécurité, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

17. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des dispositions de l'arrêt relatives à l'indemnité de préavis entraîne la cassation du chef de dispositif déboutant le salarié de sa demande de congés payés afférents à l'indemnité de préavis qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.

18. Le premier moyen ne formulant aucune critique contre les motifs de l'arrêt fondant la décision de débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, la cassation ne peut s'étendre à cette disposition de l'arrêt qui n'est pas dans un lien de dépendance nécessaire avec les dispositions de l'arrêt critiquées par ce moyen.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [D] de ses demandes de résiliation judiciaire du contrat de travail, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité de préavis et des congés payés afférents, de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité et en ce qu'il statue sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 10 mai 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;

Remet sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;

Condamne la société La Flèche aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société La Flèche et la condamne à payer à la SAS Hannotin Avocats la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé publiquement le onze juin deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52500637
Date de la décision : 11/06/2025
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Analyses

TRAVAIL REGLEMENTATION, SANTE ET SECURITE


Références :

Publié au bulletin

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 10 mai 2023


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 jui. 2025, pourvoi n°52500637


Composition du Tribunal
Président : Mme Capitaine (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer, SAS Hannotin Avocats

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:52500637
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