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08/04/2025 | FRANCE | N°C2500632

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 08 avril 2025, C2500632


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :


N° B 25-80.279 F-B


N° 00632




RB5
8 AVRIL 2025




REJET




M. BONNAL président,
















R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________




AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 8 AVRIL 2025






M. [K] [L] a for

mé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 5e section, en date du 8 janvier 2025, qui, dans la procédure d'extradition suivie contre lui à la demande du gouvernement américain, a rejeté ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° B 25-80.279 F-B

N° 00632

RB5
8 AVRIL 2025

REJET

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 8 AVRIL 2025

M. [K] [L] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 5e section, en date du 8 janvier 2025, qui, dans la procédure d'extradition suivie contre lui à la demande du gouvernement américain, a rejeté sa demande de mise en liberté.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de Mme Merloz, conseiller référendaire, les observations de la SAS Zribi et Texier, avocat de M. [K] [L], et les conclusions de M. Dureux, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Merloz, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Le 23 octobre 2024, M. [K] [L] a été arrêté en exécution d'une demande d'arrestation provisoire décernée par le gouvernement des Etats-Unis d'Amérique aux fins de l'exercice de poursuites pénales, sur le fondement d'un mandat d'arrêt décerné le 22 octobre 2024 pour des faits qualifiés de fraude électronique et vol d'identité aggravé, punis respectivement de vingt ans et deux ans d'emprisonnement.

3. Le 25 octobre 2024, le procureur général a notifié la demande d'arrestation provisoire à M. [L], qui a été placé sous écrou extraditionnel.

4. La demande d'extradition est parvenue au ministère de l'Europe et des affaires étrangères le 18 décembre 2024.

5. Par déclaration reçue au greffe le 26 décembre suivant, M. [L] a formé une demande de mise en liberté.

6. La demande d'extradition a été notifiée à M. [L] le 6 janvier 2025.

7. M. [L] n'a pas consenti à son extradition.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche, et les deuxième et troisième moyens

8. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Sur le premier moyen, pris en ses autres branches

Enoncé du moyen

9. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté la demande de mise en liberté de M. [L], alors :

« 2°/ que toute personne arrêtée doit être informée, dans le plus court délai et dans une langue qu'elle comprend, des raisons de son arrestation et de toute accusation portée contre elle ; que tout accusé a droit notamment à: être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu'il comprend et d'une manière détaillée, de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui ; qu'il résulte de ce texte qu'une personne placée sous écrou extraditionnel, doit connaître dans les plus brefs délais, les raisons de sa demande d'extradition ; que cela implique que le parquet lui transmette les éléments relatifs à sa demande d'extradition, qui lui permettent de comprendre les raisons de son arrestation et de sa détention, ainsi que les accusations portées à son encontre dans les plus brefs délais à compter de la date à laquelle il les reçoit ; que la seule information de l'existence d'une demande d'arrestation provisoire, non accompagnée d'éléments suffisants quant à la raison de cette arrestation et la cause de l'accusation portée contre lui par l'Etat requérant ne saurait suppléer à cette absence de transmission ; qu'en jugeant le contraire, la chambre de l'instruction a méconnu les articles 5 et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

3°/ que toute personne arrêtée doit être informée, dans le plus court délai et dans une langue qu'elle comprend, des raisons de son arrestation et de toute accusation portée contre elle ; que tout accusé a droit notamment à être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu'il comprend et d'une manière détaillée, de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui ; que dès lors, une personne placée sous écrou extraditionnel, doit connaître dans les plus brefs délais, les raisons de sa demande d'extradition ; que cela implique que le parquet lui transmette les éléments relatifs à sa demande d'extradition, qui lui permettent de comprendre les raisons de son arrestation et de sa détention, ainsi que les accusations portées à son encontre dans les plus brefs délais à compter de la date à laquelle il les reçoit ; que la seule information de l'existence d'une demande d'arrestation provisoire, non accompagnée d'éléments suffisants quant à la raison de cette arrestation et la cause de l'accusation portée contre lui par l'Etat requérant ne saurait suppléer à cette absence de transmission ; qu'en jugeant que M. [L] avait dès le 25 octobre 2024 était informé par le parquet général de la demande d'arrestation provisoire préfigurant la demande d'extradition et de ses droits en matière de défense, pour en déduire qu'il était informé à court délai des raisons de son arrestation et de toute accusation portée contre lui, sans mieux s'expliquer sur les informations qui lui avaient été transmises à cette occasion, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 5 et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

4°/ que toute personne arrêtée doit être informée, dans le plus court délai et dans une langue qu'elle comprend, des raisons de son arrestation et de toute accusation portée contre elle ; que le placement sous écrou extraditionnel est une arrestation au sens de l'article 5 CESDH ; qu'en jugeant au contraire que M. [L] « n'était pas arrêté au sens de ces dispositions conventionnelles », la chambre de l'instruction a méconnu les articles 5 et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

5°/ que, toute personne arrêtée doit être informée, dans le plus court délai et dans une langue qu'elle comprend, des raisons de son arrestation et de toute accusation portée contre elle ; que M. [L], qui a fait l'objet d'un placement sous écrou extraditionnel le 25 octobre 2024, ne s'est vu transmettre que le 6 janvier 2025 les pièces relatives à la demande d'extradition lui permettant de comprendre les raisons de son arrestation et de l'accusation portée contre lui ; qu'en considérant qu'il avait été informé dans le plus court délai des raisons de son arrestation et de toute accusation portée contre lui, la chambre de l'instruction a violé les articles 5 et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour

10. Pour rejeter le moyen pris de l'absence de notification à M. [L] des raisons de sa détention dans le plus court délai, exigé par les articles 5, § 2, et 6, § 3, de la Convention européenne des droits de l'homme et rejeter sa demande de mise en liberté, l'arrêt attaqué énonce que la demande d'extradition est parvenue le 18 décembre 2024 au ministère de l'Europe et des affaires étrangères, accompagnée des pièces requises par l'article 10 du Traité bilatéral d'extradition entre la France et les Etats-Unis, soit dans le délai de soixante jours exigé par l'article 13 dudit traité, et qu'elle est parvenue au ministère de la justice le 20 décembre suivant qui l'a transmise au procureur général le 23 décembre.

11. Les juges observent que le procureur général, qui a reçu la demande d'extradition le 31 décembre 2024, a convoqué M. [L] et son avocat le 2 janvier 2025 pour la notification de la demande d'extradition fixée le 6 janvier suivant.

12. Ils relèvent que, lors de cette comparution, M. [L] a été informé de la demande d'extradition et des pièces annexées et que son avocat a eu accès au dossier de la procédure d'extradition.

13. Ils en déduisent que la demande d'extradition a été transmise avec une particulière promptitude, soit le jour même de sa réception par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères, puis par le ministère de la justice au procureur général qui l'a lui-même aussitôt traitée par une convocation quasi-immédiate aux fins de notification en tenant compte du délai nécessaire pour l'extraction de l'intéressé, de sorte qu'aucune négligence dans le traitement de la demande d'extradition ne ressort du dossier de la procédure.

14. Ils ajoutent que M. [L] a fait l'objet, le 23 octobre 2024, d'une demande d'arrestation provisoire, préfigurant la demande d'extradition, qui lui a été notifiée, ainsi que ses droits, par le procureur général dès le 25 octobre 2024, de sorte qu'il a été informé, dans le plus court délai et dans une langue qu'il comprenait, des raisons de son arrestation et de toute accusation portée contre lui au sens des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme.

15. En l'état de ces seules énonciations, la chambre de l'instruction a fait l'exacte application des textes visés au moyen pour les motifs qui suivent.

16. En premier lieu, il résulte des pièces de la procédure, dont la Cour de cassation a le contrôle, que l'intéressé, arrêté le 23 octobre 2024 à 16 heures 35 sur le fondement d'une demande d'arrestation provisoire, en application des articles 13 du Traité bilatéral d'extradition entre la France et les Etats-Unis et 696-23 du code de procédure pénale, a été placé en rétention judiciaire et a été informé, à 17 heures, de l'objet de la demande et de ses droits, conformément aux articles 63-1 à 63-7 du code de procédure pénale, avant d'en recevoir lecture intégrale à 20 heures 30. Puis, il a été présenté au procureur général le 25 octobre suivant, à 10 heures 20, qui lui a notifié la demande d'arrestation provisoire, mentionnant la date des faits, leur qualification, les textes d'incrimination et les peines encourues, ainsi que ses droits, de sorte que l'intéressé a reçu des informations suffisantes quant aux raisons de son arrestation et de sa détention, dans le plus court délai, au sens de l'article 5, § 2, de la Convention européenne des droits de l'homme.

17. En second lieu, dès lors que l'intéressé a été informé, dans un tel délai, des raisons fondant la demande d'arrestation provisoire, préalable à la demande d'extradition, le procureur général n'était pas tenu de lui notifier la demande d'extradition avec cette même exigence de célérité.

18. Ainsi, le moyen, inopérant en sa quatrième branche, qui critique un motif erroné mais surabondant, et en sa cinquième branche, doit être écarté.

19. Par ailleurs, l'arrêt a été rendu par une chambre de l'instruction compétente et composée conformément à la loi, et la procédure est régulière.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du huit avril deux mille vingt-cinq.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : C2500632
Date de la décision : 08/04/2025
Sens de l'arrêt : Rejet

Analyses

EXTRADITION - Chambre de l'instruction - Détention extraditionnelle - Durée - Délai raisonnable - Appréciation - Diligences suffisantes dans la conduite de la procédure d'extradition - Information dans le plus court délai des raisons de l'arrestation provisoire - Notification ultérieure de la demande d'extradition

CONVENTION DE SAUVEGARDE DES DROITS DE L'HOMME ET DES LIBERTES FONDAMENTALES - Article 5 - Droit à la liberté et à la sûreté - Privation - Cas - Détention - Détention extraditionnelle - Durée - Délai raisonnable - Appréciation - Diligences suffisantes dans la conduite de la procédure d'extradition - Information dans le plus court délai des raisons de l'arrestation provisoire - Notification ultérieure de la demande d'extradition

N'encourt pas la censure l'arrêt de la chambre de l'instruction qui rejette le moyen pris de l'absence de notification à la personne faisant l'objet d'une demande d'arrestation provisoire aux fins d'extradition des raisons de sa détention dans le plus court délai, au sens de l'article 5, § 2, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'il résulte des pièces de la procédure, dont la Cour de cassation a le contrôle, que l'intéressé, a été placé en rétention judiciaire dès son interpellation au cours de laquelle il a été informé de l'objet de la demande et de ses droits, conformément aux articles 63-1 à 63-7 du code de procédure pénale, puis que le procureur général lui a notifié la demande d'arrestation provisoire, mentionnant la date des faits, leur qualification, les textes d'incrimination et les peines encourues, ainsi que ses droits. Dès lors que l'intéressé a été informé, dans le plus court délai, des raisons fondant la demande d'arrestation provisoire, préalable à la demande d'extradition, le procureur général n'était pas tenu de lui notifier la demande d'extradition avec cette même exigence de célérité


Références :

Sur le numéro 1 : Articles 5, § 2, et 6, § 3, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

articles 63-1 à 63-7 du code de procédure pénale.
Publié au bulletin

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 08 janvier 2025

A rapprocher :Crim., 5 octobre 2016, pourvoi n° 16-84669, Bull. crim. 2016, n° 262 (cassation sans renvoi)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 08 avr. 2025, pourvoi n°C2500632


Composition du Tribunal
Président : M. Bonnal
Avocat(s) : SAS Zribi et Texier

Origine de la décision
Date de l'import : 29/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:C2500632
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