LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
MB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 15 janvier 2025
Cassation
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 23 F-D+B
Pourvoi n° J 22-24.016
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 15 JANVIER 2025
M. [E] [W], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° J 22-24.016 contre l'arrêt rendu le 15 novembre 2022 par la cour d'appel de Poitiers (1re chambre civile), dans le litige l'opposant à la société Tersen, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Boutié, conseiller référendaire, les observations de la SAS Hannotin Avocats, avocat de M. [W], de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de la société Tersen, et l'avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l'audience publique du 19 novembre 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Boutié, conseiller référendaire rapporteur, Mme Schmidt, conseiller doyen, et Mme Sezer, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 15 novembre 2022), le 29 juin 2021, M. [W], ingénieur agronome, exerçant une activité de « conseil pour les affaires et autres conseils de gestion » a assigné devant un tribunal judiciaire la société Tersen en paiement de prestations de conseil qu'il soutient lui avoir fournies en vue d'améliorer la performance des produits que cette société commercialise.
2. La société Tersen a soulevé une exception d'incompétence au profit de la juridiction commerciale.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa troisième branche
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches
Enoncé du moyen
4. M. [W] fait grief à l'arrêt d'accueillir cette exception d'incompétence, alors :
« 1°/ que le tribunal de commerce dispose d'une compétence d'exception en particulier en cas de contestation relative aux engagements entre commerçants ; qu'est considéré comme commerçant celui qui, d'une part, exerce des actes de commerce et qui, d'autre part, fait de ces actes de commerce sa profession habituelle ; qu'au cas présent, pour retenir la compétence d'attribution du tribunal de commerce d'Angers, la cour d'appel a retenu que l'inscription de M. [W] au répertoire SIRENE n'excluait pas la qualité de commerçant et que le litige avait pour objet un acte de commerce dès lors que les prestations litigieuses avaient été ¿¿réalisées à la demande de la société Tersen'', c'est-à-dire d'un commerçant ; qu'en s'appuyant sur de tels éléments, impropres à qualifier l'existence d'un acte de commerce, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 121-1 et L. 721-3 du code de commerce, ensemble l'article 33 du code de procédure civile ;
2°/ que le tribunal de commerce dispose d'une compétence d'exception en particulier en cas de contestation relative aux engagements entre commerçants ; qu'est considéré comme commerçant celui qui, d'une part, exerce des actes de commerce et qui, d'autre part, fait de ces actes de commerce sa profession habituelle ; qu'au cas présent, pour retenir la compétence d'attribution du tribunal de commerce d'Angers, la cour d'appel a retenu que l'inscription de M. [W] au répertoire SIRENE n'excluait pas la qualité de commerçant et que le litige avait pour objet un acte de commerce dès lors que les prestations litigieuses avaient été ¿¿réalisées à la demande de la société Tersen'', c'est-à-dire d'un commerçant ; qu'en s'appuyant sur de tels éléments sans retenir d'élément de nature à caractériser que M. [W] faisait de la réalisation d'actes de commerce sa profession habituelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 121-1 et L. 721-3 du code de commerce, ensemble l'article 33 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 121-1 et L. 721-3, 1° du code de commerce :
5. Selon le premier de ces textes, sont commerçants ceux qui exercent des actes de commerce et en font leur profession habituelle. Selon le second, les tribunaux de commerce connaissent des contestations relatives aux engagements entre commerçants.
6. L'attribution du numéro du « système d'identification entreprises » (Sirene) par l'Institut national de la statistique et des études économiques, qui n'est destiné qu'à l'identification de la société auprès des administrations et des personnes ou organismes énumérés à l'article 1er de la loi n° 94-126 du 11 février 1994, n'est pas en soi de nature à conférer la qualité de commerçant.
7. Pour retenir la qualité de commerçant de M. [W] et déclarer compétent le tribunal de commerce d'Angers, l'arrêt retient que l'inscription de celui-ci au répertoire Sirene, au titre d'une activité principale de conseil pour les affaires et autres conseil de gestion, n'exclut pas la qualité de commerçant et que le litige, qui est relatif au paiement de prestations dont M. [W] soutient qu'elles ont été réalisées à la demande de la société Tersen, porte sur un acte de commerce.
8. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser que M. [W] avait accompli des actes de commerce et en avait fait sa profession habituelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 novembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;
Condamne la société Tersen aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Tersen et la condamne à payer à M. [W] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé en l'audience publique du quinze janvier deux mille vingt-cinq et signé par Mme Schmidt, conseiller doyen en ayant délibéré, en remplacement de M. Vigneau président, empêché, le conseiller référendaire rapporteur et le greffier conformément aux dispositions des articles 452, 456 et 1021 du code de procédure civile.