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27/11/2024 | FRANCE | N°52401203

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 27 novembre 2024, 52401203


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


CZ






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 27 novembre 2024








Rejet




Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président






Arrêt n° 1203 F-D


Pourvoi n° D 22-22.838








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 NOVEMBRE 2024


La société Leni, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], venant aux droits de la société IS communication, a f...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CZ

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 27 novembre 2024

Rejet

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1203 F-D

Pourvoi n° D 22-22.838

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 NOVEMBRE 2024

La société Leni, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], venant aux droits de la société IS communication, a formé le pourvoi n° D 22-22.838 contre l'arrêt rendu le 15 septembre 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 8), dans le litige l'opposant à M. [S] [E], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Brinet, conseiller, les observations écrites de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de la société Leni, de la SARL Cabinet Briard, Bonichot et Associés, avocat de M. [E], et après débats en l'audience publique du 22 octobre 2024 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Brinet, conseiller rapporteur, M. Barincou, conseiller, et Mme Aubac, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 septembre 2022), M. [E] a été engagé en qualité de technico-commercial par la société Is communication, aux droits de laquelle vient la société Leni, le 3 janvier 2000. Il occupait en dernier lieu les fonctions de directeur services locations.

2. Licencié pour motif économique par la société Is communication le 13 juin 2017, le salarié a saisi la juridiction prud'homale en contestation de cette rupture.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. La société Leni fait grief à l'arrêt de la condamner au paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors :

« 1°/ que le périmètre du groupe à prendre en considération pour apprécier la cause économique d'un licenciement est l'ensemble des entreprises unies par le contrôle ou l'influence d'une entreprise dominante dans les conditions définies à l'article L. 2331-1 du code du travail ; qu'une filiale commune, dont le capital est partagé entre deux sociétés ou groupes de sociétés qui la gèrent sur un plan de stricte égalité, n'appartient à aucun groupe ; que pour dire que la société Is communication appartenait à un groupe, après avoir constaté qu'elle était cogérée par deux de ses associés, à savoir M. [K] et M. [D], et qu'elle partageait son capital social à parts égales entre la société Leni et la société International System [Localité 3], la cour d'appel a retenu que l'addition des parts que M. [K] détenait dans la société Is communication à titre personnel et en qualité de président de la société Leni atteignait 50 %, peu important qu'une partie des parts ait été détenue à titre personnel et l'autre en qualité de président de la société Leni, dès lors qu'était ainsi offerte à la société Leni, société dominante, la possibilité d'un pouvoir décisionnel effectif au sein de la société Is communication ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée, si l'addition des parts que M. [D] détenait dans la société Is communication à titre personnel et en qualité de gérant de la société International System [Localité 3] atteignait également 50 %, ce dont il se déduisait que les sociétés Leni et International System [Localité 3], propriétaires par moitié du capital de la société Is communication, géraient celle-ci de manière strictement égalitaire et, partant, que la société Is communication n'appartenait à aucun groupe, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-3 et L. 2331-1 du code de travail, le premier dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 ;

2°/ qu'en s'abstenant d'examiner les statuts de la société Is communication dont les articles 21 et 22 prévoyaient que les décisions collectives ordinaires étaient prises par les associés représentant plus de la moitié du capital social et les décisions extraordinaires par les associés représentant au moins les trois quart du capital social, ce dont il résultait, compte tenu de la répartition du capital, que toutes les décisions étaient prises par tous les associés et, par conséquent, que ni la société Leni ni la société International System [Localité 3] n'exerçaient une influence dominante sur la société Is communication, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-3 et L. 2331-1 du code de travail, le premier dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 ;

3°/ que le périmètre du groupe à prendre en considération pour apprécier la cause économique d'un licenciement est l'ensemble des entreprises unies par le contrôle ou l'influence d'une entreprise dominante dans les conditions définies à l'article L. 2331-1 du code du travail ; que pour dire que la société Is communication appartenait à un groupe, la cour d'appel a retenu que la réalité de l'influence dominante de la société Leni au sens du II de l'article L. 2331-1 du code du travail résultait du pouvoir décisionnel qu'elle avait mis en oeuvre ainsi que relaté par l'employeur lui même dans la lettre de licenciement dans laquelle il était rappelé que la société Leni, "notre actionnaire, a mis en place un pôle d'activités transversal au sein du groupe afin d'optimiser l'activité commerciale vis à vis de nos clients", évoquant donc la décision et l'action de la société Leni au bénéfice de l'activité commerciale de la société Is communication relativement à la création d'un pôle, que la consultation des documents issus du site internet de la société Leni France confortait la réalité de la domination de cette dernière qui présentait les sept PME parmi lesquelles était citée la société Is Communication, composant son réseau, invitant à venir sur le stand Leni pour "nous retrouver", évoquant sous sa bannière "nos solutions" ou encore "nos logiciels" pour définir l'action des sociétés citées et que la faculté de transférer des salariés d'une société à l'autre résultait des propositions de reclassement offertes dans le cadre de la procédure de licenciement dont il n'était pas contesté qu'elles avaient toutes été faites dans la société Leni ; qu'en statuant par de tels motifs, impropres à caractériser l'influence dominante de la société Leni, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-3 et L. 2331-1 du code de travail, le premier dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 ;

4°/ que le juge doit se placer à la date du licenciement économique pour apprécier si l'employeur appartient à un groupe de sociétés ; qu'en retenant, pour dire que la société Is communication appartenait à un groupe de sociétés, que moins d'un an après le licenciement, la société Leni était devenue titulaire de la majorité des parts sociales de la société Is Communication, la cour d'appel a violé les articles L. 1233-2 et L. 1233-3 du code du travail, le second dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 ;

5°/ que les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner et analyser tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en se bornant à énoncer que l'attestation de l'un des gérants de la société employeur aux termes de laquelle une baisse d'activité de 13 % avait été enregistrée de juillet 2016 à mars 2017 par rapport à la période d'octobre 2015 à juin 2016 ne suffisait pas à établir la réalité du caractère significatif de cette baisse des commandes liée à la perte du marché public dit du Ministère des Affaires Étrangères dont la part dans la réalisation du chiffre d'affaires n'était pas autrement justifiée, la cour d'appel, qui a refusé d'examiner la liasse fiscale produite par l'employeur, a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

4. Il résulte de l'article L. 1233-3 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, que la cause économique d'un licenciement s'apprécie au niveau de l'entreprise ou, si celle-ci fait partie d'un groupe, au niveau du secteur d'activité du groupe dans lequel elle intervient. Le périmètre du groupe à prendre en considération à cet effet est l'ensemble des entreprises unies par le contrôle ou l'influence d'une entreprise dominante dans les conditions définies à l'article L. 2331-1 du code du travail.

5. Il incombe à l'employeur de démontrer, dans le périmètre pertinent, la réalité et le sérieux du motif invoqué.

6. D'abord, la cour d'appel a constaté, d'une part, que les quatre mille cinq cents parts sociales de la société Is communication étaient détenues, depuis le 28 juin 2013, à hauteur de deux mille deux cent quarante-quatre parts par la société international System [Localité 3], deux mille deux cent quarante-quatre parts par la société Leni et six parts par chacun des co-gérants, M. [D] et M. [K], d'autre part, que ce dernier ayant également la qualité de président de la société Leni, l'addition des parts qu'il détenait à titre personnel et en qualité de président de la société Leni atteignait 50%, ce qui conférait à cette dernière, société dominante, la possibilité d'un pouvoir décisionnel effectif au sein de la société Is communication.

7. Ensuite, elle a relevé que la réalité de l'influence dominante de la société Leni, détentrice de plus de 10 % du capital de la société Is communication, résultait du pouvoir décisionnel qu'elle avait mis en oeuvre, comme le relatait l'employeur dans la lettre de licenciement, rappelant que la société Leni, "notre actionnaire, a mis en place un pôle d'activités transversal au sein du groupe afin d'optimiser l'activité commerciale vis à vis de nos clients", évoquant ainsi la décision et l'action de la société Leni au bénéfice de l'activité commerciale de la société Is communication relativement à la création d'un pôle. Elle a ajouté que la consultation des documents issus du site internet de la société Leni France confortait la réalité de la domination de cette dernière qui présentait les sept PME parmi lesquelles était citée la société Is communication, composant son réseau, invitant à venir sur le stand Leni pour "nous retrouver", évoquant sous sa bannière "nos solutions" ou encore "nos logiciels" pour définir l'action des sociétés citées, ces éléments démontrant sa part active relativement aux décisions prises.

8. De ces constatations, dont il ressortait l'existence, entre les sociétés Leni France et Is communication, d'une situation d'influence dominante de la part de la première sur la seconde, la cour d'appel a pu déduire, abstraction faite des motifs critiqués par les quatrième et cinquième branches qui sont surabondants, que le périmètre d'appréciation de la cause économique se situait au niveau du groupe constitué dont la société Leni était dominante, et qu'aucune justification n'étant produite à cet égard, le licenciement économique motivé par les difficultés économiques et la nécessaire sauvegarde de la compétitivité de la seule société Is communication était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Leni aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Leni et la condamne à payer à M. [E] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept novembre deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52401203
Date de la décision : 27/11/2024
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 15 septembre 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 27 nov. 2024, pourvoi n°52401203


Composition du Tribunal
Président : Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Cabinet Briard, Bonichot et Associés, SARL Cabinet Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 03/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:52401203
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