LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
FM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 27 novembre 2024
Rejet
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 712 F-D
Pourvoi n° X 23-18.903
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 27 NOVEMBRE 2024
M. [G] [E], domicilié [Adresse 1], agissant en qualité d'ayant droit de [F] [E], décédé, et [L] [E], décédée, a formé le pourvoi n° X 23-18.903 contre l'arrêt rendu le 2 mai 2023 par la cour d'appel de Poitiers (2e chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ au directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône, dont le siège est [Adresse 3], agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques,
2°/ au directeur général des finances publiques, domicilié [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Alt, conseiller, les observations de la SAS Hannotin Avocats, avocat de M. [E], de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, et du directeur général des finances publiques, après débats en l'audience publique du 8 octobre 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Alt, conseiller rapporteur, M. Ponsot, conseiller doyen, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Poitiers , 2 mai 2023, RG n° 22/00196), afin de bénéficier d'une réduction d'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) en application de l'article 885-0 V bis du code général des impôts, [F] et [L] [E] ont joint à leurs déclarations d'ISF des années 2009 et 2010 une attestation de la société Finaréa Avenir PME certifiant qu'ils avaient investi une certaine somme dans le capital de cette société, se présentant comme une société holding animatrice de groupe.
2. Considérant que la société Finaréa Avenir PME n'avait pas cette qualité, de sorte que [F] et [L] [E] ne pouvaient prétendre à l'avantage en cause, l'administration fiscale leur a adressé une proposition de rectification.
3. Après rejet de leur réclamation contentieuse, [F] et [L] [E] ont assigné l'administration fiscale afin d'obtenir la décharge des impositions réclamées.
4. [F] et [L] [E] étant décédés en cours de procédure, M. [G] [E], qui vient à leurs droits, a repris l'instance.
Examen du moyen
Sur le moyen pris en sa seconde branche
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui est irrecevable.
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
6. M. [G] [E] fait grief à l'arrêt de rejeter toutes ses demandes alors que « que l'administration doit, si la demande lui en est faite et avant la mise en recouvrement, communiquer au contribuable l'ensemble des éléments fondant sa proposition de rectification : les éléments à charge comme les éléments à décharge, ceux ayant fondé les motifs de la proposition de rectification comme ceux ayant été considérés par l'administration mais n'ayant pas été retenus par elle dans sa motivation ; qu'au cas présent, le contribuable avait demandé à l'administration fiscale, avant la mise en recouvrement, la communication de son entier dossier, en ce compris les éléments recueillis par l'administration lors du contrôle des sociétés holdings Finaréa, contrôle qui avait conduit à délivrer des avis de non-redressement auxdites sociétés holdings ainsi qu'à les inviter à demander remboursement de crédits de TVA ; que les conclusions d'appel du contribuable rappelaient qu'il n'avait jamais été déféré à cette demande par l'administration ; qu'en réponse, la cour d'appel s'est contentée d'énoncer qu'en "sa qualité d'investisseur auprès de la société FINAREA, le contribuable avait accès à ces éléments" et que "dans de telles circonstances, il est constant que le contribuable connaissait la teneur des documents sur lesquels l'administration fiscale se fondait pour justifier de sa proposition de rectification" ; qu'en statuant ainsi, cependant que les principes de loyauté et du procès équitable imposent la communication par l'administration au contribuable qui en fait la demande y compris des éléments en sa possession qu'elle a choisi de ne pas viser mais qui sont susceptibles de jeter un jour nouveau ou simplement différent sur les faits de la cause, la cour d'appel a violé l'article L. 76 B du Livre des procédures fiscales, l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'article 6-1 de la CEDH, ensemble les principes de loyauté, du contradictoire, du respect des droits de la défense et du procès équitable. »
Réponse de la Cour
7. En premier lieu, la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne n'est pas applicable au présent litige, dès lors que l'ISF n'entre pas dans le champ d'application du droit de l'Union. Il en va de même de l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui n'est pas applicable au contentieux fiscal lorsque le contribuable se borne, comme en l'espèce, à contester le bien-fondé des suppléments d'impôt mis à sa charge sans présenter de contestation propre aux pénalités.
8. En second lieu, selon l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, l'administration fiscale est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition de rectification et communique, avant la mise en recouvrement, une copie de ces documents au contribuable qui en fait la demande.
9. L'obligation qui résulte de ce texte ne s'impose à l'administration que pour les seuls renseignements et documents effectivement utilisés pour fonder les rectifications, qu'elle a obtenus de tiers, dont le contribuable doit être informé avec une précision suffisante pour lui permettre de discuter utilement leur origine ou de demander qu'ils soient mis à sa disposition.
10. Ni ce texte ni l'obligation de loyauté dans l'établissement des impositions à laquelle l'administration fiscale est tenue ne lui imposent de mettre à la disposition du contribuable les documents qu'elle n'a pas retenus pour fonder les rectifications, afin de permettre à ce dernier d'apprécier si, parmi ces documents, figurent des éléments de nature à démontrer que l'imposition réclamée n'est pas due.
11. Par ailleurs, l'obligation qui résulte de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ne porte pas sur les documents rendus accessibles au public en vertu d'une obligation légale, lesquels ne doivent être mis à la disposition du contribuable que si celui-ci indique n'avoir pu y avoir accès.
12. L'arrêt énonce que la réponse de l'administration faite au contribuable était particulièrement motivée, en droit et en fait. En outre, il résulte des échanges qui s'en sont suivis, versés aux débats, entre l'administration fiscale et le contribuable, que ce dernier avait parfaitement saisi la teneur et la portée des griefs faits à l'égard de sa souscription au sein de la société Finaréa pour ne pas pouvoir prétendre à l'avantage fiscal recherché. De ces énonciations, constatations et appréciations, la cour d'appel a déduit à bon droit que la procédure était régulière.
13. Le moyen n'est donc fondé en aucune de ses branches.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [G] [E] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [G] [E] et le condamne à payer au directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques et du directeur général des finances publiques, la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept novembre deux mille vingt-quatre.