LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
FD
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 17 octobre 2024
Cassation
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 954 F-B
Pourvoi n° Z 22-13.473
Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de Mme [I].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 17 février 2022.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 17 OCTOBRE 2024
Mme [G] [I], domiciliée [Adresse 3], agissant en qualité de représentant légal de ses enfants [M] [L] né le 14 septembre 2006 et [N] [L] née le 3 avril 2012, a formé le pourvoi n° 22-13.473 contre l'arrêt rendu le 21 septembre 2021 par la cour d'appel de Grenoble (chambre sociale, protection sociale), dans le litige l'opposant à la caisse de mutualité sociale agricole Ardèche Drôme et Loire, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Dudit, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de Mme [I], agissant en qualité de représentant légal de ses enfants [M] et [N] [L], de la SCP Ohl et Vexliard, avocat de la caisse de mutualité sociale agricole Ardèche Drôme et Loire, et l'avis de Mme Tuffreau, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 11 septembre 2024 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Dudit, conseiller référendaire rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 21 septembre 2021), Mme [I] (la représentante légale) a adressé, le 19 avril 2016, à la caisse de mutualité sociale agricole d'Ardèche Drôme Loire (la caisse) une demande de versement du capital décès pour le compte de ses deux fils mineurs, à la suite du décès de leur père, [S] [L] (l'assuré), survenu le 14 novembre 2013.
2. Sa demande ayant été rejetée, la représentante légale a saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. La représentante légale fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande, alors « que selon les articles L. 332-1 et L. 361-1 du code de la sécurité sociale, l'action des ayants-droit pour le paiement du capital décès se prescrit par deux ans à compter du décès de l'assuré salarié ; la prescription ne court pas ou est suspendue contre les mineurs non émancipés, conformément à l'article 2235 du code civil ; qu'en l'espèce, dès lors qu'il est constant que les ayants-droit de l'assuré sont ses enfants mineurs, la prescription de l'action en paiement du capital versé en cas de décès d'un salarié se trouvait suspendue par la minorité de ses ayants droit ; qu'en déboutant la représentante légale de son action en paiement du capital décès, engagée plus de deux ans après le décès de l'assuré, au prétexte que ce délai est un délai administratif de forclusion, la cour d'appel a violé les articles L. 332-1 et L. 361-1 du code de sécurité sociale et les articles 2230, 2231 et 2235 du code civil .»
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 332-1, alinéa 2, du code de la sécurité sociale et 2235 du code civil, le premier dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015, le second dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, applicables au litige :
4. Aux termes du premier de ces textes, l'action des ayants droit de l'assuré pour le paiement du capital prévu à l'article L. 361-1 se prescrit par deux ans à partir du jour du décès.
5. Conformément au second, applicable en l'absence de disposition contraire, cette prescription abrégée est suspendue contre les mineurs non émancipés.
6. Pour débouter la représentante légale de son recours, l'arrêt retient en substance que le délai posé par l'article 332-1 est un délai administratif de forclusion qui ne peut être suspendu pour cause de minorité des ayants droit.
7. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 septembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon.
Condamne la caisse de mutualité sociale agricole d'Ardèche Drôme Loire aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la caisse de mutualité sociale agricole d'Ardèche Drôme Loire et la condamne à payer à la SARL [2] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept octobre deux mille vingt-quatre.