LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 10 octobre 2024
Rejet
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 543 F-D
Pourvoi n° W 22-24.395
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 OCTOBRE 2024
Mme [Z] [V], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° W 22-24.395 contre l'arrêt rendu le 16 septembre 2022 par la cour d'appel de Rennes (2e chambre), dans le litige l'opposant à M. [C] [L], domicilié [Adresse 1] (Maroc), défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Grall, conseiller, les observations de la SCP Boucard-Maman, avocat de Mme [V], de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de M. [L], après débats en l'audience publique du 10 septembre 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Grall, conseiller rapporteur, Mme Proust, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 16 septembre 2022), M. [L] (le bailleur) a donné des locaux à bail commercial à Mme [V] (la locataire).
2. Le bailleur ayant délivré à la locataire un commandement de payer un arriéré de loyers, elle l'a assigné en annulation de ce commandement et restitution d'un trop-perçu de loyers, et a sollicité au cours de la procédure une dispense intégrale du paiement de plusieurs échéances de loyers en raison de l'état de l'immeuble.
3. Se prévalant de deux baux verbaux portant sur des locaux d'habitation distincts du local commercial, le bailleur a sollicité, à titre reconventionnel, le paiement de l'intégralité des loyers échus pour l'ensemble des locaux.
Examen des moyens
Sur le premier moyen et sur le second moyen, pris en sa troisième branche
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le second moyen, pris en ses première et deuxième branches
Enoncé du moyen
5. La locataire fait grief à l'arrêt de la condamner à payer au bailleur une certaine somme au titre des loyers et charges impayés à la date du 31 mai 2022 et d'ordonner la capitalisation des intérêts, alors :
« 1°/ que le locataire est fondé à s'abstenir de payer les loyers dès lors que le bailleur manque à son obligation de délivrer un local conforme à sa destination, peu important que le locataire ne se soit pas trouvé dans l'impossibilité totale d'exploiter les lieux ; qu'au cas présent, pour condamner Mme [V] au paiement d'une somme de 251 705,70 euros au titre des loyers et charges impayés à la date du 31 mai 2022, la cour d'appel a retenu que la locataire ne pouvait invoquer l'exception d'inexécution pour la période comprise entre 2016 et 2020 dans la mesure où son établissement était demeuré ouvert jusqu'au 9 avril 2020, ce qui démontrait que l'exploitation du
fonds de commerce n'avait pas été rendue totalement impossible ; qu'en statuant ainsi, après avoir constaté que les manquements du bailleur avaient rendu les locaux impropres à leur destination, la cour d'appel a violé l'article 1719 du code civil ;
2°/ que le locataire peut opposer au bailleur l'exception d'inexécution quant au paiement des loyers, même si la violation de ses obligations par le bailleur n'a pas rendu l'exploitation des lieux totalement impossible ; qu'il est ainsi fondé à solliciter une réduction de sa dette locative si sa jouissance paisible des lieux a été troublée du fait de la violation, par le bailleur, de ses obligations contractuelles ; qu'au cas présent, pour condamner Mme [V] au paiement d'une somme de 251 705,70 euros au titre des loyers et charges impayés à la date du 31 mai 2022, la cour d'appel a retenu que la locataire ne pouvait invoquer l'exception d'inexécution pour la période comprise entre 2016 et 2020 dans la mesure où son établissement était demeuré ouvert jusqu'au 9 avril 2020, ce qui démontrait que l'exploitation du fonds de commerce n'avait pas été rendue totalement impossible ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, en sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble l'article 1719 du même code. »
Réponse de la Cour
6. Ayant souverainement retenu, par motifs propres et adoptés, que, nonobstant l'état de vétusté de la façade et de la couverture de l'immeuble constaté par l'expert judiciaire, la locataire avait été en mesure d'exploiter et d'occuper les locaux commerciaux donnés à bail jusqu'au 9 avril 2020, la cour d'appel, qui n'était pas saisie d'une demande de réduction de loyer mais seulement d'une demande de dispense intégrale du paiement des loyers, en a exactement déduit que la locataire ne pouvait se prévaloir de l'exception d'inexécution pour manquement du bailleur à ses obligations d'entretien et de réparation.
7. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme [V] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix octobre deux mille vingt-quatre.