LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 10 octobre 2024
Rejet
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 891 F-D
Pourvoi n° F 22-23.254
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 OCTOBRE 2024
Mme [W] [L] [F], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° F 22-23.254 contre l'arrêt rendu le 25 août 2022 par la cour d'appel de Papeete (chambre civile), dans le litige l'opposant à l'Association polyvalente d'actions judiciaires (APAJ), dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
L'Association polyvalente d'actions judiciaires (APAJ) a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation.
La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Chauve, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de Mme [F], de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de l'Association polyvalente d'actions judiciaires (APAJ), et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 4 septembre 2024 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Chauve, conseiller rapporteur, Mme Isola, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Papeete, 25 août 2022), l'Association polyvalente d'actions judiciaires (l'APAJ) a été désignée en qualité d'administrateur ad hoc des mineures [S] [X] et [P] [G] [X], victimes de viols et d'agressions sexuelles commis par leur père.
2. Ce dernier a été condamné à payer diverses sommes à ses filles par la juridiction pénale statuant sur l'action civile.
3. L'APAJ, ès qualités, a présenté une requête en indemnisation devant une commission d'indemnisation des victimes d'infractions (CIVI).
4. Le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions (FGTI) a accepté la demande d'indemnisation au principal.
5. L'APAJ, ès qualités, a saisi le juge des tutelles afin d'être autorisée, d'une part, à signer la transaction avec le FGTI, d'autre part, à signer une convention d'honoraires avec Mme [F] (l'avocate), qui l'avait représentée dans les diverses procédures.
Examen des moyens
Sur le moyen du pourvoi principal de l'avocate et le moyen du pourvoi incident de l'APAJ, qui sont identiques
Enoncé du moyen
6. L'avocate et l'APAJ font grief à l'arrêt de rejeter la demande présentée par cette dernière en vue d'être autorisée à signer une convention d'honoraires avec l'avocate, comprenant un honoraire de diligences et de résultat sur les sommes perçues par les mineures, alors :
« 1°/ que l'administrateur ad hoc ne peut sans l'autorisation du juge des tutelles, renoncer à un droit ; que l'aide juridictionnelle n'est accordée sans conditions de ressources aux mineurs que dans le cadre des instances pénales et non pas dans le cadre d'une demande non juridictionnelle d'indemnisation portée devant la commission d'indemnisation des victimes d'infraction, et qu'elle est retirée lorsque la décision passée en force de chose jugée a procuré au bénéficiaire des ressources excédant les plafonds d'admission à l'aide juridictionnelle ; que dès lors, les mineurs ne pouvant bénéficier de plein droit de l'aide juridique pour déposer une requête devant la commission d'indemnisation, la cour d'appel ne pouvait considérer que la décision de recourir, pour le dépôt de cette requête, à un avocat sans solliciter le bénéfice de l'aide juridictionnelle, aurait du être autorisée par le juge des tutelles préalablement à toute diligence de l'avocat ; qu'elle a ainsi violé l'article 387-1 du code civil et 9-1, 9-2 et 50, 3° de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
2°/ que la convention d'honoraires doit être préalable ; que tel est le cas lorsqu'elle intervient avant la décision ou la transaction devant servir partiellement de base au calcul des honoraires ; que la transaction portant sur l'indemnisation des mineures devant être autorisée par le juge des tutelles, la convention d'honoraires pouvait être régularisée tant que cette autorisation n'était pas intervenue ; qu'en jugeant qu'elle devait intervenir avant que l'avocat n'accomplisse ses diligences, la cour d'appel a violé l'article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971. »
Réponse de la Cour
7. Il résulte de l'article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 qu'aucun honoraire de résultat n'est dû s'il n'a pas été expressément stipulé dans une convention préalablement conclue entre l'avocat et son client.
8. L'arrêt relève que la convention d'honoraires porte sur un honoraire « fixe » pour les diligences devant le juge d'instruction et la cour d'assises française à hauteur de 10 % des indemnités allouées et encaissées au profit de chaque victime, soit 350 000 francs CFP pour chaque victime, soit 700 000 francs CFP, et un éventuel honoraire de résultat égal au montant des frais irrépétibles alloués et éventuellement encaissés.
9. Il constate encore que, par lettre du 3 juin 2020, le FGTI a indiqué accepter l'indemnisation de [P] [G] [X] et [S] [X] pour le montant demandé de 350 000 francs CFP chacune mais s'est opposé à l'allocation de la somme réclamée au titre des frais irrépétibles.
10. Le FGTI ayant donné son accord sur l'indemnisation des deux mineures avant la conclusion de la convention d'honoraires et celle-ci prévoyant un honoraire constitué par un pourcentage des indemnités que le FGTI avait accepté de verser, qui s'analysait nécessairement en un honoraire de résultat, la cour d'appel a rejeté à bon droit la demande d'autorisation de signer la convention d'honoraires, faute pour l'honoraire de résultat de présenter un caractère préalable.
11. Le moyen ne peut, dès lors, être accueilli.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE les pourvois ;
Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé et signé par le président en l'audience publique du dix octobre deux mille vingt-quatre et signé par Mme Cathala, greffier de chambre qui a assisté au prononcé de l'arrêt.