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18/09/2024 | FRANCE | N°52400924

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 septembre 2024, 52400924


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


FP6






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 18 septembre 2024








Cassation partielle




Mme MONGE, conseiller doyen faisant fonction de président






Arrêt n° 924 F-D




Pourvois n°
K 22-23.580
Q 22-23.584
Y 22-23.592
C 22-23.596
H 22-23.600
K 22-23.603
N 22-23.605 JONCTION







r> R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 SEPTEMBRE 2024




La société Rabot Dutilleul co...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

FP6

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 septembre 2024

Cassation partielle

Mme MONGE, conseiller doyen faisant fonction de président

Arrêt n° 924 F-D

Pourvois n°
K 22-23.580
Q 22-23.584
Y 22-23.592
C 22-23.596
H 22-23.600
K 22-23.603
N 22-23.605 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 SEPTEMBRE 2024

La société Rabot Dutilleul construction, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé les pourvois n° K 22-23.580, Q 22-23.584, Y 22-23.592, C 22-23.596, H 22-23.600, K 22-23.603 et N 22-23.605 contre sept arrêts rendus le 30 septembre 2022 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale), dans les litiges l'opposant respectivement :

1°/ à M. [V] [W], domicilié [Adresse 4],

2°/ à M. [D] [G], domicilié [Adresse 8],

3°/ à M. [U] [Z], domicilié [Adresse 3],

4°/ à M. [T] [C], domicilié [Adresse 7],

5°/ à M. [X] [H], domicilié [Adresse 2],

6°/ à M. [F] [B] [E], domicilié [Adresse 6],

7°/ à M. [Y] [I], domicilié [Adresse 5],

défendeurs à la cassation.

Les défendeurs ont formé des pourvois incident contre les mêmes arrêts.

La demanderesse aux pourvois principaux invoque, à l'appui de ses recours, quatre moyens communs de cassation.

Les demandeurs aux pourvois incidents invoquent, chacun, à l'appui de leur recours, un moyen commun de cassation.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de Mme Le Quellec, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Rabot Dutilleul construction, de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [W] et des six autres salariés, après débats en l'audience publique du 3 juillet 2024 où étaient présents Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Le Quellec, conseiller rapporteur, Mme Thomas-Davost, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article L. 431-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° K 22-23.580, Q 22-23.584, Y 22-23.592, C 22-23.596, H 22-23.600, K 22-23.603 et N 22-23.605 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon les arrêts attaqués (Douai, 30 septembre 2022), M. [W] et six autres salariés de la société Rabot Dutilleul construction ont saisi la juridiction prud'homale le 9 juin 2015 à l'effet d'obtenir la condamnation de leur employeur à leur payer un rappel de salaire au titre de la contrepartie au temps d'habillage et de déshabillage, des temps de douche et des frais d'entretien des tenues de travail.

Examen des moyens

Sur le premier moyen des pourvois principaux de l'employeur et le moyen des pourvois incidents des salariés

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le deuxième moyen des pourvois principaux

Enoncé du moyen

4. L'employeur fait grief aux arrêts de le condamner à chiffrer pour les salariés, dans la limite de la prescription quinquennale, la contrepartie financière due en fonction du temps de travail correspondant au temps d'habillage/déshabillage en début et en fin de service, comprenant en fin de service le temps de douche, soit 20 minutes par journée travaillée, et ce dans un délai de 30 jours à compter de la notification des décisions, de le condamner à leur payer cette somme à titre de rappel de salaire dans le délai de deux mois à compter de l'expiration de ce délai, de dire que ces sommes à caractère salarial porteront intérêts au taux légal à compter du jour où l'employeur a eu connaissance de leur demande, ce avec capitalisation, et de renvoyer les parties à la négociation collective pour l'application des décisions, alors « qu'aux termes de l'article R. 3121-2 du code du travail, ''en cas de travaux insalubres et salissants, le temps passé à la douche en application de l'article R. 4228-9 est rémunéré au tarif normal des heures de travail sans être pris en compte dans le calcul de la durée du travail effectif'' ; que l'article R. 4228-8 du même code indique que ''dans les établissements où sont réalisés certains travaux insalubres et salissants, des douches sont mises à la disposition des travailleurs. La liste de ces travaux ainsi que les conditions de mises à disposition des douches sont fixées par arrêté des ministres chargés du travail ou de l'agriculture et, en tant que de besoin, par le ministre chargé de la santé'' ; que selon l'arrêté du 23 juillet 1947 fixant les conditions dans lesquelles les douches doivent être mises à la disposition du personnel effectuant des travaux insalubres ou salissants, pris pour l'application de l'article R. 4228-8 du code du travail, ''les chefs d'établissements sont tenus de mettre des douches journalières à la disposition du personnel qui effectue les travaux énumérés aux tableaux I et II annexés au présent arrêté'' ; qu'il en résulte que seuls les salariés effectuant l'un des travaux insalubres et salissants énumérés au tableau I ou II de l'arrêté du 23 juillet 1947 peuvent prétendre à la rémunération du temps passé à la douche ; qu'en l'espèce, les arrêts attaqués énoncent qu'il n'était pas démontré que les salariés exécutaient des travaux énumérés par cet arrêté ; qu'en leur allouant cependant un rappel au titre du temps de douche, au prétexte qu'ils exécutaient généralement des travaux au caractère insalubre et salissant, et à titre exceptionnel avec un risque amiante, en particulier lorsqu'il s'agit de travaux de réhabilitation, et que ces travaux nécessitaient à l'évidence la prise d'une douche quotidienne dont le temps devait être payé au tarif normal des heures de travail, la cour d'appel a violé les textes susvisés. »

Réponse de la Cour

Vu les articles R. 3121-2 et R. 4228-8 du code du travail, le premier dans sa rédaction antérieure au décret n° 2016-1551 du 18 novembre 2016, et l'arrêté du 23 juillet 1947 :

5. Selon le premier de ces textes, en cas de travaux insalubres et salissants, le temps passé à la douche en application de l'article R. 4228-9 est rémunéré au tarif normal des heures de travail sans être pris en compte dans le calcul de la durée du travail effectif.

6. Aux termes du deuxième, dans les établissements où sont réalisés certains travaux insalubres et salissants, des douches sont mises à la disposition des travailleurs. La liste de ces travaux ainsi que les conditions de mises à disposition des douches sont fixées par arrêté des ministres chargés du travail ou de l'agriculture et, en tant que de besoin, par le ministre chargé de la santé.

7. Selon le dernier, les chefs d'établissements sont tenus de mettre des douches journalières à la disposition du personnel qui effectue les travaux énumérés aux tableaux I et II annexés.

8. Pour condamner l'employeur à chiffrer la contrepartie financière due aux salariés en fonction du temps de douche et à leur payer cette somme à titre de rappel de salaire, les arrêts retiennent qu'il n'est pas démontré que les salariés exécutent les travaux énumérés au tableau I annexé à l'arrêté du 23 juillet 1947 pour les ciments qui arrivent dans des bétonnières avant d'être utilisés dans des coffres qu'ils fabriquent à partir de banches, qu'il n'est pas plus démontré que les salariés exécutent les travaux occasionnels et poussiéreux exposant à l'amiante sauf, comme l'indique le médecin du travail, de manière exceptionnelle, des équipes de sous-traitants étant alors mises en place avec l'équipement adéquat.

9. Les arrêts ajoutent que néanmoins il est acquis que les salariés exécutent généralement des travaux au caractère insalubre et salissant et à titre exceptionnel avec un risque amiante, en particulier lorsqu'il s'agit de travaux de réhabilitation.

10. Les arrêts concluent que ces travaux nécessitent à l'évidence la prise d'une douche quotidienne dont le temps doit être payé au tarif normal des heures de travail, que les salariés ont par suite droit à une rémunération spécifique, sans qu'ils doivent apporter la preuve de la prise effective de la douche, qu'il importe peu que les salariés ne justifient pas de la prise de cette douche sur leur lieu de travail.

11. En statuant ainsi, alors qu'elle constatait que les salariés n'exécutaient pas l'un des travaux énumérés aux tableaux annexés à l'arrêté du 23 juillet 1947, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens, la Cour :

REJETTE les pourvois incidents ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils condamnent la société Rabot Dutilleul construction à chiffrer pour MM. [W], [G], [Z], [C], [H], [B] [E] et [I], dans la limite de la prescription quinquennale, la contrepartie financière qui leur est due en fonction du temps de travail correspondant au temps d'habillage/déshabillage en début et en fin de service, comprenant en fin de service le temps de douche, soit 20 minutes par journée travaillée, ce dans un délai de 30 jours à compter de la notification des décisions, en ce qu'ils condamnent la société à leur payer cette somme à titre de rappel de salaire dans le délai de deux mois à compter de l'expiration de ce délai, en ce qu'ils disent que ces sommes à caractère salarial porteront intérêts au taux légal à compter du jour où l'employeur a eu connaissance de leur demande, ce avec capitalisation, en ce qu'ils renvoient les parties à la négociation collective pour l'application des décisions et en ce qu'ils statuent sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile, les arrêts rendus le 30 septembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ces arrêts et les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;

Condamne MM. [W], [G], [Z], [C], [H], [B] [E] et [I] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit septembre deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52400924
Date de la décision : 18/09/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 30 septembre 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 sep. 2024, pourvoi n°52400924


Composition du Tribunal
Président : Mme Monge (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Origine de la décision
Date de l'import : 01/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:52400924
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