LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° K 23-87.202 FS-B
N° 00679
ODVS
11 JUIN 2024
IRRECEVABILITE
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 11 JUIN 2024
Le procureur de la République financier a formé un pourvoi contre l'ordonnance du président de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 23 octobre 2023, qui, dans la procédure suivie du chef de blanchiment aggravé de fraude fiscale aggravée, a prononcé sur une contestation élevée en matière de saisie d'un document relevant de l'exercice des droits de la défense et couvert par le secret professionnel de la défense et du conseil.
Par ordonnance du 29 janvier 2024, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi.
Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires, ont été produits.
Sur le rapport de Mme Thomas, conseiller, les observations de la SCP Alain Bénabent, avocat de Mme [Z] [O], les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Paris, et les conclusions de M. Lemoine, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 avril 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Thomas, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, MM. Cavalerie, Maziau, Seys, Dary, Mme Chaline-Bellamy, M. Hill, conseillers de la chambre, M. Violeau, Mme Merloz, M. Michon, conseillers référendaires, M. Lemoine, avocat général, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'ordonnance attaquée et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Lors d'une enquête préliminaire ouverte du chef susvisé, des perquisitions ont été menées dans les locaux des sociétés [1] et [2].
3. Certains des documents découverts étant susceptibles de relever de l'exercice des droits de la défense et d'être couverts par le secret professionnel de la défense et du conseil, les sociétés se sont opposées à leur saisie en application de l'article 56-1-1 du code de procédure pénale.
4. Par ordonnance du 11 avril 2023, le juge des libertés et de la détention a ordonné le versement à la procédure de certains de ces documents, dont ceux objet du scellé n° 6 comprenant deux exemplaires d'une consultation juridique émanant de Mme [Z] [O], avocate.
5. Les deux sociétés, le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Paris et Mme [O], notamment, ont formé des recours contre cette décision.
Examen de la recevabilité du pourvoi formé par le procureur de la République financier
6. À défaut de texte législatif contraire, l'ordonnance du président de la chambre de l'instruction rendue sur le recours suspensif formé à l'encontre de la décision du juge des libertés et de la détention statuant sur la contestation, par le bâtonnier ou son délégué, de la saisie effectuée dans le cabinet ou au domicile d'un avocat, entre dans les prévisions de l'article 567 du code de procédure pénale.
7. Il en va de même de l'ordonnance du président de la chambre de l'instruction portant sur la saisie, réalisée hors le cabinet ou le domicile d'un avocat, d'un document ou objet susceptible de relever de l'exercice des droits de la défense et d'être couvert par le secret professionnel de la défense et du conseil prévu à l'article 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971.
8. Dès lors, conformément à l'article 567 susvisé, le ministère public a qualité pour former un pourvoi contre l'ordonnance du président de la chambre de l'instruction.
9. L'article 192 du code de procédure pénale dispose que les fonctions du ministère public auprès de la chambre de l'instruction sont exercées par le procureur général ou par ses substituts.
10. Il en résulte que le procureur général a, seul, qualité pour former un pourvoi contre la décision susvisée, les dispositions de l'article 56-1 du code précité, auxquelles renvoie l'article 56-1-1 de ce code, selon lesquelles le procureur de la République, s'il est le magistrat qui a procédé à la perquisition, est entendu par le juge des libertés et de la détention et, en cas de recours, par le président de la chambre de l'instruction, ne conférant pas pour autant au procureur de la République la qualité de représentant du ministère public devant le président de la chambre de l'instruction.
11. En conséquence, le pourvoi formé par le procureur de la République financier est irrecevable.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
DÉCLARE le pourvoi IRRECEVABLE.
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du onze juin deux mille vingt-quatre.