LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° V 23-80.886 FS-B
N° 00247
GM
20 MARS 2024
REJET
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 20 MARS 2024
M. [B] [G] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'assises de l'Essonne, en date du 24 janvier 2023, qui, pour tentative de meurtre, viols aggravés et vol, en récidive, l'a condamné à la réclusion criminelle à perpétuité avec une période de sûreté de vingt-deux ans, quinze ans de suivi socio-judiciaire avec injonction de soins, quinze ans d'interdiction de détenir ou porter une arme soumise à autorisation, et cinq ans d'inéligibilité.
Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.
Sur le rapport de Mme Diop-Simon, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boullez, avocat de M. [B] [G], les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme [C] [P], et les conclusions de M. Bougy, avocat général, après débats en l'audience publique du 31 janvier 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Diop-Simon, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, Mme Leprieur, MM. Turbeaux, Laurent, Gouton, Brugère, Tessereau, conseillers de la chambre, M. Mallard, Mme Guerrini, conseillers référendaires, M. Bougy, avocat général, et M. Maréville, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Par ordonnance, en date du 18 août 2021, le juge d'instruction a mis en accusation M. [B] [G] des chefs susvisés, et a ordonné son renvoi devant la cour d'assises.
3. Par arrêt du 31 mars 2022, l'accusé a été déclaré coupable et condamné.
4. M. [G] a relevé appel de cette décision, et le ministère public a formé appel incident.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
5. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a ordonné une mesure de suivi socio-judiciaire durant quinze ans, mesure comprenant notamment une injonction de soins, et fixé à sept ans la durée maximum de l'emprisonnement encouru en cas d'inobservation des obligations imposées, alors « que, en ordonnant une mesure de suivi socio-judiciaire comprenant l'injonction de soins sans qu'il résulte, ni de l'arrêt criminel, ni du procès-verbal des débats, que le président ait averti le condamné, d'une part, des obligations résultant du suivi socio-judiciaire et des conséquences qu'entraînerait leur inobservation, d'autre part, qu'aucun traitement ne pourra être entrepris sans son consentement mais que, s'il refuse les soins qui lui seront proposés, l'emprisonnement prononcé à son encontre en vertu de l'article 131-36-1 pourra être mis à exécution, enfin qu'il aura la possibilité de commencer un traitement pendant l'exécution de la peine de réclusion criminelle prononcée à son encontre, la cour d'assises a violé les articles 131-36-1 et 131-36-4 du code pénal. »
Réponse de la Cour
7. Selon l'article 131-36-1 du code pénal, dans les cas prévus par la loi, la juridiction de jugement peut ordonner un suivi socio-judiciaire. Cette peine impose au condamné de se soumettre à des mesures de surveillance et d'assistance, afin de prévenir la récidive. La durée du suivi est fixée par la juridiction, dans les limites prévues par la loi, de même que la durée maximum de l'emprisonnement encouru en cas d'inobservation, par le condamné, des obligations qui lui sont imposées. Le président de la juridiction, après le prononcé de la décision, avertit le condamné des obligations qui lui incombent et des conséquences qu'entraînerait leur inobservation.
8. Selon l'article 131-36-4 du code pénal, et dans les conditions qu'il détermine, la personne condamnée à un suivi socio-judiciaire peut être soumise à une injonction de soins. Le président de la juridiction avertit alors le condamné qu'aucun traitement ne pourra être entrepris sans son consentement, mais que, s'il refuse les soins qui lui seront proposés, l'emprisonnement prévu en application de l'article 131-36-1 pourra être mis à exécution. Lorsque la juridiction de jugement prononce une injonction de soins et que la personne a également été condamnée à une peine privative de liberté non assortie du sursis, le président informe le condamné qu'il aura la possibilité de commencer un traitement pendant l'exécution de cette peine.
9. La Cour de cassation a jugé que le défaut de délivrance au condamné de l'avertissement prévu par l'article 131-36-1 du code pénal devait conduire à la cassation de l'arrêt d'une juridiction de jugement, dans ses dispositions portant sur les peines (Crim., 17 mars 2021, pourvoi n° 20-83.916 ; Crim., 23 juin 2021, pourvoi n° 20-82.998 ; Crim., 16 février 2022, pourvoi n° 21-81.312).
10. Cette jurisprudence doit être abandonnée.
11. Les articles 131-36-1 et 131-36-4 du code pénal ne prévoient pas que la délivrance des avertissements qu'ils prescrivent s'impose à peine de nullité de la décision sur la peine.
12. Au demeurant, les articles R. 61 à R. 61-6 du code de procédure pénale prévoient que la personne condamnée à une peine de suivi socio-judiciaire qui exécute une peine privative de liberté est placée sous la surveillance du juge de l'application des peines qui lui rappelle les obligations auxquelles elle est soumise en vertu de la décision de condamnation, peut lui notifier des obligations complémentaires, et lui rappelle aussi la durée du suivi socio-judiciaire ainsi que la durée maximale de l'emprisonnement qu'elle encourt en cas d'inobservation de ses obligations. Ces dispositions ainsi que les articles 763-1 à 763-9 du code de procédure pénale prévoient également la mise en oeuvre de l'injonction de soins, sous le contrôle du juge de l'application des peines.
13. Le moyen ne peut, dès lors, être accueilli.
14. Par ailleurs, la procédure est régulière et les peines ont été légalement appliquées aux faits déclarés constants par la cour et le jury.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi.
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mars deux mille vingt-quatre.