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05/03/2024 | FRANCE | N°C2400243

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 05 mars 2024, C2400243


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :


N° X 23-82.406 F-D


N° 00243




SL2
5 MARS 2024




REJET




M. BONNAL président,
















R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________




AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 5 MARS 2024






M. [X] [O], partie

civile, a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier, chambre correctionnelle, en date du 21 février 2023, qui l'a débouté de ses demandes après relaxe de M. [J] [N] des chefs d'injure publique et diffamation ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° X 23-82.406 F-D

N° 00243

SL2
5 MARS 2024

REJET

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 5 MARS 2024

M. [X] [O], partie civile, a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier, chambre correctionnelle, en date du 21 février 2023, qui l'a débouté de ses demandes après relaxe de M. [J] [N] des chefs d'injure publique et diffamation publique envers un fonctionnaire public.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de M. Hill, conseiller, les observations de la SCP Spinosi, avocat de M. [X] [O], et les conclusions de M. Croizier, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 janvier 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Hill, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Le 26 juin 2018, M. [X] [O] a fait citer M. [J] [N] devant le tribunal correctionnel pour diffamation publique envers un fonctionnaire public, pour avoir diffusé le 27 mars 2018 sur la page Facebook, dont il était l'administrateur, un article intitulé « [X] et sa tendre peluche » au sein duquel il est affirmé : « C'est un agent communal aux compétences multiples. Il a conseillé et renseigné la population de [Localité 3] lors de l'épisode neigeux [?] Il croule sous les propositions des futurs candidats de plusieurs villages pour animer leur campagne électorale en 2020. A notre question : quel est le candidat le plus généreux pour l'instant ? Il ne préfère pas se prononcer pour l'instant ».

3. M.[O] a également fait citer M.[N] du chef d'injure publique envers un fonctionnaire public, pour avoir diffusé, le même jour et par le même procédé technique, un article intitulé « [X] et sa tendre peluche », renfermant les expressions outrageants et dédaigneuses qui suivent : « un renard perché [?] [X] est un gay luron, il saute, il gesticule, il créé l'ambiance [?] Sacré [X] ».

4. Le tribunal a relaxé M. [N] du chef d'injure envers un particulier, l'a déclaré coupable du chef de diffamation envers un fonctionnaire public et a prononcé sur les intérêts civils.

5. M. [N] a relevé appel de cette décision et le ministère public appel incident.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a relaxé M. [N] du chef de diffamation publique envers un fonctionnaire public en jugeant non diffamatoire l'article « [X] et sa tendre peluche » affirmant : « c'est un agent communal aux compétences multiples. Il a conseillé et renseigné la population de [Localité 3] lors de l'épisode neigeux [?] Il croule sous les propositions des futurs candidats de plusieurs villages pour animer leur campagne électorale en 2020. A notre question : quel est le candidat le plus généreux pour l'instant ? Il ne préfère pas se prononcer pour l'instant », alors :

« 1°/ que d'une part, en matière de diffamation, le juge doit prendre en considération les éléments intrinsèques et extrinsèques de nature à donner aux propos incriminés leur véritable sens ; qu'en écartant le caractère diffamatoire de l'article intitulé « [X] et sa tendre peluche » au sein duquel il est affirmé « c'est un agent communal aux compétences multiples. Il a conseillé et renseigné la population de [Localité 3] lors de l'épisode neigeux [?] Il croule sous les propositions des futurs candidats de plusieurs villages pour animer leur campagne électorale en 2020. A notre question : quel est le candidat le plus généreux pour l'instant ? Il ne préfère pas se prononcer pour l'instant », sans tenir compte, ainsi que l'y invitaient expressément les conclusions de Monsieur [O], du contexte politique dans lequel s'inscrivait la publication des propos poursuivis, Monsieur [N] étant opposant au maire en place, ainsi que des atteintes portées à la considération et la réputation professionnelle de Monsieur [O] par des allégations mettant en cause son intégrité et son professionnalisme en tant que fonctionnaire, le présentant comme « un agent félon à l'égard de la commune de [Localité 1] qui l'emploie » et prétendant qu'il serait « déloyal, opportuniste et cupide, au service des élus les plus offrants » ( conclusions, p. 10), la cour d'appel a violé les articles 23, 29 alinéa 1, 30, 31 alinéa 1er de la loi du 29 juillet 1881, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

2°/ que d'autre part, en écartant le caractère diffamatoire des propos lorsque l'évocation, dans le cadre d'un article figurant dans un journal d'actualité locale, consacré à la présentation d'un agent communal de la ville de [Localité 1], Monsieur [O], comme étant un employé communal déloyal envers la commune qui l'emploie, dénonçant le prétendu non-respect du cadre de ses fonctions d'agent communal, renvoyait dans ce contexte à des accusations de manquements à la probité concernant ce fonctionnaire public, la cour d'appel a de plus fort méconnu les articles précités. »

Réponse de la Cour

7. Pour infirmer le jugement et relaxer le prévenu du chef de diffamation, l'arrêt attaqué énonce notamment que le fait de soutenir, après avoir rappelé que M. [O] était « un agent communal aux compétences multiples », qu'il avait « conseillé et renseigné la population de Saint Brès lors de l'épisode neigeux », ne suffit pas à établir l'intention du prévenu de présenter celui-ci comme un employé communal déloyal, dès lors que les éventuelles actions d'un individu au profit de la population d'une autre commune ne signifient en rien que celui-ci a manqué aux devoirs de sa fonction d'agent communal.

8. Les juges retiennent que, contrairement à ce qu'ont considéré les premiers juges, le fait d'écrire que M. [O] « croulait sous les propositions des futurs candidats de plusieurs villages pour animer leur campagne électorale en 2020. À notre question : quel est le candidat le plus généreux pour l'instant ? il ne préfère pas se prononcer pour l'instant », ne constitue pas davantage une allégation portant atteinte à son honneur ou à sa considération.

9. En se déterminant ainsi, la cour d'appel, qui a souverainement analysé les éléments extrinsèques susceptibles d'éclairer le sens et la portée des propos poursuivis et a exactement retenu que ces derniers ne portaient pas atteinte à l'honneur et à la considération de M. [O], a justifié sa décision.

10. Dès lors, le moyen doit être écarté.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

11. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a relaxé M. [N] du chef d'injures publiques envers un fonctionnaire public, alors « que, toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l'imputation d'aucun fait précis est une injure ; qu'en l'espèce, en se bornant à relever que « sans qu'il soit nécessaire de s'interroger sur le caractère prétendument injurieux desdits propos, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a relaxé Monsieur [N] de ce chef de poursuite » aux motifs que les propos seraient « uniquement relatifs au comportement de Monsieur [O] dans sa sphère privée, en particulier en sa qualité de supporter du club de handball de la ville de [Localité 2] » (arrêt, p. 7 et 8), sans répondre aux conclusions qui faisaient explicitement valoir que les propos litigieux étaient dirigés à l'encontre de Monsieur [O], en sa qualité d'agent communal de la ville de [Localité 1] et avaient pour objectif le dénigrer en tant que fonctionnaire, par voie d'insinuations, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 23, 29 alinéa 2, 33 alinéa 1er de la loi du 29 juillet 1881, 591 et 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

12. Pour confirmer le jugement et relaxer le prévenu du chef d'injure envers un fonctionnaire public, l'arrêt attaqué énonce que les propos critiqués ne contiennent aucune référence, fût-elle subtile ou indirecte, à l'exercice par M. [O] de sa fonction d'agent communal, que les termes utilisés sont exclusivement relatifs à sa personnalité, sans établir aucun lien entre ses traits de caractère et l'exercice de ses fonctions.

13. Les juges ajoutent qu'il est tout autant impossible de comprendre en quoi la fonction d'agent communal de M. [O] aurait été le support ou le moyen d'accomplir les actions décrites par les propos litigieux et qu'il apparaît que ces derniers sont uniquement relatifs à son comportement dans sa sphère privée, en particulier en sa qualité de supporter du club de handball de la ville de [Localité 2].

14. En prononçant ainsi, la cour d'appel, qui a répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et a exactement retenu que les propos litigieux ne visaient pas M. [O] en sa qualité de fonctionnaire public, a justifié sa décision.

15. Dès lors, le moyen doit être écarté.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

16. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a débouté M. [O] de ses demandes du fait de la relaxe prononcée au bénéfice de M. [N], alors « que, en cas de relaxe, les juges doivent apprécier le bien-fondé d'une faute civile, à partir et dans la limite des faits objet de la poursuite, sur la base de la loi du 29 juillet 1881 sur la presse ; qu'en l'espèce, en déboutant Monsieur [O] de ses demandes formulées au titre de l'action civile aux motifs que « compte tenu de la relaxe totale prononcé au bénéfice du prévenu Monsieur [O] ne peut qu'être débouté de ses demandes de réparation au plan civil » (arrêt, p. 10), la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 2, 591 et 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

17. Dès lors que la cour d'appel, saisie de l'action publique, a prononcé une relaxe c'est à bon droit que l'arrêt attaqué énonce qu'en raison de la relaxe totale prononcée au bénéfice du prévenu, M. [O] ne peut qu'être débouté de ses demandes de réparation au plan civil.

18. Ainsi, le moyen doit être écarté.

19. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du cinq mars deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : C2400243
Date de la décision : 05/03/2024
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 21 février 2023


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 05 mar. 2024, pourvoi n°C2400243


Composition du Tribunal
Président : M. Bonnal (président)
Avocat(s) : SCP Spinosi

Origine de la décision
Date de l'import : 12/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:C2400243
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