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24/01/2024 | FRANCE | N°52400092

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 janvier 2024, 52400092


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


ZB1




COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 24 janvier 2024








Cassation partielle




Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président






Arrêt n° 92 F-D


Pourvoi n° X 22-19.359


Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de Mme [V].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cass

ation
en date du 10 novembre 2022.




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATIO...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

ZB1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 24 janvier 2024

Cassation partielle

Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 92 F-D

Pourvoi n° X 22-19.359

Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de Mme [V].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 10 novembre 2022.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 24 JANVIER 2024

1°/ Mme [R] [W], divorcée [C], domiciliée [Adresse 3],

2°/ Mme [N] [W], épouse [Y], domiciliée [Adresse 2],

agissant toutes deux en leur qualité d'héritières de [U] [W], décédé,

ont formé le pourvoi n° X 22-19.359 contre l'arrêt rendu le 10 mai 2022 par la cour d'appel de Nîmes (5e chambre sociale PH), dans le litige les opposant :

1°/ à Mme [A] [V], domiciliée [Adresse 4],

2°/ à M. [T] [J], domicilié [Adresse 1], personne habilitée à représenter et assister sa mère, Mme [A] [V],

défendeurs à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Laplume, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mmes [Y] et [W], en qualité d'héritières de [U] [W], de la SCP Guérin-Gougeon, avocat de Mme [V] et M. [J], après débats en l'audience publique du 12 décembre 2023 où étaient présentes Mme Capitaine, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Laplume, conseiller référendaire rapporteur, Mme Lacquemant, conseiller, et Mme Aubac, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 10 mai 2022), Mme [V], qui revendiquait avoir travaillé pour [U] [W] en qualité d'assistante de vie depuis le 2 janvier 2013, a saisi la juridiction prud'homale le 2 avril 2015 d'une demande tendant à la reconnaissance de l'existence d'un contrat de travail.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui, en ses première et deuxième branches, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation, et en sa troisième branche, est irrecevable.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

3. Mme [Y] et Mme [W], en qualité d'héritières de leur père [U] [W], font grief à l'arrêt de dire que Mme [V] était salariée de ce dernier selon contrat de travail verbal à durée indéterminée à temps complet de janvier 2013 à fin mars 2014 et qu'elle occupait le poste d'assistante de vie 1, classée niveau II de la convention collective du particulier employeur et que le licenciement était dénué de cause réelle et sérieuse, de constater que la créance de la salariée à l'encontre de la succession de [U] [W] s'élève à une certaine somme à titre de rappel de salaires dont doit être déduite une somme versée en octobre 2013, à une somme au titre des congés payés correspondants et à diverses sommes au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L. 8223-1 du code du travail, de dommages-intérêts pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse, de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis, outre une certaine somme au titre des congés payés correspondants, et au titre de l'indemnité légale de licenciement, de les condamner à payer à Mme [V] les sommes précitées, outre une somme par application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et d'ordonner la remise de bulletins de salaires, d'un certificat de travail et d'une attestation Pôle emploi conformes, alors « que l'existence d'une relation de travail salarié ne dépend, ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention mais exclusivement des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs, qui doivent caractériser une subordination par rapport à l'entreprise recherchée ; que le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; qu'en l'espèce, pour décider que Mme [V] et [U] [W] avaient été liés par une relation de travail salariée, la cour d'appel s'est fondée sur "les déclarations faites par [U] [W] devant les services enquêteurs dans le cadre de l'enquête pénale pour abus de faiblesse" selon lesquelles il avait "...cherché à trouver une personne qui pourrait dormir à notre domicile la nuit et s'occuper de nous à temps complet...J'ai voulu la déclarer mais elle ne le voulait pas, disant qu'elle était assurée, je lui ai fourni le gîte, le couvert. Elle pouvait disposer de la maison à son gré, et au début elle m'a réclamé dix euros par jour surtout pour payer ses cigarettes [...]", sur les témoignages, recueillis lors de cette enquête, selon lesquels [U] [W] avait présenté Mme [V] "... comme quelqu'un qui pouvait les aider, veiller sur eux et dormir sur place, en qualité de "dame de compagnie", qu'elle "... apportait sa compagnie à M. [W], allait faire les courses courantes du ménage et faisait la cuisine", [U] [W] ayant confirmé, "suite au dépôt de plainte de Mme [V] pour agression sexuelle : "...cette personne a travaillé chez moi pendant cette période en qualité de dame de compagnie" ; qu'en se déterminant aux termes de tels motifs impropres à caractériser que Mme [V] avait fourni une prestation de travail sous l'autorité de [U] [W], que celui-ci avait le pouvoir de lui donner des ordres et des directives dont il contrôlait l'exécution et, le cas échéant, pouvait sanctionner les manquements, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1221-1 du code du travail :

4. Il résulte de ce texte que l'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs. Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

5. Pour retenir l'existence d'un contrat de travail, l'arrêt retient que l'existence de ce contrat ne peut être sérieusement contestée en l'état des déclarations faites par [U] [W] devant les services enquêteurs dans le cadre de l'enquête pénale pour abus de faiblesse, celui-ci ayant effectivement indiqué : « J'ai cherché à trouver une personne qui pourrait dormir à notre domicile la nuit et s'occuper de nous à temps complet... J'ai voulu la déclarer mais elle ne le voulait pas, disant qu'elle était assurée, je lui ai fourni le gîte, le couvert. Elle pouvait disposer de la maison à son gré, et au début elle m'a réclamé dix euros par jour surtout pour payer ses cigarettes, j'ai au moins deux témoins Mme [Z] [H] mon infirmière et [D] [P] une amie, qui peuvent attester que je voulais la déclarer mais qu'elle a insisté pour ne pas l'être », que lors de cette même enquête, ont été entendues : - Mme [L], infirmière : « J'ai fait la connaissance de Mme [V] il y a un an environ. C'est M. [W] qui me l'a présentée comme quelqu'un qui pouvait les aider, veiller sur eux et dormir sur place, en qualité de "dame de compagnie " », - Mme [Z] [B], voisine, parlant de Mme [V] qui « apportait sa compagnie à M. [W], allait faire les courses courantes du ménage et faisait la cuisine », « je ne sais pas quels étaient leurs arrangements par contre je saisis qu'au début, quand elle venait juste leur rendre visite et services, il lui donnait dix euros par jour », que lors de son audition suite au dépôt de plainte de Mme [V] pour agression sexuelle, [U] [W] avait déclaré : « Comme je vous l'ai expliqué précédemment au cours de mes auditions et suite à la plainte que j'ai déposée contre Mme [V] [A] pour des faits d'abus de faiblesse, cette personne a travaillé chez moi pendant cette période en qualité de dame de compagnie et cela dans les conditions que j'ai décrit au cours de la procédure enregistrée sous le N° 2014/1727 ». La cour d'appel en a déduit que Mme [V] était salariée de [U] [W] de janvier 2013 à fin mars 2014 soit quinze mois.

6. En se déterminant ainsi, par des motifs insuffisants à caractériser l'existence d'un lien de subordination, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il dit irrecevables les conclusions des intimées des 23 décembre 2021 et 5 janvier 2022 et déboute Mme [V] de sa demande à titre de dommages-intérêts pour non remise d'une attestation Pôle emploi, l'arrêt rendu le 10 mai 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;

Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;

Condamne Mme [V] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre janvier deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52400092
Date de la décision : 24/01/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nimes, 10 mai 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 jan. 2024, pourvoi n°52400092


Composition du Tribunal
Président : Mme Capitaine (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Guérin-Gougeon

Origine de la décision
Date de l'import : 30/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:52400092
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