LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
CF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 5 avril 2023
Cassation partielle
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 233 FS-B
Pourvoi n° U 21-22.296
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 5 AVRIL 2023
M. [U] [B], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° U 21-22.296 contre l'arrêt rendu le 29 juin 2021 par la cour d'appel de Chambéry (3e chambre), dans le litige l'opposant à Mme [D] [J], divorcée [B], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, Ã l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Buat-Ménard, conseiller référendaire, les observations de la SCP Alain Bénabent, avocat de M. [B], de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme [J], et l'avis de M. Sassoust, avocat général, après débats en l'audience publique du 28 février 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Buat-Ménard, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, Mmes Antoine, Poinseaux, M. Fulchiron, Mmes Dard, Beauvois, Agostini, conseillers, M. Duval, Mmes Daniel, Azar, conseillers référendaires, M. Sassoust, avocat général, et Mme Layemar, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 29 juin 2021), un jugement du 12 mai 2014 a prononcé le divorce de M. [B] et de Mme [J], mariés sous le régime de la séparation de biens.
2. Des difficultés sont survenues lors des opérations de comptes, liquidation et partage de leurs intérêts patrimoniaux.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa seconde branche
Enoncé du moyen
3. M. [B] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de créance formée à l'encontre de Mme [J], alors « que l'apport en capital de fonds personnels, effectué par un époux séparé de biens, pour financer la construction d'un bien propre de son conjoint, fut-il affecté à l'usage familial, ne relève pas de son obligation de contribuer aux charges du mariage ; qu'en relevant que le montant de la facture litigieuse était modeste, "de sorte qu'il ne s'agissait que d'une dépense ponctuelle", que l'époux n'établissait pas sa sur-contribution "et encore qu'il avait bénéficié avec les enfants de son hébergement au sein de ce bien immobilier", la cour d'appel s'est prononcée par des motifs impropres, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article 214 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 214 du code civil :
4. Il résulte de ce texte que, sauf convention contraire des époux, l'apport en capital de fonds personnels, réalisé par un époux séparé de biens pour financer l'amélioration, par voie de construction, d'un bien personnel appartenant à l'autre et affecté à l'usage familial, ne participe pas de l'exécution de son obligation de contribuer aux charges du mariage.
5. Pour rejeter la demande de créance formée par M. [B] à l'encontre de Mme [J] au titre du financement d'une partie des travaux d'édification d'une maison sur le terrain appartenant à celle-ci, l'arrêt, après avoir constaté que M. [B] avait réglé une facture de construction de la maison d'un montant de 36 240,83 euros à l'aide de capitaux provenant de son épargne personnelle, relève que l'espèce concerne le financement de la construction d'un bien personnel de l'épouse et non celui de la part indivise du conjoint, que le montant de la facture demeure relativement modeste et constitue une dépense ponctuelle, qu'il n'est pas établi de sur-contribution aux charges du mariage de M. [B] et qu'il n'est pas contesté que celui-ci a bénéficié avec les enfants du couple d'un hébergement dans le bien immobilier considéré. Il en déduit que le paiement de la facture relève de sa contribution aux charges du mariage.
6. En se déterminant ainsi, sans constater l'existence d'une convention entre les époux prévoyant l'exécution par M. [B] de sa contribution aux charges du mariage sous la forme d'un apport en capital, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare l'appel recevable en la forme, l'arrêt rendu le 29 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ;
Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon .
Condamne Mme [J] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [J] et la condamne à payer à M. [B] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq avril deux mille vingt-trois.