La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/03/2023 | FRANCE | N°21-14420

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 01 mars 2023, 21-14420


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH9

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 1er mars 2023

Cassation partielle sans renvoi

Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 192 F-D

Pourvoi n° G 21-14.420

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 1ER MARS 2023

La société Etabli

ssements Nicolas, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° G 21-14.420 contre l'arrêt rendu le 3 février 2021 par la...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH9

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 1er mars 2023

Cassation partielle sans renvoi

Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 192 F-D

Pourvoi n° G 21-14.420

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 1ER MARS 2023

La société Etablissements Nicolas, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° G 21-14.420 contre l'arrêt rendu le 3 février 2021 par la cour d'appel de Versailles (19e chambre), dans le litige l'opposant à M. [K] [O], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Pion, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Etablissements Nicolas, de la SARL Ortscheidt, avocat de M. [O], après débats en l'audience publique du 10 janvier 2023 où étaient présents Mme Capitaine, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Pion, conseiller rapporteur, Mme Van Ruymbeke, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 3 février 2021), M. [O] et Mme [E], son épouse, ont conclu le 1er février 2006 avec la société Etablissements Nicolas (la société) un contrat de cogérance non salariée.

2. Placé en arrêt de travail pour maladie d'origine professionnelle du 16 mars 2013 au 28 août 2014, M. [O] a bénéficié d'une visite de reprise le 29 août 2014 au terme de laquelle le médecin du travail l'a déclaré inapte dans les termes suivants : « inapte à ce poste, procédure unique article 4624-31 du code du travail, étude de poste réalisée dans les 15 jours ».
3. Par lettre du 13 novembre 2014, la société a résilié le contrat de cogérance non salariée pour inaptitude.

4. Faisant valoir que cette rupture était sans cause réelle et sérieuse, M. [O] a saisi la juridiction prud'homale.

Examen des moyens

Sur le premier moyen et le second moyen, pris en sa première branche, ci-après annexés

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le second moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

6. La société fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer à M. [O] la somme de 2 706,29 euros au titre du préavis complémentaire, alors « que l'article L. 5213-9 du code du travail ayant pour but de doubler la durée du délai-congé en faveur des salariés handicapés n'est pas applicable en cas d'inaptitude d'origine professionnelle ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la résiliation du contrat de cogérance de M. [O] était fondée sur son inaptitude d'origine professionnelle ; qu'en octroyant à M. [O] la somme de 2 706,29 euros au titre du solde de préavis en application de l'article L. 5213-9 du code du travail, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-14 et L. 5213-9 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

7. M. [O] conteste la recevabilité du moyen au motif de sa nouveauté.

8. Cependant le moyen, qui est de pur droit, est recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu les articles L. 1226-14, L. 5213-9 et L. 7322-1 du code du travail :

9. Il résulte du dernier de ces textes que les dispositions du code du travail bénéficiant aux salariés s'appliquent en principe aux gérants non salariés de succursales de commerce de détail alimentaire et que les dispositions des articles L. 1226-14 et L. 5213-9 du code du travail leur sont applicables.

10. Il résulte du premier que l'employeur est tenu de verser au salarié déclaré par le médecin du travail inapte à reprendre l'emploi occupé précédemment et dont le contrat a été rompu, une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité prévue à l'article L. 1234-5 dudit code.

11. Le deuxième, qui a pour but de doubler la durée du délai-congé en faveur des salariés handicapés, n'est pas applicable à l'indemnité compensatrice prévue à l'article L. 1226-14.

12. Pour condamner l'employeur à payer au salarié une somme correspondant à un troisième mois de préavis, l'arrêt a fait application de l'article L. 5213-9 du code du travail.

13. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

14. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

15. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

16. La cassation sur le chef de dispositif critiqué par le second moyen, n'entraîne pas la cassation des chefs de dispositif condamnant la société Etablissements Nicolas à verser une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en appel et à supporter les dépens d'appel, justifiés par d'autres condamnations non remises en cause.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Etablissements Nicolas à payer à M. [O] la somme de 2 706, 29 euros au titre de préavis complémentaire, l'arrêt rendu le 3 février 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

DÉBOUTE M. [O] de sa demande de complément d'indemnité compensatrice de préavis ;

Condamne M. [O] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé par le président en son audience publique du premier mars deux mille vingt-trois, et signé par lui et Mme Van Ruymbeke, conseiller, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452, 456 et 1021 du code de procédure civile.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société Etablissements Nicolas

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

La société Etablissements Nicolas fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a dit que la rupture du contrat liant la société Nicolas à M. [O] était dénuée de cause réelle et sérieuse, en ce qu'il l'a condamnée à lui payer la somme de 2 706,29 euros au titre du préavis complémentaire d'AVOIR statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant, condamné la société Nicolas à payer à M. [O] une somme de 60 000 euros net à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en application des dispositions de l'article L. 1226-15 du code du travail ;

1°) ALORS QUE l'article L. 7322-1 du code du travail, applicable depuis le 1er mai 2008, fixe limitativement les dispositions du code du travail applicables aux gérants nonsalariés de succursale en les limitant aux dispositions du Livre I de la troisième partie relatif à la durée du travail, aux repos et aux congés, et la quatrième partie du code du travail relative à la santé et à la sécurité au travail, et ce à la condition que soient fixées par l'entreprise propriétaire de la succursale les conditions de travail, de santé et de sécurité au travail dans l'établissement, ou soumises à son agrément ; que les gérants de succursales non-salariés dont le contrat a été rompu après l'entrée en vigueur de cet article ne peuvent dès lors pas se prévaloir des articles du code du travail relatifs au licenciement en général et au licenciement pour inaptitude en particulier ; qu'en affirmant que le gérant non salarié bénéficie de tous les avantages accordés aux salariés par la législation sociale dont ceux relatifs à l'inaptitude énoncés par les articles L. 1226-10 et suivants du code du travail, à la rupture du contrat de travail, et à l'obligation de reclassement des salariés devenus physiquement inaptes à leur emploi à la suite d'une maladie professionnelle, la cour d'appel a violé l'article L. 7322-1 du code du travail, ensemble les articles L. 1226-10, L. 1226-12 et L. 1226-15 du code du travail, et les articles 13 et 14 de l'accord collectif national du 18 juillet 1963 ;

2°) ALORS subsidiairement QUE l'obligation de reclassement appréciée au regard des spécificités du statut de gérant non salarié de succursale impose seulement de lui proposer les postes disponibles compatibles avec son état de santé et correspondants à ses compétences et aptitudes et à son statut ; qu'en l'espèce, la société Nicolas faisait valoir et offrait de prouver que compte tenu des tâches réalisées par un gérant mandataire non salarié, concernant la gestion d'un commerce de détail alimentaire, les restrictions médicales de l'état de santé de M. [O] avaient rendu impossible la poursuite de son activité professionnelle, qu'un reclassement sur un emploi salarié n'avait pas à être recherché puisque la nature juridique de la relation contractuelle déterminait le périmètre de recherche de reclassement, qui était alors la gérance mandataire non salariée, que l'article 13 de l'accord collectif national du 18 juillet 1963 envisageant l'hypothèse d'un emploi salarié ne lui était pas applicable et que les postes de « chef des ventes régional » et de « chargé de gestion immobilière » étaient très éloignés des qualifications et compétences de M. [O] (conclusions d'appel de l'exposante p. 21 et p. 23 et 24 ; production n° 4) ; qu'en se bornant à affirmer par motifs propres que la société Nicolas n'avait procédé à aucune recherche de reclassement suite à l'inaptitude professionnelle de M. [O] et par motifs adoptés que d'autres types d'emplois existaient au sein de la société Nicolas dans un autre cadre contractuel et qu'aucun de ces emplois n'avait été proposé à M. [O], sans constater l'existence d'un poste disponible et compatible avec l'état de santé, la qualification et le statut de M. [O], la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1226-10, L. 1226-12 et L. 1226-15 du code du travail, et de l'article 13 de l'accord collectif national du 18 juillet 1963 ;

3°) ALORS QUE les articles du code du travail relatifs aux syndicats professionnels et aux institutions représentatives du personnel qui sont applicables aux gérants non-salariés de succursales ne le sont que sous réserve des dispositions les concernant spécifiquement ; qu'en l'espèce, l'article 36 de l'accord collectif national du 18 juillet 1963 énumérant limitativement les attributions des représentants des gérants mandataires non salariés n'impose pas que leur avis soit requis sur le reclassement du gérant mandataire non salarié déclaré inapte ; qu'en reprochant à la société Nicolas de ne pas avoir procédé à une consultation d'un comité de gérant s'agissant de l'inaptitude de M. [O] en lien avec une maladie professionnelle, la cour d'appel a violé les articles L. 7322-1, L. 1226-10, L. 1226-15 du code du travail et l'article 36 de l'accord collectif national du 18 juillet 1963 ;

4°) ALORS QUE les articles du code du travail qui sont applicables aux gérants nonsalariés de succursales ne le sont que sous réserve des dispositions les concernant spécifiquement ; qu'en l'espèce, les articles 13 et 14 de l'accord collectif national du 18 juillet 1963 imposent seulement à la société propriétaire de la succursale qui entend rompre le contrat de gérance, de notifier sa décision au gérant par lettre recommandée, après avoir reçu l'intéressé en entretien préalable, sans exiger d'énoncé particulier du motif ayant justifié cette rupture, que la société propriétaire de la succursale reste libre de justifier en cas de contestation par le gérant en justice ; qu'en reprochant à la société Nicolas d'avoir insuffisamment motivé le courrier de résiliation du contrat de gérance, aux motifs adoptés que dans la lettre de rupture adressée à M. [O], la société Nicolas avait fait état de l'inaptitude physique relevé par le médecin du travail mais n'avait pas précisé qu'elle était dans l'impossibilité de reclasser M. [O], la cour d'appel a violé l'article L. 7322-1 du code du travail, ensemble les articles L. 1232-6, L. 1226-10, L. 1226-12 et L. 1226-15 du code du travail, et les articles 13 et 14 de l'accord collectif national du 18 juillet 1963.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

La société Etablissements Nicolas fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer au salarié la somme de 2 706,29 euros au titre du préavis complémentaire ;

1°) ALORS QUE les articles du code du travail qui sont applicables aux gérants nonsalariés de succursales ne le sont que sous réserve des dispositions les concernant spécifiquement ; qu'en l'espèce, l'article 14 de l'accord collectif national du 18 juillet 1963 prévoit qu'en cas de rupture du contrat de gérance par l'entreprise, le gérant mandataire non salarié ayant deux ans d'ancienneté à la date de la rupture bénéficie d'un préavis de deux mois ; qu'en affirmant que M. [O] pouvait se prévaloir de l'article L. 5213-9 du code du travail et bénéficier d'une indemnité de préavis de trois mois, la cour d'appel a violé l'article L. 7322-1 du code du travail, ensemble les articles L. 5213-9 du code du travail, et 14 de l'accord collectif national du 18 juillet 1963 ;

2°) ALORS QUE l'article L. 5213-9 du code du travail ayant pour but de doubler la durée du délai-congé en faveur des salariés handicapés n'est pas applicable en cas d'inaptitude d'origine professionnelle ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la résiliation du contrat de cogérance de M. [O] était fondée sur son inaptitude d'origine professionnelle ; qu'en octroyant à M. [O] la somme de 2 706,29 euros au titre du solde de préavis en application de l'article L. 5213-9 du code du travail, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-14 et L. 5213-9 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-14420
Date de la décision : 01/03/2023
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 03 février 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 01 mar. 2023, pourvoi n°21-14420


Composition du Tribunal
Président : Mme Capitaine (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Ortscheidt, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:21.14420
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award