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25/01/2023 | FRANCE | N°20-20354

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 25 janvier 2023, 20-20354


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

BD4

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 25 janvier 2023

Cassation partielle sans renvoi

Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 64 F-D

Pourvoi n° N 20-20.354

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 JANVIER 2023

La société Flexadux

international, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° N 20-20.354 contre l'arrêt ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

BD4

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 25 janvier 2023

Cassation partielle sans renvoi

Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 64 F-D

Pourvoi n° N 20-20.354

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 JANVIER 2023

La société Flexadux international, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° N 20-20.354 contre l'arrêt rendu le 26 juin 2020 par la cour d'appel de Rennes (8e chambre prud'homale), dans le litige l'opposant à M. [L] [D], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rouchayrole, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Flexadux international, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [D], après débats en l'audience publique du 30 novembre 2022 où étaient présents Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rouchayrole, conseiller rapporteur, M. Sornay, conseiller, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 26 juin 2020), M. [D] a été engagé le 1er novembre 2006 par la société Flexadux international (la société) en qualité de responsable régional des ventes.

2. A la suite d'une mise à pied conservatoire, M. [D] a été licencié pour faute lourde le 12 novembre 2012.

3. Contestant son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale le 29 octobre 2014 de diverses demandes relatives à l'exécution et à la rupture du contrat de travail.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche, ci-après annexé

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. L'employeur fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement le condamnant à verser au salarié certaines sommes à titre de paiement de la période de mise à pied, outre les congés payés sur cette période, d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, d'indemnité conventionnelle de licenciement, ainsi qu'à rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômages versées dans la limite de 15 jours d'indemnités, alors « que s'agissant d'un licenciement prononcé à titre disciplinaire, si la lettre de licenciement fixe les limites du litige en ce qui concerne les griefs articulés à l'encontre du salarié et les conséquences que l'employeur entend en tirer quant aux modalités de rupture, il appartient au juge de qualifier les faits invoqués ; que la faute grave s'entend de celle qui, par son importance, rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, même pendant la durée limitée du préavis ; qu'il en résulte qu'en l'absence d'intention de nuire du salarié de nature à justifier son licenciement pour faute lourde, le juge demeure tenu de rechercher, au regard de l'ampleur, de la réitération et de la gravité des faits fautifs commis par le salarié, s'il convient de requalifier le licenciement pour faute lourde prononcé par l'employeur en licenciement pour faute grave ; qu'au cas présent, la société a notifié, par lettre du 12 novembre 2012, le licenciement pour faute lourde après avoir découvert que le salarié lui avait fourni, de manière récurrente et depuis plusieurs années, de fausses notes de frais professionnels pour en obtenir indûment le remboursement par l'entreprise ; que la cour d'appel a constaté que le salarié a été condamné par jugement correctionnel du 24 septembre 2015 à une peine de six mois d'emprisonnement, assortie d'un sursis, pour ces faits qualifiés de faux et usage de faux en écritures et d'escroquerie, commis entre le 20 mars 2011 et le 31 décembre 2012, au préjudice de la société, que 72 % des factures produites par le salarié sur la période étaient des faux, et que ce dernier avait agi en dissimulant constamment le caractère frauduleux de ses notes de frais et des faux comptes-rendus de visite, établis pour tromper son employeur et l'amener à lui verser des sommes indues, causant ainsi à la société un préjudice financier certain ; que néanmoins, la cour d'appel s'est bornée à considérer que les faits reprochés au salarié, s'ils ne caractérisent pas une faute lourde, n'en sont pas moins matériellement établis et sont constitutifs d'une faute disciplinaire de nature à conférer une cause réelle et sérieuse à son licenciement ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si les faits ainsi commis, compte tenu de leur ampleur, de leur gravité et de leur réitération, n'étaient pas constitutifs d'une faute grave rendant impossible son maintien dans l'entreprise, même pendant la durée du préavis, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des les articles L. 1232-1, L. 1234-1 et L. 1234-9 du code du travail ».

Réponse de la Cour

6. La cour d'appel, après avoir estimé que l'employeur ne démontrait pas que le salarié aurait agi dans le but de lui nuire, de sorte que les éléments constitutifs de la faute lourde n'étaient pas réunis, a relevé que les faits dénoncés dans la lettre de licenciement n'en restaient pas moins matériellement établis et qu'il y avait lieu de leur restituer leur juste qualification, puis, retenant qu'ils étaient constitutifs d'une faute disciplinaire de nature à conférer une cause réelle et sérieuse au licenciement, elle a implicitement écarté l'existence d'une faute grave.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

8. L'employeur fait le même grief, alors « que, selon l'article L. 1235-4 du code du travail, pris dans sa version application applicable au présent litige, le juge ordonne, dans les cas prévus aux articles L. 1132-4, L. 1134-4, L. 1144-3, L. 1152-3, L. 1153-4, L. 1235-3 et L. 1235-11, le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé ; qu'au cas présent, la cour d'appel a expressément jugé que le licenciement du salarié était fondé sur une cause réelle et sérieuse et a infirmé le jugement déféré de ces chefs ; qu'en confirmant néanmoins le jugement qui a condamné la société à rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômages versées, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé l'article L. 1235-4 du code du travail, pris dans sa version applicable au présent litige. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1235-4 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 :

9. Aux termes de ce texte, dans les cas prévus aux articles L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé. Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.

10. Après avoir déclaré que le licenciement du salarié était fondé sur une cause réelle et sérieuse, l'arrêt confirme le jugement qui a retenu que les conditions de l'application de l'article L. 1235-4 du code du travail étant réunies, il convenait d'ordonner le remboursement par l'employeur des allocations de chômage versées à la salariée à la suite de son licenciement, dans la limite de quinze jours.

11. En statuant ainsi, alors que le remboursement des indemnités de chômage ne pouvait être ordonné en cas de licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

12. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

13. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, mais seulement en ce qu'il confirme le jugement du conseil des prud'hommes de Nantes du 13 juillet 2016 qui a condamné la société Flexadux international à rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômage versées à M. [D] dans la limite de quinze jours d'indemnité, l'arrêt rendu le 26 juin 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Condamne M. [D] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq janvier deux mille vingt-trois.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Flexadux international

La société Flexadux International fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement déféré en ce qu'il l'a condamnée à verser à M. [D] les sommes de 2.138 € à titre de paiement de la période de mise à pied, 212 € à titre de congés payés sur cette période, 12.738 € à titre de paiement de l'indemnité compensatrice de préavis, 1.273 € à titre de congés payés sur préavis et 5.095 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement et en ce qu'il l'a condamnée à rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômages versées à M. [D] dans la limite de 15 jours d'indemnités.

1. ALORS QUE s'agissant d'un licenciement prononcé à titre disciplinaire, si la lettre de licenciement fixe les limites du litige en ce qui concerne les griefs articulés à l'encontre du salarié et les conséquences que l'employeur entend en tirer quant aux modalités de rupture, il appartient au juge de qualifier les faits invoqués ; que la faute grave s'entend de celle qui, par son importance, rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, même pendant la durée limitée du préavis ; qu'il en résulte qu'en l'absence d'intention de nuire du salarié de nature à justifier son licenciement pour faute lourde, le juge demeure tenu de rechercher, au regard de l'ampleur, de la réitération et de la gravité des faits fautifs commis par le salarié, s'il convient de requalifier le licenciement pour faute lourde prononcé par l'employeur en licenciement pour faute grave ; qu'au cas présent, la société Flexadux International a notifié à M. [D], par lettre du 12 novembre 2012, son licenciement pour faute lourde après avoir découvert que celui-ci lui avait fourni, de manière récurrente et depuis plusieurs années, de fausses notes de frais professionnels pour en obtenir indument le remboursement par l'entreprise ; que la cour d'appel a constaté que M. [D] a été condamné par jugement correctionnel du 24 septembre 2015 à une peine de six mois d'emprisonnement, assortie d'un sursis, pour ces faits qualifiés de faux et usage de faux en écritures et d'escroquerie, commis entre le 20 mars 2011 et le 31 décembre 2012, au préjudice de la société Flexadux International, que 72 % des factures produites par le salarié sur la période étaient des faux, et que M. [D] avait agi en dissimulant constamment le caractère frauduleux de ses notes de frais et des faux comptes-rendus de visite, établis pour tromper son employeur et l'amener à lui verser des sommes indues, causant ainsi à la société Flexadux un préjudice financier certain ; que néanmoins, la cour d'appel s'est bornée à considérer que les faits reprochés à M. [D] s'ils ne caractérisent pas une faute lourde, n'en sont pas moins matériellement établis et sont constitutifs d'une faute disciplinaire de nature à conférer une cause réelle et sérieuse à son licenciement ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si les faits ainsi commis par M. [D], compte tenu de leur ampleur, de leur gravité et de leur réitération, n'étaient pas constitutifs d'une faute grave rendant impossible son maintien dans l'entreprise, même pendant la durée du préavis, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des les articles L. 1232-1, L. 1234-1 et L. 1234-9 du code du travail ;

2. ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE la société Flexadux International faisait expressément valoir, dans ses écritures d'appel, qu'aucune indemnité n'était due à M. [D] – son indemnité de congés payés lui ayant par ailleurs été réglée dans le solde de tout compte - quand bien même il serait considéré que le licenciement reposerait sur une faute non pas lourde mais grave (conclusions d'appel, p. 10) ; qu'en s'abstenant ainsi de répondre à ce moyen pourtant déterminant des conclusions de la société exposante, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions et a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

3. ALORS QUE selon l'article L. 1235-4 du code du travail, pris dans sa version application applicable au présent litige, le juge ordonne, dans les cas prévus aux articles L. 1132-4, L. 1134-4, L. 1144-3, L. 1152-3, L. 1153-4, L. 1235-3 et L. 1235-11, le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé ; qu'au cas présent, la cour d'appel a expressément jugé que le licenciement de M. [D] était fondé sur une cause réelle et sérieuse et a infirmé le jugement déféré de ces chefs ; qu'en confirmant néanmoins le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société Flexadux International à rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômages versées à M. [D], la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé l'article L. 1235-4 du code du travail, pris dans sa version applicable au présent litige.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20-20354
Date de la décision : 25/01/2023
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 26 juin 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 25 jan. 2023, pourvoi n°20-20354


Composition du Tribunal
Président : Mme Monge (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 31/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:20.20354
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