LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 18 janvier 2023
Rejet
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 63 F-D
Pourvoi n° J 20-20.788
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 18 JANVIER 2023
La société Crédit foncier de France (CFF), société anonyme, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° J 20-20.788 contre l'arrêt rendu le 26 juin 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 6), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [M] [E],
2°/ à Mme [N] [P], épouse [E],
tous deux domiciliés [Adresse 1],
3°/ à M. [O] [U], domicilié [Adresse 6],
4°/ à M. [Y] [F] [S], domicilié [Adresse 5],
5°/ à la société MBG, dont le siège est [Adresse 4],
6°/ à la société MMA IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Boyer, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Crédit foncier de France, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société MMA IARD, de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de M. et Mme [E], après débats en l'audience publique du 6 décembre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Boyer, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 juin 2020), le 14 novembre 2011, la société Crédit foncier de France (le CFF) a accordé à M. et Mme [E], au vu de deux devis établis par deux entreprises différentes, un prêt immobilier destiné à financer l'achat d'un terrain et une "construction sans contrat".
2. M. et Mme [E] ont finalement conclu, le 10 novembre 2012, un contrat avec la société MBG, assurée auprès de la société MMA IARD, portant sur la construction d'un pavillon devant être livré dans un délai de cinq mois, les plans étant établis par M. [F] [S].
3. La société MBG, qui n'avait pas souscrit de garantie de livraison, a abandonné le chantier.
4. M. et Mme [E] ont, après expertise, assigné en réparation les sociétés MBG et MMA IARD, ainsi que le CFF.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche, ci-après annexé
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches
Enoncé du moyen
6. Le CFF fait grief à l'arrêt de le condamner, in solidum avec la société MBG, à payer diverses sommes à M. et Mme [E], alors :
« 1°/ que le devoir de conseil et de renseignement du banquier prêteur de deniers s'apprécie au regard des éléments d'information qui lui ont été fournis par l'emprunteur ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que l'offre de prêt émise par le Crédit foncier de France avait pour objet de financer « [un] terrain plus construction sans contrat » ; que préalablement à l'octroi du prêt aux époux [E], le Crédit foncier de France s'était vu remettre deux devis, l'un établi par M. [D] [W], l'autre par la société ARM, les emprunteurs ayant toutefois ultérieurement décidé de confier l'opération de construction à une société MBG, selon contrat de construction de maison individuelle du 10 novembre 2002 ; que, pour condamner le Crédit foncier de France à indemniser les époux [E] des préjudices résultant de l'échec de l'opération immobilière, la cour d'appel a retenu que le devis établi par M. [W] portait la mention « construction de maison individuelle », ce dont elle a déduit que l'opération financée correspondait de façon manifeste pour un professionnel à la construction d'une maison individuelle et qu'il incombait dès lors au Crédit foncier de France, qui ne l'avait pas fait, de mettre en garde les emprunteurs des risques qu'ils encouraient en raison de l'absence de garantie de livraison ; qu'en statuant de la sorte, par des motifs impropres à établir que les éléments d'information communiqués préalablement à l'octroi du prêt au Crédit foncier de France, qui ne s'était pas vu remettre le contrat finalement conclu par les époux [E] avec une autre entreprise, n'ayant disposé que des devis respectivement établis par M. [W] et par la société ARM, dont le premier seulement mentionnait, sans plus de précision quant au cadre juridique de l'opération, « construction d'une maison individuelle », étaient suffisants pour permettre au banquier de savoir que l'opération financée serait placée sous le régime juridique du contrat de construction de maison individuelle, la cour d'appel a violé les articles L. 232-2 et L. 231-6 du code de la construction et de l'habitation, ensemble l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction applicable avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;
2°/ que l'étendue des obligations incombant au prêteur s'apprécie au regard des seuls documents qui lui ont été remis au moment de la conclusion du prêt ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que l'offre de prêt émise par le Crédit foncier de France avait pour objet de financer « [un] terrain plus construction sans contrat » ; que préalablement à l'octroi du prêt aux époux [E], le Crédit foncier de France s'était vu remettre deux devis, l'un établi par M. [D] [W], l'autre par la société ARM, les emprunteurs ayant toutefois ultérieurement décidé de confier l'opération de construction à une société MBG, selon contrat de construction de maison individuelle du 10 novembre 2002 ; qu'en retenant la responsabilité du Crédit Foncier de France pour ne pas avoir mis en garde les époux [E] des risques qu'ils encouraient en raison de l'absence de garantie de livraison, quand seuls des devis de travaux avaient été communiqués à la banque au moment de l'octroi du crédit et que les emprunteurs avaient finalement décidé, sans en informer la banque, de conclure un contrat de construction de maison individuelle avec une société tierce, en se faisant assister d'un architecte, de sorte qu'aucune faute en lien causal avec le préjudice ne pouvait être reprochée au Crédit foncier de France, la cour d'appel a encore violé les articles L. 232-2 et L. 231-6 du code de la construction et de l'habitation, ensemble l'article 1147, désormais 1231-1, du code civil. »
Réponse de la Cour
7. La cour d'appel, devant laquelle le CFF précisait avoir subordonné son offre de prêt immobilier à la production de deux devis d'entreprises différentes et qui a constaté que ces devis lui avaient été fournis par M. et Mme [E], a relevé que l'un d'eux mentionnait « construction de maison individuelle » et que l'offre de prêt, à la suite de ce devis indiquait « pour financer le terrain plus construction sans contrat ».
8. Elle a pu en déduire, par une analyse, relevant de son appréciation souveraine, des pièces qui avaient été remises au CFF au moment de la souscription du prêt, que l'opération ainsi financée correspondait de façon manifeste pour un professionnel à la construction d'une maison individuelle et qu'en s'étant abstenu de mettre en garde les emprunteurs profanes des risques qu'ils encourraient en cas de conclusion d'un contrat sans garantie de livraison, celui-ci avait manqué à son devoir d'information et de conseil à leur égard.
9. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
10. Le CFF fait le même grief à l'arrêt, alors :
« 1°/ que le préjudice résultant du manquement du banquier prêteur de deniers à son devoir de conseil à l'égard du maître de l'ouvrage emprunteur sur les conséquences de l'absence de la garantie de livraison prévue à l'article L. 232-1 g) du code de la construction et de l'habitation consiste en une perte de chance de ne pas contracter ; qu'en jugeant qu'en s'abstenant fautivement de mettre en garde les époux [E], emprunteurs profanes, des risques qu'ils encouraient en raison de l'absence de garantie de livraison, le Crédit foncier de France avait causé aux emprunteurs un préjudice consistant dans la privation de la garantie de livraison, quand ce préjudice ne pouvait s'analyser qu'en une perte de chance pour les époux [E], s'ils avaient été mieux informés, de ne pas réaliser l'opération immobilière en cause, ou de la réaliser sous d'autres conditions, la cour d'appel a violé les articles L. 232-2 et L. 231-6 du code de la construction et de l'habitation, ensemble l'article 1147 (désormais 1231-1) du code civil ;
2°/ que seul est indemnisable le préjudice causé par le manquement contractuel ou la faute du débiteur ; que la garantie de livraison prévue aux articles L. 232-2 et L. 231-6 du code de la construction couvre le maître de l'ouvrage au titre du coût des travaux nécessaires à l'achèvement de l'immeuble, ainsi que des pénalités de retard ; que, pour condamner le Crédit foncier de France à payer aux époux [E] des dommages et intérêts au titre de leur préjudice locatif, la cour d'appel a retenu que les pénalités de retard n'excluaient pas la condamnation du garant à des dommages-intérêts pour d'autres préjudices subis par les maîtres de l'ouvrage, et qu'en l'espèce, le Crédit foncier de France, qui avait tardé à régler le montant des condamnations prononcées à son encontre par le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 18 avril 2017, assorti de l'exécution provisoire, avait commis « une faute qui lui est propre » à l'origine de l'aggravation du préjudice des époux [E] ; qu'en statuant par de tels motifs, impropres à établir que, si une garantie de livraison avait été souscrite, les époux [E] n'auraient pas subi le préjudice locatif allégué, la cour d'appel a violé l'article 1147 (désormais 1231-1) du code civil, ensemble le principe de réparation intégrale du préjudice ;
3°/ que seul est indemnisable le préjudice causé par le manquement contractuel ou la faute du débiteur ; que la cour d'appel a retenu que le Crédit foncier de France, qui avait tardé à régler le montant des condamnations prononcées à son encontre par le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 18 avril 2017, assorti de l'exécution provisoire, avait commis « une faute qui lui est propre » à l'origine de l'aggravation du préjudice des époux [E] ; qu'en condamnant le Crédit foncier de France à payer aux époux [E] une somme de 49 051,25 euros au titre du préjudice locatif, correspondant aux loyers payés par ces derniers au cours de la période de juillet 2013 à février 2019, la cour d'appel a violé l'article 1147 (devenu 1231-1) du code civil, ensemble le principe de réparation intégrale du préjudice. »
Réponse de la Cour
11. En premier lieu, ayant retenu que le CFF avait manqué à son obligation de conseil et d'information en n'avisant pas M. et Mme [E] des risques attachés à la souscription d'un contrat de construction de maison individuelle dépourvu de la garantie de livraison prévue par l'article L. 231-6 du code de la construction et de l'habitation, laquelle est obligatoire, par application de l'article L. 232-1, g), dans le contrat de construction de maison individuelle sans fourniture du plan, la cour d'appel en a exactement déduit que la faute de la banque avait causé aux maîtres de l'ouvrage un préjudice certain consistant en la perte du bénéfice de cette garantie.
12. En second lieu, le CFF n'ayant pas contesté dans ses conclusions d'appel le principe d'un préjudice de jouissance de M. et Mme [E], lié au retard de livraison en lien direct avec la faute personnelle retenue à sa charge, mais s'étant borné à en discuter le bien-fondé au regard des pièces produites, les griefs des deuxième et troisième branches sont nouveaux, mélangés de fait et de droit.
13. Le moyen, irrecevable en ses deux dernières branches, n'est donc pas fondé pour le surplus.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Crédit foncier de France aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Crédit foncier de France et la condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. et Mme [E] et la somme de 1 500 euros à la société MMA IARD ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit janvier deux mille vingt-trois.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Crédit foncier de France
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le CREDIT FONCIER DE FRANCE fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamné in solidum avec la société MBG, à payer aux époux [E] les sommes de 18.084 € au titre du défaut de réalisation du drainage, de 68.774,40 € au titre des désordres affectant la charpente, de 14.268 € au titre du ravalement, de 2.880 € au titre du défaut d'implantation de la construction, de 780 € au titre des honoraires du géomètre-expert, de 59.495,98 € au titre des pénalités de retard, de 49.051,25 € au titre du préjudice locatif, et de 21.584,33 € au titre des factures de matériaux,
1°) ALORS QUE le devoir de conseil et de renseignement du banquier prêteur de deniers s'apprécie au regard des éléments d'information qui lui ont été fournis par l'emprunteur ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que l'offre de prêt émise par le CREDIT FONCIER DE FRANCE avait pour objet de financer « [un] terrain plus construction sans contrat » (arrêt, p. 2) ; que préalablement à l'octroi du prêt aux époux [E], le CREDIT FONCIER DE FRANCE s'était vu remettre deux devis, l'un établi par Monsieur [D] [W], l'autre par la société ARM, les emprunteurs ayant toutefois ultérieurement décidé de confier l'opération de construction à une société MBG, selon contrat de construction de maison individuelle du 10 novembre 2002 (Ibid.) ; que, pour condamner le CREDIT FONCIER DE FRANCE à indemniser les époux [E] des préjudices résultant de l'échec de l'opération immobilière, la cour d'appel a retenu que le devis établi par Monsieur [W] portait la mention « construction de maison individuelle », ce dont elle a déduit que l'opération financée correspondait de façon manifeste pour un professionnel à la construction d'une maison individuelle et qu'il incombait dès lors au CREDIT FONCIER DE FRANCE, qui ne l'avait pas fait, de mettre en garde les emprunteurs des risques qu'ils encouraient en raison de l'absence de garantie de livraison ; qu'en statuant de la sorte, par des motifs impropres à établir que les éléments d'information communiqués préalablement à l'octroi du prêt au CREDIT FONCIER DE FRANCE, qui ne s'était pas vu remettre le contrat finalement conclu par les époux [E] avec une autre entreprise, n'ayant disposé que des devis respectivement établis par Monsieur [W] et par la SARL ARM, dont le premier seulement mentionnait, sans plus de précision quant au cadre juridique de l'opération, « construction d'une maison individuelle », étaient suffisants pour permettre au banquier de savoir que l'opération financée serait placée sous le régime juridique du contrat de construction de maison individuelle, la cour d'appel a violé les articles L. 232-2 et L. 231-6 du code de la construction et de l'habitation, ensemble l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction applicable avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 (nouvel article 1231-1 du code civil) ;
2°) ALORS, EN OUTRE, QUE l'étendue des obligations incombant au prêteur s'apprécie au regard des seuls documents qui lui ont été remis au moment de la conclusion du prêt ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que l'offre de prêt émise par le CREDIT FONCIER DE FRANCE avait pour objet de financer « [un] terrain plus construction sans contrat » (arrêt, p. 2) ; que préalablement à l'octroi du prêt aux époux [E], le CREDIT FONCIER DE FRANCE s'était vu remettre deux devis, l'un établi par Monsieur [D] [W], l'autre par la société ARM, les emprunteurs ayant toutefois ultérieurement décidé de confier l'opération de construction à une société MBG, selon contrat de construction de maison individuelle du 10 novembre 2002 2 (Ibid.) ; qu'en retenant la responsabilité du CREDIT FONCIER DE FRANCE pour ne pas avoir mis en garde les époux [E] des risques qu'ils encouraient en raison de l'absence de garantie de livraison, quand seuls des devis de travaux avaient été communiqués à la banque au moment de l'octroi du crédit et que les emprunteurs avaient finalement décidé, sans en informer la banque, de conclure un contrat de construction de maison individuelle avec une société tierce, en se faisant assister d'un architecte, de sorte qu'aucune faute en lien causal avec le préjudice ne pouvait être reprochée au CREDIT FONCIER DE FRANCE, la cour d'appel a encore violé les articles L. 232-2 et L. 231-6 du code de la construction et de l'habitation, ensemble l'article 1147 (désormais 1231-1) du code civil ;
3°) ALORS, TRES SUBSIDIAIREMENT, QUE le CREDIT FONCIER DE FRANCE faisait valoir (ses conclusions d'appel, p. 2 à 4) que préalablement à l'octroi du prêt aux époux [E], seuls lui avaient été remis les devis respectivement établis par Monsieur [W] et par la SARL ARM, conformément aux stipulations de l'offre de prêt (p. 10), non le devis daté du 6 janvier 2012 établi par la société MBG, finalement choisie par les époux [E] ; qu'en retenant, par motif éventuellement adopté des premiers juges (jugement, p. 18, 2ème §) que l'examen du devis de la société MBG prenant en charge l'intégralité de la construction de la maison aurait dû conduire le prêteur à informer les époux [E] du risque encouru par la signature d'un contrat qui ne prévoyait pas de garantie de livraison, sans rechercher si le CREDIT FONCIER DE FRANCE n'avait pas reçu communication des seuls devis de Monsieur [W] et de la société ARM, ni indiquer de quel élément du dossier elle aurait déduit le fait que le devis de la société MBG avait été communiqué à la banque, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 232-2 et L. 231-6 du code de la construction et de l'habitation, ensemble les articles 1134 et 1147 (désormais 1103 et 1231-1) du code civil).
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)Le CREDIT FONCIER DE FRANCE fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamné in solidum avec la société MBG, à payer aux époux [E] les sommes de 18.084 € au titre du défaut de réalisation du drainage, de 68.774,40 € au titre des désordres affectant la charpente, de 14.268 € au titre du ravalement, de 2.880 € au titre du défaut d'implantation de la construction, de 780 € au titre des honoraires du géomètre-expert, de 59.495,98 € au titre des pénalités de retard, de 49.051,25 € au titre du préjudice locatif, et de 21.584,33 € au titre des factures de matériaux,
1°) ALORS QUE le préjudice résultant du manquement du banquier prêteur de deniers à son devoir de conseil à l'égard du maître de l'ouvrage emprunteur sur les conséquences de l'absence de la garantie de livraison prévue à l'article L. 232-1 g) du code de la construction et de l'habitation consiste en une perte de chance de ne pas contracter ; qu'en jugeant qu'en s'abstenant fautivement de mettre en garde les époux [E], emprunteurs profanes, des risques qu'ils encouraient en raison de l'absence de garantie de livraison, le CREDIT FONCIER DE FRANCE avait causé aux emprunteurs un préjudice consistant dans la privation de la garantie de livraison, quand ce préjudice ne pouvait s'analyser qu'en une perte de chance pour les époux [E], s'ils avaient été mieux informés, de ne pas réaliser l'opération immobilière en cause, ou de la réaliser sous d'autres conditions, la cour d'appel a violé les articles L. 232-2 et L. 231-6 du code de la construction et de l'habitation, ensemble l'article 1147 (désormais 1231-1) du code civil ;
2°) ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE seul est indemnisable le préjudice causé par le manquement contractuel ou la faute du débiteur ; que la garantie de livraison prévue aux articles L. 232-2 et L. 231-6 du code de la construction couvre le maître de l'ouvrage au titre du coût des travaux nécessaires à l'achèvement de l'immeuble, ainsi que des pénalités de retard ; que, pour condamner le CREDIT FONCIER DE FRANCE à payer aux époux [E] des dommages et intérêts au titre de leur préjudice locatif, la cour d'appel a retenu que les pénalités de retard n'excluaient pas la condamnation du garant à des dommages-intérêts pour d'autres préjudices subis par les maîtres de l'ouvrage, et qu'en l'espèce, le CREDIT FONCIER DE FRANCE, qui avait tardé à régler le montant des condamnations prononcées à son encontre par le jugement du tribunal de grande instance de PARIS du 18 avril 2017, assorti de l'exécution provisoire, avait commis « une faute qui lui est propre » à l'origine de l'aggravation du préjudice des époux [E] ; qu'en statuant par de tels motifs, impropres à établir que, si une garantie de livraison avait été souscrite, les époux [E] n'auraient pas subi le préjudice locatif allégué, la cour d'appel a violé l'article 1147 (désormais 1231-1) du code civil, ensemble le principe de réparation intégrale du préjudice ;
3°) ALORS, EN OUTRE, QUE seul est indemnisable le préjudice causé par le manquement contractuel ou la faute du débiteur ; que la cour d'appel a retenu que le CREDIT FONCIER DE FRANCE, qui avait tardé à régler le montant des condamnations prononcées à son encontre par le jugement du tribunal de grande instance de PARIS du 18 avril 2017, assorti de l'exécution provisoire, avait commis « une faute qui lui est propre » à l'origine de l'aggravation du préjudice des époux [E] ; qu'en condamnant le CREDIT FONCIER DE FRANCE à payer aux époux [E] une somme de 49.051,25 € au titre du préjudice locatif, correspondant aux loyers payés par ces derniers au cours de la période de juillet 2013 à février 2019 (arrêt, p. 9 et 10), la cour d'appel a l'article 1147 (devenu 1231-1) du code civil, ensemble le principe de réparation intégrale du préjudice.