LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
CM
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 12 janvier 2023
Cassation
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 35 F-D
Pourvoi n° C 21-17.842
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 JANVIER 2023
Mme [T] [Z], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° C 21-17.842 contre l'arrêt rendu le 21 mai 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 3), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [O] [N],
2°/ à Mme [E] [H], épouse [N],
tous deux domiciliés [Adresse 1],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Delbano, conseiller, les observations de la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de Mme [Z], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. et Mme [N], et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Delbano, conseiller rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 mai 2021) et les productions, par déclaration du 27 mai 2020, Mme [Z] a interjeté appel du jugement rendu par un tribunal d'instance dans un litige portant sur un bail qui lui avait été consenti, ainsi qu'à un tiers, par M. et Mme [N], ayant fait l'objet d'une signification à étude le 2 mars 2018.
2. Un conseiller de la mise en état a déclaré l'appel irrecevable, par une ordonnance qui a été déférée à une cour d'appel.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
3. Mme [Z] fait grief à l'arrêt de confirmer l'ordonnance du conseiller de la mise en état ayant déclaré irrecevable son appel comme étant tardif et de la condamner à payer aux époux [N] une somme de 2 000 euros de dommages-intérêts pour procédure abusive, alors que « si, lors de la signification d'un acte à domicile, personne ne peut ou ne veut recevoir la copie de l'acte, et s'il résulte des vérifications de l'huissier de justice, dont il sera fait mention dans l'acte de signification, que le destinataire demeure bien à l'adresse indiquée, la signification est réputée faite à domicile ou à résidence ; que la seule confirmation du domicile par le voisinage, sans autre précision, n'est pas de nature à établir, en l'absence d'autres diligences, la réalité du domicile du destinataire de l'acte ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevable comme tardif l'appel interjeté par Mme [Z], qu'il résultait de l'acte de signification du jugement que l'huissier s'était bien assuré de la réalité de l'adresse de l'intéressée en obtenant confirmation par un voisin et qu'aucune raison ne commandait que l'huissier recherche par d'autres moyens son adresse, outre que Mme [Z] avait eu connaissance du jugement en 2018 et qu'elle n'avait pas interjeté appel alors, la cour d'appel a violé les articles 655 et 656 du code de procédure civile ».
Réponse de la Cour
Vu les articles 655 et 656 du code de procédure civile :
4. Il résulte de ces textes que si la signification à personne s'avère impossible, l'acte peut être délivré à domicile, l'huissier de justice devant relater dans l'acte les diligences qu'il a accomplies pour effectuer la signification à la personne de son destinataire et les circonstances qui l'en ont empêché, ainsi que les vérifications effectuées pour s'assurer que le destinataire de l'acte demeure bien à l'adresse indiquée.
5. Pour rejeter l'exception de nullité de la signification du jugement du 30 novembre 2017, l'arrêt retient que l'huissier de justice s'est assuré de la réalité de l'adresse de Mme [Z] correspondant à celle du jugement signifié, en obtenant confirmation par un voisin, de sorte qu'il n'avait pas à rechercher par d'autres moyen une adresse.
6. En statuant ainsi, alors que la constatation de la seule vérification auprès d'un voisin est insuffisante à caractériser les diligences requises pour s'assurer de la réalité de ce domicile, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;
Condamne M. et Mme [N] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme [N] et les condamne à payer à Mme [Z] la somme globale de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze janvier deux mille vingt-trois.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Jean-Philippe Caston, avocat aux Conseils, pour Mme [Z]
Mme [Z] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé l'ordonnance du conseiller de la mise en état ayant déclaré irrecevable son appel comme étant tardif et de l'AVOIR condamnée à payer aux époux [N] une somme de 2.000 € de dommages-intérêts pour procédure abusive ;
ALORS QUE si, lors de la signification d'un acte à domicile, personne ne peut ou ne veut recevoir la copie de l'acte, et s'il résulte des vérifications de l'huissier de justice, dont il sera fait mention dans l'acte de signification, que le destinataire demeure bien à l'adresse indiquée, la signification est réputée faite à domicile ou à résidence ; que la seule confirmation du domicile par le voisinage, sans autre précision, n'est pas de nature à établir, en l'absence d'autres diligences, la réalité du domicile du destinataire de l'acte ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevable comme tardif l'appel interjeté par Mme [Z], qu'il résultait de l'acte de signification du jugement que l'huissier s'était bien assuré de la réalité de l'adresse de l'intéressée en obtenant confirmation par un voisin et qu'aucune raison ne commandait que l'huissier recherche par d'autres moyens son adresse, outre que Mme [Z] avait eu connaissance du jugement en 2018 et qu'elle n'avait pas interjeté appel alors, la cour d'appel a violé les articles 655 et 656 du code de procédure civile.