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07/12/2022 | FRANCE | N°21-11319

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 décembre 2022, 21-11319


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

ZB1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 7 décembre 2022

Cassation partielle

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1297 F-D

Pourvoi n° N 21-11.319

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 7 DÉCEMBRE 2022

La société GJF Holding,

société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° N 21-11.319 contre l'arrêt rendu le 19 novembre 2020 par la c...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

ZB1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 7 décembre 2022

Cassation partielle

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1297 F-D

Pourvoi n° N 21-11.319

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 7 DÉCEMBRE 2022

La société GJF Holding, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° N 21-11.319 contre l'arrêt rendu le 19 novembre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 7), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [N] [V], domicilié [Adresse 1],

2°/ à Pôle emploi Direction régionale d'Ile-de-France, dont le siège est [Adresse 3],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Le Lay, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société GJF Holding, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [V], après débats en l'audience publique du 18 octobre 2022 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Le Lay, conseiller rapporteur, M. Seguy, conseiller, et Mme Aubac, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 novembre 2020), M. [V], a été engagé le 29 juin 1995 par la société Eva (la société) et occupait depuis le 19 avril 2012 les fonctions de directeur général du groupe. Son contrat de travail a été transféré le 1er octobre 2014 à la société GJF holding.

2. Licencié pour faute grave le 26 avril 2016, il a saisi la juridiction prud'homale.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

3. La société fait grief à l'arrêt de déclarer le licenciement du salarié dépourvu de cause réelle et sérieuse et de la condamner à lui payer diverses sommes à titre d'indemnité de préavis, des congés payés afférents, de rappel de salaire correspondant à la mise à pied, des congés payés afférents, d'indemnité de licenciement, d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de lui ordonner de rembourser aux organismes concernés les indemnités chômage éventuellement perçues dans la limite d'un mois d'indemnité, alors « que le juge est tenu de ne pas dénaturer les documents de la cause, serait-ce par omission ; qu'en l'espèce, pour considérer que la société ne démontrait pas que le salarié aurait commis une faute en sous-traitant la production des lingettes ‘'Dy lingettes'‘ et ‘'Surface Prop'‘ à une société ne possédant pas toutes les certifications et en déduire que licenciement du salarié était dénué de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a relevé que la société soutenait que les lingettes en cause relevaient d'un dispositif médical et devaient être certifiées mais qu'elle n'invoquait et ne versait aucune pièce, se contentant de procéder par voie d'affirmation quant au caractère médical de ces lingettes ; qu'en statuant ainsi alors que, dans ses conclusions d'appel, au soutien de son affirmation selon laquelle les lingettes ‘'Dy lingettes'‘ et ‘'Surface Prop'‘ relevaient du régime des dispositifs médicaux, la société se référait expressément à sa pièce n° 35, à savoir une attestation de l'organisme GMED dans laquelle les lingettes susvisées étaient bien identifiées comme des dispositifs médicaux, la cour d'appel a dénaturé par omission les conclusions de la société ainsi que sa pièce communiquée n° 35, en violation du principe susvisé ensemble de l'article 4 du Code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'obligation par le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :

4. Pour dire le licenciement non fondé, l'arrêt retient, au titre du second grief imputé au salarié relatif à la sous-traitance de la production des lingettes litigieuses à une société dépourvue des certifications ISO nécessaires, que l'employeur n'invoque et ne verse aucune pièce, se contentant de procéder par voie d'affirmation quant au caractère médical des lingettes litigieuses impliquant d'être produites par une société devant faire l'objet d'une certification.

5. En statuant ainsi, alors que l'employeur produisait à l'appui de ses prétentions, l'attestation de l'organisme GMED dans laquelle les lingettes litigieuses étaient bien identifiées comme relevant de la directive 93/42/CEE relative aux dispositifs médicaux, la cour d'appel qui a dénaturé cette pièce par omission, a violé le principe susvisé.

Et sur le moyen pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

6. La société fait le même grief à l'arrêt, alors « que le juge est tenu de ne pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, pour considérer que le grief tiré de la sous-traitance de lingettes relevant des dispositifs médicaux à une société que le salarié savait ne pas être certifiée et ne pas posséder les normes ISO obligatoires n'était pas établi, la cour d'appel a relevé que la société soutenait que les lingettes ‘'Dy lingettes'‘ et ‘'Surface Prop'‘ dont la production avait été sous-traitée à la société Stenago relevaient d'un dispositif médical et devaient être certifiées mais que le salarié produisait un courrier de l'ANSM du 21 février 2014 précisant que les lingettes en question étaient un produit multi-usage ; qu'en statuant par de tels motifs, alors que le courrier de l'ANSM du 21 février 2014 était relatif au statut des lingettes Prodène D51 et ne portait donc pas sur les lingettes ‘'Dy Lingettes'‘ et ‘'Surface Prop'‘, seules concernées par la sous-traitance à la société Stenago, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du courrier en cause en violation du principe susvisé ensemble de l'article 1134 du Code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

Vu l'obligation par le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :

7. Pour dire le licenciement non fondé, l'arrêt retient encore au titre du second grief imputé au salarié, qu'il résulte de la lettre de l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé du 21 février 2014 produit par l'intéressé que les lingettes litigieuses étaient des produits multi-usages.

8. En statuant ainsi, alors que cette lettre était relative au statut des lingettes Prodène D51 et ne portait pas sur les lingettes « Dy Lingettes » et « Surface Prop », seules concernées par la sous-traitance à une société dépourvue des certifications nécessaires, la cour d'appel, qui en a dénaturé les termes clairs et précis, a violé le principe susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette la demande formée aux fins d'annulation du jugement, l'arrêt rendu le 19 novembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne M. [V] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par le président et par M. Seguy, conseiller, en ayant délibéré en remplacement du conseiller rapporteur empêché en son audience publique du sept décembre deux mille vingt-deux, conformément aux dispositions des articles 452 et 1021 du code de procédure civile.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

MOYEN Produit par la scp lyon-caen et thiriez, avocat aux conseils, pour la société gjf holding

La société GJF HOLDING fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré le licenciement de Monsieur [V] dépourvu de cause réelle et sérieuse et de l'avoir condamnée à payer à Monsieur [V] diverses sommes à titre d'indemnité de préavis, des congés payés afférents, de rappel de salaire correspondant à la mise à pied, des congés payés afférents, d'indemnité de licenciement, d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et d'avoir ordonné à la société GJF HOLDING de rembourser aux organismes concernés les indemnités chômage éventuellement perçues par Monsieur [V] dans la limite d'un mois d'indemnité ;

ALORS en premier lieu QU'en vertu de l'article L. 1332-4 du Code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales ; que constitue l'employeur au sens de ces dispositions, le représentant légal de la société ou le supérieur hiérarchique du salarié concerné ; qu'en l'espèce, pour considérer que le grief tiré de la vente, depuis septembre 2015, de savons liquides sous une étiquette non conforme était prescrit depuis plusieurs mois lors de l'engagement de la procédure de licenciement, la Cour d'appel a retenu, par motifs propres et adoptés, que la société GJF HOLDING était informée, dès le 16 septembre 2015, que les savons en cause allaient être commercialisés sous une étiquette non conforme puisque cette décision avait été prise au cours d'une réunion tenue à cette date et à laquelle « la direction », dont Monsieur [B] [R], directeur général et membre du comité de direction de la société GJF HOLDING, avait assisté, peu important que l'organe dirigeant de la société n'en ait pas été informé ; qu'en statuant par de tels motifs, sans rechercher si le président de la société GJF HOLDING ou, à tout le moins, une personne titulaire d'un pouvoir hiérarchique sur Monsieur [V] avait eu connaissance de ces faits avant le 14 mars 2016, date à laquelle le président nouvellement nommé de la société en a été fortuitement informé, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article L. 1332-4 du Code du travail ;

ALORS en deuxième lieu QUE le juge est tenu de ne pas dénaturer les documents de la cause, serait-ce par omission ; qu'en l'espèce, pour considérer que la société GJF HOLDING ne démontrait pas que Monsieur [V] aurait commis une faute en sous-traitant la production des lingettes « Dy lingettes » et « Surface Prop » à une société ne possédant pas toutes les certifications et en déduire que licenciement du salarié était dénué de cause réelle et sérieuse, la Cour d'appel a relevé que la société exposante soutenait que les lingettes en cause relevaient d'un dispositif médical et devaient être certifiées mais qu'elle n'invoquait et ne versait aucune pièce, se contentant de procéder par voie d'affirmation quant au caractère médical de ces lingettes ; qu'en statuant ainsi alors que, dans ses conclusions d'appel, au soutien de son affirmation selon laquelle les lingettes « Dy lingettes » et « Surface Prop » relevaient du régime des dispositifs médicaux, la société GJF HOLDING se référait expressément à sa pièce n°35, à savoir une attestation de l'organisme GMED dans laquelle les lingettes susvisées étaient bien identifiées comme des dispositifs médicaux, la Cour d'appel a dénaturé par omission les conclusions de la société GJF HOLDING ainsi que sa pièce communiquée n° 35, en violation du principe susvisé ensemble de l'article 4 du Code de procédure civile ;

ALORS en troisième lieu QUE le juge est tenu de ne pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, pour considérer que le grief tiré de la sous-traitance de lingettes relevant des dispositifs médicaux à une société que Monsieur [V] savait ne pas être certifiée et ne pas posséder les normes ISO obligatoires n'était pas établi, la Cour d'appel a relevé que la société GJF HOLDING soutenait que les lingettes « Dy lingettes » et « Surface Prop » dont la production avait été sous-traitée à la société STENAGO, relevaient d'un dispositif médical et devaient être certifiées mais que Monsieur [V] produisait un courrier de l'ANSM du 21 février 2014 précisant que les lingettes en question étaient un produit multi-usage ; qu'en statuant par de tels motifs alors que le courrier de l'ANSM du 21 février 2014 (pièce n° 73 communiquée par Monsieur [V]) était relatif au statut des lingettes Prodène D51 et ne portait donc pas sur les lingettes « Dy Lingettes » et « Surface Prop », seules concernées par la sous-traitance à la société STENAGO, la Cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du courrier en cause en violation du principe susvisé ensemble de l'article 1134 du Code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

ALORS en quatrième lieu et en tout état de cause QUE les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, pour considérer que le grief tiré de la sous-traitance de lingettes relevant des dispositifs médicaux à une société que Monsieur [V] savait ne pas être certifiée et ne pas posséder les normes ISO obligatoires n'était pas établi, la Cour d'appel a relevé que la société GJF HOLDING soutenait que les lingettes « Dy lingettes » et « Surface Prop » dont la production avait été sous-traitée à la société STENAGO, relevaient d'un dispositif médical et devaient être certifiées mais n'invoquait et ne versait aucune pièce et que Monsieur [V] produisait, pour sa part, un courrier de l'ANSM du 21 février 2014 précisant que les lingettes en question étaient un produit multi-usage ; qu'en se fondant ainsi sur ce seul courrier de l'ANSM versé aux débats par Monsieur [V] sans avoir examiné les éléments preuve versés aux débats par la société GJF HOLDING tendant à démontrer que les lingettes en cause étaient des dispositifs médicaux et, en particulier, sa pièce n° 35, à savoir une attestation de l'organisme GMED dans laquelle les lingettes susvisées étaient bien identifiées comme des dispositifs médicaux, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-11319
Date de la décision : 07/12/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 19 novembre 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 07 déc. 2022, pourvoi n°21-11319


Composition du Tribunal
Président : Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 13/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.11319
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