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10/11/2022 | FRANCE | N°21-10013

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 10 novembre 2022, 21-10013


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 10 novembre 2022

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 1145 F-D

Pourvoi n° T 21-10.013

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 NOVEMBRE 2022

M. [Z] [J], domicilié [Adresse 3], a formé le pourvoi n° T 21

-10.013 contre l'arrêt rendu le 27 septembre 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 13), dans le litige l'opposant :

1°/ à la caisse...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 10 novembre 2022

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 1145 F-D

Pourvoi n° T 21-10.013

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 NOVEMBRE 2022

M. [Z] [J], domicilié [Adresse 3], a formé le pourvoi n° T 21-10.013 contre l'arrêt rendu le 27 septembre 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 13), dans le litige l'opposant :

1°/ à la caisse primaire d'assurance maladie de Paris, direction du contentieux et de la lutte contre la fraude - pôle contentieux général, dont le siège est [Localité 2],

2°/ au ministre chargé de la sécurité sociale, domicilié [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Coutou, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de M. [J], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de Paris, après débats en l'audience publique du 27 septembre 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Coutou, conseiller rapporteur, M. Rovinski, conseiller le plus ancien faisant fonction de doyen, et Mme Catherine, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 septembre 2019), M. [J], salarié de la société [4], entreprise de travail temporaire (la victime), a été victime le 6 mars 2014 d'un accident du travail au cours d'une mission.

2. La caisse primaire d'assurance maladie de Paris a fait application, pour le calcul des indemnités journalières qu'elle lui a versées, des dispositions de l'article R. 433-4, 5°, du code de la sécurité sociale, estimant que son travail en qualité d'intérimaire constituait une activité à caractère discontinu.

3. La victime a saisi une juridiction de sécurité sociale d'un recours, en contestant le calcul opéré par la caisse.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses troisième, quatrième et cinquième branches, ci-après annexées

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. La victime fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors « 1°/ que selon l'article R. 433-6 du code de la sécurité sociale, le salaire journalier servant de base au calcul de l'indemnité journalière prévue à l'article L. 433-1 est déterminé comme si la victime avait travaillé pendant le mois, les 28 jours, les trois mois ou les 12 mois dans les mêmes conditions, lorsque la victime avait changé d'emploi au cours de la période à considérer ; que dans ce cas, le salaire de base est déterminé à partir du salaire afférent à l'emploi occupé au moment de l'arrêt de travail ; que constituent un nouvel emploi les missions d'intérim trouvées après une période de chômage total ; qu'en l'espèce, il est acquis aux débats qu'au moment de l'accident de travail du 6 mars 2014, la victime était salariée d'une entreprise de travail temporaire, mais n'avait, en 2013, travaillé que sur de courtes périodes, ce dont il résultait qu'après avoir quitté un précédent emploi, et avait à partir de février 2014 retrouvé une situation stable de salarié intérimaire et avait, au sens de l'article R. 433-6, changé d'emploi au cours de la période à considérer, de sorte que le salaire de base devait être déterminé à partir du salaire afférent à l'emploi occupé au moment de son arrêt de travail, soit 1/30,42 de la rémunération de référence correspondant au dernier salaire mensuel augmenté des indemnités de congés payés, soit la somme de 1 930,48 euros x 1/30,42 = 63,46 euros ; qu'en décidant le contraire et en rejetant la demande principale de la victime, la cour d'appel a violé l'article R. 433-6 du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

6. Selon l'article R. 433-6, 4°, du code de la sécurité sociale, lorsque la victime a changé d'emploi au cours de la période à considérer, le salaire journalier de base est déterminé comme si la victime avait travaillé pendant le mois, les vingt-huit jours, les trois mois ou les douze mois, dans les mêmes conditions.

7. L'arrêt retient que pendant les douze mois ayant précédé l'arrêt de travail consécutif à l'accident, la victime n'a travaillé que pour un seul employeur, la société d'interim [4]. Il ajoute que la victime se réfère dans ses écritures aux « missions d'intérim trouvées à compter de janvier 2014 », soit à une période de référence de deux mois pendant laquelle il a été employé par cette seule société et a effectué en qualité de veilleur de nuit des missions de même nature que ses missions antérieure.

8. De ces constatations, la cour d'appel a déduit à bon droit que la victime ne pouvait se prévaloir des dispositions de l'article R. 433-6, 4°, du code de la sécurité sociale.

9. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

10. La victime fait le même grief à l'arrêt, alors « 2°/ subsidiairement que selon l'article R. 433-4, 1°, du code de la sécurité sociale, le salaire journalier servant de base au calcul de l'indemnité journalière prévue à l'article L. 433-1 est déterminé comme suit : « 1/30,42 du montant de la ou des deux dernières payes antérieures à la date de l'arrêt de travail, si le salaire est réglé mensuellement ou deux fois par mois » ; qu'en l'espèce, la victime ayant travaillé 8 mois avant son accident du travail, il devait bénéficier en application de ce texte d'un salaire journalier sur la base d'1/30,42 du montant de dernière paie antérieure à la date de l'arrêt de travail ; qu'en décidant que n'étaient dues que des indemnités journalières d'un montant d'1/365 du montant du salaire des 12 mois antérieurs à l'accident de travail par application de l'article R. 433-4, 5°, et en rejetant sa demande subsidiaire, la cour d'appel a pour le moins violé l'article R. 433-4 du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

11. Selon l'article R. 433-4, 1°, du code de la sécurité sociale, le salaire journalier servant de base au calcul de l'indemnité journalière prévue à l'article L. 433-1 est déterminé comme suit : 1/30,42 du montant de la ou des deux dernières payes antérieures à la date de l'arrêt de travail, si le salaire est réglé mensuellement ou deux fois par mois.

12. Selon l'article R. 433-4, 5°, du code de la sécurité sociale, le salaire journalier servant de base au calcul de l'indemnité journalière prévue à l'article L. 433-1 est déterminé en prenant en compte 1/365 du montant du salaire des douze mois antérieurs à la date de l'arrêt de travail, lorsque l'activité de l'entreprise n'est pas continue ou présente un caractère saisonnier ou lorsque la victime exerce une profession de manière discontinue.

13. Ayant constaté que la victime était un salarié intérimaire, de sorte qu'elle exerçait une profession de manière discontinue, la cour d'appel en a déduit à bon droit qu'elle relevait des seules dispositions de l'article R. 433-4, 5°, du code de la sécurité sociale.

14. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [J] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix novembre deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour M. [J]

M. [J] fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir rejeté ses demandes ;

Alors 1°) que selon l'article R. 433-6 du code de la sécurité sociale, le salaire journalier servant de base au calcul de l'indemnité journalière prévue à l'article L. 433-1 est déterminé comme si la victime avait travaillé pendant le mois, les 28 jours, les trois mois ou les 12 mois dans les mêmes conditions, lorsque la victime avait changé d'emploi au cours de la période à considérer ; que dans ce cas, le salaire de base est déterminé à partir du salaire afférent à l'emploi occupé au moment de l'arrêt de travail ; que constituent un nouvel emploi les missions d'intérim trouvées après une période de chômage total ; qu'en l'espèce, il est acquis aux débats qu'au moment de l'accident de travail du 6 mars 2014, M. [J] était salarié d'une entreprise de travail temporaire, mais n'avait, en 2013, travaillé que sur de courtes périodes, ce dont il résultait qu'après avoir quitté un précédent emploi, et avait à partir de février 2014 retrouvé une situation stable de salarié intérimaire et avait, au sens de l'article R. 433-6, changé d'emploi au cours de la période à considérer, de sorte que le salaire de base devait être déterminé à partir du salaire afférent à l'emploi occupé au moment de son arrêt de travail, soit 1/30,42 de la rémunération de référence correspondant au dernier salaire mensuel augmenté des indemnités de congés payés, soit la somme de 1 930,48 euros x 1/30,42 = 63,46 euros ; qu'en décidant le contraire et en rejetant la demande principale de M. [J], la cour d'appel a violé l'article R. 433-6 du code de la sécurité sociale ;

Alors 2°) et subsidiairement que selon l'article R. 433-4 1° du code de la sécurité sociale, le salaire journalier servant de base au calcul de l'indemnité journalière prévue à l'article L. 433-1 est déterminé comme suit : « 1/30,42 du montant de la ou des deux dernières payes antérieures à la date de l'arrêt de travail, si le salaire est réglé mensuellement ou deux fois par mois » ; qu'en l'espèce, M. [J] ayant travaillé 8 mois avant son accident du travail, il devait bénéficier en application de ce texte d'un salaire journalier sur la base d'1/30,42 du montant de dernière paie antérieure à la date de l'arrêt de travail ; qu'en décidant que n'étaient dues que des indemnités journalières d'un montant d'1/365 du montant du salaire des 12 mois antérieurs à l'accident de travail par application de l'article R. 433-4 5° et en rejetant sa demande subsidiaire, la cour d'appel a pour le moins violé l'article R. 433-4 du code de la sécurité sociale ;

Alors 3°) qu'en tout état de cause, l'article L. 433-I du code de la sécurité sociale est contraire au 11e alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 selon lequel la Nation « garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de travailler a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence » et à l'article 6 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789 qui dispose que « La Loi (?) doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. Tous les Citoyens étant égaux à ses yeux sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents », en tant que la loi ne garantit pas aux travailleurs privés de leur emploi du fait d'un accident du travail les moyens suffisants pour subvenir aux besoins de l'existence en contrepartie de leurs cotisations et porte de surcroît une atteinte injustifiée au principe d'égalité devant la loi entre des travailleurs exerçant à temps complet au jour de l'accident du travail, selon qu'ils ont cotisé ou non sur un salaire continu et à plein temps au cours de la période de référence précédant l'accident ; que la déclaration d'inconstitutionnalité qui sera prononcé entraînera la perte de fondement légal de l'arrêt attaqué ;

Alors 4°) et en tout état de cause qu'il incombe au juge de vérifier concrètement que l'application d'une règle de droit interne ne porte pas une atteinte disproportionnée ou excessive aux droits que le requérant tient de l'article 1er du Protocole n° 1 additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales qui reconnaît à chacun le droit « au respect de ses biens », parmi lesquels se trouvent les prestations sociales ; qu'en l'espèce, en appliquant l'article R. 433-4 5° du code de la sécurité sociale, et en ne faisant pas, sans motif légitime, bénéficier M. [J], victime d'un accident du travail, d'indemnités journalières suffisantes et équivalentes à celles d'un salarié percevant le même salaire au moment de l'accident, payant les mêmes cotisations et subissant le même préjudice, sans vérifier que l'application de la règle ne portait pas une atteinte disproportionnée ou excessive aux droits du requérant, laquelle résultait de ce que l'application de la règle engendrait après l'accident du travail une baisse de 60 % de ses revenus, la cour d'appel a violé l'article 1er du premier Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article 14 de la Convention ;

Alors 5°) qu'en ne faisant pas bénéficier M. [J], victime d'un accident du travail, d'indemnités journalières équivalentes à celles dont aurait bénéficié un salarié victime d'un accident du travail ayant travaillé à temps complet, la cour d'appel a violé l'article L. 3123-5 du code du travail, ensemble la convention OIT n° 175 sur le travail à temps partiel.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 21-10013
Date de la décision : 10/11/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 27 septembre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 10 nov. 2022, pourvoi n°21-10013


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SARL Cabinet Rousseau et Tapie, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.10013
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