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28/09/2022 | FRANCE | N°21-15154

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 septembre 2022, 21-15154


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CDS

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 28 septembre 2022

Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1024 F-D

Pourvoi n° F 21-15.154

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 28 SEPTEMBRE 2022

Le comité social et économique de la soc

iété Fiat Chrysler finance et services, dont le siège est [Adresse 1], venant aux droits du comité d'entreprise de la société Fiat Chrysler finan...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CDS

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 28 septembre 2022

Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1024 F-D

Pourvoi n° F 21-15.154

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 28 SEPTEMBRE 2022

Le comité social et économique de la société Fiat Chrysler finance et services, dont le siège est [Adresse 1], venant aux droits du comité d'entreprise de la société Fiat Chrysler finance et services, a formé le pourvoi n° F 21-15.154 contre l'arrêt rendu le 18 février 2021 par la cour d'appel de Versailles (6e chambre), dans le litige l'opposant à la société Fiat Chrysler finance et services, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rinuy, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat du comité social et économique de la société Fiat Chrysler finance et services, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Fiat Chrysler finance et services, après débats en l'audience publique du 29 juin 2022 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rinuy, conseiller rapporteur, Mme Ott, conseiller, Mme Laulom, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 18 février 2021), le groupe Fiat Chrysler finance et services est spécialisé dans l'automobile et dans l'équipement automobile. La société Fiat France FFSA, qui en était alors la société mère, ayant décidé de mettre en place un régime de préretraite d'entreprise, ce régime, dit Agra, a été mis en place par le biais d'un accord atypique en date du 31 mai 1972 conclu entre elle et la délégation du personnel du comité central d'entreprise. L'accord prévoyait que les salariés, qui en faisaient la demande, pouvaient cesser leur activité professionnelle avant l'âge de 65 ans, à condition de remplir une condition d'ancienneté fixée par l'accord et d'en faire la demande trois mois avant la date de départ retenue. Aux termes de l'accord, les salariés bénéficiaires percevaient une allocation de préretraite égale à 75 % des salaires bruts précédemment perçus jusqu'à la date de liquidation de leur pension de retraite qui ne devait pas intervenir avant 65 ans. Ce régime est entré en vigueur au sein de la société Fiat France FFSA, à compter du 1er juillet 1972 et a été confié à un organisme extérieur dénommé Agra. Il a fait l'objet de plusieurs avenants de 1973 à 1976. À compter de la fin des années 1990 et au début des années 2000, le groupe Fiat France a fait l'objet d'une réorganisation conduisant en 2001 à une filialisation de ses activités de service au sein de la société Business Solutions France Fiat Group SAS, devenue depuis la société Fiat Chrysler finance et services (la société). L'apport de certaines des activités de la société Fiat France à la société a conduit au transfert des contrats de travail de 118 salariés de la société Fiat France à la société, par application de l'article L. 1224-1 du code du travail, à la date du 1er juin 2001. À partir du mois de mai 2012, les élus du comité d'entreprise de la société ont demandé à la direction d'appliquer l'accord Agra.

2. A compter de l'été 2014, une procédure d'information - consultation sur un projet de dénonciation de l'accord Agra a été introduite par la société tandis que, par lettres recommandées avec accusés de réception courant septembre 2014, la direction a informé individuellement les salariés de cette dénonciation moyennant le respect d'un délai de prévenance de trois mois.

3. Par acte du 22 août 2017, le comité d'entreprise a saisi le tribunal de grande instance aux fins d'annulation de la procédure d'information - consultation de dénonciation de l'accord Agra. Le comité social et économique de la société (le comité social et économique) a poursuivi l'instance en lieu et place du comité d'entreprise.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses troisième, quatrième et cinquième branches, ci-après annexé

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches

Enoncé du moyen

5. Le comité social et économique fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes, alors :

« 1°/ que la dénonciation d'un usage, engagement unilatéral ou accord atypique en vigueur dans l'entreprise, n'a pas à être précédée d'une consultation des institutions représentatives du personnel au sens de l'article L. 2325-15, mais seulement d'une information ; qu'en retenant, pour juger valable la signature des ordres du jour des réunions uniquement par Mme [T], directrice des ressources humaines, que la consultation du comité d'entreprise était obligatoire, cependant que la dénonciation de l'accord atypique Agra devait donner lieu, non pas une consultation, mais à une information donnée aux institutions représentatives du personnel, ce que le CSE avait rappelé en faisant valoir que c'est la société qui a décidé unilatéralement de consulter le CE et pas simplement de l'informer", la cour d'appel a violé l'article L. 2325-15 du code du travail ;

2°/ en tout état de cause que dans les entreprises de 50 salariés et plus, la consultation du comité d'entreprise doit commencer par l'élaboration conjointe de l'ordre du jour de la réunion par le représentant de l'employeur et le secrétaire du CE ; que si l'un d'eux s'oppose à l'inscription d'une question, l'autre peut l'inscrire de plein droit dans la mesure où la consultation des élus est obligatoire ; que néanmoins, préalablement, une tentative d'élaboration conjointe est obligatoire et qu'un entretien en vue d'une fixation conjointe doit être proposé ; qu'en se bornant à retenir, pour juger régulier l'établissement de l'ordre du jour par Mme [T] (directrice des ressources humaines) seule, que la direction s'était heurtée au refus de signature de Mme [E] pour arrêter l'ordre du jour des réunions d'information et de consultation du comité d'entreprise, sans avoir recherché, ainsi qu'elle y était invitée, si la société FCFS justifiait d'une recherche de rendez-vous, même par mail, pour tenter de voir fixer conjointement l'ordre du jour, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2325-15 du code du travail. »

Réponse de la Cour

6. D'abord, le comité social et économique invoquait dans ses conclusions d'appel que le comité d'entreprise devait être consulté sur le projet de dénonciation, de sorte que le moyen, pris en sa première branche, est contraire à la position soutenue devant les juges du fond.

7. Ensuite, il résulte de l'article L. 2325-15 du code du travail, alors applicable, que si l'ordre du jour des réunions du comité d'entreprise est en principe arrêté par l'employeur et le secrétaire, lorsque sont en cause des consultations rendues obligatoires par une disposition législative, réglementaire ou par un accord collectif de travail, elles y sont inscrites de plein droit par l'employeur ou le secrétaire.

8. La cour d'appel, qui a relevé qu'il ressortait des attestations produites aux débats que la direction de la société s'était rapprochée de la secrétaire du comité d'entreprise aux fins d'arrêter l'ordre du jour des réunions d'information et de consultation du comité d'entreprise sur le projet de dénonciation du régime de préretraite et s'était heurtée à un refus de signature, contesté par la secrétaire du comité d'entreprise sans autre précision, alors que le comité social et économique invoquait lui-même le caractère obligatoire de la consultation, a, par ces seuls motifs et sans être tenue d'effectuer des recherches complémentaires, légalement justifié sa décision.

9. Le moyen, irrecevable en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne le comité social et économique de la société Fiat Chrysler finance et services aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit septembre deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour le comité social et économique de la société Fiat Chrysler finance et services

Le CSE de la société Fiat Chrysler Finance et Services fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir débouté de ses demandes ;

Alors 1°) que la dénonciation d'un usage, engagement unilatéral ou accord atypique en vigueur dans l'entreprise, n'a pas à être précédée d'une consultation des institutions représentatives du personnel au sens de l'article L. 2325-15, mais seulement d'une information ; qu'en retenant, pour juger valable la signature des ordres du jour des réunions uniquement par Mme [T], directrice des ressources humaines, que la consultation du comité d'entreprise était obligatoire, cependant que la dénonciation de l'accord atypique Agra devait donner lieu, non pas une consultation, mais à une information donnée aux institutions représentatives du personnel, ce que le CSE avait rappelé en faisant valoir que « c'est la société qui a décidé unilatéralement de consulter le CE et pas simplement de l'informer » (conclusions d'appel du CSE p. 9, 1er §), la cour d'appel a violé l'article L. 2325-15 du code du travail ;

Alors 2°) et en tout état de cause, que dans les entreprises de 50 salariés et plus, la consultation du comité d'entreprise doit commencer par l'élaboration conjointe de l'ordre du jour de la réunion par le représentant de l'employeur et le secrétaire du CE ; que si l'un d'eux s'oppose à l'inscription d'une question, l'autre peu l'inscrire de plein droit dans la mesure où la consultation des élus est obligatoire ; que néanmoins, préalablement, une tentative d'élaboration conjointe est obligatoire et qu'un entretien en vue d'une fixation conjointe doit être proposé ; qu'en se bornant à retenir, pour juger régulier l'établissement de l'ordre du jour par Mme [T] (directrice des ressources humaines) seule, que la direction s'était heurtée au refus de signature Mme [E] pour arrêter l'ordre du jour des réunions d'information et de consultation du comité d'entreprise, sans avoir recherché, ainsi qu'elle y était invitée (conclusions d'appel du CSE p. 6), si la société FCFS justifiait d'une recherche de rendez-vous, même par mail, pour tenter de voir fixer conjointement l'ordre du jour, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2325-15 du code du travail ;

Alors 3°) que le CHSCT est consulté avant toute décision d'aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail ; qu'en l'espèce, en ne recherchant pas, ainsi qu'elle y était invitée (conclusions d'appel du CSE p. 7 à 9), si la dénonciation de l'accord Agra qui permettait à des salariés de partir en préretraite, qui allait prolonger la durée du travail et reporter la date de départ en retraite jusqu'à 7 ans, ne comportait pas, nécessairement, de graves conséquences sur la santé physique et morale des salariés priver de la possibilité de pouvoir quitter plus tôt la société, de sorte que la dénonciation nécessitait la consultation préalable du CHSCT, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 4612-8-1 du code du travail ;

Alors 4°) que pour satisfaire aux conditions de l'article L. 2325-5 du code du travail, l'information donnée aux membres du comité d'entreprise, doit non seulement être déclarée confidentielle par l'employeur, mais encore être de nature confidentielle, au regard des intérêts légitimes de l'entreprise, ce qu'il appartient à l'employeur d'établir ; qu'en l'espèce, pour juger l'information donnée régulière, l'arrêt relève que la société FCFS avait remis le 15 juillet 2014 une vue de l'information/consultation du comité d'entreprise un document, que les procès-verbaux des réunions des 21 juillet et 8 septembre 2014 justifiaient la nécessité de dénoncer l'accord et que Mme [T] explicitait que « certaines données personnelles » avaient été déclarées confidentielles pour ne pas créer de jalousie entre salariés, l'annexe à la note du 15 juillet 2014 comportant des informations nominatives sur 23 salariés ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée par le CSE qui soutenait que « la direction a souhaité que l'information précédent la consultation soit classée confidentielle ce qui a empêché les élus de communiquer et de prendre l'avis de leurs collègues salariés ; alors même que la direction n'a donné aucune explication recevable pour justifier de cette confidentialité » (conclusions d'appel du CSE p. 9 et 10), si la société n'avait pas placé l'intégralité des informations et documents adressés au CE sous le sceau de la confidentialité sans justifier de la nécessité d'assurer la protection de l'ensemble des données contenues dans ces documents, ce dont il résultait que l'employeur avait porté une atteinte illicite aux prérogatives des membres du comité d'entreprise dans la préparation des réunions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2325-5 du code du travail ;

Alors 5°) que le juge ne peut dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, en retenant que le comité d'entreprise n'expliquait pas en quoi la durée de préavis de trois mois était insuffisante (arrêt p. 6, antépénultième §), cependant que le CSE avait fait valoir que l'insuffisance du délai résultait de ce que la société Fiat Chrysler automobiles, société du même groupe et sur le même site, avait retenu un délai de prévenance de 6 mois pour ce même accord (conclusions d'appel du CSE p. 10), soit le double, la cour d'appel a ainsi dénaturé ses conclusions et violé l'article 4 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21-15154
Date de la décision : 28/09/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 18 février 2021


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 sep. 2022, pourvoi n°21-15154


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Cabinet Rousseau et Tapie, SCP Célice, Texidor, Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 04/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:21.15154
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