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30/03/2022 | FRANCE | N°19-22846

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 30 mars 2022, 19-22846


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 mars 2022

Cassation partielle

M. MOLLARD, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 223 F-D

Pourvoi n° A 19-22.846

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 30 MARS 2022
>1°/ M. [P] [O],

2°/ Mme [Z] [X], épouse [O],

domiciliés tous deux [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° A 19-22.846 contre l'arrêt rendu le 3 ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 mars 2022

Cassation partielle

M. MOLLARD, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 223 F-D

Pourvoi n° A 19-22.846

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 30 MARS 2022

1°/ M. [P] [O],

2°/ Mme [Z] [X], épouse [O],

domiciliés tous deux [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° A 19-22.846 contre l'arrêt rendu le 3 juillet 2019 par la cour d'appel de Montpellier (1re chambre B), dans le litige les opposant à la société Banque privée européenne (BPE), société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Fevre, conseiller, les observations de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de M. et Mme [O], de la SCP Spinosi, avocat de la société Banque privée européenne, après débats en l'audience publique du 8 février 2022 où étaient présents M. Mollard, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Fevre, conseiller rapporteur, M. Ponsot, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 3 juillet 2019), le 10 avril 2008, M. et Mme [O] ont acquis, sous condition suspensive d'obtention d'un prêt de 337 000 euros, un ensemble immobilier à rénover, en vue d'y créer trois logements à usage locatif et un appartement à usage de résidence principale.

2. Pour financer ce projet, la société Banque privée européenne (la banque) leur a consenti, selon une offre acceptée le 3 mai 2008, un prêt relais de 240 000 euros, remboursable en une seule échéance à l'expiration d'un délai de deux ans, dans l'attente de la vente d'un bien immobilier appartenant aux emprunteurs, et un prêt amortissable de 171 500 euros, remboursable en 25 ans.

3. L'immeuble de M. et Mme [O] n'ayant pas été vendu dans le délai de deux ans, et ceux-ci ayant été défaillants dans le remboursement du prêt relais et dans le paiement de plusieurs échéances du prêt amortissable, la banque a, le 27 septembre 2010, prononcé la déchéance du terme et les a assignés en paiement des deux prêts. Ils lui ont opposé un manquement à son devoir de mise en garde et ont demandé, reconventionnellement, sa condamnation au paiement de dommages-intérêts.

Sur le moyen, pris en ses troisième, quatrième, cinquième, sixième et septième branches, ci-après annexé

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. M. et Mme [O] font grief à l'arrêt de rejeter leur demande tendant à la condamnation de la banque à leur payer, à titre de dommages-intérêts, une somme excédant la somme de 20 000 euros, alors « que le préjudice subi par un emprunteur né du manquement par un établissement de crédit à l'obligation de mise en garde à laquelle il est tenu à son égard s'analyse en la perte de chance de ne pas contracter le prêt que cet établissement de crédit lui a consenti et d'éviter le risque, qui s'est réalisé, d'endettement excessif né de l'octroi de ce prêt ; qu'en conséquence, lorsque le juge retient qu'un établissement de crédit a manqué à l'obligation de mise en garde à laquelle il était tenu à l'égard d'un emprunteur auquel il a consenti un prêt, il ne peut totalement débouter cet emprunteur de son action en responsabilité à l'encontre de cet établissement de crédit pour manquement à son obligation de mise en garde que s'il était certain que, si l'établissement de crédit avait exécuté son obligation de mise en garde à son égard, l'emprunteur aurait tout de même contracté ce prêt ou que si le risque d'endettement excessif né de l'octroi de ce prêt ne s'est pas réalisé ; qu'en énonçant, dès lors, après avoir retenu que la banque avait manqué, relativement au crédit relais qu'elle leur avait consenti, à son obligation de mise en garde à l'égard de M. et Mme [O], pour écarter toute indemnisation de ces derniers résultant d'un tel manquement, que, manifestement, M. et Mme [O] tenaient à leur projet, de sorte qu'ils ne démontraient pas de préjudice de perte de chance de ne pas contracter ce prêt relais, quand de tels motifs étaient impropres à caractériser qu'il était certain que, si la banque avait exécuté son obligation de mise en garde à leur égard, M. et Mme [O] auraient tout de même souscrit ce même prêt relais ou que le risque d'endettement excessif né de l'octroi de ce prêt ne s'était pas réalisé, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1147 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 :

6. Il résulte de ce texte que constitue une perte de chance réparable, la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable.

7. Pour rejeter la demande d'indemnisation d'une perte de chance au titre d'un manquement de la banque à son obligation de mise en garde, l'arrêt, après avoir relevé que la banque n'a pas mis en garde les emprunteurs sur le caractère très risqué de l'opération résultant des fluctuations du marché immobilier et de la situation de l'immeuble à vendre, lesquelles rendaient très aléatoire la possibilité de le vendre dans le délai de deux ans à un prix permettant de rembourser le prêt relais à son terme, alors que la vente de cet immeuble était indispensable dans le montage financier de l'opération, retient que les emprunteurs, qui tenaient manifestement à leur projet immobilier, ne démontrent pas de préjudice de perte de chance de ne pas contracter le prêt relais.

8. En statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l'absence de toute perte de chance de ne pas contracter le prêt relais ou de le contracter à d'autres conditions, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, infirmant le jugement entrepris sur le montant des dommages-intérêts alloués à M. et Mme [O] venant en compensation partielle de la créance de la banque, sur les frais irrépétibles et sur les dépens, il condamne la société Banque privée européenne à payer à M. et Mme [O] la somme de 20 000 euros à titre dommages-intérêts, venant, par compensation partielle, en déduction de leur condamnation au titre du prêt « Modulimmo » n° 0495 5839649 05, dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et condamne M. et Mme [O] aux entiers dépens, l'arrêt rendu le 3 juillet 2019 entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;

Condamne la société Banque privée européenne aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Banque privée européenne et la condamne à payer à M. et Mme [O] la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente mars deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Yves et Blaise Capron, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [O].

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté M. et Mme [P] [O] de leur demande tendant à la condamnation de la société Banque privée européenne à leur payer, à titre de dommages et intérêts, une somme excédant la somme de 20 000 euros ;

AUX MOTIFS QUE « sur la responsabilité de la banque : Dans l'arrêt dont il est fait opposition, la cour infirmant le jugement sur ce point, retenait essentiellement la carence probatoire des époux [O] dans leurs prétentions. / Dans la présente instance, il est bien démontré que la banque a eu le souci de prendre pour elle-même plusieurs garanties - cession des loyers caution solidaire de Garantie habitat d'un montant de 411 500 € et ordre irrévocable au notaire de verser le produit de la vente de la maison de [Localité 3] - sans mettre en garde les emprunteurs sur le caractère particulièrement risqué pour eux de cette opération, notamment en ce que les fluctuations du marché immobilier et la situation de leur maison à [Localité 3] rendaient très aléatoire la possibilité de pouvoir vendre ce bien dans le délai de deux ans à un prix leur permettant de rembourser le crédit relais. / Toutefois, si les époux [O] ont mis en vente leur bien à [Localité 3] au prix initial de 390 000 €, compte tenu de deux estimations immobilières aux prix " net vendeur " respectifs de 330 000 € et 340 000 €, la banque avait prudemment tenu compte de cet aléa, en ne retenant qu'un crédit relais de 240 000 €, dont le coût total de crédit, même dans l'avenant de prolongation, restait bien inférieur aux estimations immobilières. / Il est évident que la vente de leur maison à [Localité 3] était indispensable dans le montage de l'opération, les revenus modestes des époux [O] ne permettant pas à l'époque qu'il leur soit accordé un crédit amortissable pour financer la totalité du projet. / Or, manifestement, ils tenaient à ce projet, de sorte qu'ils ne démontrent pas de préjudice de perte de chance de ne pas contracter ce prêt relais. / Par ailleurs, les époux [O] ne peuvent utilement se plaindre d'une sous-estimation du montant des travaux et de l'absence d'exigence de la banque d'évaluations par des devis d'entreprises. En effet, le devis de 50 000 € qu'ils ont établi et fourni ne concerne que les matériaux et matériels à partir de factures pro-forma. Monsieur [O] voulant se charger lui-même de la réalisation des travaux. / En revanche, il est vrai qu'au regard du statut professionnel de contractuelle de Madame [O], la banque aurait dû leur conseiller de souscrire une assurance-chômage la concernant, d'autant que les revenus de Monsieur [O] étaient assez modestes et que, par ailleurs, le rendement locatif de l'opération projetée serait très aléatoire. / De fait, la situation avérée de perte d'emploi de Madame [O] au cours du remboursement des prêts, a vite rendu difficile puis impossible, le remboursement du prêt amortissable à bonnes dates après sa période de différé, tandis que l'avenant avait rallongé la durée du prêt relais. / Cependant, le préjudice en résultant ne peut être corrélé à ce manquement fautif de la banque que s'agissant du remboursement du prêt amortissable et au maximum à hauteur de 50 % des échéances restant à échoir. En effet, chacun des époux ayant assuré ce prêt à hauteur de 50 %, l'assurance chômage, si elle avait été souscrite pour Madame [O], n'aurait pris en charge que 50 % des échéances, et vraisemblablement pour une durée limitée. / C'est donc à tort que le premier juge a fait droit à hauteur de 150 000 € à la demande de dommages et intérêts des emprunteurs. / Cette perte de chance de pouvoir contracter et bénéficier de l'assurance chômage ne peut être totale en ce que : - on ne peut être certain que si cette assurance complémentaire leur avait été effectivement conseillée, Madame [O] l'aurait souscrite, dans la mesure où elle aurait généré des primes d'assurance plus élevées ; - le fait que Madame [O] se soit trouvée au chômage, par non-renouvellement de son contrat de travail au cours de remboursement du prêt, ne permet pas de présumer, au moment de la souscription du contrat, de la réalisation du risque de chômage ; - les compagnies d'assurance qui couvrent le risque chômage limitent contractuellement la durée de prise en charge des échéances du prêt. / La cour estime que ce préjudice de perte de chance - qui ne peut porter que sur la prise en charge partielle et temporaire du prêt amortissable - sera justement réparé par la somme de 20 000 €, somme légèrement inférieure à celle correspondant à 50 % des échéances du prêt amortissable pendant 3 ans » (cf., arrêt attaqué, p. 8 et 9) ;

ALORS QUE, de première part, le préjudice subi par un emprunteur né du manquement par un établissement de crédit à l'obligation de mise en garde à laquelle il est tenu à son égard s'analyse en la perte de chance de ne pas contracter le prêt que cet établissement de crédit lui a consenti et d'éviter le risque, qui s'est réalisé, d'endettement excessif né de l'octroi de ce prêt ; qu'en conséquence, lorsque le juge retient qu'un établissement de crédit a manqué à l'obligation de mise en garde à laquelle il était tenu à l'égard d'un emprunteur auquel il a consenti un prêt, il ne peut totalement débouter cet emprunteur de son action en responsabilité à l'encontre de cet établissement de crédit pour manquement de ce dernier pour manquement à son obligation de mise en garde à son égard que s'il était certain que, si l'établissement de crédit avait exécuté son obligation de mise en garde à son égard, l'emprunteur aurait tout de même contracté ce prêt ou que si le risque d'endettement excessif né de l'octroi de ce prêt ne s'est pas réalisé ; qu'en énonçant, dès lors, après avoir retenu que la société Banque privée européenne avait manqué, relativement au crédit relais qu'elle leur avait consenti, à son obligation de mise en garde à l'égard de M. et Mme [P] [O], pour écarter toute indemnisation de ces derniers résultant d'un tel manquement, que, manifestement, M. et Mme [P] [O] tenaient à leur projet, de sorte qu'ils ne démontraient pas de préjudice de perte de chance de ne pas contracter ce prêt relais, quand de tels motifs étaient impropres à caractériser qu'il était certain que, si la société Banque privée européenne avait exécuté son obligation de mise en garde à leur égard, M. et Mme [P] [O] auraient tout de même souscrit ce même prêt relais ou que le risque d'endettement excessif né de l'octroi de ce prêt ne s'était pas réalisé, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1147 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

ALORS QUE, de deuxième part, le préjudice subi par un emprunteur né du manquement par un établissement de crédit à l'obligation de mise en garde à laquelle il est tenu à son égard s'analyse en la perte de chance de ne pas contracter le prêt que cet établissement de crédit lui a consenti et d'éviter le risque, qui s'est réalisé, d'endettement excessif né de l'octroi de ce prêt ; qu'en conséquence, lorsque le juge retient qu'un établissement de crédit a manqué à l'obligation de mise en garde à laquelle il était tenu à l'égard d'un emprunteur auquel il a consenti un prêt, il ne peut totalement débouter cet emprunteur de son action en responsabilité à l'encontre de cet établissement de crédit pour manquement de ce dernier pour manquement à son obligation de mise en garde à son égard que s'il était certain que, si l'établissement de crédit avait exécuté son obligation de mise en garde à son égard, l'emprunteur aurait tout de même contracté ce prêt ou que si le risque d'endettement excessif né de l'octroi de ce prêt ne s'est pas réalisé ; qu'en énonçant, dès lors, après avoir retenu que la société Banque privée européenne avait manqué, relativement au crédit relais qu'elle leur avait consenti, à son obligation de mise en garde à l'égard de M. et Mme [P] [O], pour écarter toute indemnisation de ces derniers résultant d'un tel manquement, que, manifestement, M. et Mme [P] [O] tenaient à leur projet de sorte qu'ils ne démontraient pas de préjudice de perte de chance de ne pas contracter ce prêt relais, sans rechercher, ainsi qu'elle y avait été invitée par M. et Mme [P] [O], si ces derniers, si la société Banque privée européenne avait exécuté, relativement au crédit relais qu'elle leur avait consenti, son obligation de mise en garde à leur égard, n'auraient pas mis leur projet en attente d'une situation plus stable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 1147 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

ALORS QUE, de troisième part, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en soulevant, dès lors, d'office, pour limiter à la somme de 20 000 euros le montant des dommages et intérêts qu'elle a condamné la société Banque privée européenne à payer à M. et Mme [P] [O] en raison de la méconnaissance de ses obligations relativement à la conclusion du prêt immobilier « Modulimmo », le moyen tiré de ce que, si la société Banque privée européenne avait exécuté ses obligations, Mme [P] [O] n'aurait souscrit l'assurance garantissant le risque de chômage qu'à hauteur de 50 % des échéances de ce prêt immobilier, sans inviter, au préalable, les parties, et, en particulier M. et Mme [P] [O], à présenter leurs observations sur un tel moyen, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 16 du code de procédure civile et les stipulations de l'article 6.1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

ALORS QUE, de quatrième part, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en soulevant, dès lors, d'office, pour limiter à la somme de 20 000 euros le montant des dommages et intérêts qu'elle a condamné la société Banque privée européenne à payer à M. et Mme [P] [O] en raison de la méconnaissance de ses obligations relativement à la conclusion du prêt immobilier « Modulimmo », le moyen tiré de ce que les compagnies d'assurance qui couvrent le risque de chômage limitent contractuellement la durée de prise en charge des échéances du prêt et de ce que l'assurance garantissant le risque de chômage, si elle avait été souscrite par Mme [P] [O], n'aurait vraisemblablement pris en charge les échéances du prêt que pour une durée limitée, sans inviter, au préalable, les parties, et, en particulier M. et Mme [P] [O], à présenter leurs observations sur un tel moyen, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 16 du code de procédure civile et les stipulations de l'article 6.1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

ALORS QUE, de cinquième part, M. et Mme [P] [O] ont fait valoir, dans leurs conclusions d'appel, que, comme l'avaient retenu les premiers juges, la société Banque privée européenne avait engagé sa responsabilité à leur égard, parce qu'elle avait fait preuve d'une légèreté fautive, durant la période d'exécution du prêt relais et du prêt immobilier « Modulimmo », en leur accordant, alors qu'ils rencontraient de graves difficultés financières, le 29 octobre 2009 et le 1er juin 2010, des autorisations de découvert, et parce que cette attitude avait entraîné l'aggravation de leur situation d'endettement ; qu'en limitant à la somme de 20 000 euros le montant des dommages et intérêts qu'elle a condamné la société Banque privée européenne à payer à M. et Mme [P] [O], sans déduire un quelconque motif au sujet de ces prétentions de M. et Mme [P] [O], la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs et violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS QUE, de sixième part, M. et Mme [P] [O] ont fait valoir, dans leurs conclusions d'appel, que la société Banque privée européenne avait engagé sa responsabilité à leur égard, parce qu'elle avait prononcé, par une lettre en date du 27 septembre 2010, la déchéance du terme du prêt immobilier « Modulimmo » avant même l'expiration du délai qu'elle leur avait imparti, par une lettre en date du 4 août 2010, pour procéder à la régularisation de leur situation, en invoquant, de surcroît, une somme impayée différente de celle résultant des termes de cette lettre du 4 août 2010 ; qu'en limitant à la somme de 20 000 euros le montant des dommages et intérêts qu'elle a condamné la société Banque privée européenne à payer à M. et Mme [P] [O], sans déduire un quelconque motif au sujet de ces prétentions de M. et Mme [P] [O], la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs et violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS QUE, de septième part, M. et Mme [P] [O] ont fait valoir, dans leurs conclusions d'appel, que la société Banque privée européenne avait engagé sa responsabilité à leur égard, parce qu'elle avait omis de prendre en compte, dans le montage financier qu'elle leur avait proposé, les conséquences du changement de statut fiscal de la maison située à [Localité 3] qui leur appartenait et qui ont entraîné une diminution du montant net après impôt qu'a généré la vente de cette maison au mois de juin 2013 ; qu'en limitant à la somme de 20 000 euros le montant des dommages et intérêts qu'elle a condamné la société Banque privée européenne à payer à M. et Mme [P] [O], sans déduire un quelconque motif au sujet de ces prétentions de M. et Mme [P] [O], la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs et violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 19-22846
Date de la décision : 30/03/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 03 juillet 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 30 mar. 2022, pourvoi n°19-22846


Composition du Tribunal
Président : M. Mollard (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Spinosi, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:19.22846
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