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09/02/2022 | FRANCE | N°20-22060

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 février 2022, 20-22060


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 février 2022

Cassation

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 203 F-D

Pourvoi n° S 20-22.060

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 FÉVRIER 2022

M. [G] [S], domicilié [Adresse 1], a fo

rmé le pourvoi n° S 20-22.060 contre l'arrêt rendu le 21 septembre 2020 par la cour d'appel de Basse-Terre (chambre sociale), dans le litige l'opp...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 février 2022

Cassation

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 203 F-D

Pourvoi n° S 20-22.060

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 FÉVRIER 2022

M. [G] [S], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° S 20-22.060 contre l'arrêt rendu le 21 septembre 2020 par la cour d'appel de Basse-Terre (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société Créole Beach, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rouchayrole, conseiller, les observations de la SCP Spinosi, avocat de M. [S], de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de la société Créole Beach, après débats en l'audience publique du 15 décembre 2021 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rouchayrole, conseiller rapporteur, Mme Lecaplain-Morel, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 21 septembre 2020), M. [S] a été engagé le 15 octobre 2001 par la société Créole Beach en qualité d'agent d'entretien, puis, à compter du 1er janvier 2003, comme agent technique.

2. Le 27 juillet 2018, il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail et de diverses demandes liées à l'exécution et la rupture de celui-ci.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. Le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes tendant au paiement d'un rappel de salaire, de congés payés afférents et de capitalisation des intérêts, alors « qu'en application de l'article 16 du code de procédure civile, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, en écartant la prétention du salarié selon laquelle il devait, pendant son temps de pause quotidien, se tenir en permanence à la disposition de son employeur et se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles, au motif que les attestations de deux anciens salariés de la société Créole Beach énonçant qu'ils étaient tenus de demeurer disponibles en vue de la réalisation de diverses interventions et ne pouvaient pas quitter leur poste de travail, mentionnées dans ses écritures versées aux débats en tant que pièces n° 20 et 21, ne figurent pas au dossier, sans avoir invité les parties à s'expliquer sur l'absence au dossier de ces deux pièces dont la communication n'avait pas été contestée, la cour d'appel a violé le texte susvisé. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 16 du code de procédure civile :

4. Selon ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

5. Pour rejeter les demandes du salarié tendant au paiement d'un rappel de salaire, l'arrêt retient que si le salarié mentionne, dans ses écritures, verser aux débats les attestations de deux anciens salariés indiquant demeurer à la disposition de l'employeur durant les pauses (numérotées 20 et 21), ces pièces ne figurent pas au dossier, le bordereau des pièces communiquées ne comportant que dix-neuf documents.

6. En statuant ainsi, sans avoir invité les parties à s'expliquer sur l'absence au dossier de ces pièces, qui figuraient sur le bordereau de pièces annexé aux dernières conclusions du salarié et dont la communication n'avait pas été contestée, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Et sur le second moyen

Enoncé du moyen

7. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail et de celles subséquentes relatives à la nullité de son licenciement, en paiement de dommages-intérêts à ce titre, d'indemnité conventionnelle de licenciement, d'indemnité pour violation du statut protecteur liée à la résiliation judiciaire et d'indemnité de préavis avec incidence de congés payés, alors « que la cassation qui sera prononcée du chef du premier moyen, concernant l'absence de paiement de l'intégralité du salaire dû à M. [S], entraînera par voie de conséquence et en application de l'article 624 du code de procédure civile, l'annulation du chef de l'arrêt ayant débouté le salarié de sa demande tendant à ce que la résiliation judiciaire de son contrat de travail produise les effets d'un licenciement nul et de ses demandes en paiement de diverses sommes à ce titre. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 624 du code de procédure civile :

8. La cassation prononcée emporte, par voie de conséquence, la cassation des chefs de dispositif déboutant le salarié de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail et de ses demandes subséquentes ainsi que de sa demande d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 septembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre autrement composée ;

Condamne la société Créole Beach aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Créole Beach et la condamne à payer à M. [S] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf février deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Spinosi, avocat aux Conseils, pour M. [S]

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'avoir rejeté les demandes de M. [S] tendant au paiement d'un rappel de salaire, de congés payés afférents et de capitalisation des intérêts ;

Aux motifs que « L'article 14 de la convention collective départementale des hôtels de Guadeloupe applicable au présent litige, prévoit que la durée du travail est de 37h30, dont 30 minutes de temps de repas par jour de travail.

L'article 3 du contrat de travail de M. [S] prévoit que son temps de travail hebdomadaire est de 37h30 par semaine, se répartissant à raison de 7h30 par jour sur 5 jours.

Il résulte des pièces du dossier que les plannings de travail de M. [S] mentionnent une durée de travail quotidienne de 7h30.

Il est toutefois établi que, par note de service du 14 juin 2008, l'employeur prévoyait que les techniciens devaient prendre leurs repas dans les créneaux horaires suivants : 12h à 12h30, 12h30 à 13h, 13h à 13h30.

Il résulte de l'attestation du directeur technique, conforme aux prescriptions de l'article 202 du code de procédure civile, qu'il bénéficiait d'une pause de trente minutes et avait informé ses collaborateurs de leur droit similaire. Si les attestations des techniciens versées aux débats par l'employeur devront être écartées, dès lors, ainsi que le souligne le salarié, qu'elles ne sont pas conformes à l'article 202 précité, à défaut d'être manuscrites, il n'en demeure pas moins que l'existence d'une pause accordée par l'employeur est corroborée par l'attestation d'un autre cadre de la société, qui répond aux exigences de ce texte.

Si le salarié précise dans ses écritures qu'il était sollicité à n'importe quel moment des plages de travail prévues par le planning, qu'il avait toujours un téléphone à cette fin et qu'il se trouvait de manière continue à la disposition de l'employeur, il ne le démontre pas.

Le salarié mentionne dans ses écritures versées aux débats les attestations de deux anciens salariés de la société Créole Beach énonçant qu'ils étaient tenus de demeurer disponibles en vue de la réalisation de diverses interventions et ne pouvaient pas quitter leur poste de travail, sans toutefois en justifier. En effet, la Cour observe que les pièces précitées n° 20 et 21 ne figurent pas au dossier, observation étant faite que le bordereau de celles communiquées par le salarié est limité à 19 documents.

La circonstance que les fiches de paie de M. [S] mentionnent jusqu'en 2011 un nombre d'heures de travail mensuel de 162,37 heures, puis, à compter de l'année 2011, 151,67 heures ne saurait justifier de la rémunération initiale du temps de repas, alors qu'il appert que son salaire était sensiblement le même entre ces deux périodes et que la modification de ces mentions résulte de la déduction de celui-ci du temps de repas. Dès lors, M. [S] ne peut se prévaloir d'une modification de son contrat de travail.

Il résulte des éléments analysés ci-dessus que l'employeur justifie avoir donné au salarié un temps de pause quotidienne de 30 minutes, conformément aux termes de la convention collective auxquels le contrat de travail de M. [S], qui prévoit une durée de travail similaire à celle-ci, se réfère.

Il n'est pas établi que le salarié ne prenait pas son temps de repas, ou, que durant celui-ci, il se soit tenu à la disposition de son employeur ni qu'il se soit conformé à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles, la circulaire DRT qu'il invoque ne pouvant au demeurant palier ce défaut de justification.

Par suite, les demandes de M. [S] tendant au paiement d'un rappel de salaire, de congés payés et de capitalisation des intérêts devront être rejetées » ;

Alors, d'une part, qu'en application de l'article 16 du code de procédure civile, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, en écartant la prétention du salarié selon laquelle il devait, pendant son temps de pause quotidien, se tenir en permanence à la disposition de son employeur et se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles, au motif que les attestations de deux anciens salariés de la société Créole Beach énonçant qu'ils étaient tenus de demeurer disponibles en vue de la réalisation de diverses interventions et ne pouvaient pas quitter leur poste de travail, mentionnées dans ses écritures versées aux débats (p. 5) en tant que pièces n° 20 et 21, ne figurent pas au dossier, sans avoir invité les parties à s'expliquer sur l'absence au dossier de ces deux pièces dont la communication n'avait pas été contestée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Alors, d'autre part, que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en retenant, en l'espèce, que le bordereau de pièces communiquées par le salarié, annexé à ses conclusions d'appel, ne mentionnent que 19 pièces et que les pièces n° 20 et 21 n'y figurent pas, quand ce bordereau comportait 22 pièces, dont les pièces n° 20 et 21 correspondant aux attestations d'anciens salariés, la cour d'appel méconnu le principe susvisé.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. [S] de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail et celles subséquentes relatives à la nullité de son licenciement, en paiement de dommages et intérêts à ce titre, d'indemnité conventionnelle de licenciement, d'indemnité pour violation du statut protecteur liée à la résiliation judiciaire et d'indemnité de préavis avec incidence de congés payés ;

Aux motifs que « M. [S] ne peut se prévaloir au soutien de sa demande de résiliation judiciaire du défaut de paiement par l'employeur depuis 2011 de sa rémunération correspondant à 2,5 heures hebdomadaires, dès los qu'ainsi qu'il vient d'être démontré ci-dessus, celle-ci ne lui était pas due et correspondait à son temps de repas hebdomadaire.

Si le salarié précise dans ses écritures qu'il avait déjà subi par le passé des manquements de la part de son employeur, il appert que le différend l'opposant à celui-ci avait été réglé en 2009.

En l'absence de manquement imputable à l'employeur, M. [S] ne pourra qu'être débouté de sa demande de résiliation judiciaire et de celles subséquentes relatives à la nullité de son licenciement, l'indemnité y afférente, l'indemnité conventionnelle de licenciement, l'indemnité pour violation du statut protecteur lié à la résiliation judiciaire, l'indemnité de préavis et les congés payés y afférents » ;

Alors que la cassation qui sera prononcée du chef du premier moyen, concernant l'absence de paiement de l'intégralité du salaire dû à M. [S], entraînera par voie de conséquence et en application de l'article 624 du code de procédure civile, l'annulation du chef de l'arrêt ayant débouté le salarié de sa demande tendant à ce que la résiliation judiciaire de son contrat de travail produise les effets d'un licenciement nul et de ses demandes en paiement de diverses sommes à ce titre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20-22060
Date de la décision : 09/02/2022
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Basse-Terre, 21 septembre 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 fév. 2022, pourvoi n°20-22060


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Spinosi, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.22060
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