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02/02/2022 | FRANCE | N°20-12301

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 02 février 2022, 20-12301


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CDS

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 2 février 2022

Annulation

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 138 F-D

Pourvoi n° J 20-12.301

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 2 FÉVRIER 2022

La société Autostar, société par a

ctions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° J 20-12.301 contre l'ordonnance rendue le 15 janvier 2020 par le premier prés...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CDS

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 2 février 2022

Annulation

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 138 F-D

Pourvoi n° J 20-12.301

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 2 FÉVRIER 2022

La société Autostar, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° J 20-12.301 contre l'ordonnance rendue le 15 janvier 2020 par le premier président de chambre de la cour d'appel de Rennes, (récusation, suspicion légitime), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [D] [E], domicilié [Adresse 2],

2°/ au procureur général près la cour d'appel de Rennes, dont le siège est [Adresse 3],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Prache, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Autostar, après débats en l'audience publique du 7 décembre 2021 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Prache, conseiller référendaire rapporteur, M. Pietton, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'ordonnance attaquée (Rennes, 15 janvier 2020), M. [E], engagé à compter du 1er avril 2007 par la société Autostar en qualité de directeur d'exploitation du site de [Localité 4], a été licencié pour faute grave le 13 juillet 2018.

2. Le 23 janvier 2019, il a saisi la juridiction prud'homale pour contester ce licenciement.

3. Par requête du 20 novembre 2019, la société Autostar a demandé au délégué du premier président de la cour d'appel de Rennes de dire que les conseillers prud'homaux du collège employeur désignés sur une liste proposée par le Medef 22 (Upia) ne présentent pas les garanties d'impartialité et d'indépendance nécessaires pour siéger dans le cadre du dossier prud'homal "Autostar c/ [E] c/ Upia et Uimm 22", en conséquence, de prononcer leur récusation ainsi, le cas échéant, que la nullité de tous les actes de procédure accomplis par une formation du conseil de prud'hommes de Saint-Brieuc dans laquelle siégerait un conseiller prud'homal du collège employeur désigné sur une liste présentée par le Medef 22 (Upia), et de renvoyer l'affaire devant une formation autrement composée du conseil de prud'hommes de Saint Brieuc, subsidiairement devant un autre conseil de prud'hommes territorialement compétent.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. L'employeur fait grief à l'ordonnance, qui a rejeté la requête en récusation et en renvoi pour suspicion légitime formée par la société Autostar, de ne porter la signature d'aucun greffier, alors « qu'il résulte des dispositions combinées des articles 456 et 458 du code de procédure civile que le jugement est signé par le président et par le greffier, à peine de nullité ; que l'ordonnance attaquée, qui ne comporte ni l'indication du nom ni la signature d'un greffier, est donc nulle. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 456 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2019-402 du 3 mai 2019, applicable au litige :

5. Il résulte de ce texte, que tout jugement doit être signé par le président et par le greffier.

6. L'ordonnance attaquée, rendue par le délégué du premier président d'une cour d'appel statuant sur le fondement des articles 342 et suivants du code de procédure civile, ne comporte ni l'indication du nom ni la signature d'un greffier.

7. L'ordonnance est donc nulle.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen, la Cour :

ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 15 janvier 2020, entre les parties, par le premier président de chambre de la cour d'appel de Rennes ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cette ordonnance et les renvoie devant la juridiction du premier président de la cour d'appel de Rennes autrement composée ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elles exposés ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Autostar ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance annulée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux février deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Autostar

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée, qui a rejeté la requête en récusation et en renvoi pour suspicion légitime formée par la société AUTOSTAR, de ne porter la signature d'aucun greffier,

Alors qu' il résulte des dispositions combinées des articles 456 et 458 du Code de procédure civile que le jugement est signé par le président et par le greffier, à peine de nullité ; que l'ordonnance attaquée, qui ne comporte ni l'indication du nom ni la signature d'un greffier, est donc nulle.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir rejeté la demande de la société AUTOSTAR tendant à voir dire que les Conseillers prud'homaux du collège employeur désignés sur une liste proposée par le Médef 22 (UPIA) ne présentent pas les garanties d'impartialité et d'indépendance nécessaires pour siéger dans le cadre du dossier prud'homal AUTOSTAR c/ [E] c/ UPIA et UIMM 22, et en conséquence, à voir prononcer la récusation des Conseillers prud'homaux du collège employeur désignés sur une liste proposée par le Médef 22 (UPIA) ainsi, le cas échéant, que la nullité de tous les actes de procédure accomplis par une formation du Conseil de Prud'hommes de Saint-Brieuc dans laquelle siègerait un Conseiller prud'homal du collège employé désigné sur une liste présentée par le Médef 22 (UPIA), et à voir renvoyer l'affaire devant une formation autrement composée du Conseil de prud'hommes de Saint-Brieuc ou, subsidiairement, devant un autre Conseil de prud'hommes territorialement compétent,

Aux motifs que « L'affaire qui oppose la S.A.S. Autostar à M. [E] a été engagée devant le conseil des prud'hommes de Saint-Brieuc le 23 janvier 2019 ; cette affaire a été appelée à deux audience, devant le bureau de conciliation et d'orientation le 7 mars 2019, puis devant le bureau de conciliation et de mise en état le 27 juin 2019.

Les causes de récusation et renvoi pour cause de suspicion légitime dont fait état la S.A.S. Autostar sont connues de celle-ci depuis de nombreuses années : elle reproche à M. [E] d'ailleurs dans la lettre de licenciement du 13 juillet 2018 la "dissimulation d'activités annexes" ("votre direction a découvert fortuitement en 2012 que vous étiez président de L'UPIA 22, ... et que vous avez finalement présenté votre démission du poste... fin 2017... Vous en étiez maintenant le trésorier...").

Selon les termes de l'article 342 du Code de procédure civile, la partie qui veut récuser un juge ou demander le renvoi pour cause de suspicion légitime devant une autre juridiction de même nature doit, à peine d'irrecevabilité, le faire dès qu'elle a connaissance de la cause justifiant la demande...

En l'espèce, en déposant la requête en récusation et suspicion légitime le 20 novembre 2019 alors que l'affaire est pendante devant le conseil de prud'hommes depuis le 20 janvier 2019, soit dix mois plus tard, la S.A.S. Autostar est manifestement irrecevable en sa demande » ;

1°) Alors que, au soutien de sa requête en récusation et suspicion légitime, la société AUTOSTAR faisait valoir que, suite à l'appel en cause de l'UPIA 22 et de l'UIMM 22 afin que ces organisations patronales justifiassent de la réalité des mandats patronaux de M. [E] et des conditions dans lesquelles ceux-ci avaient pu lui être confiés, elle avait découvert, dans les écritures communiquées le 10 octobre 2019 par l'UPIA 22 et l'UIMM 22, que : « En tant qu'organisation patronale, l'UPIA a également un rôle dans la désignation des Juges prud'homaux. A ce titre l'UPIA propose la nomination de la moitié des sièges des Juges prud'homaux employeurs du Conseil de Prud'hommes de Saint-Brieux. (...) L'UPIA dispense également des formations aux Conseillers Prud'homaux » ; qu'ainsi, peu important qu'elle ait connu antérieurement les mandats patronaux de M. [E], elle n'avait eu connaissance que le 10 octobre 2019 du défaut d'impartialité et d'indépendance des conseillers prud'homaux dont le mandat était en cours, résultant de ce qu'ils avaient été proposés par l'UPIA 22 en 2017, à l'époque où M. [E] en était le président et où, de par ses fonctions, il avait nécessairement participé lui-même à la désignation des conseillers prud'homaux collège employeur ; que néanmoins, pour déclarer tardive la requête en récusation déposée par la société AUTOSTAR, le délégué du Premier Président de la Cour d'appel a retenu que l'affaire est pendante devant le conseil de prud'hommes depuis le 20 janvier 2019, mais que la société AUTOSTAR n'a déposé la requête en récusation et suspicion légitime que le 20 novembre 2019, soit dix mois plus tard, alors que « Les causes de récusation et renvoi pour cause de suspicion légitime dont fait état la S.A.S. Autostar sont connues de celle-ci depuis de nombreuses années : elle reproche à M. [E] d'ailleurs dans la lettre de licenciement du 13 juillet 2018 la "dissimulation d'activités annexes" ("votre direction a découvert fortuitement en 2012 que vous étiez président de l'UPIA 22, ... et que vous avez finalement présenté votre démission du poste... fin 2017... Vous en étiez maintenant le trésorier...") » ; qu'en statuant ainsi, il a méconnu l'objet du litige et, par suite, violé l'article 4 du Code de procédure civile ;

2°) Alors que la société AUTOSTAR faisait valoir devant le juge délégué par le Premier président de la Cour d'appel que, peu important qu'elle ait connu antérieurement les mandats patronaux de M. [E], les écritures communiquées le 10 octobre 2019 par l'UPIA 22 et l'UIMM 22 lui avaient permis de découvrir que, « En tant qu'organisation patronale, l'UPIA a également un rôle dans la désignation des Juges prud'homaux. A ce titre l'UPIA propose la nomination de la moitié des sièges des Juges prud'homaux employeurs du Conseil de Prud'hommes de Saint-Brieux. (...) L'UPIA dispense également des formations aux Conseillers Prud'homaux » et donc de prendre connaissance du défaut d'impartialité et d'indépendance des conseillers prud'homaux dont le mandat était en cours, résultant de ce qu'ils avaient été proposés par l'UPIA 22 en 2017, à l'époque où M. [E] en était le président et où, de par ses fonctions, il avait nécessairement participé lui-même à la désignation des conseillers prud'homaux collège employeur ; qu'en retenant néanmoins, pour déclarer irrecevable la requête en récusation et suspicion légitime formée par la société AUTOSTAR, que l'affaire est pendante devant le conseil de prud'hommes depuis le 20 janvier 2019, mais que la société AUTOSTAR n'a déposé la requête en récusation et suspicion légitime que le 20 novembre 2019, soit dix mois plus tard, alors qu'elle connaissait depuis de nombreuses années le mandat de président de l'UPIA 22 de M. [E], le délégué du Premier Président de la Cour d'appel a statué par un motif inopérant et, par suite, privé sa décision de base légale au regard de l'article 342 du Code de procédure civile ;

3°) Et alors que la société AUTOSTAR faisait valoir devant le juge délégué par le Premier président de la Cour d'appel que, peu important qu'elle ait connu antérieurement les mandats patronaux de M. [E], les écritures communiquées le 10 octobre 2019 par l'UPIA 22 et l'UIMM 22 lui avaient permis de découvrir que, « En tant qu'organisation patronale, l'UPIA a également un rôle dans la désignation des Juges prud'homaux. A ce titre l'UPIA propose la nomination de la moitié des sièges des Juges prud'homaux employeurs du Conseil de Prud'hommes de Saint-Brieux. (...) L'UPIA dispense également des formations aux Conseillers Prud'homaux » et donc de prendre connaissance du défaut d'impartialité et d'indépendance des conseillers prud'homaux dont le mandat était en cours, résultant de ce qu'ils avaient été proposés par l'UPIA 22 en 2017, à l'époque où M. [E] en était le président et où, de par ses fonctions, il avait nécessairement participé lui-même à la désignation des conseillers prud'homaux collège employeur ; que faute d'avoir procédé à la recherche qui lui était ainsi demandée, le délégué du Premier Président de la Cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article 342 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20-12301
Date de la décision : 02/02/2022
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 15 janvier 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 02 fév. 2022, pourvoi n°20-12301


Composition du Tribunal
Président : Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.12301
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