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20/01/2022 | FRANCE | N°20-16469

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 20 janvier 2022, 20-16469


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 janvier 2022

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 90 F-D

Pourvoi n° Q 20-16.469

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 20 JANVIER 2022

1°/ M. [E] [H], domicilié [Adresse 2],

2°/ l'association U

daf 77, dont le siège est [Adresse 4],
agissant en qualité de curateur de M. [H],

ont formé le pourvoi n° Q 20-16.469 contre l'arrêt rendu le 14 mai ...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 janvier 2022

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 90 F-D

Pourvoi n° Q 20-16.469

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 20 JANVIER 2022

1°/ M. [E] [H], domicilié [Adresse 2],

2°/ l'association Udaf 77, dont le siège est [Adresse 4],
agissant en qualité de curateur de M. [H],

ont formé le pourvoi n° Q 20-16.469 contre l'arrêt rendu le 14 mai 2020 par la cour d'appel de Versailles (3e chambre), dans le litige les opposant :

1°/ à la société Transfo services, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 6],

2°/ à la société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3],

3°/ à la société Mutuelle assurance des travailleurs mutualistes, société d'assurance mutuelle à cotisations variables, dont le siège est [Adresse 5],

4°/ à la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine, dont le siège est [Adresse 1],

défenderesses à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Pradel, conseiller référendaire, les observations de la SAS Cabinet Colin-Stoclet, avocat de M. [H] et de l'association UDAF 77, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Transfo services, de la société Axa France IARD, et après débats en l'audience publique du 1er décembre 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Pradel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen, et M. Carrasco, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 14 mai 2020), M. [H], qui circulait à bord de son véhicule assuré auprès de la société Mutuelle assurance des travailleurs mutualistes (la société Matmut) a été victime d'un accident de la circulation. Le véhicule s'est immobilisé sur une des voies d'une autoroute et a été percuté à l'arrière par une camionnette, conduite par M. [G], propriété de la société Transfo services, assurée auprès de la société Axa France IARD.

2. M. [H], assisté par son curateur, l'UDAF des Hauts-de-Seine, a assigné la société Axa France Iard, la société Transfo services et la société Matmut, en présence de la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine devant un tribunal de grande instance, aux fins d'indemnisation de ses préjudices.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. M. [H] et l'association UDAF 77, en qualité de curateur de M. [H], font grief à l'arrêt de dire que la faute commise par ce dernier réduisait son droit à indemnisation de 65 %, alors :

« 1°/ que, lorsque plusieurs véhicules sont impliqués dans un accident de la circulation, chaque conducteur a droit à l'indemnisation des dommages qu'il a subis, sauf s'il a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice ; que, pour limiter le droit à indemnisation de M. [H], la cour d'appel a retenu que, dès lors qu'il roulait sur la troisième voie de circulation en partant de la droite lorsque son véhicule victime d'une avarie s'était mis à ralentir, il avait commis une faute en n'amorçant pas le moindre mouvement pour diriger son véhicule vers la droite et la bande d'arrêt d'urgence et en continuant sa course jusqu'à l'arrêt complet du véhicule ; qu'en relevant d'office, et sans recueillir les observations contradictoires des parties, un tel comportement prétendument fautif qu'aucune de celles-ci – et notamment pas la société Transfo services et la société Axa France – n'avait invoqué, elle a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

2°/ qu'en tout état de cause, qu'en statuant ainsi tout en admettant que le ralentissement du véhicule et son arrêt étaient exclusivement dus à la panne et non à l'action humaine de M. [H] et tout en constatant, par motif adopté, que le témoin [N] avait vu M. [H] essayer de remettre le contact de son véhicule arrêté avant d'être percuté, ce dont il résulte que M. [H] avait été empêché de maîtriser son véhicule et, par suite, d'opérer un déplacement vers les voies de droite, la cour d'appel a violé l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985 ;

3°/ que, de son audition, M. [N], témoin garé sur la bande d'arrêt d'urgence de l'autoroute au moment de l'accident, a déclaré « A ma hauteur, sur ma gauche, j'ai vu une 205 blanche qui circulait à très faible allure sur le milieu de l'autoroute » et qu'à la question « Qu'est-ce qu'a fait ce véhicule 205 ? », il a répondu « Il est resté au milieu des voies, et il s'est arrêté » ; que le témoin, qui n'a pas dit avoir vu le véhicule de M. [H] avant qu'il n'arrive à sa hauteur, n'a pas indiqué depuis combien de temps ce véhicule roulait au ralenti et il n'a pas précisé le temps écoulé entre le moment où le véhicule est passé à sa hauteur et celui où il s'est arrêté ; qu'en affirmant néanmoins que, selon les déclarations du témoin, l'arrêt du véhicule n'avait pas été soudain mais avait été précédé d'une période durant laquelle il avait ralenti et que M. [H] avait disposé d'un laps de temps utile pour procéder à une manoeuvre afin de conduire son véhicule vers la voie la plus à droite, la cour d'appel a dénaturé le procès-verbal d'audition du 12 décembre 2009 en violation du principe de l'interdiction faite au juge de dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

4°/ que, pour réduire le droit à indemnisation de M. [H], la cour d'appel a également retenu qu'il était fautif de ne pas avoir fait usage de ses feux de détresse qu'il avait le temps nécessaire d'actionner, dont la commande était indépendante de celle des feux de route et dont aucun élément ne prouvait le dysfonctionnement technique ; qu'en statuant ainsi tout en admettant que le véhicule avait été victime d'une avarie, que le défaut d'allumage des feux de route arrière était la conséquence d'un dysfonctionnement et que M. [H] n'était sous l'emprise d'aucun produit de nature à altérer son comportement, ce dont il résultait que tout lien entre le défaut d'allumage des feux de détresse et la panne du véhicule ne pouvait être exclu, comme le faisait d'ailleurs valoir M. [H] dans ses conclusions, elle a violé l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985 ;

5°/ que, si la faute du conducteur qui demande l'indemnisation des dommages qu'il a subis doit être appréciée en faisant abstraction du comportement des autres conducteurs, ce comportement est à prendre en considération pour déterminer si la faute du conducteur a contribué à la réalisation de son préjudice ; que, dans ses conclusions, M. [H] faisait valoir que le seul élément causal était dû, d'une part, à l'inattention du conducteur du véhicule Fiat Ducato, M. [G], qui, lorsqu'il a percuté son véhicule sans freiner, était en train de regarder la voiture garée sur la bande d'arrêt d'urgence et, d'autre part, à sa vitesse inadaptée de 100 km/h sur une portion d'autoroute limitée à 90 km/h ; qu'en retenant que la faute de M. [Z] avait contribué à proportion de 65 % à la réalisation de son préjudice sans examiner le comportement de M. [G], la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985. »

Réponse de la Cour

4. L'arrêt retient que l'accident s'est produit de nuit, sans éclairage public, sur une portion d'autoroute comportant quatre voies de circulation où la vitesse est limitée à 90 km/h et qu'il ressort de l'audition de M. [N], témoin extérieur qui se trouvait sur la bande d'arrêt d'urgence en raison d'une panne d'essence de son véhicule, que celui-ci a vu arriver la voiture Peugeot 205 circulant à très faible allure au milieu de l'autoroute, feux avant allumés mais sans feu à l'arrière, ni feu de détresse, que la voiture s'est immobilisée au milieu des voies, que le conducteur a essayé de remettre le contact mais qu'une camionnette est alors arrivée, à une allure normale, et a percuté de plein fouet l'arrière du véhicule.

5. L'arrêt retient également qu'il n'est pas contestable que le véhicule a été victime d'une avarie, sa circulation à très faible allure puis son arrêt ne pouvant être la conséquence d'une action humaine dès lors que son conducteur n'était sous l'emprise d'aucun produit de nature à altérer son comportement, que cependant, selon les déclarations du témoin, l'arrêt du véhicule n'a pas été soudain mais a été précédé d'une période durant laquelle il a ralenti et qu'il résulte de cette audition que M. [H] n'a pas amorcé le moindre mouvement pour diriger son véhicule vers la droite et la bande d'arrêt d'urgence et a, au contraire, continué à poursuivre sa course au milieu de l'autoroute jusqu'à l'arrêt de son véhicule sur la troisième voie de circulation en partant de la droite, ainsi qu'il ressort des procès-verbaux de police. Il en déduit que l'arrêt de la voiture sur la deuxième file en partant de la gauche sans la moindre manoeuvre préalable en ce sens, alors que M. [H] n'a pu qu'avoir conscience de la difficulté affectant son véhicule et a disposé d'un laps de temps utile pour y procéder, est constitutif d'une faute.

6. L'arrêt ajoute qu'aucun élément ne prouve, ni ne permet de supposer l'existence d'un dysfonctionnement technique à l'origine du défaut d'allumage des feux de détresse, dès lors que la commande de ces feux est distincte de celle des feux de route et que ces derniers étaient à tout le moins éclairés à l'avant, qu'en outre M. [H] aurait eu le temps nécessaire pour les actionner puisque son véhicule a d'abord ralenti avant de s'immobiliser puis d'être percuté. Il en déduit que le défaut d'allumage des feux de détresse apparaît ainsi imputable à M. [H] et fautif.

7. De ces constatations et énonciations procédant de son pouvoir souverain d'appréciation de la valeur et de la portée des éléments de preuve qui lui était soumis, la cour d'appel, qui était saisie de conclusions de la société Axa invoquant la faute de M. [H] et qui ne devait pas prendre en compte le comportement de l'autre conducteur, a à bon droit déduit, sans encourir les autres griefs du moyen, que M. [H] avait commis des fautes qui étaient en relation avec son préjudice, et a souverainement estimé qu'elles étaient de nature à justifier la réduction de 65% de son droit à indemnisation.

8. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [H] et l'association UDAF 77, ès qualité, de curateur aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [H] et son curateur l'association UDAF 77 et les condamne solidairement à payer à la société Transfo services et la société Axa France IARD la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt janvier deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SAS Cabinet Colin-Stoclet, avocat aux Conseils, pour M. [H] et l'association Udaf 77

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la faute commise par M. [E] [H] réduisait son droit à indemnisation de 65 % ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE le tribunal a retenu qu'en ralentissant puis en s'arrêtant la nuit sur une file d'autoroute sans éclairage public, sans feux de route ni de détresse, M. [H] a commis une faute réduisant de 65 % sont droit à indemnisation ; que lorsque plusieurs véhicules sont impliqués dans un accident de la circulation, chaque conducteur a droit à l'indemnisation des dommages qu'il a subis, directement ou par ricochet, sauf s'il a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice et qu'il appartient au juge d'apprécier si cette faute a eu pour effet de limiter l'indemnisation ou de l'exclure ; que la faute de la victime ayant contribué à la réalisation de son préjudice doit être appréciée en faisant abstraction du comportement de l'autre conducteur du véhicule impliqué dans l'accident ;
que les juges du fond n'ont pas à rechercher, pour exclure son droit à indemnisation, si la faute du conducteur victime est la cause exclusive de l'accident mais doivent seulement examiner si cette faute a contribué à la réalisation de son préjudice et apprécier sa gravité afin de réduire ou exclure son droit à indemnisation ; qu'au cas particulier, c'est à tort que les sociétés Transfo services et Axa France Iard se prévalent d'une reconnaissance de faute sur la base des procès-verbaux de transaction provisionnelle puisqu'en effet, le premier a été annulé de sorte qu'il est nul en toutes ses dispositions et qu'il ne saurait en être tiré de conséquence, peu important que l'avocat de la victime ait pu éventuellement lui conseiller de l'accepter, ce que l'intéressé conteste du reste et que le second, comme justement relevé par le tribunal, n'a pas été signé par l'UDAF exerçant la mesure de curatelle renforcée de M. [H] et se trouve donc privé de tout effet ; qu'il résulte par ailleurs des énonciations précédentes que le comportement de M. [G], conducteur de la camionnette, n'a pas à être pris en compte pour apprécier la faute éventuelle de M. [H] ; que l'accident s'est produit de nuit, sans éclairage public, sur une portion d'autoroute comportant quatre voies de circulation où la vitesse est limitée à 90 km/h ; qu'il ressort de l'audition de M. [N], témoin extérieur qui se trouvait sur la bande d'arrêt d'urgence en raison d'une panne d'essence de son véhicule, que celui-ci a vu arriver la voiture Peugeot 205 circulant à très faible allure au milieu de l'autoroute, feux avant allumés mais sans feu à l'arrière, ni feu de détresse, que la voiture s'est immobilisée au milieu des voies, que le conducteur a essayé de remettre le contact mais qu'une camionnette est alors arrivée, à une allure normale, et a percuté de plein fouet l'arrière de la Peugeot 205 ; que ce témoignage confirme celui de M. [G], conducteur de la camionnette ; que les recherches d'alcool et de stupéfiants effectuées sur M. [H] se sont révélées négatives ; que celui-ci n'a pu être entendu par les services de police du fait de ses séquelles et d'une amnésie traumatique ; qu'il n'est pas contestable que le véhicule Peugeot 205 a été victime d'une avarie, sa circulation à très faible allure puis son arrêt ne pouvant être la conséquence d'une action humaine dès lors que son conducteur n'était sous l'emprise d'aucun produit de nature à altérer son comportement ; qu'au reste, même si aucun examen technique n'a été réalisé afin de déterminer la cause de l'arrêt du véhicule, les services de police qui ont procédé à l'enquête ont noté que cette voiture était tombée en panne ; que cependant, selon les déclarations du témoin, l'arrêt du véhicule n'a pas été soudain mais a été précédé d'une période durant laquelle il a ralenti ; qu'il résulte de cette audition que M. [H] n'a pas amorcé le moindre mouvement pour diriger son véhicule vers la droite et la bande d'arrêt d'urgence, présente sur cette portion d'autoroute, et a au contraire continué à poursuivre sa course au milieu de l'autoroute jusqu'à l'arrêt de son véhicule sur la troisième voie de circulation en partant de la droite, ainsi qu'il ressort des procès-verbaux de police ; qu'il incombe au conducteur d'un véhicule roulant sur autoroute, confronté à une baisse de régime importante et inopinée de sa voiture, d'entreprendre immédiatement ou au plus vite une manoeuvre pour conduire son véhicule vers la voie la plus à droite réservée à ceux roulant le plus doucement et vers la bande d'arrêt d'urgence, destinée précisément à abriter les véhicules confrontés à des difficultés techniques ; que l'arrêt de la voiture Peugeot 205 sur la deuxième file en partant de la gauche sans la moindre manoeuvre préalable en ce sens, alors que M. [H] n'a pas qu'avoir conscience de la difficulté affectant son véhicule et a disposé d'un laps de temps utile pour y procéder, est constitutif d'une faute ; que le témoignage de M. [N] établit que les feux de route de la Peugeot 205 étaient éclairés à l'avant, non à l'arrière ; que M. [H] fait valoir à juste titre que la commande d'allumage de ces feux est unique pour l'avant et l'arrière du véhicule ; qu'il s'en déduit que le défaut d'allumage des feux de route arrière est la conséquence d'un dysfonctionnement et que rien ne justifie que M. [H] ait pu préalablement s'en rendre compte, puisque les feux de route avant éclairaient normalement ; qu'une faute n'est donc pas caractérisée de ce chef ; qu'en revanche, ce témoignage démontre que les feux de détresse ne fonctionnaient ni à l'avant, ni à l'arrière alors que, comme le soutiennent les intimées, en application de l'article R. 416-18 du code de la route, tout conducteur contraint de circuler momentanément à allure fortement réduite est tenu d'en faire usage ; qu'aucun élément ne prouve, ni ne permet de supposer l'existence d'un dysfonctionnement technique à l'origine de ce défaut d'allumage dès lors que la commande de ces feux est distincte de celle des feux de route et que ces derniers étaient à tout le moins éclairés à l'avant ; qu'en outre, M. [H] aurait eu le temps nécessaire pour les actionner puisque son véhicule a d'abord ralenti avant de s'immobiliser puis d'être percuté ; que le défaut d'allumage des feux de détresse apparaît ainsi imputable à M. [H] ; que les fautes ci-dessus retenues, qui ont abouti à ce que ce le véhicule Peugeot 205 s'arrête de nuit, en pleine voie sur une autoroute, sans feux de détresse allumés permettant d'alerter les autres usages du danger immédiat qu'il représentait, ont contribué à la réalisation du préjudice de M. [H] dont la voiture a été percutée à l'arrière par la camionnette qui circulait dans la même voie, son conducteur n'ayant vu la Peugeot 205 qu'au dernier moment ; que la gravité résultant de la conjonction de ces fautes justifie la réduction de 65% du droit à indemnisation de M. [H], le jugement étant confirmé en ce sens ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE l'implication des véhicules n'est pas contestée ; que la loi du 5 juillet 1985 dispose notamment, que lorsque plusieurs véhicules terrestres à moteur sont impliqués dans un accident de la circulation, chaque conducteur a droit à l'indemnisation des dommages qu'il a subis, directement ou par ricochet, sauf s'il a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice, une telle faute ayant pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages ; qu'en l'espèce, l'accident s'est produit à 6 h du matin, alors qu'il faisait encore nuit et que la vitesse était limitée à 90 km/h ; que les services de police notent que l'éclairage public ne fonctionnait pas sur cette portion de route et que la visibilité était bonne ; que M. [E] [H] n'a aucun souvenir de l'accident ; que M. [F], qui conduisait la camionnette Fiat remorque indique qu'il roulait sur la 4ème file la plus à droite, lorsque « tout à coup j'ai aperçu un véhicule 205 immobilisé sur ma voie ; je n'ai pas eu le temps de freiner ; je l'ai donc percuté en plein arrière » ; que cette version est corroborée par un témoin, M. [N], qui se trouvait arrêté sur la bande d'arrêt d'urgence : « j'ai vu une 205 blanche qui circulait à très faible allure?
il n'y avait pas de feux à l'arrière et pas de feux de détresse? ce véhicule s'est arrêté ; le conducteur était en train d'essayer de remettre le contact?
j'ai vu une camionnette arrivée à allure normale sur une autoroute ; elle a percuté de plein fouet l'arrière de la 205 » ; qu'en ralentissant, puis en s'arrêtant la nuit sur une file d'autoroute sans éclairage public, sans feux de route ni feux de détresse, M. [E] [H] a commis une faute qui réduira de 65% son droit à indemnisation.

1°) ALORS QUE, lorsque plusieurs véhicules sont impliqués dans un accident de la circulation, chaque conducteur a droit à l'indemnisation des dommages qu'il a subis, sauf s'il a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice ; que, pour limiter le droit à indemnisation de M. [H], la cour d'appel a retenu que, dès lors qu'il roulait sur la troisième voie de circulation en partant de la droite lorsque son véhicule victime d'une avarie s'était mis à ralentir, il avait commis une faute en n'amorçant pas le moindre mouvement pour diriger son véhicule vers la droite et la bande d'arrêt d'urgence et en continuant sa course jusqu'à l'arrêt complet du véhicule ; qu'en relevant d'office, et sans recueillir les observations contradictoires des parties, un tel comportement prétendument fautif qu'aucune de celles-ci – et notamment pas la société Transfo services et la société Axa France – n'avait invoqué, elle a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

2°) ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU'en statuant ainsi tout en admettant que le ralentissement du véhicule et son arrêt étaient exclusivement dus à la panne et non à l'action humaine de M. [H] et tout en constatant, par motif adopté, que le témoin [N] avait vu M. [H] essayer de remettre le contact de son véhicule arrêté avant d'être percuté, ce dont il résulte que M. [H] avait été empêché de maîtriser son véhicule et, par suite, d'opérer un déplacement vers les voies de droite, la cour d'appel a violé l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985 ;

3°) ALORS QUE, lors de son audition (PV n° 09/12024/03 du 12 décembre 2009), M. [N], témoin garé sur la bande d'arrêt d'urgence de l'autoroute au moment de l'accident, a déclaré « A ma hauteur, sur ma gauche, j'ai vu une 205 blanche qui circulait à très faible allure sur le milieu de l'autoroute » et qu'à la question « Qu'est-ce qu'a fait ce véhicule 205 ? », il a répondu « Il est resté au milieu des voies, et il s'est arrêté » ; que le témoin, qui n'a pas dit avoir vu le véhicule de M. [H] avant qu'il n'arrive à sa hauteur, n'a pas indiqué depuis combien de temps ce véhicule roulait au ralenti et il n'a pas précisé le temps écoulé entre le moment où le véhicule est passé à sa hauteur et celui où il s'est arrêté ; qu'en affirmant néanmoins que, selon les déclarations du témoin, l'arrêt du véhicule n'avait pas été soudain mais avait été précédé d'une période durant laquelle il avait ralenti et que M. [H] avait disposé d'un laps de temps utile pour procéder à une manoeuvre afin de conduire son véhicule vers la voie la plus à droite, la cour d'appel a dénaturé le procès-verbal d'audition du 12 décembre 2009 en violation du principe de l'interdiction faite au juge de dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

4°) ALORS QUE, pour réduire le droit à indemnisation de M. [H], la cour d'appel a également retenu qu'il était fautif de ne pas avoir fait usage de ses feux de détresse qu'il avait le temps nécessaire d'actionner, dont la commande était indépendante de celle des feux de route et dont aucun élément ne prouvait le dysfonctionnement technique ; qu'en statuant ainsi tout en admettant que le véhicule avait été victime d'une avarie, que le défaut d'allumage des feux de route arrière était la conséquence d'un dysfonctionnement et que M. [H] n'était sous l'emprise d'aucun produit de nature à altérer son comportement, ce dont il résultait que tout lien entre le défaut d'allumage des feux de détresse et la panne du véhicule ne pouvait être exclu, comme le faisait d'ailleurs valoir M. [H] dans ses conclusions (p. 8), elle a violé l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985 ;

5°) ALORS QUE, si la faute du conducteur qui demande l'indemnisation des dommages qu'il a subis doit être appréciée en faisant abstraction du comportement des autres conducteurs, ce comportement est à prendre en considération pour déterminer si la faute du conducteur a contribué à la réalisation de son préjudice ; que, dans ses conclusions (p. 8), M. [H] faisait valoir que le seul élément causal était dû, d'une part, à l'inattention du conducteur du véhicule Fiat Ducato, M. [G], qui, lorsqu'il a percuté son véhicule sans freiner, était en train de regarder la voiture garée sur la bande d'arrêt d'urgence et, d'autre part, à sa vitesse inadaptée de 100 km/h sur une portion d'autoroute limitée à 90 km/h ; qu'en retenant que la faute de M. [H] avait contribué à proportion de 65 % à la réalisation de son préjudice sans examiner le comportement de M. [G], la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 20-16469
Date de la décision : 20/01/2022
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 14 mai 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 20 jan. 2022, pourvoi n°20-16469


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SAS Cabinet Colin - Stoclet, SCP Célice, Texidor, Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.16469
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