LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 10 novembre 2021
Rejet
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 1057 FS-B+R
Pourvoi n° M 19-24.696
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 NOVEMBRE 2021
La caisse primaire d'assurance maladie de Meurthe-et-Moselle, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° M 19-24.696 contre l'arrêt rendu le 6 mai 2019 par la cour d'appel de Nancy (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Saint-Gobain [Localité 6], société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ à la société MMA Iard, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], venant aux droits de la société Covea Fleet,
3°/ à la société MMA Iard assurances mutuelles, dont le siège est [Adresse 1], venant aux droits de la société Covea Fleet,
défenderesses à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Bouvier, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de Meurthe-et-Moselle, de Me Le Prado, avocat des sociétés Saint-Gobain [Localité 6], MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles, et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 septembre 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Bouvier, conseiller rapporteur, Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen, Mme Taillandier-Thomas, M. Besson, Mmes Coutou, Renault-Malignac, M. Rovinski, Mme Cassignard, M. Martin, Mme Lapasset, M. Leblanc, conseillers, Mmes Guého, Vigneras, Dudit, MM. Ittah, Pradel, conseillers référendaires, M. Grignon Dumoulin, avocat général, et M. Carrasco, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 6 mai 2019), [Y] [B], salarié de la société de transport Michel, a été victime, le 7 mai 2007, d'un accident mortel alors qu'il participait, sur le site exploité par la société Saint-Gobain [Localité 6] (Saint-Gobain PAM), au chargement de tuyaux en fonte d'un poids de huit tonnes chacun et qu'il se trouvait entre deux camions stationnés en parallèle lorsque le tuyau, que le cariste soulevait, a roulé sur les fourches de son engin de levage et l'a heurté en tombant.
2. La société Saint-Gobain PAM a été déclarée coupable du délit d'homicide involontaire pour ne pas avoir pris les mesures nécessaires pour faire respecter par les chauffeurs des camions assurant le transport des tuyaux les mesures de sécurité en vigueur dans l'entreprise.
3. La caisse primaire d'assurance maladie de Meurthe-et-Moselle (la caisse) a assigné la société Saint-Gobain PAM et ses assureurs de responsabilité, les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles, sur le fondement des articles L. 454-1 et D. 454-1 du code de la sécurité sociale, aux fins de condamnation solidaire à lui payer le montant des débours exposés par elle à l'occasion de l'accident et des indemnités de frais de gestion.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
4. La caisse fait grief à l'arrêt, infirmant le jugement, de dire que le protocole d'accord conclu entre assureurs et organismes sociaux doit trouver à s'appliquer en l'espèce et de la débouter de son recours exercé contre la société Saint-Gobain PAM et ses assureurs selon les règles du droit commun, alors « que le protocole d'accord du 14 mai 1983 conclu entre les organismes sociaux et les entreprises d'assurances, faisant obstacle à ce que la caisse exerce son recours selon les règles du droit commun, ne s'applique qu'en présence d'un accident de la circulation au sens de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 ; que n'est pas un accident de la circulation au sens de ce texte, l'accident impliquant un élément d'équipement d'un véhicule terrestre à moteur étranger à sa fonction de circulation ; qu'en retenant toutefois qu'il n'y avait pas lieu de vérifier si, au moment de l'accident, le chariot élévateur circulait ou était à l'arrêt et utilisé comme machine outil, les juges du fond ont violé les articles L. 454-1 et D. 454-1 du code de la sécurité sociale, ensemble les articles 1er de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 et L. 211-1 et R. 221-5 du code des assurances. »
Réponse de la Cour
5. Le protocole d'accord assureurs-organismes sociaux conclu le 24 mai 1983 est relatif au recouvrement des créances des organismes de protection sociale auprès des entreprises d'assurances à la suite d'accidents causés par des véhicules terrestres à moteur et par des bicyclettes.
6. Son règlement d'application pratique et ses annexes, en leur version applicable au litige, prévoient qu'il s'applique aux accidents survenus à compter du 6 avril 2000 et « occasionnés par des véhicules soumis à l'obligation d'assurance (articles L. 211-1 et suivants, R. 211-1 et suivants du code des assurances), ainsi que par des bicyclettes, même lorsqu'elles sont tenues à la main ».
7. Le protocole d'accord assureurs-organismes sociaux conclu le 24 mai 1983 est relatif au recouvrement des créances des organismes de protection sociale auprès des entreprises d'assurances à la suite d'accidents causés par des véhicules terrestres à moteur et par des bicyclettes.
8. C'est dans l'exercice de son pouvoir souverain que la cour d'appel a décidé que l'accord liant les parties s'appliquait aux accidents causés par des véhicules terrestres à moteur soumis à l'obligation d'assurance.
9. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
Et sur le second moyen
10. La caisse fait grief à l'arrêt de dire que le protocole conclu entre assureurs et organismes sociaux doit trouver à s'appliquer en l'espèce et de la débouter de son recours exercé contre la société Saint-Gobain PAM selon les règles du droit commun, alors « que le protocole d'accord du 14 mai 1983 conclu entre les organismes sociaux et les entreprises d'assurances, faisant obstacle à ce que la caisse exerce son recours selon les règles du droit commun, n'a vocation qu'à régir les relations entre la caisse et les assureurs de l'auteur de l'accident ; qu'en déboutant la caisse de son recours en tant qu'il était dirigé contre la société Saint-Gobain [Localité 6], auteur de l'accident, motif pris de l'applicabilité du protocole, les juges du fond ont violé les articles L. 454-1 et D. 454-1 du code de la sécurité sociale. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
11. Les sociétés Saint-Gobain PAM, MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles contestent la recevabilité du moyen. Elles soutiennent que le moyen, mélangé de fait et de droit, est nouveau.
12. Cependant, le moyen qui ne se réfère à aucune considération de fait qui ne résulterait pas des énonciations des juges du fond, est de pur droit.
13. Le moyen est, dès lors, recevable.
Bien-fondé du moyen
14. Le tiers à un contrat peut invoquer à son profit, comme constituant un fait juridique, la situation créée par ce contrat.
15. C'est, par suite, sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel, pour statuer sur la demande de la caisse dirigée contre le tiers responsable, a pris en compte le protocole litigieux, lequel constituait un fait juridique pouvant être invoqué à son profit par ce tiers.
16. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la caisse primaire d'assurance maladie de Meurthe-et-Moselle aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la caisse primaire d'assurance maladie de Meurthe-et-Moselle et condamne cette dernière à payer aux sociétés Saint-Gobain [Localité 6], MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles, la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix novembre deux mille vingt et un.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire d'assurance maladie de Meurthe-et-Moselle
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU' il a, infirmant le jugement, dit que le protocole d'accord conclu entre assureurs et organismes sociaux doit trouver à s'appliquer en l'espèce et débouté la Caisse de son recours exercé contre la société SAINT-GOBAIN [Localité 6] et ses assureurs selon les règles du droit commun ;
AUX MOTIFS QUE « Le 24 mai 1983, a été signé entre les organismes de protection sociale que sont la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), la caisse nationale d'assurance maladie (CANAM) et la caisse de mutualité sociale agricole (CMSA) d'une part, et les organismes représentatifs des entreprises d'assurance que sont la fédération française des sociétés d'assurance (FFSA) et le groupement des sociétés d'assurance à caractère mutuel (GEMA) d'autre part, un protocole d'accord relatif au recouvrement des créances des organismes de protection sociale auprès des entreprises d'assurance à la suite d'accidents causés par des véhicules terrestres à moteurs et par des bicyclettes, et ce en vue : - d'accélérer le recouvrement par les organismes de protection sociale des créances qu'ils détiennent auprès de l'assureur du responsable pour le montant des prestations versées à des victimes d'accidents causés par des véhicules à moteurs et par des bicyclettes ; - de simplifier les rapports entre ces organismes et les entreprises d'assurances, notamment en éliminant les causes de contentieux ; - de permettre aux entreprises d'assurances d'indemniser plus rapidement les victimes. Le règlement d'application pratique (RAP) annexé à ce protocole stipule que la procédure de fixation de l'assiette du recours des organismes sociaux prévue par le protocole et précisée par ce règlement est une procédure amiable, prévoyant des normes d'évaluation spécifiques s'appliquant dans les rapports entre caisses et entreprises d'assurances adhérentes ; que ces règles, exclusives de tout autre mode de détermination de l'assiette du recours, s'imposent aux parties signataires, lesquelles renoncent à se prévaloir de toute décision judiciaire rendue au pénal ou au civil qui conduirait à une appréciation différente des responsabilités ou du préjudice. S'agissant du champ d'application de ces règles de résolution amiable des litiges entre caisses et entreprises d'assurance, il est prévu que le règlement d'application pratique du protocole et ses annexes s'appliquent aux accidents survenus à compter du 6 avril 2000, et que les accidents visés par le protocole sont ceux occasionnés par des véhicules soumis à l'obligation d'assurance (articles L. 211-1 et suivants, R. 211-1 et suivants du code des assurances), ainsi que par des bicyclettes, même lorsqu'elles sont tenues à la main. L'article L. 211-1 du code des assurances dispose : « Toute personne physique ou toute personne morale autre que l'Etat, dont la responsabilité civile peut être engagée en raison de dommages subis par des tiers résultant d'atteintes aux personnes ou aux biens dans la réalisation desquels un véhicule est impliqué, doit, pour faire circuler celui-ci, être couverte par une assurance garantissant cette responsabilité dans les conditions fixées par règlement d'administration publique. Pour l'application du présent article, on entend par "véhicule" tout véhicule terrestre à moteur, c'est-à-dire tout véhicule automoteur destiné à circuler sur le sol et qui peut être actionné par une force mécanique sans être lié à une voie ferrée, ainsi que toute remorque, même non attelée. » En l'espèce, il est constant que l'accident mortel dont M. [B] a été victime a été occasionné par un chariot élévateur, c'est-à-dire un engin motorisé utilisé pour charger sur des camions les tuyaux en fonte fabriqués par la société Saint-Gobain [Localité 6]. Ce véhicule correspond à la définition donnée par le code des assurances des véhicules qui sont soumis à une obligation d'assurance. Le protocole d'accord entre assureurs et organismes sociaux précédemment rappelé ayant vocation à s'appliquer dès lors qu'un accident a été causé par un véhicule soumis à une obligation d'assurance, il n'y a pas lieu de vérifier si, au moment où l'accident s'est produit, le chariot élévateur circulait ou était à l'arrêt et utilisé comme une machine outil. Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a fait cette distinction, et écarté l'application du protocole pour considérer que le recours de la caisse devait s'exercer selon les règles du droit commun à l'encontre de l'assureur de responsabilité civile. La société Saint-Gobain [Localité 6] et ses assureurs soutiennent que si la première condition d'application du protocole est ainsi remplie, celle prévue à l'article C 1.231 de ce même document l'est également puisque l'accident dont M. [B] a été victime s'est produit dans l'enceinte fermée d'une entreprise, dans le cadre d'un travail en commun, et sous sa direction unique. L'article C 1.231 du protocole est ainsi rédigé : « Le recours de la caisse est recevable s'il s'agit d'un accident survenu sur une voie ouverte à la circulation publique, impliquant un véhicule terrestre à moteur conduit par l'employeur de la victime ou un préposé, ou une personne appartenant à la même entreprise selon les dispositions des articles L. 411-1 et L. 455-1-1 du code de la sécurité sociale. Par voie ouverte à la circulation publique, il faut entendre les voies et lieux autres que ceux énumérés en annexe I du règlement d'application pratique. Les enceintes d'entreprise, les champs, les chantiers ne sont pas des voies ouvertes à la circulation publique. » L'article C 1.232 du protocole ajoute que « dans les situations autres que celles énumérées ci-dessus, le recours de la caisse est irrecevable s'il s'agit d'un accident de travail causé par l'employeur ou un co-préposé selon les dispositions des articles L. 455-1-1 du code de la sécurité sociale et l'article 1149 du code rural. » L'article C 1.233 prévoit enfin un cas d'irrecevabilité partielle lorsque la responsabilité est partagée entre un tiers et l'employeur ou un co-préposé. L'accident mortel dont M. [B] a été victime s'étant produit dans l'enceinte de l'entreprise exploitée par la société Saint-Gobain [Localité 6], et celle-ci ayant été déclarée entièrement responsable du préjudice subi par les ayants droit de la victime, il y a lieu, en l'absence de toute référence dans le protocole précédemment rappelé aux notions de travail en commun ou de direction unique, de constater que la caisse ne peut se prévaloir d'aucun recours selon les règles du droit commun contre la société appelante et ses assureurs de responsabilité. Le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné solidairement la société Saint-Gobain [Localité 6] et ses assureurs à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de Meurthe-et-Moselle les sommes visées dans son dispositif qui correspondent au montant des prestations versées par elle aux ayants droit de M. [B], et à l'actualisation de son indemnité de gestion. » ;
ALORS QUE, le protocole d'accord du 14 mai 1983 conclu entre les organismes sociaux et les entreprises d'assurances, faisant obstacle à ce que la Caisse exerce son recours selon les règles du droit commun, ne s'applique qu'en présence d'un accident de la circulation au sens de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 ; que n'est pas un accident de la circulation au sens de ce texte, l'accident impliquant un élément d'équipement d'un véhicule terrestre à moteur étranger à sa fonction de circulation ; qu'en retenant toutefois qu'il n'y avait pas lieu de vérifier si, au moment de l'accident, le chariot élévateur circulait ou était à l'arrêt et utilisé comme machine-outil, les juges du fond ont violé les articles L. 454-1 et D. 454-1 du code de la sécurité sociale, ensemble les articles 1er de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 et L. 211-1 et R. 221-5 du code des assurances.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU' il a, infirmant le jugement, dit que le protocole d'accord conclu entre assureurs et organismes sociaux doit trouver à s'appliquer en l'espèce et débouté la Caisse de son recours exercé contre la société SAINT-GOBAIN [Localité 6] selon les règles du droit commun ;
AUX MOTIFS QUE « Le 24 mai 1983, a été signé entre les organismes de protection sociale que sont la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), la caisse nationale d'assurance maladie (CANAM) et la caisse de mutualité sociale agricole (CMSA) d'une part, et les organismes représentatifs des entreprises d'assurance que sont la fédération française des sociétés d'assurance (FFSA) et le groupement des sociétés d'assurance à caractère mutuel (GEMA) d'autre part, un protocole d'accord relatif au recouvrement des créances des organismes de protection sociale auprès des entreprises d'assurance à la suite d'accidents causés par des véhicules terrestres à moteurs et par des bicyclettes, et ce en vue : - d'accélérer le recouvrement par les organismes de protection sociale des créances qu'ils détiennent auprès de l'assureur du responsable pour le montant des prestations versées à des victimes d'accidents causés par des véhicules à moteurs et par des bicyclettes ; - de simplifier les rapports entre ces organismes et les entreprises d'assurances, notamment en éliminant les causes de contentieux ; - de permettre aux entreprises d'assurances d'indemniser plus rapidement les victimes. Le règlement d'application pratique (RAP) annexé à ce protocole stipule que la procédure de fixation de l'assiette du recours des organismes sociaux prévue par le protocole et précisée par ce règlement est une procédure amiable, prévoyant des normes d'évaluation spécifiques s'appliquant dans les rapports entre caisses et entreprises d'assurances adhérentes ; que ces règles, exclusives de tout autre mode de détermination de l'assiette du recours, s'imposent aux parties signataires, lesquelles renoncent à se prévaloir de toute décision judiciaire rendue au pénal ou au civil qui conduirait à une appréciation différente des responsabilités ou du préjudice. S'agissant du champ d'application de ces règles de résolution amiable des litiges entre caisses et entreprises d'assurance, il est prévu que le règlement d'application pratique du protocole et ses annexes s'appliquent aux accidents survenus à compter du 6 avril 2000, et que les accidents visés par le protocole sont ceux occasionnés par des véhicules soumis à l'obligation d'assurance (articles L. 211-1 et suivants, R. 211-1 et suivants du code des assurances), ainsi que par des bicyclettes, même lorsqu'elles sont tenues à la main. L'article L. 211-1 du code des assurances dispose : « Toute personne physique ou toute personne morale autre que l'Etat, dont la responsabilité civile peut être engagée en raison de dommages subis par des tiers résultant d'atteintes aux personnes ou aux biens dans la réalisation desquels un véhicule est impliqué, doit, pour faire circuler celui-ci, être couverte par une assurance garantissant cette responsabilité dans les conditions fixées par règlement d'administration publique. Pour l'application du présent article, on entend par "véhicule" tout véhicule terrestre à moteur, c'est-à-dire tout véhicule automoteur destiné à circuler sur le sol et qui peut être actionné par une force mécanique sans être lié à une voie ferrée, ainsi que toute remorque, même non attelée. » En l'espèce, il est constant que l'accident mortel dont M. [B] a été victime a été occasionné par un chariot élévateur, c'est-à-dire un engin motorisé utilisé pour charger sur des camions les tuyaux en fonte fabriqués par la société Saint-Gobain [Localité 6]. Ce véhicule correspond à la définition donnée par le code des assurances des véhicules qui sont soumis à une obligation d'assurance. Le protocole d'accord entre assureurs et organismes sociaux précédemment rappelé ayant vocation à s'appliquer dès lors qu'un accident a été causé par un véhicule soumis à une obligation d'assurance, il n'y a pas lieu de vérifier si, au moment où l'accident s'est produit, le chariot élévateur circulait ou était à l'arrêt et utilisé comme une machine outil. Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a fait cette distinction, et écarté l'application du protocole pour considérer que le recours de la caisse devait s'exercer selon les règles du droit commun à l'encontre de l'assureur de responsabilité civile. La société Saint-Gobain [Localité 6] et ses assureurs soutiennent que si la première condition d'application du protocole est ainsi remplie, celle prévue à l'article C 1.231 de ce même document l'est également puisque l'accident dont M. [B] a été victime s'est produit dans l'enceinte fermée d'une entreprise, dans le cadre d'un travail en commun, et sous sa direction unique. L'article C 1.231 du protocole est ainsi rédigé : « Le recours de la caisse est recevable s'il s'agit d'un accident survenu sur une voie ouverte à la circulation publique, impliquant un véhicule terrestre à moteur conduit par l'employeur de la victime ou un préposé, ou une personne appartenant à la même entreprise selon les dispositions des articles L. 411-1 et L. 455-1-1 du code de la sécurité sociale. Par voie ouverte à la circulation publique, il faut entendre les voies et lieux autres que ceux énumérés en annexe I du règlement d'application pratique. Les enceintes d'entreprise, les champs, les chantiers ne sont pas des voies ouvertes à la circulation publique. » L'article C 1.232 du protocole ajoute que « dans les situations autres que celles énumérées ci-dessus, le recours de la caisse est irrecevable s'il s'agit d'un accident de travail causé par l'employeur ou un co-préposé selon les dispositions des articles L. 455-1-1 du code de la sécurité sociale et l'article 1149 du code rural. » L'article C 1.233 prévoit enfin un cas d'irrecevabilité partielle lorsque la responsabilité est partagée entre un tiers et l'employeur ou un co-préposé. L'accident mortel dont M. [B] a été victime s'étant produit dans l'enceinte de l'entreprise exploitée par la société Saint-Gobain [Localité 6], et celle-ci ayant été déclarée entièrement responsable du préjudice subi par les ayants droit de la victime, il y a lieu, en l'absence de toute référence dans le protocole précédemment rappelé aux notions de travail en commun ou de direction unique, de constater que la caisse ne peut se prévaloir d'aucun recours selon les règles du droit commun contre la société appelante et ses assureurs de responsabilité. Le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné solidairement la société Saint-Gobain [Localité 6] et ses assureurs à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de Meurthe-et-Moselle les sommes visées dans son dispositif qui correspondent au montant des prestations versées par elle aux ayants droit de M. [B], et à l'actualisation de son indemnité de gestion. » ;
ALORS QUE, le protocole d'accord du 14 mai 1983 conclu entre les organismes sociaux et les entreprises d'assurances, faisant obstacle à ce que la Caisse exerce son recours selon les règles du droit commun, n'a vocation qu'à régir les relations entre la Caisse et les assureurs de l'auteur de l'accident ; qu'en déboutant la Caisse de son recours en tant qu'il était dirigé contre la société SAINT-GOBAIN [Localité 6], auteur de l'accident, motif pris de l'applicabilité du protocole, les juges du fond ont violé les articles L. 454-1 et D. 454-1 du code de la sécurité sociale.