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20/10/2021 | FRANCE | N°19-25495

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 octobre 2021, 19-25495


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 octobre 2021

Cassation partielle

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1186 F-D

Pourvoi n° E 19-25.495

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 20 OCTOBRE 2021

La société Elior services pro

preté et santé (ESPS), société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° E 19-25.495 contre l'arrêt rendu le 1...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 octobre 2021

Cassation partielle

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1186 F-D

Pourvoi n° E 19-25.495

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 20 OCTOBRE 2021

La société Elior services propreté et santé (ESPS), société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° E 19-25.495 contre l'arrêt rendu le 11 octobre 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-7), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [S] [R], épouse [N], domiciliée [Adresse 1],

2°/ au syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches-du-Rhône, dont le siège est [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Chamley-Coulet, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Elior services propreté et santé, après débats en l'audience publique du 8 septembre 2021 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Chamley-Coulet, conseiller référendaire rapporteur, Mme Ott, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre, assistée de Mme Catherine, greffier stagiaire,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 11 octobre 2019), Mme [R], épouse [N], a été engagée en qualité d'agent de services, à compter du 1er mai 2014, par la société Elior services propreté et santé (ci-après la société ESPS).

2. Le 11 mai 2016, la salariée a saisi la juridiction prud'homale aux fins de paiement, en application du principe d'égalité de traitement, notamment d'une prime de treizième mois et d'une prime d'assiduité versées à des salariés de la même entreprise travaillant sur les sites de la polyclinique de [2] et de la clinique [1]. Le syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches-du-Rhône est intervenu volontairement dans cette procédure.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. L'employeur fait grief à l'arrêt de constater que la salariée été victime d'une inégalité de traitement au titre d'une prime de treizième mois en tant que salariée de la société ESPS, alors :

« 1°/ que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs ; qu'en affirmant, pour constater que Mme [R] avait été victime d'une inégalité de traitement au titre de la prime de treizième mois, que « la société Elior n'a pas conclu, alors qu'il appartient à l'employeur de justifier la différence de traitement au titre de cette prime de treizième mois qui en résulte entre ces salariés et la salariée appelante », quand la société ESPS était réputée s'être appropriée les motifs du jugement qui, pour débouter Mme [R] de sa demande au titre de la prime de treizième mois, avait jugé, d'une part, que « compte tenu des procédures engagées par les salariés affectés sur le site de la polyclinique de [2] à deux moments différents aux mêmes fins et des décisions rendues par le conseil de prud'hommes également à des moments différents, l'erreur invoquée par la société Elior services propreté et santé, en ce qu'elle a versé la prime du treizième mois au premier groupe des trente-cinq salariés au regard de sa condamnation aux termes du jugement du 2 avril 2012, mais également au deuxième groupe des dix salariés qui venaient de saisir la juridiction, n'est pas à exclure » et, d'autre part, que « même à supposer que la société Elior services propreté et santé a fait le choix, suite à sa condamnation du 2 avril 2012, de verser la prime de treizième mois à l'ensemble des salariés ayant engagé une procédure devant le conseil de prud'hommes afin d'obtenir un treizième mois au visa de l'égalité de traitement, le fait pour elle d'avoir, dans le même temps, contesté la décision du 2 avril 2012 devant la cour d'appel de Montpellier avant de se pourvoir en cassation exclut tout engagement unilatéral de l'employeur d'allouer une prime de treizième mois aux salariés concernés, qu'il s'agisse du groupe de trente-cinq salariés ou de celui de dix salariés », la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

2°/ qu'en se bornant à affirmer que « la société Elior ne présenta[it] aucune explication sur la différence de traitement à ce titre » pour juger que « le versement d'une prime de treizième mois effectué entre 2012 et 2014 au profit de quelques salariés de l'entreprise d[evait] être analysé comme un avantage alloué unilatéralement et discrétionnairement à certains employés affectés sur le site de la polyclinique de [2], sans que l'employeur invoque des raisons objectives et pertinentes justifiant la différence de traitement que ce versement a occasionné entre les salariés exerçant sur le site de la polyclinique de [2] et Mme [R] », sans cependant rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si le versement en novembre 2012 d'une prime de treizième mois aux salariés [C] et autres ne résultait pas d'une confusion faite par la société exposante avec un autre collectif de salariés du même site qui venaient d'obtenir gain de cause sur la prime de treizième mois par jugements du conseil de prud'hommes du 2 avril 2012, ce dont il résultait que la différence de traitement avec Mme [R] était justifiée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe d'égalité de traitement ;

3°/ que l'exposante avait fait valoir, par les motifs du jugement entrepris qu'elle s'était appropriée, que « compte tenu des procédures engagées par les salariés sur le site de la polyclinique de [2] à deux moments différents, aux mêmes fins et des décisions rendues par le conseil de prud'hommes également à des moments différents, l'erreur invoquée par la société Elior services propreté et santé, en ce qu'elle a versé la prime de treizième mois au premier groupe de trente-cinq salariés au regard de sa condamnation aux termes du jugement du 2 avril 2012 mais également au deuxième groupe des dix salariés qui venaient de saisir la juridiction prud'homale, n'est pas à exclure » ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen péremptoire, dont il résultait que la différence de traitement entre les salariés [C] et autres, affectés sur le site de [2], et Mme [R] était justifiée objectivement, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4°/ que constitue un engagement unilatéral de l'employeur l'expression de la volonté libre et explicite de ce dernier de consentir un avantage à ses salariés ; qu'en se bornant à affirmer que « la société Elior ne présenta[it] aucune explication sur la différence de traitement à ce titre » pour juger que « le versement d'une prime de treizième mois effectué entre 2012 et 2014 au profit de quelques salariés de l'entreprise d[evait] être analysé comme un avantage alloué unilatéralement et discrétionnairement à certains employés affectés sur le site de la polyclinique de [2], sans que l'employeur invoque des raisons objectives et pertinentes justifiant la différence de traitement que ce versement a occasionné entre les salariés exerçant sur le site de la polyclinique de [2] et Mme [R] », sans cependant rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la réitération, en 2013 et 2014, du versement de la prime de treizième mois aux salariés [C] et autres du site de [2] ne résultait pas du lien étroit existant entre le contentieux engagé par trente-cinq salariés du site de [2], qui avaient obtenu gain de cause sur la prime de treizième mois par jugements du conseil de prud'hommes de [2] du 2 avril 2012, et le contentieux des salariés [C] et autres dont les jugements avant dire droit rendus par ce même conseil de prud'hommes le 29 avril 2013 avaient sursis à statuer dans l'attente de la décision de la cour d'appel de Montpellier dans l'autre contentieux, ce dont il résultait que les versements litigieux ne reposaient sur aucune intention libérale de l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1103 et 1104 du code civil ;

5°/ que l'exposante avait fait valoir, par les motifs du jugement entrepris qu'elle s'était appropriée, que « si, au mois de novembre 2012, le conseil de prud'hommes n'avait pas encore tranché le litige opposant la société Elior services propreté et santé aux autres salariés avec lesquels la demanderesse se compare, comme n'ayant statué que le 5 janvier 2015 à la suite d'un sursis à statuer prononcé le 29 avril 2013 dans l'attente de la décision de la cour d'appel de Montpellier à intervenir dans l'affaire concernant le groupe des trente-cinq salariés, il n'en demeure pas moins que ceux-ci avaient saisi la juridiction prud'homale le 27 septembre 2012 afin d'obtenir également un rappel de prime de treizième mois, soit avant même d'avoir bénéficié de la prime de treizième mois à compter du mois de novembre 2012 et après que leurs collègues, à savoir le groupe de trente-cinq salariés, aient obtenu gain de cause devant la même juridiction par décision du 2 avril 2012 » ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen péremptoire, lequel excluait pourtant toute intention libérale de la société ESPS de verser aux salariés [C] et autres la prime de treizième mois et justifiait ainsi la différence de traitement litigieuse, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

6°/ que constitue un engagement unilatéral de l'employeur l'expression de la volonté libre et explicite de ce dernier de consentir un avantage à ses salariés ; qu'en se bornant à affirmer que « la société Elior ne présenta[it] aucune explication sur la différence de traitement à ce titre » pour juger que « le versement d'une prime de treizième mois effectué entre 2012 et 2014 au profit de quelques salariés de l'entreprise d[evait] être analysé comme un avantage alloué unilatéralement et discrétionnairement à certains employés affectés sur le site de la polyclinique de [2], sans que l'employeur invoque des raisons objectives et pertinentes justifiant la différence de traitement que ce versement a occasionné entre les salariés exerçant sur le site de la polyclinique de [2] et Mme [R] », sans cependant rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la remise en cause systématique par la société ESPS, via l'appel et le pourvoi en cassation, de l'ensemble des décisions judiciaires l'ayant condamnée à verser la prime de treizième mois aux salariés du site de [2] n'était pas de nature à exclure toute intention libérale d'accorder à ces salariés la prime litigieuse, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1103 et 1104 du code civil ;

7°/ que l'exposante avait fait valoir, par les motifs du jugement entrepris qu'elle s'était appropriée, que « le fait pour la société Elior services propreté et santé d'avoir fait appel des jugements du 2 avril 2012 et 5 janvier 2015 puis de s'être pourvue en cassation suite aux arrêts rendus par la cour d'appel de Montpellier les 26 mars 2014 et 20 janvier 2016 démontre bien que cette dernière a toujours considéré que les salariés affectés sur le site de la polyclinique de [2] ne pouvaient prétendre à la prime de treizième mois » ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen péremptoire, dont il résultait pourtant que le versement de la prime de treizième mois aux salariés [C] et autres ne reposait sur aucune intention libérale de la société ESPS, de sorte que la différence de traitement avec Mme [R] était justifiée, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 472 et 954 du code de procédure civile, L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :

4. Selon le premier de ces textes, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond et le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée. Selon le second, la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement, est réputée s'en approprier les motifs.

5. Pour constater que la salariée a été victime d'une inégalité de traitement au titre d'une prime de treizième mois, l'arrêt retient d'abord que l'examen des bulletins de paie des salariés de l'entreprise ayant travaillé sur le site de la polyclinique de [2] révèle le versement, en novembre 2012 ([C]), novembre 2013 ([Z], [J], [L], [U], [C]), novembre 2014 ([C]), novembre 2018 ([C]) d'un treizième mois sur la base de 100 % du salaire mensuel brut de base (au prorata du temps de présence dans l'entreprise au cours de l'année), qu'il n'est pas contesté que la salariée n'a pas perçu cette prime de treizième mois, au moins pour les périodes dont elle justifie par les bulletins de salaire qu'elle verse aux débats, et effectue un travail égal ou de valeur égale à celui occupé par les salariés auxquels elle se compare, que la différence de traitement ayant été mise en évidence par la salariée, il incombe dès lors à l'employeur de la justifier par des raisons objectives et pertinentes. L'arrêt retient ensuite que la société ESPS n'a pas conclu, qu'il n'est donc pas contesté que l'attribution de la prime de treizième mois à ces salariés du site de la polyclinique de [2] ne résulte ni d'un transfert du contrat de travail en application d'une garantie d'emploi, en application de l'article 7 de la convention collective nationale des entreprises de propreté, ni d'un accord collectif négocié et signé par les organisations syndicales représentatives ou d'un protocole de fin de conflit ayant même valeur, ni du maintien d'une majoration de traitement consentie à certains salariés par un ancien employeur en application de l'article L. 1224-1 du code du travail, qu'il résulte des bulletins de salaire produits que cette prime de treizième mois a été attribuée non seulement en novembre 2012, mais aussi en novembre 2013, et en novembre 2014, et ce alors même qu'aucune décision de justice ne l'imposait à l'employeur, le jugement du conseil de prud'hommes ayant accordé à ces salariés un rappel de primes de treizième mois ayant été prononcé seulement le 5 janvier 2015, que la société Elior ne présentant aucune explication sur la différence de traitement à ce titre, le versement d'une prime de treizième mois effectué entre 2012 et 2014 au profit de quelques salariés de l'entreprise doit en conséquence être analysé comme un avantage alloué unilatéralement et discrétionnairement à certains employés affectés sur le site de la polyclinique de [2], sans que l'employeur invoque des raisons objectives et pertinentes justifiant la différence de traitement que ce versement a occasionné entre les salariés exerçant sur le site de la polyclinique de [2] et la salariée partie au présent litige.

6. En se déterminant ainsi, sans réfuter les motifs du jugement tirés de ce que, par jugement du 5 janvier 2015, le conseil de prud'hommes de Narbonne avait fait droit à la demande de plusieurs salariés de la polyclinique de [2] et notamment à Mmes [C], [J], [Z], [L] et M. [U], lesquels avaient saisi la juridiction le 27 septembre 2012 pour réclamer un rappel de prime de treizième mois, sur le fondement de l'égalité de traitement, en se comparant à des salariés affectés sur le site du centre hospitalier Lapeyronie à Montpellier, que, par ailleurs, trente-cinq salariés exerçant au sein de la polyclinique de [2] avaient, sur le même fondement, saisi aussi le conseil de prud'hommes de Narbonne en 2011 pour revendiquer la prime de treizième mois et avaient obtenu gain de cause par jugement du 2 avril 2012 confirmé sur ce point par arrêt de la cour d'appel de Montpellier rendu le 26 mars 2014 et que la remise en cause par l'employeur de l'ensemble des décisions judiciaires l'ayant condamné à verser une prime de treizième mois à certains salariés de la polyclinique de [2] excluait tout engagement volontaire et unilatéral de la leur attribuer, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Et sur le second moyen

Enoncé du moyen

7. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à verser au syndicat une certaine somme à titre de dommages-intérêts, alors que « la cassation à intervenir sur le premier moyen entraînera, par voie de conséquence, la cassation sur le second moyen, en application de l'article 625 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 624 du code de procédure civile :

8. La cassation à intervenir sur le premier moyen entraîne la cassation par voie de conséquence du chef de dispositif critiqué par le second moyen relatif aux dommages-intérêts versés au syndicat pour violation du principe d'égalité de traitement, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il constate que Mme [R], épouse [N] a été victime d'une inégalité de traitement au titre d'une prime de treizième mois et en ce qu'il condamne la société ESPS à payer au syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches-du-Rhône une certaine somme à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 11 octobre 2019, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;

Condamne Mme [R], épouse [N], aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société ESPS ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt octobre deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Elior services propreté et santé.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir constaté que Madame [S] [R], épouse [N], avait été victime d'une inégalité de traitement au titre d'une prime de 13ème mois en tant que salariée de la société ELIOR SERVICES PROPRETE ET SANTE ;

Aux motifs que Madame [R], recrutée par la société ELIOR, soutient avoir été dans une situation d'inégalité de traitement au titre d'une prime de 13ème mois dont elle n'a pas bénéficié, en comparant sa situation avec des salariés affectés sur le site de la polyclinique de [2] ; que Madame [R] compare sa situation à des salariés du site de la polyclinique de [2] ; que l'examen des bulletins de paie des salariés de l'entreprise ayant travaillé sur le site de la polyclinique de [2] révèlent le versement, en novembre 2012 ([C]), novembre 2013 ([Z], [J], [L], [U], [C]), novembre 2014 ([C]), novembre 2018 ([C]) d'un 13ème mois sur la base de 100 % du salaire mensuel brut de base (au prorata du temps de présence dans l'entreprise au cours de l'année) ; qu'il n'est pas contesté que Madame [R] n'a pas perçu cette prime de 13ème mois, au moins pour les périodes dont elle justifie par les bulletins de salaire qu'elle verse aux débats, et effectue un travail égal ou de valeur égal à celui occupé par les salariés auxquels elle se compare ; que la différence de traitement ayant été mise en évidence par la salariée, il incombe dès lors à l'employeur de la justifier par des raisons objectives et pertinentes ; que la société ELIOR n'a pas conclu, alors qu'il appartient à l'employeur de justifier la différence de traitement au titre de cette prime de 13ème mois qui en résulte entre ces salariés et la salariée appelante ; qu'il n'est donc pas contesté que l'attribution de la prime de 13ème mois à ces salariés du site de la polyclinique de [2] ne résulte ni d'un transfert du contrat de travail en application d'une garantie d'emploi, en application de l'article 7 de la Convention collective nationale des entreprises de propreté, ni d'un accord collectif négocié et signé par les organisations syndicales représentatives ou d'un protocole de fin de conflit ayant même valeur, ni du maintien d'un majoration de traitement consentie à certains salariés par un ancien employeur en application de l'article L. 1224-1 du Code du travail ; qu'il résulte des bulletins de salaire produits que cette prime de 13ème mois a été attribuée non seulement en novembre 2012 (Madame [C]), mais aussi en novembre 2013 (Mmes [C], [J], [Z], [L], [U]), novembre 2014 (Madame [C]), et ce alors même qu'aucune décision de justice ne l'imposait à l'employeur, le jugement du Conseil de prud'hommes ayant accordé à ces salariés un rappel de primes de 13ème mois ayant été prononcé seulement le 5 janvier 2015 ; que la société ELIOR ne présentant aucune explication sur la différence de traitement à ce titre, le versement d'une prime de 13ème mois effectué entre 2012 et 2014 au profit de quelques salariés de l'entreprise doit en conséquence être analysé comme un avantage alloué unilatéralement et discrétionnairement à certains employés affectés sur le site de la polyclinique de [2], sans que l'employeur invoque des raisons objectives et pertinentes justifiant la différence de traitement que ce versement a occasionné entre les salariés exerçant sur le site de la polyclinique de [2] et Madame [R] ; que Madame [R], dont il n'est pas contesté qu'elle se trouve dans une situation de travail de valeur égale aux cinq salariés affectés sur le site de la polyclinique de [2] auxquels elle se compare, est donc fondée en sa demande de constat d'une inégalité de traitement à ce titre ;

ALORS, D'UNE PART, QUE la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs ; qu'en affirmant, pour constater que Madame [R] avait été victime d'une inégalité de traitement au titre de la prime de 13ème mois, que « la société ELIOR n'a pas conclu, alors qu'il appartient à l'employeur de justifier la différence de traitement au titre de cette prime de 13ème mois qui en résulte entre ces salariés et la salariée appelante », quand la société ESPS était réputée s'être appropriée les motifs du jugement qui, pour débouter Madame [R] de sa demande au titre de la prime de 13ème mois, avait jugé, d'une part, que « compte tenu des procédures engagées par les salariés affectés sur le site de la polyclinique de [2] à deux moments différents aux mêmes fins et des décisions rendues par le Conseil de prud'hommes également à des moments différents, l'erreur invoquée par la société ELIOR SERVICES PROPRETE ET SANTE, en ce qu'elle a versé la prime du 13ème mois au premier groupe des 35 salariés au regard de sa condamnation aux termes du jugement du 2 avril 2012, mais également au deuxième groupe des 10 salariés qui venaient de saisir la juridiction, n'est pas à exclure » et, d'autre part, que « même à supposer que la société ELIOR SERVICES PROPRETE ET SANTE a fait la choix, suite à sa condamnation du 2 avril 2012, de verser la prime de 13ème mois à l'ensemble des salariés ayant engagé une procédure devant le Conseil de prud'hommes afin d'obtenir un 13ème mois au visa de l'égalité de traitement, le fait pour elle d'avoir, dans le même temps, contesté la décision du 2 avril 2012 devant la Cour d'appel de Montpellier avant de se pourvoir en cassation exclut tout engagement unilatéral de l'employeur d'allouer une prime de 13ème mois aux salariés concernés, qu'il s'agisse du groupe de 35 salariés ou de celui de 10 salariés », la Cour d'appel a violé le texte susvisé ;

ALORS, D'AUTRE PART et subsidiairement, QU'en se bornant à affirmer que « la société ELIOR ne présenta[it] aucune explication sur la différence de traitement à ce titre » pour juger que « le versement d'une prime de 13ème mois effectué entre 2012 et 2014 au profit de quelques salariés de l'entreprise d[evait] être analysé comme un avantage alloué unilatéralement et discrétionnairement à certains employés affectés sur le site de la polyclinique de [2], sans que l'employeur invoque des raisons objectives et pertinentes justifiant la différence de traitement que ce versement a occasionné entre les salariés exerçant sur le site de la polyclinique de [2] et Madame [R] », sans cependant rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si le versement en novembre 2012 d'une prime de 13ème mois aux salariés [C] et autres ne résultait pas d'une confusion faite par la société exposante avec un autre collectif de salariés du même site qui venaient d'obtenir gain de cause sur la prime de 13ème pois par jugements du Conseil de prud'hommes du 2 avril 2012, ce dont il résultait que la différence de traitement avec Madame [R] était justifiée, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe d'égalité de traitement ;

ALORS, DE TROISIEME PART et en tout état de cause, QUE l'exposante avait fait valoir, par les motifs du jugement entrepris qu'elle s'était appropriée, que « compte tenu des procédures engagées par les salariés sur le site de la polyclinique de [2] à deux moments différents, aux mêmes fins et des décisions rendues par le Conseil de prud'hommes également à des moments différents, l'erreur invoquée par la société ELIOR SERVICES PROPRETE ET SANTE, en ce qu'elle a versé la prime de 13ème mois au premier groupe de 35 salariés au regard de sa condamnation aux termes du jugement du 2 avril 2012 mais également au deuxième groupe des 10 salariés qui venaient de saisir la juridiction prud'homale, n'est pas à exclure » ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen péremptoire, dont il résultait que la différence de traitement entre les salariés [C] et autres, affectés sur le site de [2], et Madame [R] était justifiée objectivement, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

ALORS, DE QUATRIEME PART et subsidiairement à la première branche, QUE constitue un engagement unilatéral de l'employeur l'expression de la volonté libre et explicite de ce dernier de consentir un avantage à ses salariés ; qu'en se bornant à affirmer que « la société ELIOR ne présenta[it] aucune explication sur la différence de traitement à ce titre » pour juger que « le versement d'une prime de 13ème mois effectué entre 2012 et 2014 au profit de quelques salariés de l'entreprise d[evait] être analysé comme un avantage alloué unilatéralement et discrétionnairement à certains employés affectés sur le site de la polyclinique de [2], sans que l'employeur invoque des raisons objectives et pertinentes justifiant la différence de traitement que ce versement a occasionné entre les salariés exerçant sur le site de la polyclinique de [2] et Madame [R] », sans cependant rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la réitération, en 2013 et 2014, du versement de la prime de 13ème mois aux salariés [C] et autres du site de [2] ne résultait pas du lien étroit existant entre le contentieux engagé par 35 salariés du site de [2], qui avaient obtenu gain de cause sur la prime de 13ème mois par jugements du Conseil de prud'hommes de Narbonne du 2 avril 2012, et le contentieux des salariés [C] et autres dont les jugements avant dire droit rendus par ce même conseil de prud'hommes le 29 avril 2013 avaient sursis à statuer dans l'attente de la décision de la Cour d'appel de Montpellier dans l'autre contentieux, ce dont il résultait que les versements litigieux ne reposaient sur aucune intention libérale de l'employeur, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du Code du travail et 1103 et 1104 du Code civil ;

ALORS, DE CINQUIEME PART et en tout état de cause, QUE l'exposante avait fait valoir, par les motifs du jugement entrepris qu'elle s'était appropriée, que « si, au mois de novembre 2012, le Conseil de prud'hommes n'avait pas encore tranché le litige opposant la société ELIOR SERVICES PROPRETE ET SANTE aux autres salariés avec lesquels la demanderesse se compare, comme n'ayant statué que le 5 janvier 2015 à la suite d'un sursis à statuer prononcé le 29 avril 2013 dans l'attente de la décision de la Cour d'appel de Montpellier à intervenir dans l'affaire concernant le groupe des 35 salariés, il n'en demeure pas moins que ceux-ci avaient saisi la juridiction prud'homale le 27 septembre 2012 afin d'obtenir également un rappel de prime de 13ème mois, soit avant même d'avoir bénéficié de la prime de 13ème mois à compter du mois de novembre 2012 et après que leurs collègues, à savoir le groupe de 35 salariés, aient obtenu gain de cause devant la même juridiction par décision du 2 avril 2012 » ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen péremptoire, lequel excluait pourtant toute intention libérale de la société ESPS de verser aux salariés [C] et autres la prime de 13ème mois et justifiait ainsi la différence de traitement litigieuse, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

ALORS, DE SIXIEME PART, et subsidiairement à la première branche, QUE constitue un engagement unilatéral de l'employeur l'expression de la volonté libre et explicite de ce dernier de consentir un avantage à ses salariés ; qu'en se bornant à affirmer que « la société ELIOR ne présenta[it] aucune explication sur la différence de traitement à ce titre » pour juger que « le versement d'une prime de 13ème mois effectué entre 2012 et 2014 au profit de quelques salariés de l'entreprise d[evait] être analysé comme un avantage alloué unilatéralement et discrétionnairement à certains employés affectés sur le site de la polyclinique de [2], sans que l'employeur invoque des raisons objectives et pertinentes justifiant la différence de traitement que ce versement a occasionné entre les salariés exerçant sur le site de la polyclinique de [2] et Madame [R] », sans cependant rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la remise en cause systématique par la société ESPS, via l'appel et le pourvoi en cassation, de l'ensemble des décisions judiciaires l'ayant condamnée à verser la prime de 13ème mois aux salariés du site de [2] n'était pas de nature à exclure toute intention libérale d'accorder à ces salariés la prime litigieuse, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles L. 1221-1 du Code du travail et 1103 et 1104 du Code civil ;

ALORS, ENFIN et en tout état de cause, QUE l'exposante avait fait valoir, par les motifs du jugement entrepris qu'elle s'était appropriée, que « le fait pour la société ELIOR SERVICES PROPRETE ET SANTE d'avoir fait appel des jugements du 2 avril 2012 et 5 janvier 2015 puis de s'être pourvue en cassation suite aux arrêts rendus par la Cour d'appel de Montpellier les 26 mars 2014 et 20 janvier 2016 démontre bien que cette dernière a toujours considéré que les salariés affectés sur le site de la polyclinique de [2] ne pouvaient prétendre à la prime de 13ème mois » ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen péremptoire, dont il résultait pourtant que le versement de la prime de 13ème mois aux salariés [C] et autres ne reposait sur aucune intention libérale de la société ESPS, de sorte que la différence de traitement avec Madame [R] était justifiée, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société ESPS à verser au syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches du Rhône la somme de 50 € à titre de dommages et intérêts ;

Aux motifs que la violation du principe de l'égalité de traitement quant à l'attribution d'une prime de 13ème mois justifie que la société ELIOR soit condamnée à verser au syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches du Rhône la somme de 50 € à titre de dommages et intérêts ;

ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen entraînera, par voie de conséquence, la cassation sur le second moyen, en application de l'article 625 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-25495
Date de la décision : 20/10/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 11 octobre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 oct. 2021, pourvoi n°19-25495


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.25495
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