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12/10/2021 | FRANCE | N°20-86638

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 12 octobre 2021, 20-86638


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° K 20-86.638 F-D

N° 01197

CK
12 OCTOBRE 2021

REJET

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 12 OCTOBRE 2021

La société La Générale de bâtiment et M. [W] [D] ont formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 5-12, en date du 25 novembre 2020, qui

, pour homicide involontaire et infraction à la législation du travail, a condamné la première à 75 000 euros d'amende et le sec...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° K 20-86.638 F-D

N° 01197

CK
12 OCTOBRE 2021

REJET

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 12 OCTOBRE 2021

La société La Générale de bâtiment et M. [W] [D] ont formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 5-12, en date du 25 novembre 2020, qui, pour homicide involontaire et infraction à la législation du travail, a condamné la première à 75 000 euros d'amende et le second à un an d'emprisonnement avec sursis et 10 000 euros d'amende.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de Mme Guerrini, conseiller référendaire, les observations de la SCP Spinosi, avocat de la société La Générale de bâtiment et M. [W] [D], et les conclusions de M. Croizier, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 septembre 2021 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Guerrini, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Le 30 août 2016, [N] [T] est décédé d'une chute dans une trémie, destinée à recevoir un velux, aménagée dans le toit d'un immeuble en construction, duquel il s'employait à retirer une bâche parapluie qui avait abrité le chantier durant les vacances.

3. Il était employé de la société Bois et Tradition, chargée, par la société La Générale de bâtiment (LGB) constructeur de l'ouvrage, de la sous-traitance de la charpente et de la couverture.

4. La société LGB et son dirigeant M. [W] [D], ainsi que M. [I] dirigeant de la société Bois et Tradition, ont été poursuivis notamment du chef d'homicide involontaire par la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, consistant en le fait d'avoir fait travailler [N] [T] en hauteur, sur un plan de travail non conforme, en l'espèce un toit en pente, à retirer une bâche anti-pluie placée sur une trémie, alors qu'aucune obstruction du trou, garde-corps et point d'ancrage fixe, protections collectives contre les chutes, n'étaient en place.

5. Le tribunal a déclaré les prévenus coupables.

6. La société LGB, M. [D] et le ministère public ont relevé appel de cette décision.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses deuxième, troisième, quatrième et cinquième branches

7. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

8. Le moyen, en sa première branche, critique l'arrêt attaqué en ce qu'il les a déclarés coupables d'homicide involontaire par violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité, alors :

« 1°/ que si l'entrepreneur chargé de la construction et de l'entretien d'un ouvrage pourra, en principe, engager sa responsabilité pénale pour homicide involontaire en cas d'accident mortel survenu sur un chantier dont il a, globalement, la charge, c'est sous réserve des obligations et responsabilités respectives assumées par cet entrepreneur et par ses éventuels sous-traitants ainsi que du rôle causal que la faute de ces derniers peut avoir joué dans la survenance du dommage ; qu'en déclarant l'entreprise principale, la société La Générale de bâtiment, et son dirigeant, M. [D], coupables d'homicide involontaire en ne se fondant que sur des solutions de droit général, et en refusant expressément d'examiner les actes et instruments contractuels qui, entre cet entreprise principale et son sous-traitant, la société Bois et Tradition, laquelle était en charge de la construction et de l'édification de tous les éléments qui, en l'espèce, avaient matériellement été à l'origine de l'accident, et, notamment, en refusant d'apprécier leur portée et leur impact sur les responsabilités et obligations respectives censées peser sur les parties, ainsi que leur possible modulation par rapport au droit commun, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 221-6 et 121-3 du code pénal. »

Réponse de la Cour

9. Pour déclarer la société LGB et M. [D] coupables d'homicide involontaire par la violation manifestement délibérée d'une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, l'arrêt attaqué retient que la conception de la trémie, son positionnement, et ses dimensions étaient le fait du maître d'ouvrage et de son exécutant, la société LGB, que le sous-traitant n'avait pas d'autres attributions que celles consistant à exécuter sa tâche en se conformant aux plans et schémas de construction ainsi décidés et qu'il n'avait pas le pouvoir de remettre en cause, que dès lors, la sécurisation du bâtiment ne pouvait, compte-tenu de ces spécificités, se subdiviser, et que le sous-traitant n'avait pas à assumer, à l'égard de ses salariés, les mesures de sécurité autres que celle se rattachant à l'accomplissement par son personnel de la tâche confiée de couverture et de charpente, distincte de celle impartie à la société LGB, sur laquelle pesait une obligation générale de sécurité en sa qualité de constructeur de l'immeuble, peu important les dispositions arrêtées dans les documents contractuels définissant leurs rapports.

10. Les juges ajoutent que M. [D] avait été destinataire de l'avis du coordonnateur de sécurité après sa visite, en sa présence, sur le chantier du mois de juillet, selon lequel aucun travail sur la couverture ne pouvait avoir lieu avant la mise en oeuvre des moyens de protection, qu'il était donc nécessairement informé que l'aménagement d'une telle ouverture, si elle n'était pas protégée ou obstruée durant les travaux d'édification, constituait un risque et un danger pour les personnes qui pouvaient travailler sur le toit, que toutefois, aucun dispositif de nature à prévenir ce risque n'avait été installé.

11. Ils en concluent que la société LGB représentée par son dirigeant M. [D] a méconnu cette obligation, personnelle à tout constructeur, de prendre la mesure adéquate.

12. En se déterminant ainsi, la cour d'appel qui a caractérisé l'obligation de sécurité qui demeurait à la charge du constructeur nonobstant les stipulations contractuelles qui le liaient à son sous-traitant, lesquelles ne pouvaient dans les conditions retenues être de nature à l'en exonérer, a justifié sa décision.

13. Dès lors, le moyen doit être écarté.

14. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le douze octobre deux mille vingt et un.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 20-86638
Date de la décision : 12/10/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 25 novembre 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 12 oct. 2021, pourvoi n°20-86638


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : SCP Spinosi

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:20.86638
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