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30/06/2021 | FRANCE | N°20-18759

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 30 juin 2021, 20-18759


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 juin 2021

Cassation partielle

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 622 FS-B+R

Pourvoi n° D 20-18.759

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 30 JUIN 2021

La société Banque Delubac et cie

, société en commandite simple, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° D 20-18.759 contre l'arrêt rendu le 9 juin 2020 par la cour...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 juin 2021

Cassation partielle

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 622 FS-B+R

Pourvoi n° D 20-18.759

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 30 JUIN 2021

La société Banque Delubac et cie, société en commandite simple, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° D 20-18.759 contre l'arrêt rendu le 9 juin 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 8), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société MJA, société d'exercice libéral à forme anonyme, dont le siège est [Adresse 2], venant en remplacement et aux droits de la SCP [Z] Moyrand-Pascal [P], en la personne de M. [T] [A], prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société Intervad 2, dont le siège [Adresse 3],

2°/ à la société administrateurs judiciaires [V] [B], société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 4], prise en qualité d'ancien administrateur judiciaire de la société Intervad 2, dont le siège est [Adresse 5],

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Riffaud, conseiller, les observations de la SCP Ortscheidt, avocat de la société Banque Delubac et cie, de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société MJA, ès qualités, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, à la suite duquel le président a demandé aux avocats s'ils souhaitaient présenter des observations complémentaires, après débats en l'audience publique du 1er juin 2021 où étaient présents Mme Mouillard, président, M. Riffaud, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, Mmes Vallansan, Graff-Daudret, Vaissette, Bélaval, Fevre, conseillers, M. Guerlot, Mmes Barbot, Brahic-Lambrey, M. Blanc, Mme Kass-Danno, M. Boutié, conseillers référendaires, Mme Guinamant, avocat général référendaire, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 juin 2020), la société Intervad 2, placée sous sauvegarde le 23 février 2012, a été mise en redressement judiciaire par un jugement du 21 janvier 2015, la société [B] étant désignée en qualité d'administrateur. Par un jugement du 8 avril 2015, la procédure collective a été convertie en liquidation judiciaire, la société [I], au droit de laquelle est venue la société MJA, étant désignée en qualité de liquidateur.

2. La société Banque Delubac et cie (la banque) a procédé à la clôture du compte ouvert dans ses livres par la société Intervad 2 et a en adressé le solde créditeur au liquidateur.

3. Le liquidateur a assigné la banque pour voir déclarer inopposables à la procédure collective les paiements et encaissements effectués sur le compte de la société Intervad 2 à compter de sa mise en liquidation judiciaire et obtenir qu'une somme de 365 021,69 euros lui soit remise.

Examen des moyens

Sur le premier moyen et sur le second moyen, pris en ses sixième, neuvième et dixième branches, ci-après annexés

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le second moyen, pris en ses première et cinquième branches

Enoncé du moyen

5. La banque fait grief à l'arrêt de déclarer inopposables à la liquidation judiciaire de la société Intervad 2 les paiements et les encaissements qu'elle a opérés sur le compte de cette société postérieurement à sa mise en liquidation judiciaire et de la condamner à payer à la liquidation judiciaire la somme de 322 445,19 euros, alors :

« 1°/ qu'un ordre de virement est irrévocable et son bénéficiaire acquiert un droit définitif sur les fonds, assimilable à un paiement, quand cet ordre est reçu par le prestataire de services de paiement ; que le virement est donc opposable à la procédure collective si l'ordre de virement a été reçu par le prestataire de services de paiement avant le prononcé de la liquidation judiciaire ; qu'en considérant que les virements litigieux seraient inopposables à la procédure collective parce que les fonds auxquels ils correspondent avaient été réceptionnés par les bénéficiaires ou les banques des bénéficiaires après le prononcé de la liquidation judiciaire, la cour d'appel a violé les articles L. 133-8, I du code monétaire et financier et L. 641-9 du code de commerce ;

2°/ qu'un titre interbancaire de paiement (TIP) s'analyse comme un ordre de paiement et est irrévocable, de sorte que son bénéficiaire acquiert un droit définitif sur les fonds, assimilable à un paiement, quand ce TIP est reçu par l'organisme chargé de son traitement ; que le paiement correspondant est donc opposable à la procédure collective si le TIP a été reçu par l'organisme chargé de son traitement avant le prononcé d'une liquidation judiciaire ; qu'en retenant, pour juger que le paiement correspondant au titre interbancaire de paiement émis au profit de l'Urssaf serait inopposable à la procédure collective, la date à laquelle ce TIP avait été débité et non la date à laquelle il avait été reçu par l'organisme chargé de son traitement, la cour d'appel a violé les articles L. 133-8, I du code monétaire et financier et L. 641-9 du code de commerce. »

Réponse de la cour

Vu les articles L. 641-9 du code de commerce et L. 133-6 du code monétaire et financier :

6. Selon le premier de ces textes, le jugement qui prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens et interdiction de tout règlement, les actes de disposition effectués postérieurement à ce jugement étant inopposables à la procédure collective. Il résulte du second qu'une opération de paiement est autorisée si le payeur a donné son consentement à son exécution et qu'ainsi, l'émetteur d'un ordre de paiement dispose des fonds dès la date à laquelle il consent à cette opération.

7. Pour déclarer inopposables à son liquidateur, en raison du dessaisissement de la société Intervad 2, les opérations passées au débit du compte bancaire de cette société à compter du jour de sa mise en liquidation judiciaire et condamner, en conséquence, la banque à payer, à ce titre, au liquidateur la somme de 322 445,19 euros, l'arrêt retient que, si l'article L. 133-8 du code monétaire et financier dispose que l'utilisateur de services de paiement ne peut révoquer un ordre de paiement une fois qu'il a été reçu par le prestataire de services de paiement, il n'en résulte pas pour autant que la date du paiement correspond à la date à laquelle la banque a reçu l'ordre de virement du débiteur, que le paiement d'un virement n'intervenant qu'à réception des fonds par le bénéficiaire ou le banquier de ce dernier qui les détient pour le compte de son client, il importe peu que les opérations de virement aient été en cours auprès de la banque du débiteur la veille du jugement prononçant la liquidation judiciaire dès lors qu'elles ont donné lieu à paiement après son ouverture. Il retient encore qu'un titre électronique de paiement au profit de l'Urssaf a également été débité du compte alors que le débiteur se trouvait dessaisi.

8. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare recevable l'intervention forcée de la société [B] en sa qualité d'ancien administrateur judiciaire de la société Intervad 2 et lui déclare son arrêt commun, l'arrêt rendu le 9 juin 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société MJA, en sa qualité de liquidateur de la société Intervad 2, aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente juin deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour la société Banque Delubac et cie.

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir déclaré inopposables à la liquidation judiciaire de la société Intervad 2 d'une part les paiements, d'autre part les encaissements faits par la société Banque Delubac et compagnie sur le compte de la société Intervad 2 postérieurement à l'ouverture de la liquidation judiciaire de cette société et d'avoir condamné la société Banque Delubac et compagnie à payer à la SCP [Z] [E] et [K] [P] en sa qualité de liquidatrice de la liquidation judiciaire de la société Intervad 2 la somme de 322.445,19 euros ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE : Le liquidateur fonde son action en inopposabilité sur le fait que les opérations litigieuses sont intervenues après la prise d'effet du jugement prononçant la liquidation judiciaire de la société Intervad 2, en violation de la règle du dessaisissement du débiteur. Les débits litigieux d'un total de 180.021,69 euros correspondent à 13 virements ayant pour date de valeur les 8, 9 ou 13 avril 2015, et à un chèque de 3.600 euros, émis le 8 avril 2015 et débité du compte le 20 avril suivant. Quant aux crédits revendiqués par le liquidateur, ils ont été portés sur le compte de la société Intervad 2 aux dates des 8, 9, 10 et 13 avril 2015 pour un montant total de 185.000 euros. Pour déclarer inopposables à la liquidation les opérations passées sur le compte bancaire après le jugement d'ouverture, le tribunal a fait application des règles du dessaisissement du débiteur, édictées par l'article L. 641-9 du code de commerce. Au soutien de son appel, la Banque Delubac argue de l'absence de tout préjudice pour la liquidation, dès lors que les opérations portées au débit du compte correspondent à des créances nées postérieurement à l'ouverture de la procédure de sauvegarde pour les besoins de la période d'observation, devaient en conséquence être payées à leur échéance et qu'elles ont été expressément validées par l'administrateur judiciaire. Elle fait ensuite valoir que seule la date des ordres de virement, soit la veille du jugement ayant prononcé la liquidation judiciaire, est à prendre en considération, dès lors qu'en vertu de l'article L. 133-8 du code monétaire et financier l'ordre de virement est irrévocable et qu'elle était tenue à peine d'engager sa responsabilité de les honorer, ajoutant que tous les paiements effectués trouvent leur origine antérieurement au jugement d'ouverture. Elle souligne qu'elle n'avait pas été informée du prononcé de la liquidation judiciaire à la date des opérations litigieuses, le jugement n'ayant été publié au Bodacc que le 24 avril 2015 et que la SCP [I] n'a pas respecté l'obligation d'information prévue dans la convention de compte courant. La Selafa MJA réplique qu'il résulte des dispositions de l'article L 641-9 du code de commerce, et de la jurisprudence constante que les paiements effectués postérieurement au jugement de liquidation judiciaire sans l'accord du liquidateur sont inopposables à la procédure collective, que cette inopposabilité erga omnes s'applique dès le jour du jugement d'ouverture et permet au liquidateur d'agir soit contre le bénéficiaire des paiements soit contre le mandataire du débiteur. Elle précise que sans l'intervention de la banque, les créanciers de l'article L. 641-13 du code de commerce, qui ont été payés, auraient été primés par le passif superpriviligié et les frais de justice et n'auraient rien reçu, qu'il est indifférent qu'elle n'ait pas informé la banque de l'ouverture de la liquidation judiciaire aucun texte ne l'y obligeant, qu'il en est de même du caractère irrévocable de l'ordre de paiement fût-il régulier, qui à la différence de l'émission d'un chèque ne vaut pas paiement. Selon l'article L. 641-9, I du code de commerce, le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens tant que la liquidation judiciaire n'est pas clôturée. Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur. Les dispositions relatives à la publicité du jugement prononçant la liquidation judiciaire, énoncées aux articles R. 621-8 et R. 641-7 du code de commerce, qui visent à informer les tiers, n'ont pas pour effet de reporter au jour de la publication la date d'effet du dessaisissement du débiteur vis-à-vis des tiers. Il s'ensuit que le dessaisissement du débiteur, qui s'étend à toute opération ayant un caractère patrimonial, prend effet de plein droit par la loi, indépendamment de l'absence de publication du jugement d'ouverture, à la première heure du jour où est prononcée la liquidation judiciaire, en l'espèce le 8 avril 2015 à 0 heure. L'inopposabilité sanctionnant les actes accomplis au mépris des règles de ce dessaisissement, s'applique de manière générale à un établissement bancaire comme à tout cocontractant du débiteur et consacre une stricte égalité de traitement des cocontractants du débiteur sous procédure. L'application immédiate du dessaisissement dès le prononcé du jugement avant même toute publication étant indispensable pour garantir l'efficacité de cette mesure. Dès lors, le moyen pris de ce qu'en l'absence de publication adéquate, la sanction d'inopposabilité prive la Banque Delubac du droit à un procès équitable, porte atteinte au principe de la sécurité juridique et de l'égalité des armes n'est pas fondé, étant relevé que dans son arrêt du 18 décembre 2018, la cour a dit n'y avoir à transmission de la question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de cassation. Le fait non contesté que les opérations portées au débit du compte courant correspondent selon l'attestation de la SCP [B], administrateur judiciaire, à des dettes de la période d'observation réglées pendant cette période avec son accord, n'est pas de nature à faire échec à la règle d'ordre public du dessaisissement du débiteur, compte tenu de l'effet de plein droit, qui s'attache au jugement prononçant la liquidation judiciaire. Quant aux articles L. 622-17, I et L. 631-14 alinéa 1er du commerce selon lesquels les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, doivent être payées à leur échéance, ils ne font qu'instituer un régime de paiement préférentiel au profit de certains créanciers et n'affectent pas les effets du dessaisissement, dont la portée est générale. C'est encore de manière inopérante que la Banque Delubac invoque l'absence de tout préjudice pour la liquidation, dès lors qu'il n'appartient pas au débiteur dessaisi ou à sa banque de procéder au paiement des créanciers aux lieu et place du liquidateur, étant surabondamment observé que selon la Selafa MJA, les fonds disponibles auraient été affectés au paiement de créanciers privilégiés, primant ceux qui ont été réglés. S'agissant des virements portés au débit du compte, le jour du jugement d'ouverture ou postérieurement, la Banque Delubac soutient que la date à prendre en compte est celle du 7 avril 2015, correspondant à l'ordre irrévocable donné par le débiteur. Si l'article L. 133-8 du code monétaire et financier dispose que l'utilisateur de services de paiement ne peut révoquer un ordre de paiement une fois qu'il a été reçu par le prestataire de services, il n'en résulte pas pour autant que la date du paiement correspond à la date à laquelle la banque a reçu l'ordre de virement du débiteur, ces dispositions régissant les rapports entre le client et sa banque et non les rapports avec le bénéficiaire, qui peut ne pas être informé de cet ordre de virement à la différence du chèque qui lui est remis en paiement. La banque serait d'ailleurs amenée à refuser d'exécuter un ordre de virement, fût- il irrévocable, à défaut de fonds disponibles sur le compte. Le paiement d'un virement n'intervenant qu'à réception des fonds par le bénéficiaire ou le banquier du bénéficiaire qui les détient pour le compte de son client, il importe peu que les opérations de virement aient été en cours auprès de la banque du débiteur la veille du jugement prononçant la liquidation judiciaire. Les virements en cause ont donné lieu à paiement après l'ouverture de la liquidation judiciaire, la date de valeur portée sur le compte est d'ailleurs celle du 8 et non du 7 avril 2015. Dès lors, la circonstance que les ordres de paiement ont été donnés par le débiteur et contresignés par l'administrateur judiciaire le 7 avril 2015, n'est pas susceptible de rendre ces virements opposables à la liquidation. S'agissant du chèque de 3.600 euros, c'est son émission qui transfère de plein droit la provision au profit du bénéficiaire. Or, il résulte de la copie du chèque que celui-ci a été émis le 8 avril 2015 jour du jugement d'ouverture, de sorte que la transmission de la provision au bénéficiaire du chèque est intervenue alors que le tireur se trouvait déjà dessaisi. Le fait que ce chèque a été émis en règlement des honoraires de l'avocat de la société Intervad 2 dans le cadre de la procédure ayant abouti au jugement de conversion est indifférent, le dessaisissement opérant de manière absolue indépendamment de la nature de la créance. Le titre électronique de paiement (TEP) au profit de l'Urssaf d'un montant de 28.731 euros a également été débité du compte le 8 avril 2015, alors que le débiteur se trouvait dessaisi. L'ignorance de la liquidation dans laquelle se trouvait la Banque Delubac lorsqu'elle a passé ces opérations n'est pas davantage de nature à faire échec aux dispositions d'ordre public de l'article L. 641-9, I du code de commerce, qui s'appliquent indépendamment de la bonne foi des tiers. En l'absence de disposition légale l'y contraignant, la Banque Delubac reproche vainement au liquidateur de ne pas l'avoir informée du prononcé de la liquidation judiciaire. Quant aux dispositions de la convention d'ouverture de compte conclue entre le dirigeant de la société Intervad 2 et la Banque Delubac, faisant obligation au client d'informer immédiatement la banque de tout fait susceptible d'affecter la situation de l'entreprise, elles ne peuvent être opposées au liquidateur, étant souligné que les opérations litigieuses ont pour plusieurs d'entre elles été passées le jour même du prononcé de liquidation judiciaire. Subsidiairement, la Banque Delubac entend voir limiter le montant de la condamnation prononcée au profit de la Selafa MJA à la somme de 180.021,69 euros correspondant aux seuls débits effectués sur le compte, soutenant que le liquidateur ne peut cumuler l'inopposabilité des opérations de débit et la restitution des crédits et qu'elle ne peut pas être tenue de régler les crédits qui lui ont permis d'honorer les virements. Le liquidateur conteste tout « double emploi » relevant que si la banque n'avait pas réglé la somme totale de 176.421,69 euros, ce montant serait resté sur le compte de la société Intervad 2 et la liquidation aurait donc été « plus riche » d'un total de 365.021,69 euros. Il ressort du relevé de compte versé aux débats, que les crédits suivants ont été enregistrés à partir du 8 avril 2015 : - 8 avril : 100.000 euros, 10.000 euros, 10.000 euros et 10.000 euros, - 9 avril : 40.000 euros, - 10 avril : 10.000 euros, - 13 avril : 5.000 euros (le crédit de 88,90 euros n'étant pas invoqué par le liquidateur), soit un total de 185.000 euros. Si la règle du dessaisissement avait été appliquée dès le 8 avril 2015, aucune opération, ni en débit, ni en crédit n'aurait été passée sur le compte à partir de cette date, de sorte que non seulement le compte n'aurait pas été débité de 176.421,69 euros mais aurait bien été crédité de 185.000 euros. La Banque Delubac ayant viré au liquidateur le 28 avril 2015 la somme de 42.576,50 euros, n'aura à restituer du chef des crédits qu'un complément de 142.423,50 euros (185.000 - 42.576,50 euros), s'ajoutant au montant de 180.021,69 euros correspondant au débit des 13 virements et du chèque émis le 8 avril 2015. C'est dès lors à juste titre que le tribunal a déclaré l'ensemble de ces opérations inopposables à la liquidation et a condamné la Banque Delubac à payer au liquidateur, ès qualités, la somme de 322.445,19 euros, le jugement étant confirmé de ces chefs ;

AUX MOTIFS ADOPTES QUE : par deux jugements successifs en dates des 21 janvier et 8 avril 2015, ce tribunal a prononcé le redressement puis la liquidation judiciaire de la société Intervad 2. S'agissant de l'espèce les conditions relatives à la compétence du tribunal de céans sont remplies tant rationae materiae que rationae loci ; l'article 127 du code de procédure civile donne la faculté aux parties, d'elles-mêmes ou à l'initiative du juge, de se concilier tout au long de l'instance, dans le cas où les règles posées à l'article 58 in fine du code de procédure civile n'auraient pas été observées par un requérant, cette règle n'étant nullement prescrite sous peine de nullité ou d'irrecevabilité et le tribunal constate qu'aucune demande de conciliation ne lui fut soumise par la défenderesse ; au cours de la période d'observation de la société Intervad 2, cette société, assistée par son administrateur judiciaire, avait ouvert un compte à la Banque Delubac et compagnie et l'examen du relevé de ce compte fait apparaître qu'à compter du 8 avril 2015, donc simultanément et postérieurement à l'ouverture de la liquidation judiciaire de la société Intervad 2, il a fait l'objet : - de treize débits correspondant à treize virements pour un montant total de 176.421,69 ?, - d'un débit correspondant au paiement d'un chèque établi le jour de la liquidation judiciaire, d'un montant de 3.600 ?, - de sept crédits correspondant à sept virements reçus pour un montant total de 185.000 ? ; mise en demeure d'avoir à rembourser ces sommes, la Banque Delubac et compagnie s'est bornée à répondre que les opérations litigieuses furent validées par Maître [B] ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Intervad 2 ; cependant il résulte des dispositions d'ordre public de l'article L. 641-9 du code de commerce que le jugement qui prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens, même de ceux qu'il a acquis à quelque titre que ce soit tant que la liquidation judiciaire n'est pas clôturée ; ce texte a repris celui de l'article L. 622-9 ancien du code de commerce et, tant sous l'empire de cette précédente disposition (loi de 1985) que sous l'empire de la nouvelle (loi de 2005), il résulte d'une jurisprudence constante que les paiements effectués postérieurement au jugement de liquidation judiciaire sans l'accord du liquidateur sont inopposables à la procédure collective ; il importe de rappeler que cette inopposabilité à la procédure collective est la conséquence pure et simple de l'opposabilité « erga omnes » du jugement d'ouverture, ce dès son prononcé et par application des dispositions des articles R. 621-4 alinéa 2 et R. 641-1 du code de commerce et que par voie de conséquence le liquidateur peut assigner pour voir constater l'inopposabilité ; le tribunal déclarera recevable et bien fondée la demande d'inopposabilité formulée par la SCP [E] [P] ;

ALORS QUE la déclaration d'inconstitutionnalité par le Conseil Constitutionnel d'une disposition législative produit son effet sur les instances en cours ; que par l'effet du prononcé de l'inconstitutionnalité de la portée effective de l'interprétation jurisprudentielle constante conférée par la Cour de cassation à l'article L. 641-9 alinéa 1er du code de commerce, la décision attaquée a perdu son fondement juridique ; que l'annulation de l'arrêt est donc encourue. Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir déclaré inopposables à la liquidation judiciaire de la société Intervad 2 d'une part les paiements, d'autre part les encaissements faits par la société Banque Delubac et compagnie sur le compte de la société Intervad 2 postérieurement à l'ouverture de la liquidation judiciaire de cette société et d'avoir condamné la société Banque Delubac et compagnie à payer à la SCP [Z] [E] et [K] [P] en sa qualité de liquidatrice de la liquidation judiciaire de la société Intervad 2 la somme de 322.445,19 euros ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE : Le liquidateur fonde son action en inopposabilité sur le fait que les opérations litigieuses sont intervenues après la prise d'effet du jugement prononçant la liquidation judiciaire de la société Intervad 2, en violation de la règle du dessaisissement du débiteur. Les débits litigieux d'un total de 180.021,69 euros correspondent à 13 virements ayant pour date de valeur les 8, 9 ou 13 avril 2015, et à un chèque de 3.600 euros, émis le 8 avril 2015 et débité du compte le 20 avril suivant. Quant aux crédits revendiqués par le liquidateur, ils ont été portés sur le compte de la société Intervad 2 aux dates des 8, 9, 10 et 13 avril 2015 pour un montant total de 185.000 euros. Pour déclarer inopposables à la liquidation les opérations passées sur le compte bancaire après le jugement d'ouverture, le tribunal a fait application des règles du dessaisissement du débiteur, édictées par l'article L. 641-9 du code de commerce. Au soutien de son appel, la Banque Delubac argue de l'absence de tout préjudice pour la liquidation, dès lors que les opérations portées au débit du compte correspondent à des créances nées postérieurement à l'ouverture de la procédure de sauvegarde pour les besoins de la période d'observation, devaient en conséquence être payées à leur échéance et qu'elles ont été expressément validées par l'administrateur judiciaire. Elle fait ensuite valoir que seule la date des ordres de virement, soit la veille du jugement ayant prononcé la liquidation judiciaire, est à prendre en considération, dès lors qu'en vertu de l'article L. 133-8 du code monétaire et financier l'ordre de virement est irrévocable et qu'elle était tenue à peine d'engager sa responsabilité de les honorer, ajoutant que tous les paiements effectués trouvent leur origine antérieurement au jugement d'ouverture. Elle souligne qu'elle n'avait pas été informée du prononcé de la liquidation judiciaire à la date des opérations litigieuses, le jugement n'ayant été publié au Bodacc que le 24 avril 2015 et que la SCP [I] n'a pas respecté l'obligation d'information prévue dans la convention de compte courant. La Selafa MJA réplique qu'il résulte des dispositions de l'article L. 641-9 du code de commerce, et de la jurisprudence constante que les paiements effectués postérieurement au jugement de liquidation judiciaire sans l'accord du liquidateur sont inopposables à la procédure collective, que cette inopposabilité erga omnes s'applique dès le jour du jugement d'ouverture et permet au liquidateur d'agir soit contre le bénéficiaire des paiements soit contre le mandataire du débiteur. Elle précise que sans l'intervention de la banque, les créanciers de l'article L. 641-13 du code de commerce, qui ont été payés, auraient été primés par le passif superpriviligié et les frais de justice et n'auraient rien reçu, qu'il est indifférent qu'elle n'ait pas informé la banque de l'ouverture de la liquidation judiciaire aucun texte ne l'y obligeant, qu'il en est de même du caractère irrévocable de l'ordre de paiement fût-il régulier, qui à la différence de l'émission d'un chèque ne vaut pas paiement. Selon l'article L. 641-9, I du code de commerce, le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens tant que la liquidation judiciaire n'est pas clôturée. Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur. Les dispositions relatives à la publicité du jugement prononçant la liquidation judiciaire, énoncées aux articles R. 621-8 et R. 641-7 du code de commerce, qui visent à informer les tiers, n'ont pas pour effet de reporter au jour de la publication la date d'effet du dessaisissement du débiteur vis-à-vis des tiers. Il s'ensuit que le dessaisissement du débiteur, qui s'étend à toute opération ayant un caractère patrimonial, prend effet de plein droit par la loi, indépendamment de l'absence de publication du jugement d'ouverture, à la première heure du jour où est prononcée la liquidation judiciaire, en l'espèce le 8 avril 2015 à 0 heure. L'inopposabilité sanctionnant les actes accomplis au mépris des règles de ce dessaisissement, s'applique de manière générale à un établissement bancaire comme à tout cocontractant du débiteur et consacre une stricte égalité de traitement des cocontractants du débiteur sous procédure. L'application immédiate du dessaisissement dès le prononcé du jugement avant même toute publication étant indispensable pour garantir l'efficacité de cette mesure. Dès lors, le moyen pris de ce qu'en l'absence de publication adéquate, la sanction d'inopposabilité prive la Banque Delubac du droit à un procès équitable, porte atteinte au principe de la sécurité juridique et de l'égalité des armes n'est pas fondé, étant relevé que dans son arrêt du 18 décembre 2018, la cour a dit n'y avoir à transmission de la question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de cassation. Le fait non contesté que les opérations portées au débit du compte courant correspondent selon l'attestation de la SCP [B], administrateur judiciaire, à des dettes de la période d'observation réglées pendant cette période avec son accord, n'est pas de nature à faire échec à la règle d'ordre public du dessaisissement du débiteur, compte tenu de l'effet de plein droit, qui s'attache au jugement prononçant la liquidation judiciaire. Quant aux articles L. 622-17, I et L. 631-14 alinéa 1er du commerce selon lesquels les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, doivent être payées à leur échéance, ils ne font qu'instituer un régime de paiement préférentiel au profit de certains créanciers et n'affectent pas les effets du dessaisissement, dont la portée est générale. C'est encore de manière inopérante que la Banque Delubac invoque l'absence de tout préjudice pour la liquidation, dès lors qu'il n'appartient pas au débiteur dessaisi ou à sa banque de procéder au paiement des créanciers aux lieu et place du liquidateur, étant surabondamment observé que selon la Selafa MJA, les fonds disponibles auraient été affectés au paiement de créanciers privilégiés, primant ceux qui ont été réglés. S'agissant des virements portés au débit du compte, le jour du jugement d'ouverture ou postérieurement, la Banque Delubac soutient que la date à prendre en compte est celle du 7 avril 2015, correspondant à l'ordre irrévocable donné par le débiteur. Si l'article L. 133-8 du code monétaire et financier dispose que l'utilisateur de services de paiement ne peut révoquer un ordre de paiement une fois qu'il a été reçu par le prestataire de services, il n'en résulte pas pour autant que la date du paiement correspond à la date à laquelle la banque a reçu l'ordre de virement du débiteur, ces dispositions régissant les rapports entre le client et sa banque et non les rapports avec le bénéficiaire, qui peut ne pas être informé de cet ordre de virement à la différence du chèque qui lui est remis en paiement. La banque serait d'ailleurs amenée à refuser d'exécuter un ordre de virement, fût- il irrévocable, à défaut de fonds disponibles sur le compte. Le paiement d'un virement n'intervenant qu'à réception des fonds par le bénéficiaire ou le banquier du bénéficiaire qui les détient pour le compte de son client, il importe peu que les opérations de virement aient été en cours auprès de la banque du débiteur la veille du jugement prononçant la liquidation judiciaire. Les virements en cause ont donné lieu à paiement après l'ouverture de la liquidation judiciaire, la date de valeur portée sur le compte est d'ailleurs celle du 8 et non du 7 avril 2015. Dès lors, la circonstance que les ordres de paiement ont été donnés par le débiteur et contresignés par l'administrateur judiciaire le 7 avril 2015, n'est pas susceptible de rendre ces virements opposables à la liquidation. S'agissant du chèque de 3.600 euros, c'est son émission qui transfère de plein droit la provision au profit du bénéficiaire. Or, il résulte de la copie du chèque que celui-ci a été émis le 8 avril 2015 jour du jugement d'ouverture, de sorte que la transmission de la provision au bénéficiaire du chèque est intervenue alors que le tireur se trouvait déjà dessaisi. Le fait que ce chèque a été émis en règlement des honoraires de l'avocat de la société Intervad 2 dans le cadre de la procédure ayant abouti au jugement de conversion est indifférent, le dessaisissement opérant de manière absolue indépendamment de la nature de la créance. Le titre électronique de paiement (TEP) au profit de l'Urssaf d'un montant de 28.731 euros a également été débité du compte le 8 avril 2015, alors que le débiteur se trouvait dessaisi. L'ignorance de la liquidation dans laquelle se trouvait la Banque Delubac lorsqu'elle a passé ces opérations n'est pas davantage de nature à faire échec aux dispositions d'ordre public de l'article L. 641-9, I du code de commerce, qui s'appliquent indépendamment de la bonne foi des tiers. En l'absence de disposition légale l'y contraignant, la Banque Delubac reproche vainement au liquidateur de ne pas l'avoir informée du prononcé de la liquidation judiciaire. Quant aux dispositions de la convention d'ouverture de compte conclue entre le dirigeant de la société Intervad 2 et la Banque Delubac, faisant obligation au client d'informer immédiatement la banque de tout fait susceptible d'affecter la situation de l'entreprise, elles ne peuvent être opposées au liquidateur, étant souligné que les opérations litigieuses ont pour plusieurs d'entre elles été passées le jour même du prononcé de liquidation judiciaire. Subsidiairement, la Banque Delubac entend voir limiter le montant de la condamnation prononcée au profit de la Selafa MJA à la somme de 180.021,69 euros correspondant aux seuls débits effectués sur le compte, soutenant que le liquidateur ne peut cumuler l'inopposabilité des opérations de débit et la restitution des crédits et qu'elle ne peut pas être tenue de régler les crédits qui lui ont permis d'honorer les virements. Le liquidateur conteste tout « double emploi » relevant que si la banque n'avait pas réglé la somme totale de 176.421,69 euros, ce montant serait resté sur le compte de la société Intervad 2 et la liquidation aurait donc été « plus riche » d'un total de 365.021,69 euros. Il ressort du relevé de compte versé aux débats, que les crédits suivants ont été enregistrés à partir du 8 avril 2015 : - 8 avril : 100.000 euros, 10.000 euros, 10.000 euros et 10.000 euros, - 9 avril : 40.000 euros, - 10 avril : 10.000 euros, - 13 avril : 5.000 euros (le crédit de 88,90 euros n'étant pas invoqué par le liquidateur), soit un total de 185.000 euros. Si la règle du dessaisissement avait été appliquée dès le 8 avril 2015, aucune opération, ni en débit, ni en crédit n'aurait été passée sur le compte à partir de cette date, de sorte que non seulement le compte n'aurait pas été débité de 176.421,69 euros mais aurait bien été crédité de 185.000 euros. La Banque Delubac ayant viré au liquidateur le 28 avril 2015 la somme de 42.576,50 euros, n'aura à restituer du chef des crédits qu'un complément de 142.423,50 euros (185.000 - 42.576,50 euros), s'ajoutant au montant de 180.021,69 euros correspondant au débit des 13 virements et du chèque émis le 8 avril 2015. C'est dès lors à juste titre que le tribunal a déclaré l'ensemble de ces opérations inopposables à la liquidation et a condamné la Banque Delubac à payer au liquidateur, ès qualités, la somme de 322.445,19 euros, le jugement étant confirmé de ces chefs ;

AUX MOTIFS ADOPTES QUE : par deux jugements successifs en dates des 21 janvier et 8 avril 2015, ce tribunal a prononcé le redressement puis la liquidation judiciaire de la société Intervad 2. S'agissant de l'espèce les conditions relatives à la compétence du tribunal de céans sont remplies tant rationae materiae que rationae loci ; l'article 127 du code de procédure civile donne la faculté aux parties, d'elles-mêmes ou à l'initiative du juge, de se concilier tout au long de l'instance, dans le cas où les règles posées à l'article 58 in fine du code de procédure civile n'auraient pas été observées par un requérant, cette règle n'étant nullement prescrite sous peine de nullité ou d'irrecevabilité et le tribunal constate qu'aucune demande de conciliation ne lui fut soumise par la défenderesse ; au cours de la période d'observation de la société Intervad 2, cette société, assistée par son administrateur judiciaire, avait ouvert un compte à la Banque Delubac et compagnie et l'examen du relevé de ce compte fait apparaître qu'à compter du 8 avril 2015, donc simultanément et postérieurement à l'ouverture de la liquidation judiciaire de la société Intervad 2, il a fait l'objet : - de treize débits correspondant à treize virements pour un montant total de 176.421,69 ?, - d'un débit correspondant au paiement d'un chèque établi le jour de la liquidation judiciaire, d'un montant de 3.600 ?, - de sept crédits correspondant à sept virements reçus pour un montant total de 185.000 ? ; mise en demeure d'avoir à rembourser ces sommes, la Banque Delubac et compagnie s'est bornée à répondre que les opérations litigieuses furent validées par Maître [B] ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Intervad 2 ; cependant il résulte des dispositions d'ordre public de l'article L. 641-9 du code de commerce que le jugement qui prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens, même de ceux qu'il a acquis à quelque titre que ce soit tant que la liquidation judiciaire n'est pas clôturée ; ce texte a repris celui de l'article L. 622-9 ancien du code de commerce et, tant sous l'empire de cette précédente disposition (loi de 1985) que sous l'empire de la nouvelle (loi de 2005), il résulte d'une jurisprudence constante que les paiements effectués postérieurement au jugement de liquidation judiciaire sans l'accord du liquidateur sont inopposables à la procédure collective ; il importe de rappeler que cette inopposabilité à la procédure collective est la conséquence pure et simple de l'opposabilité « erga omnes » du jugement d'ouverture, ce dès son prononcé et par application des dispositions des articles R. 621-4 alinéa 2 et R. 641-1 du code de commerce et que par voie de conséquence le liquidateur peut assigner pour voir constater l'inopposabilité ; le tribunal déclarera recevable et bien fondée la demande d'inopposabilité formulée par la SCP [E] [P] ;

1°) ALORS QU' un ordre de virement est irrévocable et son bénéficiaire acquiert un droit définitif sur les fonds, assimilable à un paiement, quand cet ordre est reçu par le prestataire de services de paiement ; que le virement est donc opposable à la procédure collective si l'ordre de virement a été reçu par le prestataire de services de paiement avant le prononcé de la liquidation judiciaire ; qu'en considérant que les virements litigieux seraient inopposables à la procédure collective parce que les fonds auxquels ils correspondent avaient été réceptionnés par les bénéficiaires ou les banques des bénéficiaires après le prononcé de la liquidation judiciaire, la cour d'appel a violé les articles L. 133-8 I du code monétaire et financier et L. 641-9 du code de commerce ;

2°) ALORS QU' un ordre de virement est irrévocable et son bénéficiaire acquiert un droit définitif sur les fonds, assimilable à un paiement, quand cet ordre est reçu par le prestataire de services de paiement ; que le virement est donc opposable à la procédure collective si l'ordre de virement a été reçu par le prestataire de services de paiement avant le prononcé de la liquidation judiciaire ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, la date à laquelle les ordres de virement litigieux avaient été reçus par la banque, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 133-8 I du code monétaire et financier et L. 641-9 du code de commerce ;

3°) ALORS QU'un ordre de virement est irrévocable et son bénéficiaire acquiert un droit définitif sur les fonds, assimilable à un paiement, quand cet ordre est reçu par le prestataire de services de paiement ; que le virement est donc opposable à la procédure collective si l'ordre de virement a été reçu par le prestataire de services de paiement avant le prononcé de la liquidation judiciaire ; qu'en retenant, pour déclarer les virements inopposables à la procédure collective, que la banque serait amenée à refuser d'exécuter un ordre de virement, fût-il irrévocable, à défaut de fonds disponibles sur le compte, la cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 133-8 I du code monétaire et financier et L. 641-9 du code de commerce ;

4°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QU'en retenant, pour déclarer les virements inopposables à la procédure collective, que la banque serait amenée à refuser d'exécuter un ordre de virement, fût-il irrévocable, à défaut de fonds disponibles sur le compte, la cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant puisqu'indépendamment de la date à laquelle les bénéficiaires des virements ont acquis un droit définitif sur les fonds en cause, assimilable à un paiement, il n'a jamais été ni prétendu ni constaté qu'une somme suffisante n'aurait pas été disponible sur le compte ou que les ordres litigieux n'auraient pas été clairement libellés, auraient été affectés d'un vice apparent ou que leur origine aurait été douteuse et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 133-8 I du code monétaire et financier et L. 641-9 du code de commerce ;

5°) ALORS QU'un titre interbancaire de paiement ? TIP - s'analyse comme un ordre de paiement et est irrévocable, de sorte que son bénéficiaire acquiert un droit définitif sur les fonds, assimilable à un paiement, quand ce TIP est reçu par l'organisme chargé de son traitement ; que le paiement correspondant est donc opposable à la procédure collective si le TIP a été reçu par l'organisme chargé de son traitement avant le prononcé d'une liquidation judiciaire ; qu'en retenant, pour juger que le paiement correspondant au titre interbancaire de paiement émis au profit de l'Urssaf serait inopposable à la procédure collective, la date à laquelle ce TIP avait été débité et non la date à laquelle il avait été reçu par l'organisme chargé de son traitement, la cour d'appel a violé les articles L. 133-8 I du code monétaire et financier et L. 641-9 du code de commerce ;

6°) ALORS QUE les droits et actions du débiteur en liquidation judiciaire concernant son patrimoine sont exercés, à compter du jour du prononcé de la liquidation judiciaire, à 0 heure et pendant toute la durée de la liquidation judiciaire, par le liquidateur ; qu'en considérant que les stipulations de la convention d'ouverture de compte conclue entre le dirigeant de la société Intervad 2 et la Banque Delubac, faisant obligation au client d'informer immédiatement la banque de tout fait susceptible d'affecter la situation de l'entreprise, ne pourraient être opposées au liquidateur, et que les opérations litigieuses avaient pour plusieurs d'entre elles été passées le jour même du prononcé de la liquidation judiciaire, la cour d'appel a violé l'article L. 641-9 du code de commerce ;

7°) ALORS QUE les actes juridiques accomplis par le débiteur en liquidation judiciaire, dessaisi de l'administration et de la disposition de ses biens, sont frappés d'inopposabilité à la procédure collective et le liquidateur peut agir en restitution de fonds versés par le débiteur dessaisi, à l'encontre de leurs bénéficiaires ; qu'en condamnant la société Banque Delubac à payer au liquidateur une somme correspondant à un chèque émis et aux virements effectués au profit de créanciers de la société Intervad 2 et dont la société Banque Delubac n'était pas bénéficiaire, la cour d'appel a violé l'article L. 641-9 du code de commerce, ensemble l'article 1er du protocole additionnel n° 1 à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

8°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QU'en considérant, pour condamner la société Banque Delubac à payer au liquidateur la somme de 322.445,19 euros, que si la règle du dessaisissement avait été appliquée dès le 8 avril 2015, aucune opération ni en débit ni en crédit n'aurait été passée sur le compte à partir de cette date, de sorte que non seulement le compte n'aurait pas été débité de 176.421, 69 euros mais aurait bien été crédité de 185.000 euros, sans vérifier si les opérations passées au crédit n'avaient pas permis d'effectuer les débits, de sorte que les sommes mises à la charge de la société Banque Delubac correspondaient à une double condamnation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 641-9 du code de commerce ;

9°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période, sont payées à leur échéance ; qu'en condamnant l'exposante à verser au liquidateur la somme de 322.445, 19 euros, sans tenir compte de ce que les opérations de débit effectuées à hauteur de 176.421, 69, concernaient des créances nées régulièrement pendant la période d'observation avec l'autorisation de l'administrateur judiciaire, de sorte qu'en tout état de cause, elles devaient être réglées à échéance, et auraient été réglées à échéance par le liquidateur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 622-17 I et L. 631-14 du code de commerce ;

10°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QU' en retenant, pour condamner la société Banque Delubac à payer au liquidateur la somme de 322.445,19 euros, que selon la société MJA, les fonds disponibles auraient été affectés au paiement de créanciers privilégiés, primant ceux qui ont été réglés, motif purement hypothétique puisque formulé au conditionnel, ne reposant que sur des allégations de la société MJA qui n'ont pas été vérifiées et parce que rien ne permet d'affirmer que les créanciers réglés par les virements et chèque litigieux n'auraient pas été réglés avant que ne soient honorées des créances superprivilégiées, éventuellement par la mise en oeuvre de voies d'exécution, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 622-17 et L. 641-9 du code de commerce.


Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005) - Liquidation judiciaire - Effets - Dessaisissement du débiteur - Portée - Acte de disposition - Applications diverses - Ordre de paiement - Date d'autorisation - Détermination - Consentement à l'opération de paiement

Selon l'article L. 641-9 du code de commerce, le jugement qui prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens et interdiction de tout règlement, les actes de disposition effectués postérieurement à ce jugement étant inopposables à la procédure collective. Il résulte de l'article L. 133-6 du code monétaire et financier qu'une opération de paiement est autorisée si le payeur a donné son consentement à son exécution et qu'ainsi, l'émetteur d'un ordre de paiement dispose des fonds dès la date à laquelle il consent à cette opération


Références :

Article L. 641-9 du code de commerce

article L . 133-6 du code monétaire et financier

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 09 juin 2020


Publications
Proposition de citation: Cass. Com., 30 jui. 2021, pourvoi n°20-18759, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles
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Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard
Avocat(s) : SCP Ortscheidt, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Formation : Chambre commerciale
Date de la décision : 30/06/2021
Date de l'import : 21/09/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 20-18759
Numéro NOR : JURITEXT000043759759 ?
Numéro d'affaire : 20-18759
Numéro de décision : 42100622
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2021-06-30;20.18759 ?
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