La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/06/2021 | FRANCE | N°19-24020

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 23 juin 2021, 19-24020


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 23 juin 2021

Cassation partielle

M. CATHALA, président

Arrêt n° 803 FS-B

Pourvoi n° B 19-24.020

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 23 JUIN 2021

M. [X] [N], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° B 19-24.020 contre

l'arrêt rendu le 5 septembre 2019 par la cour d'appel de Colmar (chambre sociale, section A), dans le litige l'opposant à l'association Carita...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 23 juin 2021

Cassation partielle

M. CATHALA, président

Arrêt n° 803 FS-B

Pourvoi n° B 19-24.020

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 23 JUIN 2021

M. [X] [N], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° B 19-24.020 contre l'arrêt rendu le 5 septembre 2019 par la cour d'appel de Colmar (chambre sociale, section A), dans le litige l'opposant à l'association Caritas, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Barincou, conseiller, les observations de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de M. [N], de la SCP Didier et Pinet, avocat de l'association Caritas, et l'avis de Mme Berriat, avocat général, après débats en l'audience publique du 11 mai 2021 où étaient présents M. Cathala, président, M. Barincou, conseiller rapporteur, Mme Leprieur, conseiller doyen, M. Pietton, Mmes Le Lay, Mariette, M. Séguy, conseillers, Mme Duvallet, M. Le Corre, Mmes Prache, Marguerite, conseillers référendaires, Mme Berriat, avocat général, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 5 septembre 2019), M. [N] a été engagé par l'association Fédération de charité Caritas Alsace, en qualité d'infirmier, à compter du 29 novembre 2004.

2. Le 4 janvier 2013, l'employeur lui a notifié un avertissement en raison d'absences injustifiées et de négligences dans son travail, constatées en octobre et novembre 2012.

3. Le 18 janvier 2013, suite à des faits du 30 décembre 2012, le salarié a été avisé d'une mise à pied à titre conservatoire puis convoqué à un entretien préalable au licenciement. Il a été licencié, pour faute grave, par lettre du 4 février 2013.

4. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale aux fins notamment de contester son licenciement.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. Le salarié fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement reposait sur une faute grave et, en conséquence, de rejeter ses demandes en paiement des indemnités de rupture, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de son salaire pendant la mise à pied conservatoire, alors « que l'employeur qui, ayant connaissance de divers faits commis par le salarié considérés par lui comme fautifs, choisit de n'en sanctionner que certains, ne peut plus ultérieurement prononcer une nouvelle mesure disciplinaire pour sanctionner les autres faits antérieurs à la première sanction ; que dès lors que le supérieur hiérarchique direct du salarié est informé des faits ayant fondé le licenciement, l'employeur doit à la même date être regardé comme informé ; que pour dire que l'employeur n'avait pas épuisé son pouvoir disciplinaire en notifiant au salarié un avertissement le 4 janvier 2013, la cour d'appel, après avoir constaté que l'infirmière coordinatrice, reconnaissait avoir été avisée dès le 31 décembre 2012 des faits ayant motivé la lettre de licenciement du 4 février 2013, a retenu que cette dernière attestait n'avoir prévenu la direction que le 15 janvier 2013 et que le salarié ne justifiait pas que son employeur ait eu connaissance des faits qui lui étaient reprochés avant cette date ; qu'en statuant ainsi, alors pourtant que dès lors que la supérieure hiérarchique directe du salarié avait été informée des faits ayant motivé le licenciement dès le 31 décembre 2012, soit avant la notification de l'avertissement du 4 janvier 2013 pour d'autres faits, l'employeur devait à cette même date être regardé comme informé, en sorte qu'il avait épuisé son pouvoir disciplinaire pour l'ensemble des faits dont il avait connaissance avant le 4 janvier 2013 et ne pouvait prononcer ultérieurement un licenciement pour des faits connus à cette date, la cour d'appel a violé l'article L. 1331-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1331-1 du code du travail :

6. Il résulte de ce texte que l'employeur qui, ayant connaissance de divers faits commis par le salarié, considérés par lui comme fautifs, choisit de n'en sanctionner que certains, ne peut plus ultérieurement prononcer une nouvelle mesure disciplinaire pour sanctionner les autres faits antérieurs à la première sanction.

7. L'employeur, au sens de ce texte, s'entend non seulement du titulaire du pouvoir disciplinaire mais également du supérieur hiérarchique du salarié, même non titulaire de ce pouvoir.

8. Pour juger que l'employeur n'avait pas épuisé son pouvoir disciplinaire en notifiant un avertissement le 4 janvier 2013, l'arrêt retient que l'infirmière coordinatrice, avisée le 31 décembre 2012 des faits à l'origine du licenciement, n'avait prévenu la direction que le 15 janvier 2013.

9. En statuant ainsi, alors qu'il n'était pas contesté que l'infirmière coordinatrice était la supérieure hiérarchique du salarié, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

10. La cassation prononcée entraîne, par voie de conséquence, la cassation des chefs de dispositif relatifs aux dépens et aux demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que le licenciement de M. [N] repose sur une faute grave, rejette les demandes en paiement des indemnités de rupture, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de salaire pendant la mise à pied conservatoire qui a précédé le licenciement, rejette les demandes au titre de l'article 700 et condamne M. [N] aux dépens, l'arrêt rendu le 5 septembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Condamne l'association Fédération de charité Caritas Alsace aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'association Fédération de charité Caritas Alsace et la condamne à payer à M. [N] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois juin deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour M. [N]

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le licenciement de M. [X] [N] reposait sur une faute grave et d'avoir, en conséquence, rejeté ses demandes en paiement des indemnités de rupture, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de son salaire pendant la mise à pied conservatoire qui a précédé le licenciement ;

Aux motifs qu'en application des articles L. 1232-1, L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail, lorsque l'employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception, qui doit comporter l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur ; que les motifs énoncés dans la lettre de licenciement fixent les termes du litige, et il appartient au juge d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur en formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties ; que la faute grave, qui seule peut justifier une mise à pied à titre conservatoire, est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible la poursuite des relations de travail ; que l'employeur qui entend arguer d'une faute grave supporte exclusivement la charge de prouver celle-ci, dans les termes de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, et si un doute subsiste il profite au salarié ; que la lettre de licenciement de M. [N] du 4 février 2013 est ainsi libellée : « (?) Nous vous informons que nous avons décidé de vous licencier pour faute grave en raison des faits suivants : Vous avez été surpris le 30 décembre 2012 vers 23h15 enfermé à clé dans la chambre d'une résidante de notre établissement, les deux autres veilleurs de nuit s'étant rendus sur place suite au déclenchement de la sonnette d'appel malade de cette résidente. À leur arrivée, ils ont trouvé la porte fermée. L'un d'eux n'a cessé de frapper à la porte et de demander à la résidente d'ouvrir mais sans aucun retour. Son inquiétude a grandi au fur et à mesure des petits bruits qui lui parvenaient, confirmant la présence de la résidente et d'une autre personne. L'autre veilleur est parti chercher le passe partout. A son retour et alors qu'il allait ouvrir la porte avec le passe partout, vous êtes sorti de la chambre sans mot dire. Par la suite, vous avez expliqué votre présence auprès de cette résidente pour l'administration d'un traitement, sans donner d'explication valable sur la fermeture de la porte et la non réponse aux appels de vos collègues. Votre attitude enfreint les règles élémentaires de travail en équipe restreinte la nuit, où l'information constante est de règle. Votre présence, seul, enfermé et silencieux, auprès d'une résidante âgée dépendante, est contraire à toute règle d'éthique. Les témoignages, le déroulement des faits et la vulnérabilité de la résidente nous obligent à privilégier la protection psychique et physique de nos pensionnaires. Par ailleurs vous avez transmis par courrier reçu le 28 janvier 2013, un arrêt de travail-accident du travail établi par le médecin en date du 22 janvier, celui-ci faisant remonter les premiers symptômes au 18 janvier. Vous avez eu l'établissement ou sa directrice au téléphone, jamais vous n'avez parlé d'un accident du travail, que vous signalez donc avec un retard de 10 jours. Nous émettons des doutes sur la réalité de cet accident du travail et l'événement déclencheur. Nous vous rappelons que tout justificatif d'absence doit nous parvenir sous 48 heures, a fortiori, lorsqu'il s'agit d'un accident de travail dont la déclaration est totalement encadrée par la législation (?) » ; que M. [N] invoque d'abord l'épuisement du pouvoir disciplinaire de son employeur lors de son licenciement, et soutient : - que les faits reprochés sont antérieurs à l'avertissement du 4 janvier 2013 et étaient connus de l'employeur, - que la mise à pied conservatoire lui a été adressée avant la date de la convocation à l'entretien préalable au licenciement et qu'elle a fait suite à un premier niveau de vérifications en interne, de sorte qu'elle revêt un caractère disciplinaire ; que toutefois, et d'une part, Mme [C] [I], infirmière coordinatrice qui reconnaît avoir été avisée dès le 31 décembre 2012 des faits constatés, atteste qu'elle n'a prévenu la direction que le 15 janvier 2013, soit le lendemain de l'arrivée de la nouvelle directrice, Mme [Y] [S] ; que M. [N] ne justifie pas que son employeur ait eu connaissance des faits qui lui étaient reprochés avant cette date ; que d'autre part, le délai restreint de 2 jours ouvrables qui s'est écoulé entre la mise à pied conservatoire du 18 janvier 2013 et la convocation à l'entretien préalable du 23 janvier 2013 a permis à l'employeur de mener une enquête pour se prononcer sur la réalité des faits reprochés et de décider de la suite à donner ; qu'au regard de la nécessité de procéder à ces investigations complémentaires, la procédure de mise à pied conservatoire est intervenue à bref délai et ne saurait présenter le caractère d'une sanction disciplinaire ; que le jugement entrepris doit donc être infirmé en ce qu'il a considéré que l'employeur avait épuisé son pouvoir disciplinaire ; que par ailleurs, M. [N] conteste les faits reprochés et soutient pour l'essentiel : - qu'il a téléphoné à son employeur dès le 22 janvier 2013 pour l'informer de son arrêt de travail ainsi que de son accident du travail du 18 janvier 2013, - que concernant les faits du 30 décembre 2012, la résidente, Mme [Q], rencontrait des problèmes de constipation et il a respecté la prescription du médecin en lui administrant un médicament pour la soulager et en prenant le soin de fermer la porte, mais sans clé, pour des raisons évidentes de dignité, - que l'employeur a attendu près de trois semaines avant d'engager les poursuites disciplinaires, ce qui prouve que ces faits ne rendaient pas impossible son maintien dans l'établissement ; qu'à le supposer même établi, le simple retard dans la transmission par M. [N] de son avis de travail pour accident travail ne saurait constituer une faute, d'autant que le salarié a consulté son médecin traitant le 22 janvier 2013, soit pendant la mise à pied à titre conservatoire dont il a fait l'objet ; qu'en revanche, le docteur [L] [R], médecin traitant, atteste qu'à la date du 30 décembre 2012, « il n'y avait aucune prescription ni pour administrer le médicament Normacol ni le Microlax » à la résidente dont il s'agit ; que le docteur [I] [F], médecin coordonnateur et médecin traitant à la maison de retraite Caritas, atteste « qu'aucun médicament ne peut être donné sans prescription médicale et quel que soit le soin à faire, le soignant ne peut pas s'enfermer avec le patient et surtout à clef » ; que M. [N] reconnaît que si les aides soignants M. [Q] [J] et M. [Z] [W] se sont rendus à la chambre de la résidente, c'était uniquement parce qu'il s'était trompé en actionnant « le bouton jaune qui est la sonnette d'alarme, au lieu du bouton vert qui indique une présence » ; que cependant, il n'explique pas pourquoi il considère que ses collègues auraient « établi des attestations pour les besoins de la cause, dans l'unique but de procéder à son licenciement » ; qu'il ressort de manière non équivoque des déclarations de ces deux aides soignants qu'à leur arrivée, la porte de la chambre de la résidente était bien verrouillée de l'intérieur, que bien que M. [Q] [J] ait frappé à la porte en l'absence du « passepartout » adéquat, celle-ci est restée fermée, et qu'il s'est écoulé plusieurs minutes avant que M. [N] ne l'ouvre, visiblement gêné et sans fournir aucune explication ; que le fait de s'enfermer avec une jeune résidente handicapée et vulnérable, puis ne de ne pas ouvrir rapidement la porte malgré les sollicitations des collègues de travail, sans raison aucune et en contradiction avec les règles de déontologie au sein de l'établissement, est caractéristique d'une faute grave rendant impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, d'autant que l'employeur a réagi dans un délai restreint de deux jours ouvrables entre la date de prise de connaissance des faits et l'engagement de la procédure disciplinaire ; qu'en conséquence, le licenciement est bien fondé sur une faute grave, ce qui justifie le rejet des demandes de M. [N] en paiement des indemnités de rupture, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de son salaire pendant la mise à pied conservatoire qui a précédé le licenciement ; que le jugement entrepris doit dès lors être infirmé sur ces points ;

Alors 1°) que l'employeur qui, ayant connaissance de divers faits commis par le salarié considérés par lui comme fautifs, choisit de n'en sanctionner que certains, ne peut plus ultérieurement prononcer une nouvelle mesure disciplinaire pour sanctionner les autres faits antérieurs à la première sanction ; que dès lors que le supérieur hiérarchique direct du salarié est informé des faits ayant fondé le licenciement, l'employeur doit à la même date être regardé comme informé ; que pour dire que l'employeur n'avait pas épuisé son pouvoir disciplinaire en notifiant au salarié un avertissement le 4 janvier 2013, la cour d'appel, après avoir constaté que Mme [I], infirmière coordinatrice, reconnaissait avoir été avisée dès le 31 décembre 2012 des faits ayant motivé la lettre de licenciement du 4 février 2013, a retenu que cette dernière attestait n'avoir prévenu la direction que le 15 janvier 2013 et que le salarié ne justifiait pas que son employeur ait eu connaissance des faits qui lui étaient reprochés avant cette date ; qu'en statuant ainsi, alors pourtant que dès lors que Mme [I], supérieure hiérarchique directe du salarié, avait été informée des faits ayant motivé le licenciement dès le 31 décembre 2012, soit avant la notification de l'avertissement du 4 janvier 2013 pour d'autres faits, l'employeur devait à cette même date être regardé comme informé, en sorte qu'il avait épuisé son pouvoir disciplinaire pour l'ensemble des faits dont il avait connaissance avant le 4 janvier 2013 et ne pouvait prononcer ultérieurement un licenciement pour des faits connus à cette date, la cour d'appel a violé l'article L. 1331-1 du code du travail ;

Alors 2°) que les juges du fond sont tenus de motiver leur décision ; qu'en se bornant à énoncer que le délai restreint de deux jours ouvrables qui s'était écoulé entre la mise à pied conservatoire du 18 janvier 2013 et la convocation à l'entretien préalable du 23 janvier 2013 avait permis à l'employeur de mener une enquête pour se prononcer sur la réalité des faits reprochés et de décider de la suite à donner, la cour d'appel, qui n'a ni visé ni analysé les éléments de preuve lui permettant d'affirmer que l'employeur avait procédé à des investigations complémentaires, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

Alors 3°) que, subsidiairement, la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; que la cour d'appel, sans réfuter les motifs du jugement dont il résultait que l'employeur n'établissait aucun manquement du salarié à ses obligations contractuelles et que des simples soupçons infondés, au demeurant non visés dans la lettre de licenciement, ne pouvaient justifier un licenciement, a retenu que le fait de s'enfermer avec une jeune résidente handicapée et vulnérable, puis ne de ne pas ouvrir rapidement la porte malgré les sollicitations des collègues de travail, sans raison aucune et en contradiction avec les règles de déontologie au sein de l'établissement, était caractéristique d'une faute grave ; qu'en statuant ainsi, alors pourtant qu'aucun texte ou principe de droit n'interdit à un infirmier de se trouver dans la chambre d'une pensionnaire porte fermée à clef le temps nécessaire pour lui prodiguer des soins, la cour d'appel a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 ;

Alors 4°) qu'en tout cas, le juge doit préciser le fondement juridique de sa décision ; qu'affirmant que le salarié avait méconnu les règles de déontologie au sein de l'établissement, sans préciser quelles étaient ces règles, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile ;

Alors 5°) qu'en tout cas encore, la faute grave privative du préavis s'apprécie in concreto ; qu'elle suppose que les faits retenus à l'encontre du salarié soient imputables à une volonté délibérée de sa part de se soustraire à ses obligations contractuelles ou à tout le moins à une mauvaise volonté délibérée ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans prendre en considération l'ancienneté, la qualité de travail et l'attitude du salarié pendant toute la durée de la collaboration et sans caractériser la volonté délibérée du salarié de se soustraire à ses obligations contractuelles ou à tout le moins sa mauvaise volonté délibérée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017.


Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Employeur - Pouvoir disciplinaire - Sanction - Prononcé - Pluralité de faits fautifs - Choix du fait sanctionné - Portée

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Employeur - Pouvoir disciplinaire - Sanction - Prononcé - Pluralité de faits fautifs - Faits fautifs connus et non sanctionnés - Portée CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Employeur - Pouvoir disciplinaire - Sanction - Prononcé - Connaissance de faits fautifs par l'employeur - Employeur - Définition - Détermination - Portée

Il résulte de l'article L. 1331-1 du code du travail que l'employeur qui, ayant connaissance de divers faits commis par le salarié, considérés par lui comme fautifs, choisit de n'en sanctionner que certains, ne peut plus ultérieurement prononcer une nouvelle mesure disciplinaire pour sanctionner les autres faits antérieurs à la première sanction. L'employeur, au sens de ce texte, s'entend non seulement du titulaire du pouvoir disciplinaire mais également du supérieur hiérarchique du salarié, même non titulaire de ce pouvoir


Références :

article L. 1331-1 du code du travail

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 05 septembre 2019

Sur l'épuisement du pouvoir disciplinaire de l'employeur pour des faits connus de lui antérieurement à la sanction prononcée, à rapprocher : Soc., 25 septembre 2013, pourvoi n° 12-12976, Bull. 2013, V, n° 203 (cassation), et les arrêts cités.Sur le rôle du supérieur hiérarchique dans la connaissance de faits imputables au salarié, à rapprocher : Soc., 30 avril 1997, pourvoi n° 94-41320, Bull. 1997, V, n° 148 (rejet) ;

Soc., 23 juin 2021, pourvoi n° 20-13762, Bull. 2021, (cassation partielle).


Publications
Proposition de citation: Cass. Soc., 23 jui. 2021, pourvoi n°19-24020, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. Cathala
Avocat(s) : SCP Rousseau et Tapie, SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Formation : Chambre sociale
Date de la décision : 23/06/2021
Date de l'import : 15/09/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 19-24020
Numéro NOR : JURITEXT000043711119 ?
Numéro d'affaire : 19-24020
Numéro de décision : 52100803
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2021-06-23;19.24020 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award