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23/06/2021 | FRANCE | N°19-11434;19-11436;19-11437;19-11438

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 23 juin 2021, 19-11434 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

MA

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 23 juin 2021

Cassation partielle

M. CATHALA, président

Arrêt n° 828 FS-D

Pourvois n°
A 19-11.438
W 19-11.434
Y 19-11.436
Z 19-11.437 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 23 JUIN 2021

La société Elio

r services propreté et santé, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé les pourvois n° A 19-11.438, W 19-11.434, Y 19-11.436...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

MA

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 23 juin 2021

Cassation partielle

M. CATHALA, président

Arrêt n° 828 FS-D

Pourvois n°
A 19-11.438
W 19-11.434
Y 19-11.436
Z 19-11.437 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 23 JUIN 2021

La société Elior services propreté et santé, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé les pourvois n° A 19-11.438, W 19-11.434, Y 19-11.436 et Z 19-11.437 contre quatre arrêts rendus le 30 novembre 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (18e chambre B), dans les litiges l'opposant respectivement :

1°/ à Mme [N] [A],

2°/ à Mme [R] [A],

domiciliées toutes deux [Adresse 2],

3°/ à M. [B] [G], domicilié [Adresse 3],

4°/ à Mme [E] [K], domiciliée [Adresse 4],

5°/ au syndicat CGT des entreprises de propreté des Bouches-du-Rhône, dont le siège est [Adresse 5],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de ses pourvois, le moyen unique de cassation commun annexé au présent arrêt.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de Mme Prache, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Elior services propreté et santé, les plaidoiries de Me Lyon-Caen, et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 12 mai 2021 où étaient présents M. Cathala, président, M. Huglo, conseiller doyen, Mme Prache, conseiller référendaire rapporteur, M. Rinuy, Mmes Pécaut-Rivolier, Ott, Sommé, conseillers, Mme Lanoue, MM. Joly, Le Masne de Chermont, conseillers référendaires, Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° A 19-11.438, W 19-11.434, Y 19-11.436 et Z 19-11.437 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon les arrêts attaqués (Aix-en-Provence, 30 novembre 2018), Mme [A] et d'autres salariés, engagées par la Société française de gestion hospitalière (SFGH) Hôpital service, aux droits de laquelle vient la société Elior services propreté et santé (la société ESPS), et affectées sur le site de nettoyage de l'hôpital de la Conception à [Localité 1], ont saisi la juridiction prud'homale aux fins de paiement notamment d'une prime de treizième mois versée aux salariés de la même entreprise, travaillant sur les sites de nettoyage de la clinique [Établissement 1] à [Localité 2] et de la polyclinique de [Localité 3], en application du principe d'égalité de traitement.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. L'employeur fait grief aux arrêts de le condamner à verser aux salariés un rappel de prime de treizième mois, alors « qu'en affirmant, pour juger que « le treizième mois alloué aux salariés de la société Elior sur le site de la polyclinique [Localité 3] constitue un avantage alloué unilatéralement par l'employeur » et condamner en conséquence la société ESPS à verser aux salariés la prime litigieuse, que « le treizième mois a été attribué de façon pérenne à compter du mois de novembre 2012 à plusieurs salariés de la société Elior travaillant sur le site de la polyclinique [Localité 3], et notamment à Madame [C] [H] et à Madame [Y] [Y], ainsi que le démontrent les bulletins de salaires de ces dernières pour le mois de décembre 2013 et encore pour le mois de décembre 2014 », sans cependant rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si le versement régulier de la prime litigieuse ne résultait pas des diverses condamnations judiciaires prononcées au bénéfice de ces salariés en première et seconde instance et contestées par l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1103 et 1104 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 :

4. Pour faire droit à la demande en paiement d'une prime de treizième mois, les arrêts retiennent que, s'agissant des salariés affectés sur le site de la polyclinique de [Localité 3], certains d'entre eux, notamment Mmes [E], [Y], [H], [W] et M. [Q] ont perçu un treizième mois, attribué spontanément et unilatéralement par l'employeur, que la société ESPS ne peut valablement soutenir qu'il s'agit d'une erreur, dont l'explication de l'origine varie selon les deux attestations produites, et alors que le treizième mois a été attribué de façon pérenne à compter du mois de novembre 2012 à plusieurs salariés du site de la polyclinique de [Localité 3], et notamment, à Mme [H] et à Mme [Y], ainsi que le démontrent les bulletins de salaires de ces dernières pour le mois de décembre 2013 et encore pour le mois de décembre 2014, qu'il résulte de ces éléments que le treizième mois alloué aux salariés du site de la polyclinique de [Localité 3] constitue un avantage alloué unilatéralement par l'employeur.

5. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à établir l'existence d'un engagement unilatéral de l'employeur clair et non équivoque, et sans rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si le versement de la prime litigieuse à compter de novembre 2012 aux salariés du site de nettoyage de la polyclinique [Établissement 2] à Narbonne ne résultait pas des condamnations judiciaires prononcées au bénéfice de salariés qui avaient saisi la juridiction prud'homale d'une demande identique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils disent que la somme due par la société Elior services propreté et santé à Mme [N] [A] au titre du complément de rappel de prime de treizième mois est égale à zéro, somme arrêtée au 31 décembre 2017, et en ce qu'ils condamnent la société Elior services propreté et santé à verser, au titre du complément de rappel de prime de treizième mois, à Mme [R] [A] la somme de 20,50 euros, arrêtée au 31 décembre 2017, à M. [G] la somme de 154,37 euros, arrêtée au 31 décembre 2015, à Mme [K] la somme de 50,82 euros, somme arrêtée au 31 décembre 2017, et en ce qu'ils disent n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et condamnent la société Elior services propreté et santé aux entiers dépens de l'instance, les arrêts rendus le 30 novembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;

Remet, sur ces points, les affaires et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ces arrêts et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Condamne in solidum Mme [N] [A], Mme [R] [A], M. [G] et Mme [K] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois juin deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen commun produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Elior services propreté et santé, demanderesse aux pourvois n° A 19-11.438, W 19-11.434, Y 19-11.436 et Z 19-11.437

Il est fait grief aux arrêts attaqués d'avoir condamné la société ESPS à verser aux salariés un rappel de prime de 13è mois ;

Aux motifs propres que s'agissant de la comparaison de la situation [des salariés] d'ELIOR sur le site de La Conception avec les salariés de la société ELIOR affectés sur le site de la polyclinique de [Localité 3], [les salariées] expose[nt] que certains d'entre eux, notamment Mmes [E], [Y], [H], [W] et M. [Q] ont perçu un 13ème mois, attribué spontanément et unilatéralement par l'employeur en 2012 ; que la société ELIOR expose que cette attribution de prime résulte d'une erreur, laquelle ne peut être considérée comme constitutive d'un droit acquis ou d'un usage ; que l'examen des bulletins de paie des salariés de l'entreprise ayant travaillé sur ce site, tant en qualité de gouvernantes (Mmes [Q] et [E]) ou chef d'équipe (Mme [Y]) qu'en qualité d'agent de service (Mmes [W], [H] et M. [Q]) permet de constater le versement annuel d'un 13ème mois, sur la base de 100 % du salaire mensuel brut de base (au prorata du temps de présence dans l'entreprise au cours de l'année) ; que la société ELIOR qui soutient que l'attribution de ce 13ème mois aux salariés de la polyclinique [Localité 3] résulte d'une erreur, produit en ce sens l'attestation de Monsieur [F], responsable du centre de services partagés, aux termes de laquelle ladite erreur résulte d'un changement de programme informatique et l'attestation de Madame [B], une responsable de site, selon laquelle ce versement du 13ème mois a été effectué par erreur à des salariés ayant également engagé une procédure prud'homale et ce avant même l'issue du litige les concernant; que la société ELIOR ne peut valablement soutenir qu'il s'agit d'une erreur, alors que le 13ème mois a été attribué de façon pérenne à compter du mois de novembre 2012 à plusieurs salariés de la société ELIOR travaillant sur le site de la polyclinique de [Localité 3], et notamment à Madame [C] [H] et à Madame [Y] [Y], ainsi que le démontrent les bulletins de salaires de ces dernières pour le mois de décembre 2013 et encore pour le mois de décembre 2014 ; qu'il résulte de ces éléments que le 13èmemois alloué aux salariés de la société ELIOR que le site de la polyclinique de [Localité 3] constitue un avantage alloué unilatéralement par l'employeur ; qu'en conséquence, à défaut pour l'employeur de justifier par des éléments objectifs, pertinents et matériellement vérifiables cette différence de traitement, [les salariées] [sont] fondée[s] à réclamer l'allocation d'un 13ème mois (...) ; que le jugement sera confirmé en ce qu'il a reconnu la violation du principe de l'égalité de traitement à propos de l'attribution de la prime de 13ème mois, et qu'il sera infirmé sur le montant des sommes allouées [aux salariées] ;

Et aux motifs éventuellement adoptés des jugements entrepris que le principe est l'égalité salariale entre salariés exerçant le même travail au sein de la même entreprise; que les différences de traitement sont autorisées si elles reposent sur des raisons objectives, matériellement vérifiables et pertinentes, telles que l'expérience, l'ancienneté, les responsabilités, la qualité du travail ou le statut collectif, à certaines conditions ; qu'il n'est pas contesté que [les salariées] effectue[nt] un travail de même valeur que les autres salariés de société ELIOR SERVICE PROPRETE ET SANTE SAS, travaillant dans divers établissements à [Localité 1] ou sur le territoire national, et qu'un certain nombre d'entre eux, notamment les salariés du site [Localité 4] à [Localité 5] (qui ne font désormais plus partie de la société suite à la perte du marché)ont bénéficié d'une gratification de fin d'année qui n'est pas prévue par la convention collective de la propreté, et que [les salariées] ne perçoi[vent] pas ; que la société ELIOR SERVICES PROPRETE ET SANTESAS, excipe de l'application d'un statut collectif différent à des salariés qui viennent d'horizons différents, notamment par le jeu de pertes et reprises de marchés ; qu'or, si la négociation collective au sein d'un établissement distinct permet d'établir par voie d'accord collectif des différenciations de traitements avec des salariés qui n'entrent pas dans le champ d'application de l'accord d'établissement, il n'en demeure pas moins nécessaire pour l'employeur de donner des raisons objectives, concrètes, pertinentes et vérifiables, à cette différenciation et que l'accord collectif ne peut, à lui seul, justifier ; que si l'employeur justifie d'un accord de fin de conflit concernant le site montpelliérain de [Localité 4], il ne justifie d'aucune raison objective matériellement vérifiables à la différenciation opérée avec ses salariés travaillant sur d'autres sites, exerçant un travail égal ou de valeur égale, notamment [les salariées] ; qu'aucun décompte alternatif n'étant suggéré par société ELIOR SERVICE PROPRETE ET SANTE SAS, c'est celui proposé par [les salariées] qui sera retenu ; que dans ces conditions, la différence de salaire est illicite, et il sera fait droit à la demande [des salariées] sur le fondement de la prime de 13ème mois ;

ALORS QU'en affirmant, pour juger que « le 13ème mois alloué aux salariés de la société ELIOR sur le site de la polyclinique [Localité 3] constitue un avantage alloué unilatéralement par l'employeur » et condamner en conséquence la société ESPS à verser aux salariés la prime litigieuse, que « le 13ème mois a été attribué de façon pérenne à compter du mois de novembre 2012 à plusieurs salariés de la société ELIOR travaillant sur le site de la polyclinique [Localité 3], et notamment à Madame [C] [H] et à Madame [Y] [Y], ainsi que le démontrent les bulletins de salaires de ces dernières pour le mois de décembre 2013 et encore pour le mois de décembre 2014 », sans cependant rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si le versement régulier de la prime litigieuse ne résultait pas des diverses condamnations judiciaires prononcées au bénéfice de ces salariés en première et seconde instance et contestées par l'employeur, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L 1221-1 du Code du travail et 1103 et 1104 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-11434;19-11436;19-11437;19-11438
Date de la décision : 23/06/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 30 novembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 23 jui. 2021, pourvoi n°19-11434;19-11436;19-11437;19-11438


Composition du Tribunal
Président : M. Cathala (président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.11434
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