LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 10 juin 2021
Rejet
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 579 F-D
Pourvoi n° P 20-14.812
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 JUIN 2021
Le conseil départemental de l'Ariège, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° P 20-14.812 contre l'arrêt rendu le 20 janvier 2020 par la cour d'appel de Toulouse (1re chambre, section 1), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [O] [E],
2°/ à Mme [L] [I], épouse [E],
domiciliés tous deux [Adresse 2],
3°/ à M. [M] [M],
4°/ à Mme [V] [Q], épouse [M],
domiciliés tous deux [Adresse 3],
5°/ à M. [T] [U],
6°/ à Mme [R] [D], épouse [U],
domiciliés tous deux [Adresse 4],
7°/ à M. [H] [Y],
8°/ à Mme [E] [P], épouse [Y],
domiciliés tous deux [Adresse 5],
9°/ à M. [J] [W], domicilié [Adresse 6],
10°/ à M. [B] [R],
11°/ à Mme [Q] [G], épouse [R],
domiciliés tous deux [Adresse 7],
12°/ à Mme [C] [Z], épouse [F], domiciliée [Adresse 8],
13°/ à M. [X] [V], domicilié [Adresse 9],
14°/ à Mme [Y] [K], épouse [A], domiciliée [Adresse 10],
15°/ à Mme [W] [N], domiciliée [Adresse 11],
16°/ à Mme [G] [O], domiciliée [Adresse 12],
17°/ à la société Cassiopée, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 13],
18°/ à l'association Collectif interdépartemental de défense de l'usage R citoyen contribuable, association loi 1901, dont le siège est [Adresse 14],
19°/ à Mme [F] [T], épouse [V], domiciliée [Adresse 9],
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Kermina, conseiller, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat du conseil départemental de l'Ariège, de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de M. et Mme [E], M. et Mme [M], M. et Mme [U], M. et Mme [Y], M. [W], M. et Mme [R], Mme [F], M. et Mme [V], Mme [A], Mme [N], Mme [O] et la société Cassiopée, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 5 mai 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Kermina, conseiller rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 20 janvier 2020), M. et Mme [E], M. et Mme [M], M. [W], M. et Mme [U], Mme [F], M. et Mme [Y], la société Cassiopée, M. et Mme [R], Mme [N], M. et Mme [V], Mme [A] et Mme [O] (les demandeurs) ont, par déclaration remise au greffe d'un tribunal de grande instance, formé une inscription de faux en écriture publique contre le « Rapport d'observations définitives du Conseil Général de l'Ariège ? Département de l'Ariège ? Exercices 2006 et suivants ».
2. Le 1er août 2018, à 16h24, le conseil départemental de l'Ariège a déposé des conclusions au fond, et, à 16h44, des conclusions d'incident aux fins d'incompétence au profit du tribunal administratif.
3. Les demandeurs ont interjeté appel de l'ordonnance du juge de la mise en état ayant accueilli l'exception d'incompétence, renvoyé les parties à mieux se pourvoir. L'association Collectif interdépartemental de défense de l'usage R citoyen contribuable est intervenue volontairement à l'instance.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. Le conseil départemental de l'Ariège fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable son exception d'incompétence d'attribution, alors que « les exceptions de procédure doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées avant toute défense au fond ; que le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les exceptions de procédure, et que c'est à lui que doivent être spécialement adressées les écritures aux fins d'incident ; qu'il s'ensuit que c'est uniquement au regard des écritures adressées au juge de la mise en état que doit s'apprécier l'exigence d'antériorité posée par l'article 74 du code de procédure civile ; qu'en jugeant irrecevable l'exception d'incompétence soulevée devant le juge de la mise en état par des écritures spécifiques, au motif que le défendeur avait adressé quelques minutes plus tôt au tribunal de grande instance des écritures comportant défense au fond, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 74 du code de procédure civile et, par refus d'application, les anciens articles 771 et 772-1 du code de procédure civile, dans leur version antérieure au décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019. »
Réponse de la Cour
5. Il résulte de l'article 74 du code de procédure civile et de l'article 771 du même code, dans sa rédaction issue du décret n° 2012-66 du 20 janvier 2012, que les exceptions de procédure doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir.
6. Ayant constaté que le conseil départemental avait transmis au greffe et notifié par RPVA des conclusions au fond avant de déposer des conclusions saisissant le juge de la mise en état d'une exception d'incompétence et relevé que la procédure était unique, faisant par là-même ressortir que le caractère in limine litis de l'exception d'incompétence s'appréciait au regard de l'instance, peu important que le juge de la mise en état fût appelé à statuer avant le juge du fond, la cour d'appel a exactement décidé que l'exception d'incompétence était irrecevable faute d'avoir été soulevée avant toute défense au fond.
7. Le grief n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le conseil départemental de l'Ariège aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par le conseil départemental de l'Ariège et le condamne à payer à M. et Mme [E], M. et Mme [M], M. et Mme [U], M. et Mme [Y], M. [W], M. et Mme [R], Mme [F], M. et Mme [V], Mme [A], Mme [N], Mme [O] et la société Cassiopée la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du dix juin deux mille vingt et un et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat aux Conseils, pour le conseil départemental de l'Ariège
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré irrecevable l'exception d'incompétence d'attribution soulevée par le Conseil départemental de l'Ariège ;
AUX MOTIFS QUE
« Sur l'exception d'incompétence
Aux termes de l'article 771 du code de procédure civile le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal pour statuer sur les exceptions de procédure et les demandes formées en application de l'article 47 du code de procédure civile.
En vertu de l'article 74 du code de procédure civile les exceptions de procédure doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir et il en est ainsi alors même que les règles invoquées au soutien de l'exception seraient d'ordre public.
En vertu de l'article 772-1 du code de procédure civile, le juge de la mise en état n'est saisi des demandes relevant de sa compétence que par les conclusions qui lui sont spécialement adressées.
Lors de la procédure de première instance, le Conseil général a transmis au greffe et notifié par RPVA des conclusions au fond, quelques minutes avant les conclusions aux fins d'incident saisissant explicitement le juge de la mise en état d'une exception d'incompétence.
La procédure étant unique et le juge de la mise en état n'étant qu'une émanation du tribunal et non une juridiction autonome, l'exception d'incompétence est irrecevable, faute d'avoir été soulevée avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir.
Il n'y a pas lieu de faire application de l'article 76 du code de procédure civile, qui n'est qu'une faculté offerte au juge »
ALORS QUE les exceptions de procédure doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées avant toute défense au fond ; que le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les exceptions de procédure, et que c'est à lui que doivent être spécialement adressées les écritures aux fins d'incident ; qu'il s'ensuit que c'est uniquement au regard des écritures adressées au juge de la mise en état que doit s'apprécier l'exigence d'antériorité posée par l'article 74 du code de procédure civile ; qu'en jugeant irrecevable l'exception d'incompétence soulevée devant le juge de la mise en état par des écritures spécifiques, au motif que le défendeur avait adressé quelques minutes plus tôt au tribunal de grande instance des écritures comportant défense au fond, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 74 du code de procédure civile et, par refus d'application, les anciens articles 771 et 772-1 du code de procédure civile, dans leur version antérieure au décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019.