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05/05/2021 | FRANCE | N°19-17736

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 05 mai 2021, 19-17736


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 mai 2021

Rejet

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 447 FS-P

Pourvoi n° W 19-17.736

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 5 MAI 2021

1°/ M. [B] [Z], domicilié [Adresse 1],

2°/ M

. [T] [X], domicilié [Adresse 2],

3°/ M. [W] [Y], domicilié [Adresse 3],

ont formé le pourvoi n° W 19-17.736 contre l'arrêt rendu le 11 avril 2019 pa...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 mai 2021

Rejet

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 447 FS-P

Pourvoi n° W 19-17.736

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 5 MAI 2021

1°/ M. [B] [Z], domicilié [Adresse 1],

2°/ M. [T] [X], domicilié [Adresse 2],

3°/ M. [W] [Y], domicilié [Adresse 3],

ont formé le pourvoi n° W 19-17.736 contre l'arrêt rendu le 11 avril 2019 par la cour d'appel de Nîmes (4e chambre commerciale), dans le litige les opposant à la société Lyonnaise de banque, société anonyme, dont le siège est [Adresse 4], défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Graff-Daudret, conseiller, les observations de la SCP Delamarre et Jehannin, avocat de MM. [Z], [X] et [Y], de Me Le Prado, avocat de la société Lyonnaise de banque, et l'avis de M. Lecaroz, avocat général, après débats en l'audience publique du 23 mars 2021 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Graff-Daudret, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, Mmes Vallansan, Vaissette, Bélaval, Fontaine, M. Riffaud, Mme Fevre, conseillers, Mme Barbot, conseiller référendaire, M. Lecaroz, avocat général, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 11 avril 2019), par des actes sous seing privé du 3 septembre 2012 et 29 mai 2013, la société Lyonnaise de banque (la banque) a consenti à la société ICT (la société) des prêts garantis par les cautionnements de MM. [Z], [X] et [Y].

2. La société ayant été mise en redressement judiciaire le 3 avril 2015, converti en liquidation judiciaire le 15 juillet 2015, la banque a assigné les cautions en paiement.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. M. [Z], M. [X] et M. [Y] font grief à l'arrêt de les condamner, en qualité de cautions de la société, à payer chacun à la banque la somme de 23 827,14 euros en principal, alors :

« 1°/ que l'irrégularité de la déclaration de créance emporte l'extinction de la créance, et donc de la sûreté qui la garantissait ; qu'en retenant au contraire que "la défaillance du créancier dans la déclaration de créance n'a pas pour effet d'éteindre la créance", la cour d'appel a violé l'article L. 622-24 du code de commerce, ensemble l'article 2289 du code civil ;

2°/ que lorsque le créancier n'a pas régulièrement déclaré sa créance, la caution qui aurait pu tirer un avantage effectif du droit d'être admis dans les répartitions et dividendes peut être déchargée de ses obligations ; qu'en retenant pourtant en l'espèce que la défaillance du créancier dans la déclaration de créance n'a pas pour effet d'éteindre la dette et ne constitue pas une exception inhérente à la dette que peut invoquer la caution, sans rechercher si l'irrégularité de la déclaration n'était pas de nature à permettre aux fidéjusseurs d'invoquer le bénéfice de cession d'actions, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 2314 du code civil. »

Réponse de la Cour

4. Le juge du fond, qui statue dans l'instance en paiement opposant le créancier à la caution du débiteur principal à l'égard duquel a été ouverte une procédure collective, ne fait pas application de l'article L. 624-2 du code de commerce. Il en résulte que la décision par laquelle le juge du cautionnement retient que la déclaration de la créance est irrégulière ne constitue pas une décision de rejet de cette créance, entraînant, dès lors, l'extinction de celle-ci.

5. Ayant relevé qu'il n'était pas prétendu que la créance déclarée par la banque eut fait l'objet d'une admission au passif de la société, la cour d'appel, qui s'est prononcée elle-même, à tort, sur la régularité de la déclaration de créance, l'a jugée irrégulière pour absence de justification de la délégation de pouvoir du préposé déclarant. Cependant, s'il n'existait pas de décision du juge-commissaire admettant la créance, il n'existait pas davantage de décision de ce juge la rejetant pour irrégularité, dont la caution eût pu se prévaloir. Par ce motif de pur droit, suggéré par la défense, et substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par l'article 620, alinéa 1er, du code de procédure civile, la décision, qui condamne la caution, se trouve légalement justifiée.

6. Le moyen ne peut donc être accueilli.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne MM. [Z], [X] et [Y] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par MM. [Z], [X] et [Y] et les condamne à payer à la société Lyonnaise de banque la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq mai deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Delamarre et Jehannin, avocat aux Conseils, pour MM. [Z], [X] et [Y].

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné MM. [B] [Z], [T] [X] et [W] [Y], en leur qualité de caution de la société Ict, à payer chacun à la société Lyonnaise de Banque une somme de 23 827,14 euros en principal, outre intérêts jusqu'à parfait paiement à compter du 31 août 2015, et d'avoir dit que les intérêts des condamnations se capitaliseront par année entière, et ce en application de l'article 1154 du code civil ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE : « le contrat de prêt n° 00037953802 se rapporte au financement d'une opération de 320 000 euros en partage avec le Crédit du Nord, sur laquelle le concours de la s.a Lyonnaise de Banque représentait 45,31 %, les appelants soutiennent que la déclaration de créance effectuée par un mandataire ad litem doit être accompagnée d'un pouvoir mais que l'intimée n'avait justifié d'aucun pouvoir spécial pour déclarer sa créance. De plus, en présence de la clause "Pari passu" se rapportant à l'ensemble des garanties souscrites, la partie demanderesse n'avait pas davantage capacité à agir individuellement à l'égard d'une créance indivise mais aurait dû agir conjointement avec le Crédit du Nord ; que la s.a Lyonnaise de Banque répond que sa déclaration de créance à laquelle avait été joint son pouvoir n'avait jamais été contestée ni par le mandataire ni par la débitrice principale et qu'elle était régulière ; mais que le défaut de déclaration ou une déclaration irrégulière de créance n'entraînerait pas son extinction ; qu'enfin, seule la garantie relative au nantissement du fonds de commerce est concernée par le partage de garantie avec le Crédit du Nord de sorte que la clause de garantie "pari passu" était sans incidence sur l'engagement de caution ; qu'il n'est ni prétendu ni établi que la créance aurait fait l'objet d'une admission au passif de la s.a.s Ict ; que par application des dispositions de l'article L. 622-24 du code de commerce, la déclaration des créances peut être faite par le créancier ou par tout préposé ou mandataire de son choix. Dès lors que la déclaration n'est pas faite par un tiers, il n'est pas nécessaire de justifier d'un mandat ad litem ou d'un mandat spécial mais d'un pouvoir de représentation interne ; qu'en l'espèce, la déclaration de créance a été faite le 24/04/2015 pour "le Cic Lyonnaise de Banque, [Adresse 4] représenté par Monsieur [M] [O]" et signée par lui avec la mention "signature autorisée" ; que la s.a Lyonnaise de Banque s'abstient de justifier de la délégation de pouvoir conférée à cette personne ; mais que si une déclaration de créance irrégulière équivaut à une absence de déclaration, il n'en demeure pas moins qu'en vertu des dispositions de l'article L. 622-26 du code de commerce, la défaillance du créancier dans la déclaration de créance n'a pour effet, non d'éteindre la créance, mais d'exclure son titulaire des répartitions et dividendes ; que cette sanction ne constitue pas une exception inhérente à la dette, susceptible d'être opposée par la caution pour se soustraire à son engagement ; que le moyen tenant à l'irrégularité de la créance sera donc écarté ; que l'acte de prêt de la somme de 145000 € du 13 septembre 2012 conclu entre la sa Lyonnaise de Banque et la sas Ict avait pour objet le financement de l'agencement, d'installations et divers matériels, pour "une opération estimée à 320 000 euros en partage avec le Crédit du Nord", la part de la sa Lyonnaise correspondant à 45,31 % de l'opération soit 145 000 euros ; qu'il prévoit au titre des garanties : - la caution solidaire de M. [Z], M. [X] et M. [Y] dans la limite de 28 988 euros chacun avec la mention spécifique selon laquelle "cette garantie est associée au prêt référence 00037953802 Prêt professionnel de 145 000 euros", - la garantie Oseo, - le nantissement de fonds de commerce "pari passu avec le Crédit du Nord" ; qu'il apparaît donc que la clause de traitement égalitaire entre la société Lyonnaise de Banque d'une part et la société Crédit du Nord d'autre part n'intéresse que la garantie de nantissement de fonds de commerce et non l'ensemble des garanties souscrites au nombre desquelles le cautionnement solidaire de chacun des appelants qui ne peuvent donc soutenir faute de stipulation sur ce point, que leur caution avait également vocation à garantir une créance du Crédit du Nord dont ils ne justifient d'ailleurs pas ; qu'ils seront donc déboutés de toutes leurs demandes et la décision de première instance non autrement discutée sera confirmée en toutes ses dispositions » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi ; que la requérante a consenti à la société Ict deux prêts à usage professionnel ; que les requis par actes séparés se sont portés cautions solidaires des engagements souscrits ; que la défaillance du débiteur principal est établie, une procédure de redressement judiciaire, convertie en liquidation judiciaire, ayant été ouverte à son encontre ; que la partie requérante justifie tant du principe que du quantum des créances dont elle sollicite le paiement ; qu'elle produit aux débats les contrats de prêts et les tableaux d'amortissement y afférents ; que s'agissant de la déclaration de créance, il convient de rappeler que le défaut de déclaration ou une déclaration irrégulière n'entraîne pas extinction de la créance ; que dès lors le moyen soulevé en défense par les requis sur le pouvoir et la capacité des déclarants n'a aucune conséquence sur la présente instance ; que s'agissant de la capacité à agir de la requérante, cette dernière justifie bien d'un lien contractuel tant à l'encontre du débiteur principal qu'à l'encontre des cautions ; que la clause de pari passu n'est pas de nature à priver la requérante de son droit à ester en justice ; que ce moyen ne saurait prospérer ; que la requérante, ainsi qu'il a été rappelé ci-avant justifie tant du principe que du quantum des créances dont elle se prévaut ; que les requis ne justifient pas de leur libération ; qu'ils ne produisent aucun élément probant de nature à être opposé aux prétentions de la requérante ; que dès lors, il convient de faire une stricte application de la loi des parties et d'entrer en voie de condamnation à l'encontre des requis à hauteur de la somme de 23 827,14 euros en principal, outre intérêts jusqu'à parfait paiement à compter du 31/08/2015 ; que les intérêts des présentes condamnations se capitaliseront par année entière, et ce par application de l'article 1154 du code civil, la partie requérante n'ayant pas failli à ses obligations de créancier au stade du recouvrement » ;

1/ ALORS QUE l'irrégularité de la déclaration de créance emporte l'extinction de la créance, et donc de la sûreté qui la garantissait ; qu'en retenant au contraire que « la défaillance du créancier dans la déclaration de créance n'a pas pour effet d'éteindre la créance » (arrêt, p. 5, alinéa 6), la cour d'appel a violé l'article L. 622-24 du code de commerce, ensemble l'article 2289 du code civil ;

2/ ALORS ET SUBSIDIAIREMENT QUE lorsque le créancier n'a pas régulièrement déclaré sa créance, la caution qui aurait pu tirer un avantage effectif du droit d'être admis dans les répartitions et dividendes peut être déchargée de ses obligations ; qu'en retenant pourtant en l'espèce que la défaillance du créancier dans la déclaration de créance n'a pas pour effet d'éteindre la dette et ne constitue pas une exception inhérente à la dette que peut invoquer la caution, sans rechercher si l'irrégularité de la déclaration n'était pas de nature à permettre aux fidéjusseurs d'invoquer le bénéfice de cession d'actions, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 2314 du code civil.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

CAUTIONNEMENT - Action des créanciers contre la caution - Redressement ou liquidation judiciaire du débiteur principal - Irrégularité de la déclaration de créance - Portée - Rejet de la créance (non)

Se prononçant dans une instance opposant le créancier à la caution du débiteur principal à l'égard duquel a été ouverte une procédure collective, le juge du cautionnement ne statue pas en application de l'article L. 624-2 du code de commerce, relatif aux décisions que le juge-commissaire peut rendre à l'issue de la procédure de vérification des créances, de sorte que si ce juge retient que la déclaration de créance est irrégulière, sa décision sur ce point ne constitue pas une décision de rejet de la créance entraînant l'extinction de celle-ci


Références :

Article L. 624-2 du code de commerce.

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 11 avril 2019

Dans le même sens, à rapprocher : Com., 10 mars 2021, pourvoi n° 19-22395, Bull. 2021, (rejet).


Publications
Proposition de citation: Cass. Com., 05 mai. 2021, pourvoi n°19-17736, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles
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Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard
Avocat(s) : SCP Delamarre et Jehannin, Me Le Prado

Origine de la décision
Formation : Chambre commerciale
Date de la décision : 05/05/2021
Date de l'import : 16/11/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 19-17736
Numéro NOR : JURITEXT000043489887 ?
Numéro d'affaire : 19-17736
Numéro de décision : 42100447
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2021-05-05;19.17736 ?
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